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Opportunité et stratégie du règlement consensuel des litiges au regard des actions collectives en droit européen de la concurrence

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par Edouard Bruc
Université de Montpellier - DJCE 2016
  

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Chapitre 2 - Les modalités concrètes d'utilisation des règlements consensuels

148. Modalité concrète. La question de l'utilisation d'un mode de règlement amiable doit pouvoir se faire sans que cela soit rédhibitoire aux parties, de ce fait la directive n°2014/104 a prévu d'harmoniser la question de le la prescription au regard des règlements amiables (Section 1). Qui plus est, il est opportun de se focaliser sur un processus de règlement amiable en particulier : la transaction qui semble la plus adéquate face aux recours collectifs (Section 2).

Section 1 - La nécessaire suspension de la prescription

149. Uniformisation. La directive n°2014/104 prévoit un avantage processuel considérable à la mise en oeuvre des MARC : la suspension du délai de prescription pendant toute la durée de la procédure (article 18). Les États membres ont des règles différentes par rapport à la prescription de l'action lors de la mise en oeuvre des règlements alternatifs des conflits (1) que la directive va harmoniser lors de sa transposition en droit interne294(2).

Il est à noter que l'article 18 point 2 de la directive 2014/104 dispose que :

« Sans préjudice des dispositions du droit national en matière d'arbitrage, les États membres veillent à ce que les juridictions nationales saisies d'une action en dommages et intérêts puissent suspendre leur procédure pendant une période allant jusqu'à deux ans lorsque les parties à celle-ci participent à une procédure de règlement consensuel du litige concernant la demande couverte par l'action en dommages et intérêts ».

Cela signifie que la directive s'applique concernant la suspension du délai de prescription à défaut de disposition relevant du droit interne des États membres en matière d'arbitrage contraire. Le droit européen n'a pas vocation à s'appliquer à l'arbitrage, cependant il ne faut pas que le droit interne soit contraire à l'ordre public européen. Il faudra donc que les États prennent en compte cette directive en matière d'arbitrage pour se conformer à l'ordre public européen.

§1) Une diversité de régimes

150. Suspension et interruption. L'Union européenne est marquée par une diversité de pays ayant chacun leurs propres droits internes marqués par des règles différentes. La directive met en place une suspension du délai de prescription lors d'une procédure de règlement alternatif des litiges. Il faut étudier les différents droits internes avant la nécessaire transposition de la directive concernant les délais de prescription en général (article 10 de la directive) et au regard de l'article 18 de la directive de 2014. L'article 18 de la directive utilise le mot « suspension » qui doit être différenciée de l' « interruption ». La suspension arrête temporairement le délai de prescription sans effacer le délai déjà couru. L'interruption met un terme au délai de prescription qui reprendra de

294 avec comme date limite le 27 décembre 2016

132

zéro après la survenance d'un certain événement. Ainsi, l'article 18 prévoit une suspension du délai de prescription qui reprendra lors de la fin de la procédure de règlement consensuel des litiges.

151. Allemagne. En droit allemand, quelques modifications devront être nécessaires notamment concernant la durée du délai de prescription. Le paragraphe 199 du Code civil allemand dispose que le délai de prescription d'une action en dommage et intérêt est de 3 ans. Ce délai de prescription va devoir être porté à 5 ans pour que le droit allemand soit conforme à la directive. Le point de départ de ce délai est le même que celui précisé au sein de la directive. Le droit allemand paraît même plus libéral car le délai commence à partir du moment où le demandeur ignorant son droit à réparation devrait en avoir eu connaissance sans « négligence grossière ». Contrairement à la directive, il laisse courir le délai de prescription à partie de la connaissance du droit alors que la directive le fait courir à partir du moment où l'infraction au droit de la concurrence a cessé.

Ensuite, par rapport à l'article 18 de la directive n°2014/104, une suspension du délai de prescription en cas de négociation menées par les parties concernant le droit à réparation existe déjà ( 203 BGB). Le droit allemand institue même un délai de réflexion à l'issue de la négociation de trois mois, durant lesquels le délai de prescription sera toujours suspendu et recommencera à courir à l'issue de ces trois mois.

152. Italie. En droit italien, la transposition de la directive aura un impact car le droit italien prévoit une prescription quinquennale sans suspension de la prescription. La Cour de cassation italienne dans un arrêt du 2 février 2007 affirme le principe selon lequel le point de départ du délai de prescription commence à courir à compter du jour de l'extériorisation du dommage et non du jour où la conduite dommageable cesse. Le point de départ du délai de prescription va donc dans le même sens que celui de la directive mais nécessitera des précisions pour être conforme.

