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à‰volution du débat sur la rétroactivité de la norme prétorienne en droit privé : vers un droit transitoire pour la jurisprudence ?

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par Julien MOAL
Facultés des affaires internationales, Le Havre - Master de recherche en théorie générale du droit 2006
  

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Tout cela passe également par une réflexion approfondie sur son champ d'application. Nous avons déjà évoqué sur cette question les travaux de Thierry BONNEAU et de Pierre FLEURY-LE GROS ; d'autres travaux, plus anciens, partent toutefois sur des bases différentes, arrivant bien sûr à des conclusion différentes, que nous allons maintenant expliquer.

2) La rétroactivité naturelle de la jurisprudence.

a. La détermination du champ d'application de la jurisprudence nouvelle.

Ici, deux règles sont à prendre en compte : la règle nouvelle et la règle ancienne, à l'exclusion, bien sûr, de la règle écrite qui en fournit le support. La règle ancienne était le droit positif à l'époque des faits qui ont donné lieu au litige. L'acte - ou, par exemple, les faits - en cause est donc soumis à un certain régime substantiel le jour où il est pris. A ce moment là, la légalité de l'acte s'appréciera d'après cette règle ancienne. C'est cette règle, par comparaison avec la loi, qui devrait être appliquée par le juge, et elle l'aurait été si la jurisprudence n'avait pas évolué depuis. Mais en raison du changement dans la règle jurisprudentielle, c'est une nouvelle règle qui est appliquée par la jurisprudence au moment où le juge se prononce, la règle ancienne étant anéantie.

C'est ici qu'intervient une différence entre le droit écrit et le droit jurisprudentiel : le droit écrit est un droit de l'a priori ; il est écrit pour des faits qui se dérouleront en principe dans le futur - sauf le cas de la rétroactivité, mais c'est alors le fruit d'une volonté du législateur. La règle est, bien sûr écrite en pensant aux multiples hypothèses que recouvrent son application future, et ce en fonction de ce qui est observable dans le présent, mais il s`agit bien d'évènements postérieurs à l'intervention de la règle. De ce point de vue, le droit applicable à une situation peut donc bien rester donc celui qui était en vigueur au moment des faits en cause.

Le droit jurisprudentiel, quant à lui ne peut pas se permettre les mêmes précautions : la règle jurisprudentielle est faite pour - ou du moins à partir - des faits qui ont donné lieu au litige, qui se sont déroulés dans le passé. Le juge ne peut donc que créer et appliquer la règle nouvelle en même temps, pour les mêmes faits. C'est ici un droit de l'a posteriori, fait pour des faits concrets et passés, et non pas un droit fait a priori, pour s'appliquer de façon abstraite et hypothétique à des faits futurs.

« Le juge ne statue que sur le passé, un passé qui, par ses conséquences, se prolonge dans le présent, certes ; mais l'acte juridique ou le fait matériel sur lequel le juge se prononce se situe dans le temps (on s'excuse d'annoncer cette vérité de La Palisse !) , avant le jugement.

Or, le juge n'a pas d'autre occasion de poser une règle nouvelle ou de modifier sa règle antérieure que la solution des litiges qui lui sont soumis. L'arrêt de règlement n'ayant pas cours dans notre droit, il n'y a pour le juge qu'une technique de formulation plus ou moins explicite de la règle de droit : il énonce, dans les considérants, de façon plus ou moins explicite, la formule générale dont il va déduire la solution du cas particulier qui lui a été soumis. »172(*)

C'est d'ailleurs ce qui motive et justifie l'intervention du juge : si le règlement du litige passe par un acte de création, l'application de cette règle nouvelle se fait pour le litige qui justifie l'intervention du juge et auquel était destinée la règle nouvellement créée. De plus, l'adoption de la règle serait, autrement, dépourvue de légitimité.

Mais la conclusion est alors l'application de la règle nouvelle à des faits qui se sont déroulés avant l'intervention du juge : « Il en résulte nécessairement que, dans la mesure où le juge procède ainsi, en vertu de son pouvoir normatif, à une modification de la règle antérieure, la règle nouvelle va produire effet, non à partir du jugement, dont le prononcé lui confère l'existence, mais à l'égard des faits ou des actes sur lesquels il statue. Or, au moment où le fait s'est déroulé, où l'acte a été pris, la règle jurisprudentielle était, par hypothèse, fixée dans un certain sens. Ce n'est cependant pas cette règle, en vigueur à l'origine du litige, qui lui sera appliquée, mais celle que le juge lui substituera au terme de celui-ci. Il y a donc bien rétroactivité de la règle jurisprudentielle, non seulement à l'égard des données du litige à propos duquel elle a été élaborée, mais encore, dans la mesure où le juge s'en tiendra à la nouvelle règle, à l'égard de tous les litiges semblables dont il a été saisi avant la décision qui fait jurisprudence, et qui seront tranchés postérieurement à celle-ci »173(*).

Deux éléments son donc ici à distinguer : d'une part, la rétroactivité, d'autre part le caractère systématique de cette rétroactivité. Pour les auteurs dont nous expliquons ici les idées, le fait même que la jurisprudence s'applique à des faits qui se sont passés avant l'apparition de cette règle dans le droit positif, à une époque où une autre règle était en vigueur, suffit à démontrer sa rétroactivité. L'élément essentiel est ici le fait qu'une règle nouvelle en évince une autre pour le passé. Comme l'explique le Professeur Marie-Anne FRISON-ROCHE, « si la jurisprudence est de fait une source de droit, alors, au moment où elle émet une règle, qui s'appliquera dans tous les cas analogues, elle modifie les règles de droit ayant vocation à régir tous les litiges qui seront tranchés par les juges, même les faits constitués antérieurement à l'innovation jurisprudentielle, dès lors qu'ils n'ont pas fait l'objet d'un jugement définitif. »174(*)

Ainsi encore, le Professeur Nicolas MOLFESSIS : « la tare majeure du revirement de jurisprudence réside dans le fait qu'il saisit dans son orbe des situations constituées ou en cours de constitution - pour reprendre le langage de ROUBIER - en un temps qui ignorait, par hypothèse la solution nouvelle. D'où le fait qu'une personne va être responsable alors qu'à l'époque des faits, elle ne l'aurait pas été... »175(*).

Il faut noter que l'appréciation du caractère rétroactif du revirement se fait, dans une certaine mesure, par opposition à la théorie de la déclarativité et de l'incorporation à la loi. C'est par exemple dans cette optique que Pierre VOIRIN176(*) entreprend sa démonstration177(*).

La rétroactivité a ensuite un caractère systématique : tout revirement, en tant qu'il écarte, par l'effet même de son mode d'intervention, la solution en vigueur au moment des faits au profit d'une solution adoptée ultérieurement, a naturellement un effet rétroactif. Or, comme nous l'avons dit, cet aspect naturel de la rétroactivité est renforcé par l'absence de choix pour le juge : si le juge choisit d'adopter une nouvelle règle, il ne peut pas ne pas l'appliquer à la cause pour laquelle elle est créée et ensuite pour toutes les affaires qui lui seront présentées par la suite.

