3.4.2 - L'état de santé du toxicomane
La population carcérale est jeune mais pas en
très bonne santé. Avec en général une origine
sociale défavorisée, le passif d'une carence nutritionnelle n'est
pas rare chez le détenu et le développement de certaines
pathologies a pu être favorisé. Au début de leur
incarcération 40% des détenus ont besoins de soins dentaires
d'urgences, et 30% des soins ophtalmologiques. Cette proportion augmente au
cours de la détention.
Dans le relevé des traitements décrits pour
l'ensemble des prisons, Il est observé le suivi en nombre important de
pathologies sévères et une présence élevé de
sérologie positive au VIH, VHB et VHC. Les médecins de l'UCSA
signalent un phénomène de décompensation sur des
pathologies équilibrées à l'extérieur comme le
diabète insulino-dépendant ou non, l'hypertension
artérielle, l'asthme et le psoriasis.
L'ambition de la prison est d'apparaître salutaire pour
le toxicomane, avec une série de traitements forcés contre son
addiction, il serait ainsi mieux encadré, mieux alimenté et
suivrait les thérapies liées à ses diverses pathologies.
Les services sociaux le soutiendraient dans une recherche d'emploi ou de
formation tout en préparant une solution de logement décent qui
lui éviterait la rue ou un squat. Ce point de chute stabiliserait
l'individu dans un suivi psychologique et médical.
Depuis 1994 des progrès ont bien été
constatés, mais la France tarde à aller au bout de sa
démarche, c'est ce que lui reproche Didier SICARD, président du
comité consultatif national d'éthique. Dans le rapport sur la
santé et la médecine en prison qu'il rend en décembre
2006, il fustige les pouvoirs publics en estimant que ce rapport
« constitue l'avis le plus accablant jamais délivré par
le Comité d'éthique »
Les conditions de vie dégradantes et l'absence de
respect élémentaire des personnes détenues
énoncé tout au long du rapport, empêchent un accès
aux soins dans de bonnes conditions. La Commission nationale consultative des
droits de l'homme en 2006 n'a d'ailleurs pas attendu ce rapport pour condamner
la France
Le toxicomane évolue dans sa maladie, souvent sans en
avoir pleinement conscience, ses affections seront oubliées par une
consommation de drogues analgésiques qui lui feront oublier le signal de
la douleur. La quête de drogue et son déséquilibre
psychique lui feront négliger le suivi de sa santé ainsi que tout
contrôle de prévention.
On retrouve ainsi certaines affections caractéristiques
de la personne intoxiquée qui en plus de troubles mentaux peut
présenter le diabète, la cardiopathie, l'hypertension
artérielle, l'insuffisance rénale. Les hépatites B et C se
retrouvent chez 30 et 80 % des toxicomanes « intraveineux », tumeurs,
gale, délabrement physique et psychique des toxicomanes, parasitoses
tropicales, etc.
Les soins à l'extérieur sont peut être
plus difficile pour une personne désocialisée qui doit s'engager
dans une démarche personnelle. En détention, la prise en charge
est automatique, mais dés sa libération le toxicomane doit
s'affilier à la CMU, s'il ne dispose pas d'un moyen d'accès
à la sécurité sociale. Les droits à la CMU de base
lui seront ouverts pendant un an à partir de la libération
à charge pour lui de se présenter auprès de la caisse
primaire d'assurance maladie, avec son billet de sortie et son numéro de
sécurité sociale.
Il existe assez peu de données écrites et
chiffrées sur la prise en charge des toxicomanes, c'est pourquoi nous
avons contacté les associations de soins pour toxicomanes. L'association
« LE MAIL », 51 Mail Albert 1er à Amiens,
est une association qui nous a été particulièrement
recommandée et notamment par le SPIP de la maison d'arrêt
locale.
Cette association soulève notre intérêt
car elle a développé une structure comprenant un centre de soins
ambulatoire, un centre thérapeutique résidentiel, un lieu
où les toxicomanes peuvent se restaurer, se laver, recevoir des soins
infirmiers, téléphoner, et échanger leurs seringues
usagées.
L'association s'occupe également de prévention
auprès des établissements scolaires, universités, centre
de formations professionnelles, salons, forums etc. Elle est active dans tout
le département de la Somme et s'occupe des contrats de soins dans le
cadre du placement extérieur.
Selon les données fournies à ce sujet,
l'association note que le placement extérieur avec contrat de soins est
en diminution :
2005 : 85 mesures de
placements extérieurs - 44 personnes ont
bénéficié d'un contrat de soins
2006 : 103 mesures de
placements extérieurs - 45 personnes ont
bénéficié d'un contrat de soins
Les obligations de soins sont en revanche en constante
augmentation, le total des actes de soins était de 18,3% en 2004, 20,3%
en 2005, 21,1% en 2006 tandis que pour les injonctions thérapeutiques,
le total des actes de soins était de 3% en 2004, 1,4% en 2005 et 0,6 %
en 2006.
Les soins après la détention seraient-ils en
baisse par rapport aux soins proposés comme alternative à la
prison ? Les réformes de la loi du 5 mars 2007 ont
créées le médecin relais et instituent celui-ci, comme
coordinateur et observateur du suivi, il reste à évaluer son
rôle, et son influence, sur le suivi médical des toxicomanes qui
sortent de prison.
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