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La sécurité juridique en droit administratif sénégalais

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par Abdou Ka
Université Gaston berger de saint Louis - DEA droit public 2015
  

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Paragraphe 2 : La sécurité juridique comme principe régulateur du système juridique

La valeur sécurité juridique répond à une double logique. D'un côté, elle assure la protection des intérêts privés et, d'un autre, elle garantit le respect de l'intérêt public. Autrement, la sécurité juridique implique la garantie des droits subjectifs des particuliers tout en préservantla légalité. C'est ce quesemble parfaitement résumer l'idée de B. MATHIEU selon laquelle « la sécurité juridique ne conduit pas nécessairement à figer les situations juridiques au profit d'intérêts individuels, elle prend également en compte des considérations d'intérêt général »81(*).

La sécurité juridique des administrés appelle nécessairement une protection efficace de leurs droits individuels. Pour P. ROUBIER, « si l'on admet généralement que le droit est fait pourl'homme et non l'homme pour le droit, a fortiori, la sécurité juridique ne saurait être envisagée d'une manière absolue et indépendamment de ceux qui doivent en être les premiers bénéficiaires, à savoir les personnes »82(*).

Toutefois,sacrifier la légalité à l'autel desdroits subjectifs conduirait inexorablement à une véritableinsécurité juridique. La légalité est en soi porteuse de sécurité juridique. Elle garantit la sécurité juridique objective en ce qu'elle permet aux administrés de faire le départ entre le permis et le défendu. Sans ce minimum d'ordre, le citoyen est livré à la fantaisie et à l'angoisse juridique. C'est ce qui fait dire à D. LABETOULLE que « parce qu'il limitel'arbitraire, le principe de légalité est, tout particulièrement en droit public, porteur de sécurité juridique »83(*).

De ces considérations, il en découle que la sécurité juridique est un principe dynamique. Aussi, la valeur sécurité juridique implique inévitablement une certaine reconsidération de la place du juge au sein du système juridique. De même, les avancées de la sécurité juridique appellent, de manière globale, une reformulation des rapports entre la puissance publique et les particuliers.

D'abord, le caractère dynamique de la valeur de sécurité juridique consiste en la recherche incessante de l'équilibre entre l'intérêt public et les intérêts privés. Pour BERNARD MATHIEU, le principede sécurité est « incontestablement un principe actif »84(*). Ce caractère actif du principe de sécurité juridique rend très difficile ou même utopique toute tentative de conceptualisation de cette notion. Une approche figée de la sécurité juridique serait indésirable dans la mesure où elle suppose la prise en considération de logiques qui parfois même s'opposent. Ainsi, le principe de sécurité juridique se construit au gré de l'évolution des rapports juridiques au sein du tissu social. D'ailleurs, l'approche qu'il est possible d'avoir de la sécurité juridique peut différer selon l'ordre juridique considéré. En effet, dans certains systèmes juridiques, notamment en droit allemand, la faveur est donnée au volet subjectif de la sécurité juridique tandis que dans d'autres, à l'image du droit français, c'est la dimension objective qui est privilégiée. Certes, ces divergences d'approches à propos de la sécurité juridique sont grandement liées à une différence d'identité juridique, mais elles résultent égalementdu caractère fonctionnel de la sécurité juridique. De ce fait, la sécurité juridique renverrait à un principe matriciel qui servirait d'aiguillon dans la recherche dynamique d'un point d'équilibre entre la sphère publique et la sphère privée dans la société contemporaine.