« la technique de création ou de modification de la norme par le juge, dans ses manifestations les plus typiques, suppose nécessairement l'application de la norme aux données - éventuellement antérieures - qui fournissent l'occasion de l'énoncer. On ne saurait concevoir, en effet, une dissociation entre création et application : le juge ne peut, dans un seul et même arrêt, formuler une règle nouvelle, et appliquer, à la solution de l'espèce, la règle antérieure, car la seule justification de son pouvoir normatif réside précisément dans la nécessité où il se trouve de donner, à la décision qu'il va prendre, le fondement d'une règle générale. Il y a là une différence essentielle entre l'édiction de la règle par l'autorité législative ou réglementaire, et son élaboration jurisprudentielle, notamment lorsqu'il s'agit de substituer une règle à celle qui s'appliquait antérieurement. »178(*)

Il est intéressant de rappeler ici les travaux de Thierry BONNEAU et de Pierre FLEURY-LE GROS, qui visaient précisément à contester cette vision de la rétroactivité par l'utilisation des critères du droit transitoire pour la loi179(*). On peut par ailleurs faire remarquer que ces arguments, même s'ils peuvent éviter l'emploi intempestif du concept de rétroactivité, n'ont pas pour conclusion l'absence de rétroactivité ; la conclusion est donc ici que, s'il n'y a pas systématiquement rétroactivité, celle ci existe dans un nombre considérable de cas.

Ce schéma, cependant, doit être nuancé : il ne s'applique qu'aux revirements de jurisprudence et non à tous les arrêts de principe. « Il ne s'applique pleinement qu'aux décisions proprement novatrices : celles qui consacrent une règle nouvelle là où aucune ne s'applique, celles qui renversent une règle antérieure. Là où la décision met fin à l'incertitude du droit préexistant ou encore apporte le point final à une évolution dont chaque terme ne constitue pas, pris isolément, une modification du droit antérieur, le phénomène qu'on analyse s'estompe jusqu'à s'évanouir. »180(*)

La démonstration de Pierre VOIRIN est encore plus tranchée sur ce point : « Le revirement n'a pas le monopôle de ces inconvénients. Une jurisprudence naissante les produit également, lorsqu'elle condamne une pratique constante, peut-être même une coutume sur la foi de laquelle se sont constituées des situations qu'on croyait inébranlables et qui, soudain, se trouvent remises en question. (...) Mais une pratique, fût-elle tenue pour un coutume, est sans force lorsqu'elle tend à faire tomber la loi (...) en désuétude. Si la Cour de cassation avait été saisie plus tôt, elle n'aurait pas manqué de couper court à ces errements de la pratique. Aussi ne peut-on assimiler à un revirement la réaction tardive de la jurisprudence contre de tels errements. Le revirement seul corrode la présomption de vérité attachée à la chose jugée. Du moins, dans les deux cas, la sécurité des justiciables est ébranlée. »181(*)

b. La nécessité d'un droit transitoire adapté

Partant de la mise en évidence de ce champ d'application, deux conclusions ont pu être faites. Certains auteurs ont estimé, par analogie avec les solutions des conflits de lois dans le temps et à partir d'un a priori défavorable vis-à-vis de la rétroactivité, qu'un système de droit transitoire devait être mis en place. C'est notamment l'opinion de Christian MOULY, évoquant « l'insoutenable rétroactivité » des revirements de jurisprudence : « dans un état de droit, où les solutions juridiques tracent le paysage dans lequel chaque individu détermine ses prévisions et ses actions, seules sont admissibles des normes et solutions connues de tous au moment où les prévisions sont formées et les actions engagées. Les normes ne doivent pas être rétroactives, car la rétroactivité fausse les données ; elle spolie ceux qui se sont engagés en fonction de l'état du droit antérieur ; elle mine la prévisibilité et bafoue la croyance commune. Elle porte atteinte au principe supérieur de sécurité juridique, dont la Cour Européenne des Droits de l'Homme fait grand cas.

C'est pourquoi les normes législatives et administratives sont soumises au principe de non-rétroactivité. Même les changements de doctrine administrative n'opèrent que pour l'avenir. 

Ce contexte rend moins admissibles l'imprévisibilité qui affecte les solutions jurisprudentielles. Elle est liée à l'insuffisance des débats qui les précèdent, à l'insuffisance de leur motivation et à l'insuffisance de leur publicité. Quant aux revirements de jurisprudence, leur rétroactivité est pire que celle des autres arrêts puisqu'elles conduit à sanctionner ceux-là même qui se sont conformés au droit antérieur. Elle devient insoutenable.»182(*)

Dans le même sens, on peut citer Christophe RADE183(*) : « Pour les justiciables, il importe peu de savoir si la règle nouvelle qu'on lui impose rétroactivement résulte de l'adoption d'une loi nouvelle ou d'un changement dans l'interprétation jurisprudentielle d'une loi ancienne. Dans les deux hypothèses, le litige est en effet tranché par application d'une règle de droit, pure ou interprétée, dont le justiciable n'avait pas eu connaissance au moment des faits et dont il n'a pas pu, par hypothèse, tenir compte dans ses prévisions. La Cour de Cassation ne peut donc, à son égard, se retrancher derrière une lecture aussi formelle de l'office du juge. »

Sur cette question, le Doyen CARONNIER lui même va jusqu'à écrire que « l'article 2 n'a visé que les lois. Mais le droit d'aujourd'hui en grande partie est devenu jurisprudentiel. Or, les jurisprudences nouvelles, parce que ce sont des interprétations sont inévitablement rétroactives. Il faudrait introduire dans l'article 2 un complément garantissant les justiciables contre les changements de jurisprudence. L'article 80 A du Code des procédures fiscales est un modèle : ne déclare-t-il pas inopposables aux redevables les changements d'interprétation de l'Administration ? »184(*)

Ici, il n'y a pas à proprement parler mise en évidence d'un conflit entre jurisprudences. Mais la rétroactivité étant en soi un mal, il est nécessaire de trouver un moyen de l'éviter. C'est dans cette optique qu'une comparaison s'impose avec les conflits de loi dans le temps : si le principe de non-rétroactivité s'impose en matière législative, et si un droit transitoire permet de déterminer précisément le champ d'application de la loi nouvelle, alors il devient nécessaire de mettre en place un droit transitoire équivalent pour la jurisprudence - sans l'asseoir nécessairement sur les mêmes principes - pour déterminer quand une jurisprudence nouvelle peut être invoquée s'agissant de faits passée, et quand elle doit être écartée

C'est dans cette optique que Christian MOULY propose d'adopter un système de modulation dans le temps des effets des revirements de jurisprudence, propositions reprises en grande partie par le rapport MOLFESSIS. Sans entrer dans le détail de ces propositions, nous pouvons dire que celles-ci sont inspirées par les pratiques adoptées par plusieurs systèmes juridiques étrangers, ainsi que par les Cours de Strasbourg et de Luxembourg. Ce système a été présenté sous le nom de « revirement pour l'avenir », par référence à l'expression employée devant la Cour Suprême des.Etats-Unis : « prospective overruling ».

Elles partent de la possibilité de créer un système de droit transitoire analogue par rapport à celui des normes législatives, mais sans être exactement le même, puisque ces normes ne sont pas les mêmes.

Ce système de modulation des effets des revirements de jurisprudence, véritable « droit transitoire des arrêts de principe et de revirement »185(*), serait assis sur le principe de rétroactivité de la norme jurisprudentielle, mais en permettant au juge de déroger exceptionnellement à ce principe pour en éviter des effets négatifs et excessifs. Il y aurait donc deux étapes dans le raisonnement du juge : d'une part, l'annonce du principe nouveau ; d'autre part, la décision de ne pas appliquer ce principe nouveau à la cause sur laquelle le juge se prononce. L'entrée en vigueur du principe nouveau serait donc reculée dans le temps.

