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L'UDC de C. Blocher: l'extrême droite au coeur de la concordance helvétique?

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par Julien Vlassenbroek
Université Libre de Bruxelles - Licence en sciences politiques 2004
  

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4.2.2.3. Menaces sur la culture suisse : les assimilables et les non-assimilables

L'UDC se plaint du fait que «les immigrants proviennent aujourd'hui fréquemment de régions et de cultures très éloignées de la Suisse»319(*). Il s'agit dès lors de «sélectionner plus clairement les immigrants»320(*), de «mieux définir quels immigrants et quel nombre d'immigrants sont souhaités en Suisse»321(*). La sélection se baserait «sur des critères économiques»322(*) (voir le point 4.2.2.4 pour les critères économiques), mais tiendrait également compte de la capacité d'assimilation des immigrés concernés. Il s'agit pour ces derniers qu'ils soient capables de «s'intégrer d'eux-mêmes complètement et inconditionnellement à la société suisse»323(*). L'UDC conçoit qu'il existe des types d'immigrés ayant cette faculté et d'autres pour lesquels celle-ci est inaccessible. L'étranger capable d'être assimilé, et ainsi de ne plus perturber la cohérence culturelle nationale, serait l'«étranger de culture chrétienne»324(*), par opposition aux étrangers «exotiques»325(*) considérés de prime abord comme inassimilables. Ces présupposés ethno-différentialistes qui classent les étrangers en inassimilables et en assimilables, sont largement inspirés des théories d'Alain de Benoist, l'idéologue de la nouvelle droite française326(*). On se trouve ici face à deux phénomènes que Pierre-André Taguieff désigne comme d'une part une «substitution lexicale»327(*) qui vise à «parler de `'peuples'', de `'cultures'', [...] plutôt que de `'races''»328(*) et d'autre part une «célébration des différences intergroupales»329(*) qui «en les absolutisant»330(*) offre «un mode de légitimation hautement efficace d'exclusion radicale des étrangers supposés inassimilables [en italique dans le texte]» par le truchement d'une « reformulation différentialiste [en italique dans le texte] du racisme»331(*).

Ces techniques lexicales trouvent alors une applicabilité très concrète lorsque le parti décide de poser une étiquette claire sur les «groupes ethniques » qui « violent particulièrement souvent la loi»332(*) et autres étrangers «exotiques» inassimilables. Cette étiquette n'est autre que l'Islam. En effet, selon la section zurichoise du parti, l'Islam «devient de plus en plus le principal obstacle à l'intégration. Et pourtant la proportion des immigrants en provenance des pays islamiques est continuellement en hausse. [...] ces généreuses politiques d'immigration [...] menacent les valeurs de base occidentales»333(*).

L'Islam est donc entendu comme un élément ethnico-culturel qui s'oppose à l'intégration et qui sape les valeurs de base de l'Occident. Cette perception s'est accentuée après les attentats de `'9/11'', comme l'illustre le titre d'un article du Schweizerzeit, un hebdomadaire édité par le conseiller national UDC, Ulrich Schlüer : «L'Islam en Europe libérale : la culture chrétienne-occidentale face à son auto-liquidation ?»334(*). Cette logique répond à ce que Camus décrit comme «la vision de l'islam comme d'un mal absolu, intrinsèquement porteur de violence terroriste et de la volonté de destruction de la civilisation occidentale. Or, depuis les attentats du 11 septembre 2001, cette hostilité constante aux étrangers musulmans s'est encore renforcée, se muant en une véritable islamophobie»335(*).

Le dépôt, par un élu UDC, de l'interpellation parlementaire suivante semble confirmer les propos du politologue. Dans son texte, Jean Henri Dunant, conseiller national UDC, s'adressait au Conseil fédéral dans les termes suivants : «il est frappant de constater que le rapport sur la protection de l'Etat 2000 ne souffle mot des menées islamistes en Suisse. [...].

