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Elections et transition démocratique en République centrafricaine

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par Blaise Zalagoye
Université catholique d'Afrique centrale - Master droits de l'homme et action humanitaire 2005
  

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Paragraphe II : Le Referendum constitutionnel de 1994 et l'effritement du consensus politique

Une fois les nouvelles institutions issues des scrutins de 1993 mises en place, il reste à doter le pays d'une nouvelle loi fondamentale capable de prendre en compte les mutations politiques intervenues jusque là. La politisation du débat sur la nouvelle constitution ( A ) va alors entraîner l'effritement du consensus politique après son adoption ( B ).

A- Le débat sur le projet de la Constitution

Si l'idée d'opérer une mutation constitutionnelle nécessaire pour prendre en compte le nouveau changement politique intervenu dans le pays est partagée par la classe politique centrafricaine, le définition du type de régime capable de répondre à cette mutation ne fera pas par contre l'objet d'un consensus. En dehors de la consécration des droits et libertés longtemps attendue et de l'affirmation de la séparation des trois pouvoirs, le projet de la constitution de la 5e République va soulever des controverses surtout en ce qui concerne l'étendue du pouvoir dévolu au Chef de l'exécutif. En effet, la prééminence de la fonction présidentielle est au centre du nouveau dispositif constitutionnel. Le statut et les vastes attributions qu'elle recouvre illustre si besoin est de la volonté des nouvelles autorités de laisser constitutionnellement les coudées franches au Président dans la gestion du pouvoir. En effet, clé de voûte de l'édifice institutionnel, les pouvoirs du Chef de l'exécutif recouvrent la présidence habituelle des conseils des ministres et de la magistrature, la nomination aux hautes fonctions publiques civiles et militaires ainsi qu'à la dissolution de l'Assemblée nationale1(*)11. Toutefois, comme l'analyse Albert BOURGI, les attributions du Président de la République, aussi étendues soient-elles, doivent « désormais être appréciées à l'aune des prérogatives reconnues au gouvernement et surtout au premier ministre1(*)12. »

C'est donc sur l'étendue du pouvoir du chef de gouvernement que va achopper la concertation entre le pouvoir et la classe politique. Cette dernière souhaite le renforcement des pouvoirs du premier ministre dans la définition et la conduite de la politique de la nation afin de permettre au Parlement d'avoir un réel contrôle sur cette politique. Pour la formation présidentielle, il importe peu que la rédaction des dispositions relatives aux rapports entre le Président de la République et le Chef du gouvernement puissent prêter à diverses interprétations, l'essentiel est d'en préserver l'esprit, à savoir que le premier ministre et le gouvernement restent avant tout des gestionnaires au quotidien de l'Etat. Ainsi, la possibilité d'une cohabitation à la française est concevable dans ce schéma constitutionnel à moins de procéder à l'exclusion de l'article litigieux1(*)13.

En outre, d'autres points du projet constitutionnel ne font pas l'unanimité. Il s'agit entre autre du mandat présidentiel ( fixé à six ans au lieu de cinq ), de l'âge minimum requis pour être candidat à la présidence ( 35 ans au lieu de 45 ), et enfin du projet de la régionalisation et de la décentralisation que d'aucuns pensent qu'elles sont plus facteur de division que d'intégration1(*)14.

A l'ouverture de la campagne référendaire, certaines formations politiques de la mouvance se dissocient du parti au pouvoir. Il s'agit notamment du MDD de Dacko, de l'ADP de Péhoua, du PSD de Lakoué et du FC de Malendoma. Ils rejoignent l'opposition dite radicale (RDC, FPP, MDREC) dans la campagne contre le non.