153. France. En droit français, le délai de prescription de l'action en dommage et intérêt est de 5 ans :

295

« à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer ».

Donc le point du départ du délai commence à courir à compter du moment où la victime a eu connaissance de l'infraction ou aurait du en avoir connaissance. Aucun changement substantiel du fond du droit applicable ne sera nécessaire (mais uniquement des précisions textuelles).

Concernant l'article 18 et la suspension du délai de prescription en cas d'utilisation de règlement alternatif des litiges et notamment de médiation ou de conciliation, le droit français par son article 2238 du code civil instaure une suspension du délai de prescription pendant tout le temps de la procédure de règlement amiable.

295 article 2224 du Code civil

133

154. Panorama. Les divers États membres de l'Union européenne ont des règlementations différentes en droit interne concernant les délais de prescription des actions en dommage et intérêt, le point de départ de ces délai et l'impact des procédures de règlement alternatif des litiges sur ces délais.

§2) Une harmonisation européenne

155. Prescription et suspension. La directive met en avant les modes consensuels de règlement des différents et pour les rendre plus attractifs elle leur attribue un avantage processuel non-négligeable dans son article 18 : la suspension du délai de prescription. Avant cela au sein de son article 10 elle tend à harmoniser les délais de prescription concernant les actions en dommages et intérêts dans les différents États, sans cela son article 18 n'aurait pas de sens. En effet, si chaque États avaient des délais de prescription différents mais transposaient tous l'article 18 concernant la suspension, certains régimes internes seraient donc plus intéressants que d'autres et lors de litiges transfrontaliers on se retrouveraient avec deux délais différents se confrontant.

156. Article 10 et 18. L'article 10.4 de la directive dispose que : « Les États membres veillent à ce que les délais de prescription applicables aux actions en dommages et intérêts soient de cinq ans au minimum ».

La directive commence tout d'abord par harmoniser les délais de prescription des actions en dommages et intérêts avec un délai de 5 ans ; ce qui engendrera comme vu précédemment une modification des délais de prescription pour ces actions en Italie et en Allemagne notamment. Ensuite, la directive pose la règle concernant le point de départ du délai de prescription :

«Les délais de prescription ne commencent pas à courir avant que l'infraction au droit de la concurrence ait cessé et que le demandeur ait pris connaissance ou puisse raisonnablement être considéré comme ayant connaissance :

a) du comportement et du fait qu'il constitue une infraction au droit de la concurrence;

b) du fait que l'infraction au droit de la concurrence lui a causé un préjudice; et

c) de l'identité de l'auteur de l'infraction.»

La directive commence tout d'abord par une définition négative du point de départ du délai de prescription. Le point de départ de ce délai commence à courir une fois que l'infraction au droit de la concurrence à cesser et non avant (ce qui est intéressant pour les victimes en cas d'infraction continue). Elle énumère ensuite trois faits qui font démarrer le délai de prescription, la connaissance soit du comportement entraînant une infraction au droit de la concurrence, du fait que cette infraction lui ait causé un préjudice et de l'identité de l'auteur de l'infraction. La directive précise « puisse raisonnablement être considéré comme ayant connaissance » ce qui permet de sanctionner tout de même une négligence excessive de la part de la victime de l'infraction.

L'article 18 de la directive dispose que :

134

« Les États membres veillent à ce que le délai de prescription fixé pour intenter une action en dommages et intérêts soit suspendu pendant la durée de toute procédure de règlement consensuel du litige. Cette suspension ne s'applique qu'à l'égard des parties qui participent ou ont participé à ladite procédure ou y ont été représentées »

La directive par cette disposition instaure une suspension du délai de prescription durant la procédure de règlement amiable en droit de la concurrence, ce qui est un nécessaire pour un bon déroulement de ces procédures, renforçant ainsi son attractivité. En effet, il ne faudrait pas que les parties ayant recours à un mode consensuel de règlement des litiges soient pénalisées si elles n'arrivent pas à trouver un terrain d'entente. En cas de non aboutissement de la procédure consensuelle, il faut que la voie judiciaire puisse rester ouverte. Et c'est dans ce but que la directive a mis en place une suspension du délai de prescription pour permettre une efficacité de la justice et préserver le droit à indemnisation de la victime d'une infraction au droit de la concurrence.

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