L'attentat du 11 septembre 2001 contre le World Trade Center a pourtant très nettement montré que des terroristes islamistes fondamentalistes mènent une guerre mondiale non déclarée contre les démocraties occidentales»336(*) or «des extrémistes islamistes ont obtenu l'asile en Suisse. [...]. Les islamistes radicaux sont donc sur notre territoire depuis un certain temps déjà. Aujourd'hui, plus de 300 000 musulmans vivent en Suisse, bien que nous ne sachions pas combien d'entre eux sont proches de la mouvance fondamentaliste, voire des milieux terroristes. Comme le fondamentalisme islamique draine de plus en plus de personnes en Europe - c'est le cas notamment en Angleterre, en France, en Allemagne et en Italie -, les dangers qu'il présente pour notre sécurité intérieure ne doivent pas être sous-estimés»337(*).

Le conseiller national s'inquiète donc que 300 000 musulmans vivent en Suisse, bien qu'on ne sache pas combien d'entre eux sont proches des milieux terroristes car il est acquis pour lui que des «extrémistes islamistes ont obtenu l'asile» et que «les islamistes radicaux» sont en Suisse depuis un temps certain. Remarquez l'utilisation du déterminant défini «les» plutôt que de l'indéfini `'des'' avant l'expression «islamistes radicaux», qui suggère une idée de totalité plutôt que de fraction, et par là d'un nombre plus important d'éléments. Ensuite on recense les termes «extrémistes», «islamistes» (2 fois), «radicaux», «fondamentaliste», «fondamentalisme islamique», «danger», encerclant l'idiome «musulmans», qui, coincé entre toutes ces expressions à connotation inquiétante, s'y retrouve implicitement assimilé.

* 319 «Non à une politique des portes ouvertes en matière de migration», op. cit.

* 320 Ibid.

* 321 Ibid.

* 322 Ibid.

* 323 H.-G. BETZ, «Contre la mondialisation : xénophobie, politiques identitaires et populisme d'exclusion en Europe occidentale», op. cit., p. 18. 

* 324 Propos de Cristoph Blocher rapporté par Pierre Niggli in P.-A. JOYE, «Le plan Blocher ? Intégrer l'extrême droite !», L'Hebdo, 21 octobre 1999, Lausanne, consulté sur www.webdo.ch, url : www.webdo.ch/hebdo/hebdo_1999/hebdo_42/dossier_intro_42.html

* 325 Ibid.

* 326 H.-G. BETZ, «Contre la mondialisation : xénophobie, politiques identitaires et populisme d'exclusion en Europe occidentale», op. cit., p. 12 ; voir également P.-A. TAGUIEFF, «Alain de Benoist, philosophe», Les Temps Modernes, n°451, février 1984, pp. 1439-1478.

* 327 P.-A. TAGUIEFF, «La métaphysique de Jean-Marie Le Pen», in N. MAYER, P. PERRINEAU (ed.), «Le Front National à découvert», Presses de la Fondation nationale des Sciences politiques, Paris, 1989 (1ère édition), p.180.

* 328 Ibid.

* 329 Ibid.

* 330 Ibid.

* 331 Ibid.

* 332 « Les Socialistes mentent noir sur blanc », op. cit.

* 333 « Das Konzept für eine Zürcher Ausländerpolitik », publication de l'UDC - Zurich, consulté sur www.svp-stadt-zuerich.ch, url : www.svp-stadt-zuerich.ch/seiten/auslanderkonzept.asp, traduction Jean-Sébastien Guy.

* 334 M. VON EYSZ, « Der Islam im liberalen Europa : Christlich-abendländische Kultur vor der Selbsauflösung ? », Schweizerzeit, 13 juillet 2001, traduction personnelle.

* 335 J.-Y. CAMUS, « Extrême droite européenne : la rupture de la filiation fasciste ? », op. cit., p. 120.

* 336 «Menées islamistes en Suisse», interpellation n°02.3507, du conseiller national Jean Henri Dunant, date de dépôt : 30 septembre 2002.

* 337 Ibid.

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