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Le devoir de diligence du transporteur maritime de marchandises en droit CEMAC

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par OUSMANOU HADIDJATOU
FSJP UNIVERSITE DE NGAOUNDERE - MASTER EN DROIT PRIVE GENERAL 2014
  

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CHAPITRE II- LA MATERIALITE DU DEVOIR DE DILIGENCE DU TRANSPORTEUR MARITIME

Faut-il le rappeler le devoir de « diligence » sous-tend à la base la prudence attendue d'un professionnel. En cela c'est le contraire de la négligence. Le mot désigne le soin et l'attention avec lesquels une personne éclairée accomplit une tâche. La diligence connaît plusieurs variétés. Pour le législateur, elle doit être raisonnable. C'est d'une part une norme de comportement, comparable à la figure d'un bon père de famille connue en droit civil. La diligence raisonnable en droit anglo-saxon, « due diligence », renvoi également à un exercice, effectuer une série d'activités donnée. L'exercice en question a-t-il quelque chose à voir avec la norme de comportement ? Pas toujours; il y a en effet une différence essentielle entre les deux significations du terme diligence : en tant que norme de comportement, la diligence est un concept très général, très vague, très synthétique.

Traiter de la matérialité du devoir de diligence  revient à l'appréhender, la caractériser. A apprécier les agissements du transporteur; évaluer s'il n'a pas commis une faute ou une négligence susceptible d'être préjudiciable aux intérêts du chargeur. L'étude de cette matérialité passera par la maîtrise de son contenu (Section I), lui-même sous tendu par le caractère personnel de la due diligence (Section II).

SECTION I- LE CONTENU DU DEVOIR DE DILIGENCE

Comment qualifier le devoir de diligence ? Les Conventions de droit matériel évoquent tantôt le terme de « diligence » tantôt ceux de « diligence raisonnable ». La question pertinente serait celle de savoir s'il s'agit de la diligence du simple bon père de famille d'une diligence plus renforcée? La diligencedoit-elle s'entendre comme celle exercée par un professionnel vigilant41(*)? Il nous revient ici de ressortir la controverse découlant du contenu de la due diligence (Paragraphe I) avant de systématiser la position du législateur (Paragraphe II).

PARAGRAPHE I- SUR LA DILIGENCE : NOTION CONTROVERSEE

Sur la question du contenu de la notion de diligence, l'on s'est posé la question de savoir si ladite diligence était simplement celle attendue du bon père de famille ; cet aspect sera développé en deuxième partie (B), il est important au préalable de ressortir la notion de diligence raisonnable ou diligence comme standard juridique (A).

A- LA DILIGENCE COMME STANDARD JURIDIQUE

Le Lexique des termes juridique définit les standards juridiques comme un terme issu du droit Anglo-saxon désignant le renvoi fait à un comportement considéré correspondre à ce qui est communément admis en la matière le groupe social à un moment donné. En cas de litige, ajoute-t-il, ce comportement type servira de référence pour le juge pour apprécier le comportement effectif qu'a eu la personne mise en cause devant lui. Le caractère flou et évolutif de ce concept confère de la souplesse à l'application des textes, en laissant aux juges une assez grande liberté d'appréciation dans les affaires qui leur sont soumises42(*).Une voix autorisée dans son article sur le droit souple, estime que les standards participent du droit prospectif ou soft law43(*). Il s'agit d'une technique dont le but avoué est d'adapter le droit à l'évolution. Le standard se rapporte à la nature flexible de la norme. Celle-ci étant malléable, son contenant est fixe, certes, mais son contenu variable est fixé par le juge. C'est dans cette perspective que d'aucuns ont parlé d'un instrument au service du juge44(*).

Par ailleurs, le standard ne se réfère pas à une connaissance légale exacte appliquée strictement mais au sens commun. Il y a de ce fait un lien entre le standard et la normalité, mais aussi la normativité. Sous ce rapport, le juge devient un ingénieur social appliquant des solutions susceptibles d'assurer à la fois l'ordre et le progrès d'une société en constante évolution.

Enfin le standard n'est pas formulé de manière absolue et n'est pas pourvu d'un contenu précis mais est relatif au temps, lieux et circonstances45(*).

Le risque qui existe s'agissant des concepts flous est celui de l'atteinte éventuelle à la sécurité juridique, la prévisibilité sous-tendant le droit et enfin à la stabilité des normes. Bien plus, il y a un risque pertinent à l'arbitraire du juge qui, on ne le rappellera jamais assez n'est que « la bouche chargée de dire le droit ».

