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Les critères du procès administratif equitable en droit positif camerounais

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par Jean Duclos Ngon a moulong
Universités de Yaoundé 2 soa - Master 2 2012
  

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PARAGRAPHE II : LE DELAI RAISONNABLE ET LA MOTIVATION DES JUGEMENTS

Le délai raisonnable et la motivation des jugements se situent à la fin du déroulement de la procédure administrative contentieuse. Ainsi, il est dit que : « les jugements doivent être motivés et intervenir dans un délai raisonnable ». Il s'agit là, en effet, de deux garanties indispensables à la réalisation du procès équitable et partant d'une bonne administration de la justice. Elles font partir des droits de la défense et crèchent de ce fait à côté du contradictoire et de la publicité des audiences. Cependant, il convient de préciser qu'elles poursuivent des objectifs de natures différentes l'une de l'autre.

En effet, la finalité première de la motivation des jugements dans la réalisation d'une bonne administration de la justice réside dans la protection des parties contre les erreurs du juge, lequel doit exposer les raisons de fond et de droit qui la justifient. De ce fait, elle apparaît comme étant « le rempart contre l'arbitraire en forçant le juge à prendre conscience de son opinion, de sa portée (...) et procure au plaideur une justification en droit de la décision »522(*). De la sorte, elle rend tout à fait légitime la décision du juge et permet aux justiciables de ne pas avoir l'impression d'être confrontés à une justice arbitraire. En revanche, le délai raisonnable vise l'efficacité et suppose de ce fait « une justice qui décide vite » afin de ne pas préjudicier les droits du requérant car une justice tardive est une injustice.

Ceci étant dit, il convient afin de mieux appréhender ces deux garanties du procès, de présenter tout d'abord l'obligation de juger dans un délai raisonnable (A) afin de parler de l'obligation de motivation (B).

A- l'obligation du jugement dans un délai raisonnable

Le délai raisonnable participe du caractère juste et équitable du procès. Il s'agit là d'un élément important au procès pénal, civil et administratif car, il serait vain qu'une justice soit rendue au terme d'une procédure respectant le droit d'être entendu équitablement et publiquement, si la décision n'intervient que bien des années après l'introduction de la requête ou de l'instance. Dans ce cas, la solution du litige pourrait perdre tout son intérêt et son efficacité pour la justice.Ce droit est alors fondamental et révélateur d'une bonne administration de la justice et oblige les juges à statuer dans les meilleurs délais et sans retard excessif. Comme le disaitWalter Savage Landor « une justice tardive est une injustice523(*)».Demême, La Bruyère disait déjà qu' « une circonstance essentielle à la justice que l'on doit aux autres,c'est de la faire promptement et sans la différer ; la faire attendre, c'est injustice »524(*). Appliquée particulièrement au procès administratif, cette exigence revêt d'avantage une importance capitale qui découle du fait que,les voies de recours dirigées contre les actes administratifs n'ont point d'effets suspensifs et du bénéfice du préalable dont jouit l'autorité administrative525(*). Ainsi,le temps profite toujours au défendeur qui est généralement l'administration, dont il est l'allié objectif, au détriment du requérant-administré526(*) pour qui le temps est ennemi527(*).

Il est consacré dans certains instruments internationaux et régionaux de protection des droits de l'homme notamment dans l'article 9 paragraphe 3 du pacte international relatif aux droits civils et politiques528(*),ensuite dans l'article 6 paragraphe 1529(*) de la C.E.D.H, enfin dans l'article 7(d) de la charte africaine des droits de l'homme et des peuplesqui stipule quetoute personne a droit à ce que sa cause soit entendue. Ce droit comprend : « le droit d'être jugé dans un délai raisonnable par une juridiction impartiale ».

En France, le respect d'un délai raisonnable de jugement devant les juridictions administratives est consacré comme étant un « principe général du droit »530(*). Il doit être observé à toutes les phases de la procédure, c'est-à-dire aussi bien dans son déroulement qu'au niveau du jugement.

La notion de délai raisonnable est une notion floue et difficile à définir. Toutefois, dans son acception la plus simple, le terme « délai » se rapporte à la durée entendue comme le temps accordé pour faire une chose. En outre, l'expression « raisonnable » accolée au « délai » peut être compris comme ce qui est conforme à la raison, au bon sens. Les juristes préfèrent parler de célérité de la procédure lorsqu'il s'agit d'aborder les questions relatives à la durée de l'instance judiciaire. Ainsi, un délai trop long est générateur d'un déni de justice et un délai trop bref peut conduire à une justice arbitraire et expéditive. Contrairement au procès pénal où, les délais commencent à courir à partir du moment où la personne se trouve accusée, les délais dans le procès administratif s'apprécient à partir du moment où la procédure administrative contentieuse est engagée c'est-à-dire au moment de l'introduction de la requête introductive d'instance. Il cesse de courir avec la clôture de la procédure devant la plus haute instance possible lorsque la décision devient définitive et qu'elle a été exécutée. Les juges de Strasbourg ont établi que l'appréciation du caractère raisonnable d'un délai peut être guidée par quatre critères pouvant éventuellement justifier un délai de jugement relativement long : d'abord la complexité de l'affaire, ce qui inclut toutes les données de fait et de droit. Divers éléments peuvent attester de la complexité de l'affaire en fait, pour établir les faits pertinents et en droit, complexité de l'administration de la preuve, ensuite le comportement du requérant qui ne peut par son attitude dilatoire, retarder le cours de la justice et enfin le comportement des autorités judiciaires qui doivent tout faire pour que les affaires ne s'enlisent pas et qui sont tenues à une véritable obligation de résultat et l'enjeu du litige pour les intéressés531(*).

