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La sécurité juridique en droit administratif sénégalais

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par Abdou Ka
Université Gaston berger de saint Louis - DEA droit public 2015
  

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Section 2 : La mise en oeuvre concrète de la valeur de sécurité juridique

Afin d'inoculer une dose de sécurité juridique dans le tissu juridique, une politique de simplification du droit a été initiée et semble capter toutes les énergies (Par 1). Toutefois, au regard des résultats mitigés observés dans la mise en oeuvre de cette politique de simplification du droit, la solution semble être dans la promotion d'une véritable discipline dans le processus normatif(Par. 2)

Paragraphe 1 : Le processus de simplification du droit

La simplification du droit est au coeur de la réflexion juridique. La volonté simplificatrice a envahi toutes les sphères de décision. Des organismes supranationaux aux entités étatiques, le combat pour la simplification du droit gagne en intensité. La simplification du droit devient, par la force des choses, le maître mot des reformes conduites par les pouvoirs publics. Tous les domaines du droit sont visés. L'ère d'un nouveau paradigme de simplification du droit a sonné.

L'intérêt grandissant pour la qualité du droit témoigne tout d'abord d'un souci d'effectivité de l'Etat de droit. Pour le doyen G. VEDEL, « l'Etat de droit n'est que la dose de juridiqueque la société peut supporter sans étouffer »87(*). Vu sous cet angle, le principe de l'Etat de droit implique nécessairement que les justiciables soient en mesure de se déterminer convenablement par rapport au droit qui leur est applicable. L'Etat de droit ne serait qu'une illusion si les citoyens n'arrivent pas à trouver leur repère dans l'univers juridique. L'angoisse juridique ressentie par les justiciables dans leurs rapports avec la norme renforce la suspicion d'une tyrannie du droit. Le droit n'est plus considéré comme libérateur dans la mesure où il engendre lui-même une insécurité pour ses destinataires.

A l'époque moderne où l'accent est surtout mis sur la dimension substantielle de l'Etat de droit, c'est-à-dire en tant qu'il assure la garantie des droits fondamentaux des citoyens, la simplification du droit s'impose comme recette miracle. Un droit de qualité devient même une exigence sociale. Un jurislateur fantaisiste n'a plus droit de cité.

Comme baromètre de l'attractivité et de la compétitivité économique, la qualité du droit préoccupe désormais les autorités publiques au plus haut point. Afin de drainer les flux financiers, des efforts de simplification du cadre juridique des affaires ont été initiés. Pour attirer les investissements, chaque Etat cherche à gagner la confiance des bailleurs de fonds en aménageant un cadre juridique des affaires sûr. La qualité du droit étant devenue un enjeu fondamental de la politique économique, l'heure est à la concurrence entre systèmes juridiques. Chaque ordre juridique essaie de se rénover afin de ne pas être à la traîne dans la compétition économique féroce qui oppose les Etats. Le Rapport Doing Business présente des études comparatives de l'impact de la règlementation sur les activités d'un point de vue microéconomique et classe les Etats en fonction de la facilité à y faire des affaires. L'avant-dernier rapport avait épinglé le Sénégal, ce qui a poussé les pouvoirs publics à mettre en oeuvre un ensemble de réformes afin de rassurer les opérateurs économiques. Ainsi, avec le récent rapport, le Sénégal a fait un bond de 10 places dans le classement, ce qui constitue un grand pas en avant pour la mise en place d'un environnement juridique propice aux affaires.

En somme, il apparaît que la volonté de simplification du droit répond à une double logique. D'abord, il s'agit par le biais du processus de simplification du droit de rendre la norme aux justiciables. Autrement, afin d'assurer son acceptabilité et sa légitimité, il convenait d'assainir le système juridique, le rendre accessible et compréhensible de la part du corps social.

Ensuite, le processus de simplification du droit servirait d'outil pour rendre plus attractive et compétitive l'économie nationale.Les opérateurs économiques sont demandeurs d'un droit à même de faciliter la bonne marche des affaires. La simplification du droit devient à l'heure de la régulation une nécessité économique.

Dans cette perspective, la valeur de sécurité juridique serait un remède contre à la fois la crise des rapports entre la puissance publique et le particulier en ce qu'elle protège le second et la crise économique en ce qu'elle préserve les intérêts des opérateurs économiques contre les effets pervers du droit. C'est sans doute ce qui fait dire à B. MATHIEU que « l'exigence de sécuritéjuridique est d'abord un instrument de respect des droits des citoyens, mais elle présente aussi des enjeux économiques essentiels... »88(*). En France, il a été admis que « sécuriser la vie des entreprises par un environnement plus lisible et prévisible »89(*) constituait un enjeu essentiel pour la relance de l'économie.

Conscients des enjeux de la simplification du droit, les pouvoirs publics ont mis en oeuvre un ensemble de mesures tendant à juguler le phénomène de la proliférationdésordonnée des textes juridiques. Beaucoup de réformes ont été entreprises dans le souci de garantir aux justiciables, particuliers ou opérateurs économiques, un environnement juridique sûr. Il s'agissait d'assainir le cadre juridique en procédant, d'une part, au regroupement des textes épars en fonction de leurs domaines d'application respectifs et, d'autre part, de veiller à la lisibilité des normes.