En construisant ce droit transitoire dans l'optique d'un remède aux effets des revirements, les propositions de Christian MOULY ne visent pas à une réflexion approfondie sur l'insertion dans le temps de la norme jurisprudentielle elle-même. C'est sur ce point que ses propositions divergent par rapport à celles du Doyen ROUBIER. Celui-ci propose en effet, à partir d'une réflexion sur la nature de la norme jurisprudentielle, de construire un système de droit transitoire pour la jurisprudence à partir de la mise en évidence d'un conflits de jurisprudence dans le temps.

« Le régime de la loi a atteint son apogée, au point qu'on en est arrivé un moment à considérer que le droit était tout entier contenu dans la loi. Etant donné cette manière de voir, on ne peut être surpris de constater que le droit transitoire n'ait envisagé que les changements de législation, et nullement les changements de jurisprudence. C'est en effet une règle certaine de notre droit Français qu'il ne peut y avoir de conflit entre des jurisprudences successives : une jurisprudence nouvelle s'applique toujours dans tous les procès nouveaux, sans que l'on prenne en considération la date à laquelle les faits se sont produits, et quand bien même ces faits seraient antérieurs au changement de jurisprudence. Le motif est bien simple : on se refuse à voir autre-chose dans les arrêts qu'une simple interprétation de la loi, et cette interprétation n'a pas d'autorité au delà de la cause dans laquelle elle est donnée. Ce point de vue a été donné avec vigueur par TRONCHET, à la séance du 14 Messidor an IV du Conseil des anciens : ce que les arrêts ont admis, d'autres arrêts peuvent le rejeter ; donc il n'y a pas de changement dans la règle de droit, il y a seulement des divergences entre les solutions des interprètes. Mais disons aussi que la doctrine contemporaine est devenue plus réaliste ; elle y voit en général une source du droit moderne, quelques-uns disent même la seule source du droit coutumier moderne.

La question se posera peut-être alors de savoir s'il ne serait pas possible de prévoir, et de régler, les conflits entre des jurisprudences successives. Nous avons admis, il est vrai, qu'il n'y avait pas de conflit lors d'un changement de coutume ; mais la jurisprudence moderne ne peut être comparée aux formations juridiques inconscientes des coutumes primitives ; elle suppose au contraire un travail actif du juge, appliqué à un règlement, aussi heureux que possible, de la lutte des intérêts ; lorsqu'elle supplée aux lacunes de la législation, son oeuvre est toute d'initiative et de volonté. Sans doute elle est plus asservie aux nécessités pratiques que le travail législatif ; cependant elle représente aussi un choix entre plusieurs directions, qui pouvaient être également suivies. D'autre part, les changements de jurisprudence sont connus et commentés comme les loi nouvelles. N'y aurait-il pas lieu, dans ces conditions, de définir les portée d'application des jurisprudences nouvelles ? »186(*)

En partant du point de vue de l'existence d'une norme jurisprudentielle, il serait possible de chercher à mettre en évidence le conflit entre deux jurisprudences : si l'existence d'une norme est admise, alors il est nécessaire de réfléchir à son champ d'application ; il est alors possible que la norme en vigueur au moment des faits aie vocation à s'appliquer à ces faits. L'application - souvent, si ce n'est systématiquement - rétroactive d'une norme créerait un conflit entre ces deux normes ; la mise en place d'un droit transitoire - probablement élaboré, là encore à partir ou en tenant compte des caractéristiques bien spécifiques de cette norme - permettraient de régler ou d'éviter ce conflit187(*).

B. Evolution du droit positif : les changements dans les postulats classiques.

1) L'évolution de la doctrine de la Cour de Cassation : l'admission d'exceptions au principe de la neutralité du juge.

a. Les « craquements » dans la jurisprudence.

La Cour de cassation, en deux occasions, a porté atteinte à l'unité de sa doctrine sur l'interprétation. En premier lieu, sa jurisprudence récente a provoqué une dualité dans le régime de l'interprétation. En second lieu, elle admet depuis longtemps que la jurisprudence puisse être source de droit dans un domaine précis.

a.1) Dualité du régime de l'interprétation : Cette dualité dans le régime de l'interprétation est le résultat de l'unification récente du régime des lois rétroactives. La Cour de Cassation, se conformant en la matière aux exigences de la Cour Européenne des Droits de l'Homme188(*), a entrepris depuis plusieurs années, de restreindre la possibilité pour le législateur d'adopter des lois rétroactives, et ce plus particulièrement dans le domaine des lois de validation, où le risque d'une ingérence dans l'exercice du pouvoir judiciaire est particulièrement grande189(*). Les évolutions de la matière, aussi intéressantes soient-elles pour les droits fondamentaux, paraissent pourtant a priori étrangères au sujet qui nous occupe, la rétroactivité de la loi n'étant pas celle de la jurisprudence.

Pourtant, une évolution s'est faite récemment en ce domaine, qui intéresse indirectement la doctrine de la Cour de Cassation sur l'interprétation jurisprudentielle. Traditionnellement, la loi interprétative était considérée comme naturellement rétroactive : « jusqu'alors, parmi toutes les hypothèses de rétroactivité en matière civile, la loi interprétative faisait figure d'exception. Par la grâce de son caractère interprétatif, la rétroactivité serait ici « naturelle »190(*), « nécessaire »191(*) ; la loi nouvelle prendrait corps, elle s'incorporerait, elle se fondrait dans la loi interprétée, et les deux règles n'en formeraient plus qu'une. Cette fusion des textes opèrera fusion des effets dans le temps : la loi interprétative s'appliquera au jour d'entrée en vigueur de la loi interprétée ; l'abrogation de la loi interprétée emportera abrogation de la loi interprétative. Cet effacement de la loi interprétative comme loi nouvelle, loin d'être une vue de l'esprit, emporte une rétroactivité d'autant plus forte qu'elle est censée ne pas être. Ainsi, la loi interprétative est appliquée aux instances en cours, y compris celles pendantes devant la Cour de Cassation192(*), et a autorisé l'application rétroactive d'une loi pénale plus sévère193(*). »194(*) Cette rétroactivité naturelle justifie donc un contrôle judiciaire strict, mais la constatation de son caractère interprétatif aura pour conséquence automatique sa rétroactivité.

Cette conception traditionnelle de la loi interprétative a été remise en cause par un arrêt d'Assemblée Plénière du 23 janvier 2004195(*) dans lequel la Cour de Cassation « modifie la nature des lois interprétatives pour les considérer comme des lois nouvelles définitivement avérées. Dès lors, aux conséquences découlant de l'effet rétroactif naturel vont se substituer les conséquences de l'effet rétroactif intentionnel. La loi pénale interprétative se verra soumise aux règles de rétroactivité de la matière ; la loi interprétative civile ne pourra être invoquée directement la Cour de Cassation. Enfin, le contrôle judiciaire de la qualification d' « interprétatif » devient secondaire, voire indifférent, puisque dénué d'effet dans le temps. En revanche, les lois interprétatives sont dorénavant soumises au principe de non-rétroactivité. Pour y déroger, il faut donc rechercher dans le texte de loi ou dans les travaux préparatoires la volonté de faire rétroagir la loi et l'impérieux motif d'intérêt général l'autorisant. On ne saurait être plus clair que l'arrêt commenté : les exigences imposées aux lois rétroactives « s'appliquent quelle que soit la qualification formelle donnée à la loi » ; l'application rétroactive ne pouvant se justifier d'un impérieux motif d'intérêt général ni même d'une intention de faire rétroagir doit être écartée par le juge « peu important qu'elle ait été qualifiée d'interprétative »196(*).

