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L'UDC de C. Blocher: l'extrême droite au coeur de la concordance helvétique?

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par Julien Vlassenbroek
Université Libre de Bruxelles - Licence en sciences politiques 2004
  

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4.2.3.4. Le nationalisme dans le cadre théorique développé par Cas Mudde

Le constat empirique de la présence marquée d'une dimension nationaliste, comportant un pan xénophobe, dans le cas de l'UDC revêt une utilité de première importance lorsqu'il s'agit d'y appliquer le cadre théorique qu'a développé Cas Mudde.

Pour ce spécialiste de la question de l'idéologie des extrêmes droites européennes contemporaine, «the nucleus of the extreme right ideology is nationalism, the belief that the state (the political unit) and the nation (the cultural unit) sould be congruent. ERPs are first and foremost nationalist»414(*).

Si la première dimension empirique étudiée dans le cadre du présent travail avait permis de noter la présence dans le corpus idéologique udécéen d'un élément (l'antisystémisme) permettant de se prononcer quant aux `'border cases'' sur leur appartenance ou non au courant de l'extrême droite, sans toutefois être repris par l'auteur dans la structure idéologique idéal-typique de cette mouvance, il apparaît en revanche que dans le cas de la dimension nationaliste, dont la présence importante ne saurait être remise en question au sein de l'idéologie de l'UDC, on soit bel et bien face au `'noyau'' de l'idéologie de l'extrême droite contemporaine telle que la conçoit le politologue néerlandais.

S'il considère que les partis de ce courant sont d'abord et avant tout des partis nationalistes, il distingue cependant deux courants au sein de cette dimension idéologique.

On a vu que ces deux courants sont labellisés comme ethnic nationalism et state nationalism (cf. supra, point 2.4.).

On sait aussi que le premier définit la communauté nationale sur base de critères ethniques, principalement à travers les liens du sang. Le second considère, lui, que la nation doit être culturellement homogène mais pas nécessairement ethniquement. C'est pourquoi les tenants de ce dernier courant estiment le rapatriement et l'assimilation comme des solutions acceptables pour homogénéiser la nation. Les partisans du premier en revanche n'envisagent, eux, que le rapatriement des étrangers comme seule solution afin de faire correspondre les frontières de l'Etat à celles de la communauté ethnique415(*).

Le cas de l'UDC semble à première vue plus proche du `'nationalisme ethnique'' que du `'nationalisme étatique'' puisque le parti déclare considérer certains étrangers `'exotiques'' comme inassimilables. L'acceptation formelle de «la naturalisation des étrangers intégrés»416(*) confrontée à l'idée que certains groupes ethniques seraient particulièrement criminogènes ou «la propagande tournée contre les `'cultures non-chrétiennes'' [...] qui `'ne veulent pas s'intégrer et ne viennent en Suisse que pour encaisser les allocations sociales''»417(*), renvoie semble-t-il à Pierre-André Taguieff lorsqu'il analyse la «substitution lexicale»418(*) qui vise à «parler de `'peuples'', de `'cultures'', [...] plutôt que de `'races''»419(*) et d'autre part une «célébration des différences intergroupales»420(*) qui «en les absolutisant»421(*) offre «un mode de légitimation hautement efficace d'exclusion radicale des étrangers supposés inassimilables [en italique dans le texte]» par le truchement d'une «reformulation différentialiste [en italique dans le texte] du racisme»422(*).

Si les thèmes de la race et des liens du sang ne sont pas présents explicitement dans les arguments de l'UDC, on peut par contre émettre l'hypothèse d'une `'ethnicisation'' de la culture suisse, qui ne serait accessible qu'à certains groupes ethniques. L'acceptation des naturalisations pour les assimilés, couplée à ce paradigme, renverrait donc à une communauté culturellement homogène fondée sur une base ethnique homogène. D'où l'idée qu'à partir de ce seul critère nationaliste, on est dans le cas de l'UDC blochérienne, plus proche du groupe des formations d'extrême droite que Mudde qualifie de «(more) `'radical'' subgroup»423(*).

