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La pin-up et ses filles: histoire d'un archétype érotique

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par Camille Favre
Université Toulouse Le Mirail - Master 2 Histoire des civilisations modernes et contemporaines 2007
  

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1.2 L'empire Playboy.

En 1960, Playboy se vend à plus d'un million d'exemplaires par mois et sa société HMH Publishing Compagny, qui se compose de plus d'une centaine d'employés, propose de nombreux produits dérivés ornés du célèbre lapin : boutons de manchettes, cravates de soie, briquets précieux... C'est le début de la « Grande Vie » pour Hefner, réalisant la vie de rêve qu'il présente dans son magazine. En octobre 1959, la première émission de télévision est lancée : Playboy's Penthouse. Hefner finance aussi cette même année le premier Playboy Jazz Festival et l'achat d'une luxueuse résidence à Chicago, la Playboy Mansion. Pour rester fidèle à cette notoriété d'appartenance dans le message de Playboy - la clé de son succès commercial - il ouvre le 29 février 1960, le premier des Clubs Playboy à Chicago. Trois ans plus tard, de nombreux clubs naissent un peu partout sur le sol américain : Miami, Nouvelle Orléans, St Louis, New York, Phoenix, Détroit et les bunnies*, serveuses particulières aux Clubs, envahissent le territoire. Le succès de Playboy apporte aussi à son créateur de nombreux détracteurs. Pour répondre à ceux-ci, Hugh Hefner écrit, en 1962, un long commentaire social, la Philosophie Playboy publié en deux ans et demi sur 25 numéros. Trois ans plus tard la Fondation Playboy est créée afin de soutenir les propositions de réformes juridiques, sociales, et politiques suggérées par cet ouvrage de philosophie. Certaines de ses propositions sont particulièrement intéressantes, d'un point de vue social et la Fondation Playboy investit dans plusieurs projets, supportant financièrement la défense de la liberté de parole, les droits du citoyen, l'éducation sexuelle, la contraception et une réforme plus humaine de la législation sur les drogues. D'autres propositions par contre relèvent de délires mégalomanes.

En 1971 le magazine se vend à 7 millions d'exemplaires par mois134(*) et la société Playboy fait son entrée en bourse avec son avion privé luxueux orné du célèbre logo, ses vingt-trois Clubs Playboy, ses villégiatures et ses casinos (le premier est ouvert en 1966 à Londres) dans le monde entier, plus une maison d'édition du livre, une agence de modèles, un label de disque, plusieurs compagnies de production de cinéma et de télévision et même un service de location de limousine. Hefner achète alors une autre résidence, la Playboy Mansion West à Los Angeles et s'y installe définitivement avec une cohorte de bunnies, de playmates et de petites amies, en 1975, pour mener la « Grande Vie » dans tous les sens du terme. Hugh Hefner représente alors l'exemple type du « self made man » et fait ainsi rêver des milliers de lecteurs. Par son parcours Hugh alimente bel et bien « l'american way of life ». La seule ombre au tableau de cet « âge d'or » est que Playboy devient la cible des féministes. Ce qui agace profondément Hugh qui a toujours pensé que Playboy libérerait les femmes de la répression sexuelle.

Les attaques augmentent dans les années quatre-vingts, la période la plus sombre de l'histoire de Playboy. De nombreuses histoires de corruption et de pots de vin touchés par certaines mafias suite à l'ouverture de casino obligent Hugh à s'en séparer. De même, les histoires sordides de drogues et de trafics touchant le personnel proche de Hefner, particulièrement sa secrétaire et l'assassinat d'une playmate, l'obligent à calmer le jeu. Lorsque les premiers cas de Sida apparaissent quelques années plus tard, l'Amérique revient à une morale plus stricte qui culmine en 1984 avec la nomination par Reagan de la commission Meese pour une étude sur les retombées sociales de la pornographie. Marqué au fer rouge, Playboy perd un grand nombre de ses points de vente sur les stands de journaux et beaucoup de ses annonceurs publicitaires. Les ventes dégringolent et redescendent autour de 3,5 millions d'exemplaires par mois, et Hefner se sépare d'un bout de son empire. Suite à une légère hémorragie cérébrale en 1985, Hugh, à 59 ans, nomme sa fille Christie (née en 1952) à la présidence du conseil d'administration et au poste de PDG de son entreprise, se contentant du poste de rédacteur en chef. En 1989, il renonce à la pluralité pour épouser Kimberley Conrad, la playmate de l'année.

L'élection de Clinton à la présidence en 1992 met fin à la chasse aux sorcières de la période Reagan. Cette période plus relaxée voit la reprise des affaires pour Playboy. A la fin des années quatre-vingt-dix, l'homme aux pyjamas, fraîchement divorcé, refait son entrée dans la société. Agé aujourd'hui de 81 ans, Hugh Hefner vit toujours à la Mansion entouré de ses petites amies et ne se déplaçant qu'accompagné d'une équipe de blondes voluptueuses.

La critique n'a aucun mal à discréditer l'univers de Playboy - un monde invraisemblable de luxe masculin et de chair féminine retouchée - puéril et pompeux, et aussi « effrontément » (un terme favori du lexique du magazine) chauviniste.

Mais pour vraiment comprendre le rôle culturellement subversif qu'a joué, un temps, le mensuel, il faut se rappeler l'époque d'où il vient. En 1953, six mois avant le lancement de Playboy, la guerre de Corée s'est terminée en impasse, Julius et Ethel Rosenberg, accusés d'être des espions russes, ont été électrocutés ; le sénateur Joe Mac Carthy est à l'apogée de son pouvoir avant sa disgrâce un an plus tard. Une culture effrayante et pernicieuse, un mélange de consumérisme aveugle, de paranoïa anticommuniste et de puritanisme affiché se répandent. Playboy offre alors, indirectement, une alternative en rendant visible et en soutenant, grâce à la publication de textes et de reportages, des opinions divergentes ou critiques comme par exemple, en faisant s'exprimer les courants révolutionnaires de l'époque : beatnik, hippie, freak, Black Panthers....

* 134 HANSON Dian, «op. cit.», p. 280.

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"L'ignorant affirme, le savant doute, le sage réfléchit"   Aristote