B- L'adoption de la nouvelle Constitution et l'effritement du consensus politique

Les résultats du referendum organisé en décembre 1994 donnent 82,06% de « oui » et 17,17% de « non ». La nouvelle constitution entrera en vigueur le 14 janvier 1995. Cette victoire du « oui » au référendum constitutionnel finit par faire éclater d'abord la mouvance présidentielle. Les causes de cet éclatement sont plus profondes qu'elles ne paraissent. Elles concernent surtout le mode de gestion du pouvoir par les nouvelles autorités. En effet, au lendemain des élections pluralistes de 1993, la classe politique et les forces vives de la nation dans leur ensemble ( les syndicats notamment ) ont décidé de donner une période de trêve politique et syndicale à ces autorités à cause de l'immensité des chantiers économiques et sociaux auxquels elles devront se confronter. C'est dans cette optique et conscient de la faible représentativité de son parti que le Président Patassé a négocié et obtenu la constitution avec les leaders de certains partis d'une coalition informelle appelée « mouvance présidentielle ». Néanmoins, le gouvernement dit de large consensus qui sera formé sur la base de cette coalition s'enlisera vite dans des difficultés. Ceci beaucoup plus par la volonté du parti gagnant de se prévaloir du principe de « qui gagne, gouverne et gouverne seul » pour « partager les postes administratifs les plus respectables aux militants du parti » ou « récompenser les amis politiques » pour leurs années de lutte. Il est donc difficile, dans ces conditions, aux autorités élues, à la fois d'arbitrer les conflits internes entre les « camarades de la légion étrangère, rentrés au pays réclamer leur part de récompense et les camarades locaux, véritables artisans de la victoire » et de s'attaquer aux racines du mal économique et social centrafricain.1(*)15. La déception gagne le camp des alliés qui estiment jouer plus un rôle de figurant que d'un réel partenaire pour le pouvoir. L'éclatement de la mouvance au lendemain du referendum va aussi sonner le glas de la trêve observée jusque-là. En fait, faute de stratégie de développement et à l'absence d'une reforme institutionnelle consensuelle, le programme du premier gouvernement va se buter à une motion de censure déposée par l'opposition et soutenue par la majorité présidentielle.

La constitution d'un nouveau gouvernement ne va pas pour autant décrisper la situation politique. Tandis que le parti MDD de Dacko accuse le président de la République d'avoir violer l'article 22 de la Constitution en cumulant les fonctions de Président de son parti et de celui Chef d'Etat1(*)16, sept partis de l'opposition se regroupent au sein d'un conseil démocratique de l'opposition et fustigent le caractère autoritaire et ethnocentrique du pouvoir en place1(*)17. L'atmosphère politique va se dégrader davantage lorsque le nouveau pouvoir lance un audit sur la gestion de son prédécesseur et menace de poursuivre en justice les personnes que ledit audit parlementaire viendrait à désigner comme responsables de détournement de fonds publics. Les collaborateurs de l'ancien régime ( pour la plupart membres de l'ethnie du général Kolingba ou les militants du parti RDC ), dénoncent ce qu'ils estiment être une chasse aux sorcières. La méfiance s'installe entre les principaux protagonistes de la scène politique nationale. Le consensus politique observé depuis le début du changement politique en 1993 s'effritera définitivement lorsque, sous le prétexte de revendications corporatistes, une parties de l'armée va déclencher une série de mutineries qui vont durablement affecter la classe politique et jouer sur les élections de 1998 et 1999.

* 111 Cf. chapitre Ier du Titre III de la Constitution du 14 janvier 1995

* 112 A. Bourgi, « L'évolution du constitutionnalisme africain... » op. cit., p. 731

* 113 Notamment l'article 37du projet de la Constitution qui dispose que « la politique définie par le Président de la République est mise en oeuvre par le Premier Ministre, Chef du Gouvernement. »

* 114 Agence Centrafricaine de Presse, bulletin hebdomadaire d'information, n° spécial du 18/01/1995

* 115 M. Koyt, M. F. M'bringa, P.M. Decoudras, op. cit. p. 241

* 116 Ledit article dispose en effet que « les fonctions de Président de la République sont incompatibles avec l'exercice de toute autre fonction politique, de tout autre mandat électif, de tout emploi salarié. »

* 117 B. I. Abdourhamane, op. cit.

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