La diligence est un concept plastique, flou, mou fixé concrètement par le juge au cas par cas. A l'origine, il s'est agi pour le législateur de scruter le comportement du transporteur aux fins de réintroduire éventuellement sa responsabilité devant l'existence éventuelle d'un cas excepté : responsabilité s'évinçant en principe de la simple inexécution de son obligation de déplacement, de sécurité et de résultat. Alors, si le manque de diligence du transporteur constitue une faute, comment l'évaluer? S'agit-il d'une diligence contraignante ou simplement raisonnable. Dans la dernière hypothèse est-ce une simple prudence qui est attendue du transporteur ? Cette question mérite d'être posée à l'aune de l'article 402 ancien du CMM qui était silencieux sur la question en disposant :

« Nonobstant toute stipulation contraire, le transporteur est tenu avant et au début du voyage, de faire diligence pour :

a) mettre et conserver le navire en état de navigabilité compte tenu du voyage qu'il doit effectuer et des marchandises qu'il doit transporter ;

b) armer, équiper et approvisionner convenablement le navire;

c) mettre en bon état toutes les parties du navire où les marchandises doivent être chargées.
2- Le transporteur est tenu de procéder de façon appropriée et soigneuse au chargement, à la manutention à bord, à l'arrimage, au transport, à la garde à bord et au déchargement de la marchandise ».

B- LA DILIGENCE RAISONNABLE : UNE DILIGENCE RENFORCEE ?

La doctrine et même la jurisprudence s'est posée la question de savoir si la diligence attendue du transporteur est une diligence raisonnable ou une « absolute diligence ». S'agit-il d'une diligence d'ordre moyen ne dépassant pas ce qu'un homme « raisonnable » peut exiger?

POURCELET estime que « la diligence raisonnable » est la diligence moyenne exigible d'un bon transporteur. Ce n'est pas une diligence méticuleuse et extraordinaire, mais une diligence convenable, normale, appropriée, requise, voulue, raisonnablement nécessaire. Un ensemble de soins et de précautions que l'on peut demander à un transporteur normalement soigneux et sérieux »46(*). Ces soins et précautions sont ceux d'un bon père de famille et doivent être exercés par le transporteur lui-même, ou les techniciens qu'il se substitue pour inspecter le navire voire les agents et préposés qu'il emploie pour assurer la navigabilité du navire.

A la vérité, cette diligence raisonnable doit permettre de déceler l'innavigabilité du navire et y remédier non seulement avant et au début du voyage, mais aussi lors du déplacement ou à la livraison. René RODIERE lui, va dans le même sens en insistant sur le caractère raisonnable de la diligence attendue du transporteur et ajoute que celle-ci s'apprécie de façon humaine. La diligence en question ne saurait en son sens être une « absolute diligence »47(*).

De même, la jurisprudence a eu à fixer le droit s'agissant de la diligence raisonnable du transporteur.

Dans une espèce demeurée célèbre48(*), elle a eu à affirmer d'une part que la diligence du transporteur ne saurait s'inférer de ce qu'une société de classification réputé a visité le bâtiment et par son certificat en a attesté le bon état de navigabilité du navire.

D'après l'argumentaire développé par l'armateur dans cette cause, le fait qu'il ait confié la vérification du navire à une excellente société de Glasgow devrait sous-tendre qu'il a rempli son obligation de diligence d'autant plus que par la suite, ce navire avait fait sans encombre un voyage d'Angleterre en Australie ou il avait chargé des marchandises qui au cours du voyage de retour, furent avariées par suite de l'ouverture de couvercles mal replacés par un charpentier du chantier de Glasgow.

Pour la Chambre des Lords, d'une part même si le dommage ou l'innavigabilité résulte d'un vice de réparation du navire ou un défaut de construction cela ne dédouane nullement le transporteur et d'autre part, il s'avère que l'obligation de diligence du transporteur ne saurait se déléguer. Cette appréhension de la diligence comme diligence raisonnable est finalement l'option choisie par le CMM révisé.

* 41Bonassies, Ch.Scapel, Traité de droit maritime : LGDJ, 2e éd., 2010, p. 678, n° 1003.

* 42 GUINCHARD (S.) et autres, Lexique des Termes Juridiques, Dalloz, 16ème éd., 2007, v° Bon père de famille.

* 43CATHERINE THIBIERGE GUELFUCCI « Le droit souple », RTD Civ. 2003, p. 599.

* 44SYLVAIN NERON, « Le standard, un instrument juridique complexe » in La semaine de la Doctrine, Ed. n° 38, 2011, p 1665.

* 45 R. POUND, The call for a Réalist Jurisprudence, 44 Harv. L. Rev. 697 (1931).

* 46POURCELET (M), Le transport maritime sous connaissement, Droit canadien, américain et anglais, PUM, 1972, p. 63, n° 57.

* 47RODIERE (R), Traité général de droit maritime, Tome 2, Dalloz, 1976, p 146.

* 48Affaire de MUNCASTER CASTLE

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"Tu supportes des injustices; Consoles-toi, le vrai malheur est d'en faire"   Démocrite