Cette unification du régime des lois rétroactives laisse toutefois place à une dualité dans le régime de l'interprétation : jusqu'à présent, l'interprétation faite par le juge et celle faite par le législateur étaient soumises au même régime de rétroactivité, l'effet dans le temps découlant dans les deux cas du caractère déclaratif : la loi interprétative, tout comme la jurisprudence ne venaient que préciser ce qui était déjà prévu par une loi qui n'était qu'obscure. Sur ce point, le Doyen ROUBIER va plus loin encore : pour lui, l'explication de la rétroactivité de la loi interprétative ne se trouvait pas dans son caractère déclaratif, reposant non sur une fiction, mais dans un parallèle avec la jurisprudence : la loi interprétative serait interprétative comme l'est la jurisprudence...197(*)

« Désormais, l'interprétation de la loi se retrouve dans une situation paradoxale : l'une, opérée par le législateur, officielle, toute puissante, agirait comme une véritable nouvelle norme et serait soumise au principe de non-rétroactivité ; l'autre, produit du juge, réelle, nécessaire, ne serait pas nouvelle norme et ne pourrait en aucun cas être autre que rétroactive. Certes, les choses ne sont pas égales, par ailleurs : pour interprétative qu'elle soit, la loi reste loi198(*). Pourtant, au regard du droit Européen à l'aune duquel la rétroactivité est contrôlée, la jurisprudence n'est pas moins loi199(*). La position actuelle de la Cour de Cassation souffre ici d'une dissonance : pourtant ouverte ailleurs aux positions de la cour Européenne, elle rechigne toujours à intégrer la reconnaissance Européenne de la jurisprudence comme source de droit et la possibilité de sa non-rétroactivité200(*) »201(*)

Si « la construction idéologique de notre système se satisfait depuis longtemps de grandes ambiguïtés autour du statut de l'interprétation »202(*), la scission du régime de l'interprétation entre un acte normatif non-rétroactif et un acte d'autorité qui demeure déclaratif, qui n'est encore assise que sur un critère organique, pose un problème logique dans l'optique d'une jurisprudence qui serait source de droit : comment justifier que ce qui, pour l'un des créateurs du droit, reste rétroactif par nature, témoigne d'une « déloyauté sanctionnable », constitutive d'une atteinte à la séparation des pouvoirs, pour un autre pouvoir203(*).

C'est en ce sens que s'est prononcé le Rapport MOLFESSIS : évoquant cette évolution jurisprudentielle, le rapport poursuit : « la Cour de Cassation a ainsi refoulé la fiction du caractère déclaratif des lois interprétatives qui justifiait, jusqu'alors, qu'elles produisent des effets dans le passé. Comment admettre, dès lors, qu'elle puisse continuer à donner corps avec autant de constance à la fiction du caractère déclaratif des ses propres décisions lorsque ce sont les changements même de ses décision qui déterminent l'état du droit applicable ? »204(*)

a.2) La prise en compte de la jurisprudence en tant que source du droit dans le cadre de la responsabilité des professionnels du droit : Nous nous intéressons ici à un arrêt rendu par la Première chambre civile de la Cour de Cassation le 7 mars 2006205(*) dans une affaire de manquement d'un notaire à son devoir de conseil concernant l'état du droit positif. Plus précisément, il était reproché au notaire de ne pas avoir prévu un revirement de jurisprudence. En la matière, la Cour de Cassation estime depuis longtemps que la jurisprudence fait partie du droit positif que les professionnels du droit se doivent de connaître206(*).

Elle a trouvé l'occasion de réaffirmer cette position de façon particulièrement claire : « les juges du fond auraient dû « rechercher si, eu égard aux textes applicables, l'état du droit positif existant à l'époque de l'intervention du notaire et de l'agent immobilier, fixé par l'arrêt du 27 mars 1985, ne procédait pas d'une évolution antérieure apparue dès un arrêt de la Cour de Cassation du 27 décembre 1983 (...) , de sorte qu'il leur incombait, soit de déconseiller l'opération litigieuse, soit, à tout le moins, d'avertir le preneur quant à la validité d'un paiement mis à la charge du preneur entrant ». Ici,  « la cassation ne tient donc pas à l'étendue du devoir de conseil du notaire : il est désormais bien acquis qu'il recouvre l'état du droit positif existant à l'époque de l'intervention, cet état incluant les revirements de jurisprudence passés. La censure repose sur une mauvaise datation par les juges du fond de la solution jurisprudentielle. »207(*). le notaire se devait de connaître non seulement les revirements de jurisprudence, mais également les évolutions en cours ; en l'espèce, le notaire aurait du prévoir qu'un revirement de jurisprudence allait bientôt intervenir, celui-ci ayant été rendu prévisible par l'intervention d'au moins un arrêt d'espèce adoptant une solution différente. La solution est donc plus sévère que celle adoptée dans un arrêt du 25 novembre 1997208(*).

Ce qui est intéressant ici est de voir que la Cour de Cassation admet que la jurisprudence appartient au droit positif. Cela ne veut pas dire que le revirement lie les justiciables pour l'avenir, violant ainsi la prohibition des arrêts de règlement ; Les revirements passés, donc les précédents « ne sont pas mentionnés en tant qu'ils lient les juges mais en ce qu'ils permettent, en retraçant le développement de la jurisprudence, de dater celle-ci pour apprécier l'éventuel manquement du professionnel (...) . L'arrêt transcende donc le cas, non en contemplation des espèces à venir, ce qui lui est formellement interdit, mais au regard rétrospectif des espèces passées. »209(*)

Le principe est étonnant, quand on sait que la Cour de Cassation refuse de prendre en compte les précédents s'agissant de donner un effet rétroactif à ces solutions nouvelles. En la matière, on sait que « l'interprétation jurisprudentielle d'une même norme à un moment donné ne peut être différente selon l'époque des faits considérés et nul ne peut se prévaloir d'un droit acquis à une jurisprudence figée »210(*). Ici, c'est encore la première prémisse du raisonnement qui devrait être ébranlée.

Il est vrai qu'une différence importante a pu être invoquée sur cette question, à partir d'un parallèle entre ces deux cas : « cette solution n'entre pas en contradiction avec celle qui a, récemment, mis à la charge d'un médecin une obligation d'information pour une époque où cette obligation n'était pas encore consacrée par la jurisprudence. Dans le cas du notaire, il s'agit seulement de savoir si celui-ci a fait une application correcte de la loi et l'on ne peut tenir compte que de celle qui existait au moment de son intervention. Dans le cas du médecin, le juge est seulement invité à dire, au moment où il se prononce, quelles obligations produit, selon la jurisprudence, le contrat que l'on invoque devant lui. Or, la jurisprudence a une fonction déclarative et non constitutive : ce qu'elle dit être la loi est censé avoir toujours été dit par elle. Au demeurant, lorsque cette solution a été affirmée pour la première fois, il est évident que l'intervention du médecin concerné avait été antérieure ! L'aspiration à une jurisprudence non rétroactive est, au moins dans notre tradition juridique, un voeu irréaliste. On pourrait résumer la différence entre le cas du notaire et celui du médecin en observant que, pour le premier, la règle de droit n'est que l'objet de son intervention, tandis que, pour le second, elle est le cadre de son action. »211(*)

b. Le refus de donner un effet rétroactif à une règle jurisprudentielle nouvelle

Nous examinerons cette solution plus en détail dans une deuxième section ; mais nous pouvons ici nous intéresser à un arrêt rendu par les deuxième chambre civile du 8 juillet 2004212(*) et par l'Assemblée Plénière le 21 décembre 2006213(*) venant confirmer cette solution.