Dans cette logique, une entreprise importante de codification a été initiée. Cette politique de codification consiste en la réunion dans un code d'un ensemble de règles juridiques relatives à un domaine déterminé. En France, le Décret du 10 Mai 1948 avait mis en place une Commission chargée d'étudier la codification et la simplification des textes législatifs et règlementaires. La simplification du droit ne sera toutefois opérationnelle qu'avec l'avènement de la loi du 16 Décembre 1999 qui autorise le gouvernement à codifier, par voie d'ordonnance, dans un grand nombre de matières. En effet, du fait de l'encombrement de l'appareil parlementaire, il convenait, dans une logique d'efficacité, de décharger une partie du travail du législateur sur la machine gouvernementale plus réactive du reste. Dans cette galaxie de textes, il faut aussi noter la loi du 09 décembre 2004 qui avait principalement pour but de simplifier les procédures administratives, notamment pour les rendre plus compréhensibles par les citoyens. Récemment, la loi du 17 mai 2011 relative à la simplification et l'amélioration de la qualité du droit a été votée afin de servir de support juridique à la politique de simplification du droit qui est désormais devenue une préoccupation majeure des autorités politiques françaises.

Toutes ces réformes ont été entreprises sous le sceau de la codification à droit constant qui consiste « à relire l'ensemble des articles régissant une matière et à les réécrire, si besoin est, pour les mettre à jour, en simplifier la langue et surtout les harmoniser conformément à la hiérarchie des normes »90(*).

Au Sénégal, certes la politique de codification n'a pas connu un attrait majeur, mais il apparaît qu'elle demeure au centre des préoccupations actuelles sur le droit. En effet, avec la volonté affichée du gouvernement actuel d'attirer des investissements étrangers, l'idée de simplification du droit est au goût du jour. C'est sans doute ce qui conduit en partie à la refonte du Code des impôts et à l'avènement d'une nouvelle loi sur le partenariat public privé.

Sans nul doute, la codification à droit constant a permis de rassembler et de simplifier des textes épars et à la qualité rédactionnelle médiocre afin d'en faciliter l'accès et l'application. Toutefois, la politique de codification revêt des limites évidentes. D'abord, du fait de la succession de textes ayant vocation à encadrer le processus de codification, l'inflation normative s'en est trouvée accentuée. Ensuite, la codification ne prenant en compte que les textes existants pour les ordonner ne permet pas, à coup sûr, de maitriser la prolifération des normes. Elle semble même prise dans un paradoxe inextricable dans la mesure où au lieu de juguler le phénomène de prolifération des textes, elle l'aggrave d'une certaine manière91(*).

Par ailleurs, l'oeuvre du juge aussi n'a pas été épargné par les vagues simplificatrices. Longtemps à l'abri des critiques, le langage judiciaire est désormais pointé du doigt. Esotérique et largement ritualiste, la rhétorique du juge n'en finitplus de soulever des controverses au sein de l'élite doctrinale. En effet, pour certains auteurs simplifier le langage du juge serait une entreprise périlleuse. Pour DEMBA SY, « simplifier le langage judiciaire,c'est introduire de l'imprécision, et donc risquer la confusion »92(*).Toutefois, pour d'autres une entreprise de simplification du discours judiciaire serait souhaitable pour les administrés, surtout en droit administratif où le juge occupe une place de choix dans la production normative. C'est sous ce rapport que le groupe de travail présidé par P. MARTIN suggère une rénovation des techniques de rédaction des décisions de justice93(*).

Globalement, la politique de simplification du droit a eu des résultats probants en ce sens qu'elle a permis de bâtir des codesrelativement cohérents et ayant vocation à durée dans le temps, ce qui participe grandement du renforcement de la sécurité juridique. Cependant, pour reprendre les propos de N. MOLFESSIS, « bien naïf celui qui contemple l'essor des règlesvisant à l'amélioration du droit en se réjouissant, comme si l'appel à la simplification et, plus généralement, l'invocation de la sécurité juridique étaient un signe de rédemption du système juridique »94(*).

Les insuffisances ainsi notées dans la mise en oeuvre de la politique de simplification conduisent à envisager des solutions nouvelles au désordre systématique qui caractérise le droit contemporain. Une nouvelle approche de la politique législative ou règlementaire s'impose.Il convient de développer une nouvelle culture de la production normative qui doit nécessairement s'articuler autour d'une véritable discipline dans l'élaboration et la mise en oeuvre des normes juridiques.

* 87 G. VEDEL, Actes du Colloque l'Etat de droit au quotidien, p.65

* 88 B. MATHIEU, « Sécurité juridique : le respect de la légitime confiance des citoyens s'impose au législateur », Semaine juridique, éd. Gén. n°4, 2014, p.170

* 89 Conseil de la simplification pour les entreprises, les 50 mesures de simplification pour les entreprises, 14 Avril 2014

* 90 F. K. CAMARA, « Les nouveaux défis de la codification au Sénégal : Harmonisation et Accessibilité-le cas du droit pénal », Droit sénégalais, n°8, 2009, p. 227

* 91 N. MOLFESSIS, « Les illusions de la codification à droit constant et la sécurité juridique », RDT civ., 2000, p.186

* 92 D. SY, « Droit administratif et communicabilité en Afrique ». Afrilex, Décembre 2013

* 93 Groupe de travail présidé par P. MARTIN, Rapport sur la rédaction des décisions de justice, La documentationfrançaise 2011

* 94 N. MOLFESSIS, « Combattre l'insécurité juridique ou la lutte du système juridique contre lui-même », op. cit

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