1- L'élasticité du cadre temporel de l'instance contentieuse

Le législateur camerounais a manifesté la volonté de mettre un terme aux pertes de temps à travers l'institution des délais qui jalonnent toute la procédure administrative contentieuse jusqu'à la décision finale. De même, l'institution de procédures contentieuses d'urgence532(*)qui constituent des séries de dérogations533(*)aux règles normales de procédure ou de droit commun de règlement de litige devant les juridictions administrativess'inscrit parfaitement dans cette logique, consistant à juger certaines affaires dans un délai raisonnable. Cependant, force est de noter que si l'idée de célérité constitue bien dans notre législation un principe fondamental dans l'accomplissement d'un procès équitable, l'examen de la pratique du juge et de la jurisprudence révèle que le cadre temporel de l'instance contentieuse est élastique, ce qui rend notre justice administrative lente, et même de plus en plus lente méconnaissant ainsi le « droit d'être jugé dans un délai raisonnable ». La doctrine l'avait déjà relevé au point de la considérer comme étant« le premier défaut, désormais bien connu du fonctionnement de la juridiction administrative au Cameroun et la première cause d'insatisfaction des justiciables »534(*).Cette élasticité est récurrente aussi bien dans l'instance contentieuse ordinaire(a) que dans l'instance contentieuse d'urgence (b).

* 522GUINCHARD (S), CHAINAI(C), DELICOSTOPOULOS (C-S), DELICOSTOPOULOS (I-S), DOUCHY-OUDOT (M), FERRAND (F), LAGARDE (X), MAGNIER (V), RUIZ FABRI (H), SINOPOLI (L), SOREL (J-M), Droit processuel, Droit commun et droit comparé du procès équitable, Dalloz, 5ème éd. (2009), p. 935.

* 523 KABA SIDIKI, Les droits de l'homme au Sénégal, collection xaam sa yoon, pp. 104 et suivants

* 524 Cité par DUGRIP (O), L'urgence contentieuse devant les juridictions administratives, op. cit., p. 13.

* 525 CE, 2 juillet 1982, HUGLO, Recueil, p. 253.

* 526LOCHAK (D), La justice administrative, 3ème éd., Paris, Montchrestien, 1998, p. 106.

* 527GROS (M), « Le juge administratif, la procédure et le temps », RDP, 1999, p. 1709.

* 528«Tout individu arrêté ou détenu du chef d'une infraction pénale sera traduit dans le plus court délai devant le juge ou une autorité habilitée par la loi à exercer des fonctions judiciaires et devra être jugé dans un délai raisonnable ou libéré ».

* 529« Toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue ...dans un délai raisonnable »

* 530 C.E. Ass., 28 juin 2002, Garde des sceaux, ministre de la justice c. Magiera, A.J.D.A., juillet-août 2002,

Chroniques, p. 596 et s. cité par Xavier LAUREOTE

* 531 Voir Cour EDH, 31 mars 1998, Reinhardt et Slimane Kaid c/ France JCP 1999, II, 10074, note Soler

* 532Bernard SEILLER préfère parler de « procédures parallèles », « compte tenu de leur nature et du fait qu'elles ne sont nécessairement pas conditionnées par l'urgence » et parce que « cette expression permet d'inclure diverses procédures tendant à une décision au fond instaurées par divers textes (...) » ; voir SEILLER (B), Droit administratif, T.1, Paris, Flammarion, 2001, pp. 189-190. Une telle vision est minoritaire, voire marginale ? Comme l'attestent les développements ci-dessus, car l'urgence est explicitement ou implicitement au coeur desdites procédures. Note GUIMDO DONGMO (B-R).

* 533Les dérogations dont-il s'agit sont : le non exigence de l'introduction du recours gracieux préalable auprès de l'autorité administrative compétente avant la saisine du juge administratif, la réduction des délais de saisine du juge, de la limitation de la durée de l'instance contentieuse et de l'institution du juge unique.

* 534V. KEUTCHA TCHAPNGA (C), Précis de contentieux administratif au Cameroun, op. cit., p. 35.

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"Il y a des temps ou l'on doit dispenser son mépris qu'avec économie à cause du grand nombre de nécessiteux"   Chateaubriand