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La protection du droit à  la libre circulation des réfugiés dans la ville de Yaoundé au Cameroun: cas des centrafricains


par Oriane Murielle KENGNI MELI
Université Catholique d’Afrique Centrale - Master en droit public option Droits de l’Homme et Action Humanitaire 2023
  

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Section 2 : ECUEILS A LA LIBRE CIRCULATION DES REFUGIES RELATIFS AUX SERVICES PUBLICS

Les Conventions de 1951 et de 1969 fixent le cadre juridique permettant de conférer le statut de réfugiés à ces derniers. Elles attribuent à l'Etat recevant l'afflux des personnes victimes des situations énumérées dans les conventions, la responsabilité et le pouvoir de conférer le Statut de Réfugié. Ces dispositions ont été internalisées dans plusieurs textes, notamment la Loi de 2005 portant statut des réfugiés au Cameroun, le Décret de 2011 portant organisation et fonctionnement des organes de gestion du statut des réfugiés au Cameroun et l'arrêté ministériel n° 0013/DIPL/ CAB du 06 Août 2012 sur la composition de la Commission d'éligibilité au statut des réfugiés et celle des recours des réfugiés.

Malgré la prépondérance de ces textes, dans la pratique peu de personnes jouissent du statut de réfugié au Cameroun. La législation en vigueur prévoit en principe la possibilité d'accorder l'asile et le statut de réfugié et dans ce sens le gouvernement a mis en place un système visant à assurer la protection des droits des réfugiés, bien qu'il soit poussif.

Dans cet ordre d'idées, les écueils liés aux services publics relèvent des difficultés d'accès à la documentation officielle (Paragraphe 1) qui conduisent à des limitations d'accès aux autres services sociaux de base (Paragraphe 2).

Paragraphe 1 : Difficultés d'accès à la documentation officielle par les réfugiés

« Les réfugiés ont le droit de chercher asile dans un pays sûr, sans être soumis à des procédures bureaucratiques lentes et oppressives. »115(*)

La question relative à la protection des réfugiés a suscité durant trois décennies beaucoup d'intérêt dans le contexte camerounais, c'est dans ce sens que le Parlement s'est incliné de manière particulière à l'adoption d'une loi appropriée aux réfugiés à la faveur du Document d'Addis-Abeba sur les réfugiés et les déplacements forcés des populations en Afrique116(*) ; il s'agit de la Loi n°2005/06 du 27 juillet 2005 portant statut des réfugiés au Cameroun. L'avènement de ce texte a fait naître plusieurs autres textes réglementaires venant en complément à ladite Loi. Cette Loi crée la CESR qui est chargée d'attribuer la qualité de réfugié sans en préciser les contours117(*).

La mise en oeuvre du système camerounais en matière de documentation étant poussive, le HCR a continué de fournir documents et assistance aux populations réfugiées. Cet obstacle lié au système cause une réelle complexification des démarches administratives se traduisant par la lenteur (A) et la lourdeur des procédures (B).

A. Lenteur des procédures d'accès à la documentation par les réfugiés

Tel que nous l'avons précisé plus haut, la Loi de 2005 et son Décret d'application de 2011118(*) crée la CESR et fixe ses missions dont la fourniture des documents officiels aux réfugiés relativement à l'article 8(1) du décret de 2011 qui dispose : « 1. La commission d'éligibilité est saisie de toute demande en éligibilité et décide en premier ressort de l'octroi ou du refus du statut de réfugié au demandeur d'asile », lesdits documents sont la carte de réfugié, la carte de voyage119(*). Dans l'ensemble, le gouvernement ne fournit pas de documents d'identité en temps voulu aux réfugiés et aux autres personnes ayant besoin d'autres documents primaires. Les institutions nationales intervenant dans le processus d'octroi du statut de réfugié font généralement face à des cas de conflit de compétence dans la mesure où leur nature juridique n'est pas déterminée ; la Loi de 2005 s'est bornée à indiquer qu'elle crée la CESR120(*) sans toutefois préciser sa nature juridique. C'est dans ce sens que Boubakari OUMAROU se pose des questions qui manquent inlassablement de réponses « la CESR est-elle un établissement public doté d'une personnalité juridique avec autonomie financière comme certains le souhaiteraient ?121(*)s'agit-il d'un pendant du MINREX à côté du Service des Affaires Spéciales et des Réfugiés devenu Service des Réfugiés et des Migrants ? ou s'agit-il d'une juridiction ?122(*) ».

