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La protection du droit à la libre circulation des réfugiés dans la ville de Yaoundé au Cameroun: cas des centrafricainspar Oriane Murielle KENGNI MELI Université Catholique d’Afrique Centrale - Master en droit public option Droits de l’Homme et Action Humanitaire 2023 |
B. Difficultés d'accès aux services hospitaliers liés à la violation du droit à la libre circulationSur le plan sanitaire, la violation du droit à la libre circulation a un effet à double tranchant ; non seulement elle leur empêche de bénéficier des traitements médicaux adéquats mais elle conduit également à des décès. L'accès aux soins hospitaliers des réfugiés urbains est une vue d'esprit ; déjà qu'elle est « sélective » d'après les propos d'un réfugié de l'arrondissement de Yaoundé 6ème, seuls les enfants âgés de 0-5 ans et les personnes âgées de 60 ans et plus peuvent bénéficier de la presque gratuité des soins de santé, soit un paiement de 30% des frais médicaux par les réfugiés et 70% par le HCR. Au regard de cette affirmation, comment fera le réfugié qui n'a pas d'emploi ou qui a un emploi aléatoire pour payer les 30% demandés ? et pour ceux des réfugiés qui n'ont pas l'âge requis, ne doivent-ils pas également jouir de soins médicaux ? L'Etat devrait prendre des mesures pour résoudre cette situation qui davantage crée en les réfugiés un sentiment de discrimination ou de révolte envers les agents de services hospitaliers, se disant que c'est une sorte d'arnaque ou d'escroquerie sous prétexte qu'ils sont protégés par les textes internationaux et donc en principe ils ne devraient payer aucun frais médical128(*). Comme autre difficulté liée à la libre circulation entravant l'accès aux services hospitaliers par les réfugiés, nous pouvons accuser l'état des routes ; en effet, l'état actuel des routes dans certains quartiers de Yaoundé ne facilite pas la libre circulation des réfugiés, elle fragilise à cet effet leur droit à la santé dans la mesure où cette défaillance routière leur cause un véritable préjudice face aux urgences médicales qui des fois, nécessitent des évacuations ou des soins approfondis. Les informations collectées sur le terrain ont permis d'affirmer que le déficit routier a déjà causé la mort de plus d'un réfugié à Yaoundé. Toujours dans le sens des impacts de la libre circulation sur le droit à la santé des réfugiés, revenons sur le fait que sur le plan psychologique ces personnes ont subi des traumatismes psychiques et psychologiques dus à leur déplacement, « lorsque nous fuyions la guerre, nous avons tout perdu, nos maisons, nos biens, nos familles, nos parents ainsi que des proches ; nous ne savons pas s'ils sont tous morts ou s'ils ont rejoint les rebelles, toutes ces situations sont très émotionnelles. Quand nous arrivons encore au Cameroun et qu'on ne peut pas aller et venir sans être pointé du doigt, ça nous frustre davantage et ça nous rend malades ; pour certains d'entre nous, les églises sont la seule consolation. Quand tu arrives à l'hôpital ou dans un autre service public et tu te présentes comme un réfugié, on te demande le « mot de passe » si tu veux qu'on résolve ton problème. Le mot de passe là représente une certaine somme d'argent, si tu n'as pas d'argent on ne prend pas ton cas en charge ; nous sommes mentalement affectés par toutes ces difficultés auxquelles nous faisons face au quotidien ». La restriction de la libre circulation peut ainsi entraîner la détérioration de l'état de santé global des réfugiés ; le respect de ce droit est essentiel pour garantir aux réfugiés l'accès équitable et adéquat aux services hospitaliers dont ils ont besoin pour préserver leur bien-être129(*). * 128 Art.12 al 2-d « La création de conditions propres à assurer à tous des services médicaux et une aide médicale en cas de maladie. », PIDESC. * 129 Art. 12(1) : « Les Etats parties au présent Pacte reconnaissent le droit qu'a toute personne de jouir du meilleur état de santé physique et mentale qu'elle soit capable d'atteindre. », PIDESC. |
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