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L'utilité des peines de prison pour les criminels

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par Paul-Roger GONTARD
Université d'Avignon et des Pays de Vaucluse - Maitrise de droit privé, option Carrières Judiciaires 2007
  

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Chapitre 2 : Une lutte, la réinsertion

LOI 87-432 22/06/1987 RELATIVE AU SERVICE PUBLIC PENITENTIAIRE

Article 1 :

Le service public pénitentiaire participe à l'exécution des décisions et sentences pénales et au maintien de la sécurité publique. Il favorise la réinsertion sociale des personnes qui lui sont confiées par l'autorité judiciaire.

Il est organisé de manière à assurer l'individualisation des peines.

La réinsertion est la deuxième priorité de l'administration pénale. Elle a une mission « d'orthopédie morale » pour les détenus (section 1), et une mission de préparation de bonnes conditions de sortie pour le prisonnier, ce qui passe avant tout par une réinsertion économique, par un travail (section 2). Pour l'une comme pour l'autre de ces missions il faut admettre que le prisonnier doit être consentant, volontaire et déterminé dans son attitude car beaucoup d'embûches sont sur sa route.

Section 1 : Apprendre et s'apprendre en prison pour mieux vivre demain

Le paradoxe de la mission de réinsertion des prisons vient d'une injonction à construire un individu insérable alors que l'exercice de sa mission de sécurité l'entraîne bien souvent à déstructurer et à désocialiser ces mêmes individus. L'un des premiers piliers d'une insertion sociale est la scolarisation. L'affirmation est aussi vraie dans le cadre d'une ré-insertion (§1). La deuxième base d'une réinsertion sera le travail que pourra faire le détenu sur son propre parcours (§2).

§ 1 Reconstruction du détenu par l'éducation

En 1989, le Conseil de l'Europe - Recommandation n° R (89) 12 (en Annexe 2) - donne les grandes lignes de ce que doit être la formation en prison. Principalement, cette recommandation insiste sur la place prépondérante que devrait avoir l'éducation dans la sphère carcérale.

Concrètement, la formation générale ne concerne que deux détenus sur dix69(*), alors que le principe veut que « Tous les détenus [aient] le droit de participer à des activités culturelles et de bénéficier d'un enseignement visant au plein épanouissement de la personnalité humaine ». Edictée en 1990 par les Nations Unies, la règle n° 6 des Principes Fondamentaux relatifs au traitement des détenus est toujours loin d'être effective dans les prisons françaises. Dans son étude sur les droits de l'homme dans la prison, en mars 2004, la Commission nationale consultative des droits de l'homme (CNCDH) n'a pas manqué d'aborder ces questions. S'affirmant « convaincue que l'éducation est un moyen d'humaniser les conditions de vie au sein de la prison, qu'elle favorise la resocialisation, et qu'elle vient combler de nombreux besoins au sein de la population des personnes incarcérées », la Commission a considéré que « tous les détenus [devaient] être mis en situation de pouvoir bénéficier d'un enseignement conçu comme un moyen permettant de comprendre la société et de pouvoir jouer un rôle dans son fonctionnement dans le futur ». En 2004, 80 % de la population détenue n'a bénéficié d'aucune action de formation générale, alors que 69 % d'entre elle avait terminé ses études avant 18 ans (contre 36 % à âge comparable en population générale), et environ un tiers avait terminé leur scolarité avant 16 ans (contre un quart dans la population générale). Et pourtant une convention du 29 mars 2002 liant les ministères de l'Education nationale et de la Justice stipule que « l'enseignement en milieu pénitentiaire doit être fondé sur les mêmes exigences et les mêmes références qu'en milieu libre » !

Voici pour le constat général, mais très concrètement ce sont les expériences humaines qui sont les plus parlantes. L'Organisation Internationale des prisons nous indiquait en 2005 sur son site Internet70(*) cette histoire : 

« Deux personnes incarcérées à la maison centrale de Poissy (Yvelines) ont été autorisées pour les années universitaires 2003-2005 à accéder sous contrôle et de manière limitée à une connexion Internet afin de suivre en deux ans une maîtrise en informatique dispensée à distance par la faculté de Besançon. Après de multiples démarches, ces détenus ont réussi, fin 2003, à obtenir l'autorisation de la direction d'utiliser la connexion afin de travailler en qualité de programmateur et développeur de sites web pour le compte de sociétés extérieures. Le 24 avril 2004, l'un d'eux est informé oralement par la directrice adjointe de l'établissement de la décision de la nouvelle direction de mettre fin à la connexion payée par l'établissement. Deux jours plus tard, les deux hommes reçoivent la visite du proviseur des universités de Paris chargé des relations avec l'administration pénitentiaire. Accompagné de la directrice adjointe, ce dernier les félicite de leur persévérance avant de leur garantir le maintien de la possibilité d'accéder à Internet afin d'achever leur maîtrise. Le 3 mai 2004, après réception par la directrice du courrier recommandé des intéressés manifestant leur étonnement quant à la décision transmise par sa collègue de couper la connexion, les deux hommes sont placés dans un fourgon en direction de la maison d'arrêt de Fresnes (Val-de-Marne). La décision de transfert motivée par l'attitude de protestation des deux personnes incarcérées ne sera officialisée en toute illégalité que le 27 mai. »

Malheureusement, cet exemple n'est pas isolé. Le plus célèbre est probablement celui de Philippe MAURICE71(*). Condamné à mort le 28 octobre 1980, il est gracié par le Président MITTERAND en mai 1981. Il devra combattre contre une partie de l'administration pénitentiaire pour que soient respectés ses efforts éducatifs. Il devra protester, faire des grèves de la faim, écrire à toutes les autorités carcérales ou républicaines pour que lui soient rendus ses livres et ses travaux de recherches qui, étrangement s'évaporaient à chaque changement de prison.

Le but de ces exemples est de montrer que non seulement les moyens ne sont pas suffisamment mis sur le volet éducatif de la prison, mais que les bonnes volontés, souvent individuelles, sont marginalisées ou contradictoirement soutenues par certains et freinées par d'autres.

Pourtant, les moyens et les comportements nécessaires au succès de cette mission sont connus. La recommandation du Conseil de l'Europe qui nous servait de préambule à cette partie (annexe 2) donne toutes les mesures utiles et les objectifs devant être atteints. Pourtant ce texte semble avoir été oublié. Certes sa forme de recommandation n'en fait pas un texte spécialement contraignant. Peut-être faudrait-il, presque 20 ans après sa rédaction, lui offrir une autre forme, une directive par exemple, afin de faire prendre conscience aux Etats de l'importance de ce volet éducatif dans la construction de la sécurité européenne.

* 69 Rapport 2005 : les conditions de détention en France - Chapitre Formation générale et activités socioculturelles, OIP/La découverte, 2005, 288p.

* 70 www.oip.org

* 71 Philippe MAURICE ; DE LA HAINE À LA VIE ; édition le cherche midi éditeur ; mars 2001

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