Ces deux arrêts prennent place dans un mouvement d'unification de la procédure en matière d'atteinte à la présomption d'innocence. Une controverse existait depuis longtemps sur la question du point de départ du délai de prescription de certaines de ses infractions.

L'apport du premier arrêt « consiste à aligner la prescription des atteintes à la présomption d'innocence, prévues par l'art. 9-1 c. civ., et dont le délai est porté (...) dans le giron même de la loi sur la presse à l'art. 65-1, pour en faire un délai lui aussi d'ordre public. »214(*)

La controverse est ainsi résumée par Christophe BIGOT : « Dans le régime général de l'art. 65, la prescription se trouve acquise « après trois mois révolus » à compter soit du jour de la commission de l'infraction, soit du « jour du dernier acte d'instruction ou de poursuite s'il en a été fait ». En revanche, s'agissant de l'art. 65-1 de la loi sur la presse qui s'applique à la prescription des actions fondées sur l'art. 9-1 c. civ., l'action doit être engagée « après trois mois révolus à compter du jour de l'acte de publicité ». Ces différences textuelles ont conduit dans un premier temps à s'interroger sur le point de savoir si on devait appliquer, sur le terrain de l'art. 65-1, les principes bien connus des praticiens pour l'application de l'art. 65, qui conduisent à réitérer de manière trimestrielle leur volonté de poursuivre l'action, l'introduction de celle-ci n'ayant pas, en cette matière, un effet interruptif de prescription pour l'ensemble du litige, contrairement au droit commun.

Dans un premier temps, peu après l'entrée en vigueur de la loi du 4 janv. 1993, la Cour d'appel de Paris avait estimé, dans un arrêt du 5 juill. 1994, que le demandeur devait faire en sorte que la prescription soit interrompue tous les trois mois en notifiant sa volonté de poursuivre, les dispositions de l'art. 65-1 de la loi sur la presse sanctionnant une liberté fondamentale protégée constitutionnellement étant d'interprétation stricte. Mais, dans un arrêt du 4 déc. 1996, la deuxième Chambre civile de la Cour de cassation avait cassé cet arrêt en retenant une solution inverse et en jugeant qu'il suffisait que l'action soit engagée dans les trois mois de l'acte de publicité, sans que, dans la suite de la procédure, il y ait lieu à interrompre de nouveau tous les trois mois la prescription. Les juges du fond ont ensuite globalement statué dans le même sens. C'est cette dernière solution que la Cour de cassation remet aujourd'hui en cause dans son arrêt du 8 juill. 2004. »215(*)

En principe, la thèse de la déclarativité aurait du inciter la Cour de Cassation à appliquer la règle jurisprudentielle nouvelle à l'instance en cours : l'intervention du juge est neutre, comme nous l'avons dit, elle ne doit viser qu'à clarifier la loi, et n'est donc pas autonome ; elle s'incorpore à la loi, et l'entrée en vigueur de ce régime substantiel est donc la date d'entrée en vigueur de la loi interprétée. Le même jour, la même chambre a d'ailleurs réaffirmé cette solution : « les exigences de sécurité juridique et la protection de la confiance légitime invoquées pour contester l'application d'une solution restrictive du droit d'agir résultant d'une évolution jurisprudentielle, ne sauraient consacrer un droit acquis à une jurisprudence constante, dont l'évolution relève de l'office du juge dans l'application du droit »216(*).

Pourtant, la Cour de Cassation a choisi de retarder l'entrée en vigueur de cette règle jurisprudentielle nouvelle : « si c'est à tort que la cour d'appel a décidé que le demandeur n'avait pas à réitérer trimestriellement son intention de poursuivre l'action engagée, la censure de sa décision n'est pas encourue de ce chef, dès lors que l'application immédiate de cette règle de prescription dans l'instance en cours aboutirait à priver la victime d'un procès équitable, au sens de l'article 6.1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales »217(*). Ce faisant, elle a accompli un revirement pour l'avenir.

Nous examinerons plus tard le procédé et les raisons qu'a eu la deuxième chambre civile d'adopter ce système, mais ce qui doit être mis en évidence ici, c'est le fait que la deuxième chambre civile a dû admettre l'existence d'une règle jurisprudentielle s'intégrant au droit positif de façon autonome, et non pas comme la clarification d'une loi obscure. Elle parle à ce sujet d'une « règle de prescription », même si elle n'en précise pas le fondement exact. C'est cette insertion dans le droit positif qui a permis d'en retarder l'application, au lieu de la faire rétroagir à la date d'entrée en vigueur de la loi comme l'aurait fait une simple interprétation de ce qui est obscur.

Le mécanisme a été repris par l'Assemblée Plénière de la Cour de Cassation le 21 décembre 2006 dans une autre affaire, mais avec un enjeu absolument identique: il s'agissait en l'espèce de la même controverse, et l'Assemblée Plénière aurait pu réaffirmer la solution ancienne, désavouant l'initiative de la deuxième chambre civile. Il n'en fut rien : « si c'est à tort que la cour d'appel a écarté le moyen de prescription alors qu'elle constatait que Mme X... n'avait accompli aucun acte interruptif de prescription dans les trois mois suivant la déclaration d'appel faite par les parties condamnées, la censure de sa décision n'est pas encourue de ce chef, dès lors que l'application immédiate de cette règle de prescription dans l'instance en cours aboutirait à priver la victime d'un procès équitable, au sens de l'article 6§1 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, en lui interdisant l'accès au juge ». On remarque d'ailleurs que la formulation est presque la même, et que la seule différence de formulation ne vise qu'à préciser le champ d'application de la solution nouvelle.

Toutefois, ce mécanisme, dans l'état actuel de la jurisprudence de la Cour de Cassation, est destiné à ne rester qu'un mécanisme d'exception permettant de ne pas priver le justiciable du droit d'accès au juge, et ce sur le fondement de l'article 6-1 de la Convention Européenne de Sauvegarde des droits de l'Homme. Non seulement le mécanisme n'a pas été repris par les autres chambres, mais la solution classique a été réaffirmée par la Chambre Sociale - certes, avant l'arrêt de l'Assemblée Plénière.

2) L'affirmation d'une conception normative de la jurisprudence nationale par la Cour Européenne des Droits de l'Homme.

Là encore, nous aborderons la question de manière plus précise dans la deuxième section. Mais il faut ici mettre en évidence le fait que, comme l'explique Patrick MORVAN, « la Cour Européenne des Droits de l'Homme  a, la première, admis la jurisprudence nationale au rang des sources du droit positif. La présence en son sein de juristes de common law l'y incitait fortement »218(*). Cela ne passe pas, toutefois, par une assimilation pure et simple de la norme jurisprudentielle à la norme législative. La norme jurisprudentielle « fait partie du bloc de légalité (lato sensu) »219(*), mais comme un accessoire obligatoire pour des raisons logiques.