En plus du constat selon lequel: «Most attention in the xenophobic party litterature is paid to the threat of (mass) immigration and the creation of a multicultural society. All parties portray an image of a `'flood'' of immigrants which is out of control and which is kept hidden by `'the Establishment''»424(*), constat qui pourrait s'appliquer mot pour mot au cas empirique de l'UDC (un de ses mandataires affirme que la stratégie qui «vise à réaliser une société multiculturelle», «ne peut être concrétisée aussi discrètement que le souhaitent ces milieux [la gauche et les `'faux bourgeois'']»425(*)), Cas Mudde rappelle également que les partis d'extrême droite «perceive the process of European integration in general, and the abolition of internal borders in particular, as a threat to the character of their own group»426(*).

A la lecture de ces présupposés théoriques permettant, selon Mudde, d'aborder la nature idéal-typique de l'idéologie du parti de l'extrême droite contemporaine, il paraît difficile de ne pas conclure à la présence dans le corps idéologique udécéen, de deux éléments déterminants de cet idéal-type idéologique, à savoir «le nationalisme»427(*) et «la xénophobie»428(*). Il faut pourtant apporter un élément de nuance à cette conclusion, car Mudde donne en fait une définition beaucoup plus large de la xénophobie que le simple rejet de l'étranger, comme on l'entend dans le sens commun. En effet, la xénophobie recouvre chez cet auteur comme le fait que «everything what is considered `'alien'', or deviating from their own nation and conventions, is portrayed as negative and is perceived as threatening. This applies not only to the cultural values of other ethnic communities, but also to the values of particular minorities within their own ethnic community, such as homosexual and the left»429(*).

Si on a pu, dans le cas de l'UDC, observer cette attitude concernant la gauche, il ne nous est par contre pas encore permis d'affirmer que ce rejet de parties considérées comme déviantes, au sein même de la communauté, constitue une constante dans l'idéologie du parti. La dimension xénophobe dans le sens que Cas Mudde lui donne n'est donc pas encore totalement acquise à ce stade de l'étude en ce qui concerne l'UDC. Une partie non négligeable de cet élément est néanmoins déjà applicable, ainsi que la dimension nationaliste dans le sens dans lequel l'auteur l'entend.

Si on se souvient que Mudde considère que l'extrême droite «se réfère à une idéologie qui a pour traits caractéristiques : le nationalisme, la xénophobie, le chauvinisme social et la loi et l'ordre»430(*), on peut avancer que l'on dispose dans le dispositif idéologique de l'UDC du premier de ces quatre éléments ainsi que d'une partie importante du deuxième. Il faut en outre garder à l'esprit que l'on avait constaté, dans le point 4.1.3.4., la présence d'un élément idéologique permettant la classification des cas douteux dans la famille des partis d'extrême droite.

On est donc bien loin de pouvoir décréter, grâce au cadre théorique élaboré par Cas Mudde, que l'UDC présente une idéologie d'extrême droite, mais on est par contre déjà en état d'affirmer, à l'aide de cet outil, qu'elle en comporte d'importants éléments.

* 414 C. MUDDE, «The Single Issue Party Thesis : Extreme Right Parties and the Immigration Issue», op. cit., p. 187.

* 415 Id., pp. 187-188.

* 416 UDC, «Plate-forme électorale : Politique d'Asile et des Etrangers», op. cit.

* 417 P. NIGGLI, «La droite radicale perce en Suisse», op. cit. p. 11.

* 418 P.-A. TAGUIEFF, «La métaphysique de Jean-Marie Le Pen», in N. MAYER, P. PERRINEAU (ed.), «Le Front National à découvert», Presses de la Fondation nationale des Sciences politiques, Paris, 1989 (1ère édition), p.180.

* 419 Ibid.

* 420 Ibid.

* 421 Ibid.

* 422 Ibid.

* 423 C. MUDDE, «The ideology of the extreme right», op. cit., p. 182.

* 424 Ibid., p. 173.

* 425 Y. PERRIN, «On ne résout pas les problèmes de l'asile et de l'immigration par des naturalisations en masse», op. cit.

* 426 C. MUDDE, «The ideology of the extreme right», op. cit., p. 173.

* 427 C. MUDDE, «Expliquer le succès de l'extrême droite», op. cit., p. 14.

* 428 Ibid.

* 429 C. MUDDE, «The ideology of the extreme right», op. cit., p. 172.

* 430 C. MUDDE, «Expliquer le succès de l'extrême droite», op. cit., p. 14.

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