Ensuite, la prise en compte de la valeur de sécurité juridique conduit également à repenser le rôle du juge au sein de l'univers juridique. Pendant longtemps, le travail du juge était confiné à une application mécanique du principe de légalité. Fortement empreint de la tradition romaniste, le système juridique français ne reconnaît pas une très grande marge de manoeuvre à l'autorité judiciaire contrairement au droit anglo-saxon conçu historiquement par les cours royales de justice. Certes, en droit administratif, le juge a fait preuve d'inventivité, mais il reste que fondamentalement l'autorité judiciaire, dans le droit de type romaniste, n'a pas une très grande liberté d'action. Cependant, les avancées de la sécurité juridique combinée avec l'évolution globale du droit conduisent à reconnaître au juge un minimum de pouvoir d'arbitrage entre, d'une part, l'intérêt public et, d'autre part, l'intérêt privé. C'est dans cette perspective qu'à propos du contrôle de légalité, beaucoup de propositions de réformes ont été formulées dans le sens d'une meilleure prise en compte des intérêts en cause dans le cadre du litige. A cet effet, J. M. WOEHRLING considère que « de plus en plus fréquemment, latechnique de l'annulation ne correspond pas à l'atteinte des justiciables car elle ne constitue qu'une réponse partielle au litige soumis au juge »85(*). Il propose ainsi l'avènement d'une action en déclaration de droit plus conforme aux exigences des administrés.

Globalement, la progression de la sécurité juridique dans le système juridique induit indubitablement des avancées notables sur le plan de l'office du juge. J. P. CAMBY affirme que « si le risque d'une extension des pouvoirs du juge existe aujourd'hui, du fait de la diversité des applications possibles de la sécurité juridique, et si la marge de manoeuvre des autorités investies du pouvoir normatif se restreint, l'affirmation de ce principe, en contre poids au désordre normatif, apparait néanmoins très positive, et sera certainement prise en compte par ces autorités »86(*).

Enfin, la prise en compte de la valeur de sécurité juridique nécessite un certain réaménagement des relations entre l'administration et les administrés. Fortement inspiré par la théorie de l'institution de MAURICE HAURIOU, le droit administratif d'inspiration française réserve une place de choix à la puissance publique. La satisfaction de l'intérêt général appelle nécessairement une certaine exorbitance de l'action administrative. Toutefois, avec l'émergence de la valeur de sécurité juridique une meilleure prise en compte des intérêts des administrés s'impose. La sécurité juridique implique la reconnaissance de droits publics subjectifs dans le chef des administrés. La précarité qui caractérisait leur situation dans leurs rapports avec l'administration doit faire place à une protection plus efficace de leurs droits individuels. Certes, surtout en France à travers l'oeuvre du juge administratif, la condition des administrés a été sensiblement améliorée, il reste que d'autres défis sont à surmonter. Ainsi, dans le contexte sénégalais, le juge doit affiner son contrôle sur l'action administrative dans le sens d'une meilleure garantie des droits des administrés. Dans cette perspective, la question du régime transitoire constitue un énorme chantier qui se dresse devant lui.

La sécurité juridique ne saurait avoir comme unique finalité la protection des intérêts individuels. Elle implique aussi la garantie de l'intérêt général.La sécurité juridique n'est ainsi effective au sein du système juridique que pour autant que l'équilibre entre les droits privés et l'intérêt public reste maintenu.

En définitive, la sécurité juridique est une valeur régulatrice du système juridique. Elle constitue un remède contre la crise du droit.Elle est également au service d'un équilibre dynamique entre l'intérêt public et les intérêts privés.Dans cette perspective, la sécurité juridique est devenue un enjeu majeur de l'action publique.

* 81 B. MATHIEU, « La sécurité juridique : un principe constitutionnel clandestin mais efficient », inDroitconstitutionnel, Mélanges P. GELARD Montchrestien, 1999, p.301

* 82P. ROUBIER, Théorie générale du droit : Histoire des doctrines juridiques et philosophie des valeurs sociales, Dalloz, 2 Edition, 2005

* 83 D. LABETOULLE, « Principe de sécurité juridique et principe de légalité » in L'Etat de droit, Mélanges G. BRAIBANT, Dalloz 1996, p.403

* 84 B. MATHIEU, « Réflexions en guise de conclusion sur le principe de sécurité juridique », op.cit

* 85 J. M. WOEHRLING, « vers la fin du REP ? », op. cit

* 86 J. P. CAMBY, « la sécurité juridique : une exigence juridictionnelle », op. cit

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