CONCLUSION DU CHAPITRE I
72. Au terme de ce chapitre, on peut constater que le
législateur a fait oeuvre d'humanisme dans la mesure où il a
réglementé la phase des enquêtes de police judiciaire,
jadis siège d'abus de toute sorte et qu'il l'a placée sous le
contrôle du Ministère public afin de fortifier les garanties
accordées au suspects à cette étape du
procès94.
Pour renforcer la garantie des droits des justiciables, il a
restauré le principe de la séparation des fonctions de poursuites
et d'instruction. Ceci a commencé par la dépossession des
magistrats de la « casquette » d'OPJ suivie de la résurrection
du juge d'instruction, cet « ancien-nouveau »95
qui assurera désormais l'information judiciaire en lieu et place du
Procureur de la République.
73. Cependant des failles demeurent çà et
là. C'est ainsi que le contrôle du Procureur sur les actes de
police judiciaire porte en grande partie sur les PV. Les visites dans les
locaux de la police judiciaire sont facultatives. Ce qui compromet leur
effectivité sur le terrain, surtout si on tient compte de l'insuffisance
du personnel magistrat dans nos parquets et du cumul de compétence dont
ils font l'objet du fait de l'ineffectivité des parquets des TPI sur
l'ensemble du territoire national96.
74. Par ailleurs, la possibilité reconnue au
Ministère public d'arrêter les poursuites à toutes les
phases du procès pénal par l'article 64 CPP pourrait être
source d'instrumentalisation politique. L'exécutif, au regard de sa
supériorité hiérarchique sur les parquets, pourrait avoir
une main mise sur le procès pénal. Au lieu d'une
séparation, le législateur aurait alors réalisé une
fusion des fonctions de poursuites et d'instruction au profit de
l'exécutif. Ce qui nécessite des réaménagements
pour ne pas gâcher l'important travail effectué dans le sens de la
garantie des droits et libertés des citoyens. Ce travail qui ne s'est
d'ailleurs pas limité aux phases préjudiciaires du
procès.
connaître le petit nombre de magistrats disponibles dans
nos différents parquets.
94 BOKALLI (E-V), op. Cit. p. 13
95 OHANDJA ELOUNDOU (A), un revenant : le juge
d'instruction, Juridis périodique, n°65 2006, pp 91 et s.
96 En dehors des chefs lieux de provinces qui
disposent des TPI distincts des TGI, l'on ne dénombre pas plus de 6 TPI
sur un ensemble de plus de 200 arrondissements que compte le Cameroun.
CHAPITRE II : LE MINISTERE PUBLIC ET L'EXERCICE DE
L'ACTION PUBLIQUE
75. « L'action publique tend à faire
prononcer contre l'auteur d'une infraction, une peine ou une mesure de
sûreté97 édictée par la loi
»98 elle est pour ainsi dire une combinaison des
enquêtes de police judiciaire et des poursuites99. En
réalité, l'exercice de l'action publique commence au niveau de
l'instruction préparatoire. Le Ministère public y assiste aux
auditions, interrogatoires, inculpations, et a la possibilité de
consulter le dossier de l'instruction à tout moment. Il peut exercer les
recours contre les actes du juge d'instruction devant la chambre de
contrôle de l'instruction. Lorsque la phase de l'instruction est
achevée, le Ministère public peut continuer l'exercice de
l'action publique devant la juridiction de jugement. A ce niveau, il va
soutenir l'accusation publique après avoir déclenché les
poursuites (section 1) ; et comme les autres parties, il pourra exercer
éventuellement les voies de recours et procéder à
l'exécution des décisions de justice (section 2).
Section I : le soutien de l'accusation
Selon RASSAT100, poursuivre consiste non seulement
à mettre l'action publique en mouvement (paragraphe I), mais aussi
à l'exercer. L'exercice consiste dans la phase de jugement à
soutenir l'accusation publique (paragraphe II). Ce qui veut dire en d'autres
termes que le Ministère public n'est pas tenu de soutenir l'action
publique lorsqu'elle est déclanchée par d'autres personnes. C'est
en fait ce qui fait souvent dire que le Ministère public n'a pas
seulement pour rôle de requérir la condamnation de l'accusé
ou du prévenu. Ici se pose le problème essentiel de la
présomption d'innocence et de l'égalité entre les parties
au procès.
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