Nous pouvons dire que, face à ces questionnements, la législation camerounaise semble silencieuse. Relativement à la question 8 du guide d'entretien n°1 portant sur la durée de la procédure et en comparaison avec la Loi en vigueur portant statut des réfugiés au Cameroun, qui dispose que la Commission d'éligibilité dispose d'un délai maximum de deux (02) mois pour statuer, les réfugiés centrafricains nous ont affirmé que la procédure d'octroi du statut mettait un peu plus de huit (08) mois suivant un ordre chronologique précis ; soit trois (03) mois pour les papiers d'asile, trois (03) autres mois pour «l'acquis de droit » et enfin trois (03) autres mois pour la délivrance de la carte de réfugié. Nous notons une lenteur notoire des administrations à délivrer les cartes de réfugié, ce qui nous pousse à nous demander quelle peut en être la cause ? le HCR ne serait-il pas indépendant en matière de protection et d'assistance des réfugiés au Cameroun ? Nous penchant sur le principe de souveraineté de l'Etat, le HCR serait visiblement soumis au respect stricte des règles de l'Etat d'accueil ; en d'autres termes, le rôle de protection des réfugiés et donc de délivrance des cartes de réfugié revient en premier ressort à l'Etat, le HCR n'intervenant qu'en appui. C'est ce qui fait en sorte que dans la pratique, peu de personnes jouissent du statut de réfugiés au Cameroun car la reconnaissance juridique du statut du réfugié est butée à différents problèmes notamment institutionnels et pratiques qui hypothèquent la jouissance des droits qui leur sont reconnus sur le plan international et national.

Certes le Cameroun compte un peu plus de 275 000 réfugiés centrafricains, mais nous pensons vivement que le gouvernement devrait intensifier ses collaborations avec les acteurs internationaux et non gouvernementaux spécifiques à la protection des réfugiés en vue de pallier à cette défaillance procédurale.

* 115 Ngugi Wa THIONG'O, extrait de Moving the Centre, 1993.

* 116Document d'Addis-Abeba sur les réfugiés et les déplacements forcés des populations en Afrique, adopté par le Symposium de l'OUA et du HCR sur les réfugiés et les déplacements forcés de populations en Afrique du 8 au 10 septembre 1994, Addis-Abeba-Ethiopie, 5ème recommandation, Paragraphe 3.

* 117 Boubakari OUMAROU, « Cadre juridico-institutionnel de protection du statut de réfugié au Cameroun », Connaissances et Savoirs, 2021, pp21-56.

* 118 Décret n°2011/389 du 28 novembre 2011 portant Organisation et fonctionnement des organes de gestion du statut des réfugiés au Cameroun.

* 119 Art. 13 Loi de 2005, Op.Cit.

* 120 Art. 16, Ibid.

* 121 Cité par Martine AHANDA TANA, qui souhaitait comme en France, un Office Camerounais de Protection des Réfugiés et des Apatrides (OCPRA) ; selon elle, « un tel office public devrait être doté d'une personnalité juridique, de l'autonomie financière et administrative », 2000, p92.

* 122 Simeon Patrice KOUAM, Le statut des réfugiés au Cameroun - étude critique de la Loi n°2005/006 du 27 juillet 2005, www.memoireonline.com, consulté le 10 juillet 2024.

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