Selon quel schéma la jurisprudence de la Cour Européenne des Droits de l'Homme a-t-elle intégré la norme jurisprudentielle dans la droit positif ? Il s'agit d'une conséquence du principe de légalité220(*), mais aussi d'une affirmation logique221(*) : le droit ne peut pas être parfait, il a besoin d'être précisé même après l'entrée en vigueur de la norme.

Le principe de légalité implique notamment la qualité et la prévisibilité de la loi : « Comme la Cour l'a dit dans son arrêt Kokkinakis c. Grèce du 25 mai 1993 (série A n° 260-A, p. 22, par. 52), l'article 7 (art. 7) ne se borne donc pas à prohiber l'application rétroactive du droit pénal au désavantage de l'accuséì: il consacre aussi, de manieÌre plus générale, le principe de la légalité des délits et des peines (nullum crimen, nulla poena sine lege) et celui qui commande de ne pas appliquer la loi pénale de manieÌre extensive au désavantage de l'accuseì, notamment par analogie. Il en résulte qu'une infraction doit être clairement définie par la loi. »222(*)

Or, la cour estime par ailleurs que le droit ne peut être parfait. Dans l'affaire CANTONI, la Cour avait ainsi pu expliquer, à propos de la définition des médicaments, que « La Cour a déjàÌ constateì qu'en raison même du principe de généralité ì des lois, le libelléì de celles-ci ne peut présenter une précision absolue. L'une des techniques types de réglementation consiste aÌ recourir aÌ des catégories générales plutôt qu'aÌ des listes exhaustives. Aussi de nombreuses lois se servent-elles par la force des choses de formules plus ou moins floues, afin d'éviter une rigiditéì excessive et de pouvoir s'adapter aux changements de situation. »223(*)

La jurisprudence peut alors être appelée à jouer un rôle d'interprétation de la loi ; ce faisant, l'interprétation sera intégrée au droit positif comme ayant précisé, voire ajouté à la norme législative. Dans l'affaire C.R. c. Royaume-Uni, la Cour concluait : « La Cour a donc indiqué que la notion de "droit" ("law") utilisée à l'article 7 (art. 7) correspond à celle de "loi" qui figure dans d'autres articles de la Convention, notion qui englobe le droit écrit et non écrit et implique des conditions qualitatives, entre autres celles d'accessibilité et de Prévisibilité. »224(*) Dans son paragraphe 34, elle précisait encore que « aussi clair que le libellé d'une disposition légale puisse être, dans quelque système juridique que ce soit, y compris le droit pénal, il existe immanquablement un élément d'interprétation judiciaire. Il faudra toujours élucider les points douteux et s'adapter aux changements de situation. D'ailleurs il est solidement établi dans la tradition juridique du Royaume-Uni comme des autres Etats parties àÌ la Convention que la jurisprudence, en tant que source du droit, contribue nécessairement àÌ l'évolution progressive du droit pénal. On ne saurait interpréter l'article 7 (art. 7) de la Convention comme proscrivant la clarification graduelle des règles de la responsabilitéì pénale par l'interprétation judiciaire d'une affaire àÌ l'autre, aÌ condition que le résultat soit cohérent avec la substance de 'infraction et raisonnablement prévisible. »225(*)

Comme nous le verrons, la Cour a rappelé dans plusieurs affaires226(*) que l'appréciation de la qualité de la loi dépend des destinataires et des matières. Par conséquent, « La prévisibilité de la loi ne s'oppose pas à ce que la personne concernée soit amenée à recourir à des conseils éclairés pour évaluer, à un degré raisonnable dans les circonstances de la cause, les conséquences pouvant résulter d'un acte déterminé. »227(*)

La norme jurisprudentielle doit donc répondre aux mêmes conditions de qualité que le droit écrit, tel que précisé par les affaires Sunday Times228(*) et MALONE229(*). C'est précisément l'intérêt de cette norme - préciser le droit écrit - , et ce principe n'est pas nouveau. Il résulte notamment des affaires KRUSLIN 230(*) et GEOUFFRE De La PRADELLE231(*). Comme l'explique Patrick MORVAN, « Les écoutes téléphoniques ordonnées par un juge d'instruction constituaient une pratique admise depuis 1980 par la Cour de Cassation sur le fragile fondement de l'article 81 du Code de procédure pénal. Leur validité était en réalité subordonnée à une série de conditions jurisprudentielles déduites des « principes généraux du droit ». Sûre de son fait, la chambre criminelle concluait que « ces dispositions répondent aux exigences résultant de l'article 8 de la Convention Européenne de Sauvegarde des Droits d l'Homme et des libertés fondamentales » consacrant le droit au respect de la vie privée. Mais la Cour de Strasbourg ruina cette belle certitude en déclarant que les écoutes téléphoniques constituaient une violation de ce même texte. Certes, concéda-t-elle, « l'ingérence litigieuse avait une base légale en droit Français » puisqu'il convient d'entendre « le terme « loi » dans son acception matérielle et non formelle » ; à ce titre, « on ne saurait faire abstraction d'une jurisprudence établie ». Mais cette base légale ne revêtait pas la « qualité » requise pour fonder valablement une restriction à un droit fondamental. Précisément, estime la Cour, « le droit Français, écrit et non écrit, n'indique pas avec assez de clarté l'étendue et les modalités du pouvoir d'appréciation des autorités dans le domaine considéré. »232(*)

C'est sur un raisonnement similaire que la France fut condamnée dans l'affaire GEOUFFRE De La PRADELLE : « l'extrême complexité du droit positif, telle qu'elle résulte de la combinaison de la législation (...) avec la jurisprudence était propre à créer un état d'insécurité juridique » privant le requérant « d'une possibilité claire, concrète et effective » d'accéder à un tribunal.

Or, c'est sur ce terrain que la France fut condamnée à deux reprises dans les affaires F.E. c. France233(*) et PESSINO c. France234(*), après que le principe eut été précisé explicitement dans les affaires C.R. c. Royaume-Uni, S.W. c. Royaume-Uni, et CANTONI c. France, pour avoir appliqué à des justiciables des revirements de jurisprudence imprévisibles de façon rétroactive. Dans ces affaires, comme nous le verrons, l'intégration de la jurisprudence dans les sources du droit positif n'est pas le seul élément en cause. Il y a aussi un élément de qualité. Mais la première étape du raisonnement est de reconnaître à la jurisprudence le caractère de source de droit, même en étant qu'une source subsidiaire ou accessoire.

On peut encore préciser que la Cour de Strasbourg ne donne pas de fondement de la jurisprudence. Elle même estime que sa propre jurisprudence est fondée sur l'idée d'interprétation235(*). Il s'agit probablement d'une façon de respecter le principe de subsidiarité en laissant chaque état libre du fondement de sa jurisprudence. Mais ce faisant, elle oblige toutefois les Etats à inclure la jurisprudence dans les sources du droit, quel que soit le fondement, ce qui a des conséquences sur la rétroactivité des revirements de jurisprudence.

Dans la mesure où cette discussion prend pour départ le caractère normatif ou non de la règle jurisprudentielle, cette discussion est probablement vouée à l'échec. Comme le disait M. ESMEIN, le débat sur la question de savoir si la jurisprudence est source de droit ou pas « est sans issue car il faut répondre non ou oui suivant qu'on se place dans le champ des idées pures ou qu'on considère la réalité des faits »236(*). C'est en somme ce qu'a pu écrire Denys de BECHILLON237(*), pour qui les tenants de la déclarativité ont le défaut de se concentrer sur le droit applicable, donc ce qui devrait être, et à négliger l'expérience, donc ce qui est, tandis que ceux que l'on appelle aujourd'hui les « réalistes », par référence aux théories réalistes de l'interprétation, ont le défaut de ne penser qu'à ce qui est en oubliant ce qui devrait être. Pourtant, comme l'explique l'auteur, les deux courants sont plus complémentaires qu'opposés, chacun des deux se concentrant sur un angle d'étude et un aspect essentiel du travail du juge.

Mais les deux courants paraissent irréconciliable, et il paraît aujourd'hui bien difficile d'établir un droit transitoire pour la jurisprudence sur ces seuls débats logiques, du moins si l'on estime que ce débat doit être tranché avant de déterminer les solutions de ce droit transitoire, afin de pouvoir construire à partir de postulats fermes et universellement acceptés. Mais le débat sur la rétroactivité de la jurisprudence a évolué depuis quelques années ; la question de la nature de la jurisprudence est, dans une certaine mesure, placée au second plan, et une nouvelle préoccupation a permis au débat de prendre de l'ampleur : l'observation des effets de la jurisprudence. Dans une certaine mesure, c'est aujourd'hui essentiellement à partir des effets de la jurisprudence que les tenants du caractère normatif de la règle jurisprudentiel raisonnent, et cela a contribué à élargir le fossé entre leurs contradicteurs et eux.

* 172  : Jean RIVERO, « Sur la rétroactivité de la règle jurisprudentielle », AJDA 1968, p. 15

* 173  : Jean RIVERO, « Sur la rétroactivité de la règle jurisprudentielle » précité

* 174  : « Le juge et son objet » précité

* 175  : Nicolas MOLFESSIS, « Les revirements de jurisprudence », in La cour de Cassation et l'élaboration du droit, cité dans Catherine PUIGELIER, « Le revirement de jurisprudence est-il une erreur ? », in L'erreur, sous la direction de Jean FOYER, François TERRE et Catherine PUIGELIER, PUF, 2007, p.205

* 176  : VOIRIN Pierre, « Les revirements de jurisprudence et leurs conséquences, JCP 1959, I, 1467

* 177  : Citant le Doyen CARBONNIER, « Le revirement est rétroactif par nature ; la jurisprudence nouvelle s'applique de plein droit à tout ce que les particuliers avaient pu faire sur la base et sur la foi de la jurisprudence ancienne » (CARBONNIER, « Droit civil », t. I, n°31, p.109 et n°34, p.113. ; rappr. RIPPERTet boulanger, « Traité de droit civil d'après PLANIOL », t. I, n°244), il poursuit : « Tout revirement équivaut à une loi rétroactive.

Certains, il est vrai, corrigent ce qui est excessif dans cette affirmation. « Il n'y a pas théoriquement rétroactivité, disent-ils, puisqu'il n'y a pas modification de la loi. Mais, en fait, les conséquences du renversement de la jurisprudence sont, pour les particuliers, semblables à celles d'une loi rétroactive. » (JULLIOT de la MORANDIERE, « Traité de droit civil de COLIN et CAPITANT », t. I, n°244) Cette mise au point substitue comme terme de comparaison la loi interprétative à la loi rétroactive.

Mais l'idée même d'une comparaison avec la loi est suspecte, car on ne compare que les choses de même ordre. Or, il est permis de douter que la jurisprudence soit une source de droit parallèle à la loi. Qu'on dise que l'usage conventionnel est vis-à-vis de la coutume dans le même rapport que la loi supplétive vis-à-vis de la loi impérative ou prohibitive, c'est raisonner juste, car loi et coutume sont sources de droit. Il en va différemment de la jurisprudence ; elle se borne à invoquer la violation ou la mauvaise interprétation de la loi.

Cependant le résultat pratique du revirement est analogue à celui que produit la loi interprétative : les situations juridiques antérieurement constituées se trouvent soumises à l'interprétation nouvelle, leur constitution même peut s'en trouver ébranlée, le même risque d'insécurité pèse sur les justiciables »

* 178  : Jean RIVERO, « Sur la rétroactivité de la règle jurisprudentielle » précité. Sur ce point, Christian MOULY proposait de ne faire aucune différence entre les arrêts de principe et les arrêts de revirement : « une solution jurisprudentielle n'intervient jamais dans un paysage juridique totalement vide. Même si la position prise par un arrêt est la première expression judiciaire sur une question, elle peut bouleverser un état de droit antérieur, le plus souvent concrétisé par une doctrine et une pratique communément admise (...)Les arrêts de principe ou de règlement doivent bien relever du même régime transitoire que les arrêts de revirement » (Christian MOULY, « Le revirement pour l'avenir », JCP G n°27, p.325)

* 179  : Thierry BONNEAU, « Brèves remarques sur la prétendue rétroactivité des arrêts de principe et des arrêts de revirement » précité ; Pierre FLEURY-LE GROS, Note sous Assemblée Plénière, 21 décembre 2006, Affaires Centéa et La Briocherie, JCP E

* 180  : Jean RIVERO, « Sur la rétroactivité de la règle jurisprudentielle » précité

* 181  : VOIRIN Pierre, « Les revirements de jurisprudence et leurs conséquences, JCP 1959, I, 1467

* 182  : Christian MOULY, « Le revirement pour l'avenir » précité. Dans le même sens, on peut citer Christophe RADE (« De la rétroactivité des revirements de jurisprudence », Dalloz 2005, n°15, p.988) : Pour les justiciables, il importe peu de savoir si la règle nouvelle qu'on lui impose rétroactivement résulte de l'adoption d'une nouvelle ou d'un changement dans l'interprétation jurisprudentielle d'une loi ancienne. Dans les deux hypothèses, le litige est en effet tranché par application d'une règle de droit, pure ou interprétée, dont le justiciable n'avait pas eu connaissance au moment des faits et dont il n'a pas pu, par hypothèse, tenir compte dans ses prévisions. La Cour de Cassation ne peut donc, à son égard, se retrancher derrière une lecture aussi formelle de l'office du juge. »

* 183  : « De la rétroactivité des revirements de jurisprudence », Dalloz 2005, n°15, p.988

* 184  : Jean CARBONNIER, Droit civil, introduction, PUF, p.207

* 185  : « l'on peut admettre que les normes jurisprudentielles méritent un domaine d'application dans le temps qui soit l'égal de celui des normes législatives » (Christian MOULY, « Comment limiter la rétroactivité des arrêts de principe et des arrêts de revirement ? » , LPA, 4 mai 1994, n°53)

* 186  : ROUBIER Paul, Le droit transitoire (conflits des lois dans le temps, Dalloz, 2ème édition, p.25 et s.

* 187  : Le Doyen ROUBIER estime toutefois qu'un tel objectif est matériellement irréalisable : « Il faut bien convenir qu'il existe un obstacle insurmontable dans notre droit : c'est l'impossibilité où l'on est de déterminer, avec une précision suffisante, le moment où la jurisprudence est fixée ; on ne peut, pour cette raison, assimiler le changement qui se produit dans le droit des arrêts à un changement de loi ». Comme nous le verrons, l'évolution qui s'est faite dans le domaine de la publication des arrêts pourrait conduire à remettre en cause cette conclusion pessimiste.

* 188  : Voir notamment CEDH, 21 novembre 1994, Raffineries Grecques STRAN et STRATIS ANDREADIS c. Grèce, n°22/1993/417/496 ; CEDH, 28 octobre 1999, ZIELINSKI et PRADAL, req. 24846/94 et 34165/96 à 34173/96

* 189  : Sur cette question, voir notamment Philippe MALINVAUD, « l'étrange montée du contrôle du juge sur les lois rétroactives », in Le Code Civil, un passé, un présent, un avenir ; Béatrice BOURDELOIS, « Lois rétroactives et droits fondamentaux », étude présentée lors du colloque sur les droits fondamentaux de la personne humaine en 2003 et 2004, organisé par le Groupe de Recherche et d'Etudes en Droit Fondamental, International et comparé de la Faculté des Affaires Internationales du Havre.; François-Charles BERNARD, « Les validations législatives, bilan et perspectives », in La loi, Catherine PUIGELIER (Dir.) , économica, 2005

* 190  : Jean-Luc AUBERT, « Introduction au droit », n°108

* 191  : Civ. 3ème, 1er février 1984, Bull. civ. III, n°25

* 192  : Civ. 23 décembre 1845, Civ. 2ème, 16 juin 1961, Bull. civ. II, n°470

* 193 Crim., 12 janvier 2000, Bull. crim., n°20

* 194  : Pascale DEUMIER, « Lois interprétatives, d'une scission à l'autre », RTD civ., Juillet/Septembre 2004, p.603

* 195  : Ass. Pl., 23 janvier 2004, Bull. A.P. n°2

* 196  : Pascale DEUMIER, « Lois interprétatives, d'une scission à l'autre » précité

* 197  : ROUBIER Paul, Le droit transitoire (conflits des lois dans le temps, Dalloz, 2ème édition, p.245 et s.

* 198  : Patrick MORVAN lui-même admet d'ailleurs que « Certes, il est une différence notable entre la rétroactivité de la loi et celle de la jurisprudence. Le législateur qui modifie les règles du jeu en cours de procès agit délibérément dans ce but, témoignant ainsi d'une déloyauté répréhensible ; ce faisant, il transgresse le principe constitutionnel de la séparation des pouvoirs. A l'inverse, le juge qui opère un revirement n'est a priori animé que d'une volonté de promouvoir une solution conforme au droit, à la justice ou, simplement, à sa politique judiciaire ; ce faisant, il agit dans le cadre de son pouvoir juridictionnel. Il est indéniable, à cet égard, que « l'évolution de la jurisprudence relève de l'office du juge dans l'application du droit » (Civ. 1re, 21 mars 2000, ). Nulle immixtion dans la sphère législative ou violation de la séparation des pouvoirs (en sens inverse du législateur) n'en résulte, à défaut d'arrêt de règlement véritable au sens de l'article 5 du code civil. La rétroactivité, qui est une faute pour le législateur, relève de l'office naturel du juge et participe donc, en principe, de son devoir. » (« 
Le sacre du revirement prospectif sur l'autel de l'équitable » Recueil Dalloz 2007 p. 835)

* 199  : CEDH, 24 avril 1990, KRUSLIN c. France, Grands arrêts n°5

* 200  : CEDH, MARCKX c. Belgique ; CJCE, 8 avril 1976, DEFRENNE c. SABENNA

* 201  : Pascale DEUMIER, « Lois interprétatives, d'une scission à l'autre » précité

* 202  : Pascale DEUMIER, « Lois interprétatives, d'une scission à l'autre » précité

* 203  : Patrick MORVAN, « Le revirement de jurisprudence pour l'avenir : humble adresse aux magistrats ayant franchi le Rubicon », Dalloz,2005, n°4, p.247

* 204  : Rapport MOLFESSIS, p.13

* 205  : Pourvoi n° 04-10101

* 206  : Sur cette question, voir également Patrick MORVAN « En droit, la jurisprudence est source de droit », RRJ 2001-1, p.77 et Antoine BOLZE, « La norme jurisprudentielle et son revirement en droit privé », RRJ 1997.3, p.855

* 207  : Pascale DEUMIER, « Le formation de la jurisprudence vue par elle-même », RTD civ. Juillet/septembre 2006, p.521

* 208  : Civ. 1ère,k 25 novembre 1997, Bull. civ. , IV, n°328

* 209  : Pascale DEUMIER, « Le formation de la jurisprudence vue par elle-même » précité

* 210  : Civ. 1ère, 9 octobre 2001 précité

* 211  : Jean-Luc AUBERT, La responsabilité civile professionnelle des notaires, LPA, 11 juin 2002 n° 116, P. 9

* 212  : Civ. 2ème 8 juillet 2004, pourvoi n° 01-10426

* 213  : Ass. Pl. 21 décembre 2006, pourvoi n° 00-20493

* 214  : Christophe Bigot, « Atteinte à la présomption d'innocence : changement du régime de la prescription », Dalloz 2004 p. 2956

* 215  : Christophe Bigot, « Atteinte à la présomption d'innocence : changement du régime de la prescription » précité

* 216  : Civ. , 2ème 8 juillet 2004, pourvoi n° 03-14717

* 217  : Civ. 2ème 8 juillet 2004, pourvoi n° 01-10426 précité

* 218  : Patrick MORVAN, « En droit, la jurisprudence est une source du droit » précité

* 219  : Damien Roets « La non-rétroactivité de la jurisprudence pénale in malam partem consacrée par la Cour européenne des droits de l'homme » , Recueil Dalloz 2007 p. 124

* 220  : Sur cette question, voir notamment Damien Roets « La non-rétroactivité de la jurisprudence pénale in malam partem consacrée par la Cour européenne des droits de l'homme » précité

* 221  : Le mot logique n'a pas pour but, ici de manifester notre attachement à cette thèse. Comme nous l'avons dit, nous tentons d'expliquer les différentes thèses, pas de la départager selon leurs mérites. Ici, nous estimons simplement que, pour la Cour, il s'agit plus d'un principe logique que d'un principe de droit

* 222  : CEDH,C.R.. c. Royaume-Uni, 22 novembre 1995

* 223  : CEDH, CANTONI c. France, 15 novembre 1996

* 224  : CEDH,C.R.. c. Royaume-Uni, 22 novembre 1995

* 225  : CEDH,C.R.. c. Royaume-Uni, 22 novembre 1995

* 226  : CEDH, CANTONI c. France, 15 novembre 1996 ;

* 227  : CEDH, PESSINO c. France, 10 octobre 2006

* 228  : CEDH, Sunday Times, 26 avril 1979

* 229  : CEDH, MALONE, 2 août 1984

* 230  : CEDH, KRUSLIN c. France, 24 avril 1990

* 231  : CEDH, 16 décembre 1992, GEOUFFRE De La PRADELLE

* 232  : Patrick MORVAN, « En droit, la jurisprudence est une source du droit » précité

* 233  : F.E. c. France, 30 octobre 1998

* 234  : CEDH, PESSINO c. France, 10 octobre 2006

* 235  : Voir par exemple CEDH, MARCKX c/ Belgique, 13 juin 1979

* 236  : P. ESMEIN, « La jurisprudence et la loi », RTD civ. 1952, p.19

* 237  : Denys de BECHILLON, « Le gouvernement des juges : une question à dissoudre », Dalloz 2002, n°12, p.973, ainsi que « Comment traiter le pouvoir normatif des juges, in Mélanges JESTAZ, p. 29

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