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L'hypothèque maritime dans le code CEMAC de la Marine marchande

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par Marie Duvale KODJO GNINTEDEM
Université de Yaoundé II - DEA 2008
  

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SECTION I : LE PRINCIPE DU RECOURS

163. De façon générale, il s'est posé, tant en doctrine qu'en jurisprudence, la question de savoir dans quelle mesure « une disposition de droit terrestre peut-elle opérer dans un ensemble régi par le droit maritime...sur un point auquel ce droit ne répond pas »235(*). Il s'agit du problème de la légitimité du recours au droit commun auquel se fond celui de l'application du droit des hypothèques immobilières à l'hypothèque maritime.

KODJO GNINTEDEM Marie Duvale, L'hypothèque maritime dans le Code CEMAC de la Marine Marchande

Parler du principe du recours au droit commun des hypothèques immobilières revient à étudier les fondements d'un tel recours (paragraphe 1) et l'étendue de ce recours (paragraphe 2), puisque le recours à l'hypothèque immobilière implique une application de ses règles telles que prévues par l'AUS.

Paragraphe 1 : Fondement du recours

164. Sans compter la similitude de règles entre l'hypothèque immobilière et l'hypothèque maritime, similitude qui contribue beaucoup plus à justifier la nature hypothécaire de cette sûreté, plusieurs raisons militent en faveur de l'application du droit commun des hypothèques immobilières.

La lecture des articles consacrés à l'hypothèque maritime laisse voir que la réglementation ne touche qu'aux aspects particuliers de l'hypothèque, imposant ainsi la recherche de règles supplétives qui sont celles de l'hypothèque immobilière désignées par la mise en oeuvre de la dialectique droit commun droit spécial (A) et par la mise en oeuvres des principes d'interprétation (B).

A. La dialectique droit commun - droit spécial

165. La légitimité du recours au droit commun des hypothèques immobilières se trouve dans la philosophie générale qui sous-tend la relation droit commun - droit spécial. Cette philosophie a trait à l'établissement du rapport droit commun - droit spécial (1) et à l'intervention du droit commun à titre supplétif (2). La lecture du code laisse voir que cette philosophie a été préservée.

1. L'existence du rapport droit commun - droit spécial

166. En droit maritime communautaire, la spécialisation très poussée de l'hypothèque maritime ne fait aucun doute. Elle concerne la limitation de la réglementation de l'hypothèque maritime à des aspects particuliers que ne peut résoudre le droit des hypothèques immobilières. Cette spécialisation est favorisée par l'article 1 de l'AUS.

Il faut y voir la volonté de ne pas créer une sûreté autonome qui susciterait des réflexions assez difficiles à mener sur les points nécessaires à cette autonomie et laisseraient un goût d'inachevé236(*). Plutôt la volonté d'avoir une sûreté adaptée au contexte maritime, mais dont l'essence reste celle de l'hypothèque immobilière.

KODJO GNINTEDEM Marie Duvale, L'hypothèque maritime dans le Code CEMAC de la Marine Marchande

Dès lors, le spécialiste qui est le législateur communautaire s'est employé « à marquer son territoire, ne serait-ce que parce qu'il considère que le généraliste ne perçoit pas bien les particularités de sa matière et qu'il cherche à y plaquer des solutions et des raisonnements qui lui sont étrangers et que la méconnaissance de la spécialité empêche le généraliste de sélectionner, d'adapter ou d'écarter comme il le faudrait »237(*). Ainsi, il est acquis que le CMMC institue un droit spécial qui, en l'absence de mention contraire peut se voir appliquer le droit commun. L'éventualité de l'application du droit commun des meubles étant exclue238(*), ce droit commun ne peut être que celui des hypothèques immobilières.

2. L'intervention à titre supplétif du droit commun

167. Le droit commun a « vocation à jouer partout où il n'est pas expressément écarté par une règle d'exception ou encore, à défaut de dispositions expressément contraires, chaque fois qu'il n'entre pas en contradiction avec l'esprit d'une loi, avec les principes d'une institution ou l'économie particulière d'une législation »239(*). Dans notre cas, le recours au droit commun des hypothèques immobilières doit être fait à titre supplétif, là où le législateur communautaire est muet. Les règles de l'hypothèque immobilière viennent ainsi en complément indispensable de l'hypothèque maritime.

168. A l'analyse, ce recours a été favorisé par le législateur communautaire. L'on note ainsi son silence sur plusieurs aspects de la réglementation de cette sûreté et qui pourtant nécessitent des précisions. Tel est le cas de l'extinction de l'hypothèque maritime et de la définition de ce droit réel. On a alors l'impression que s'il avait été possible, le législateur aurait tout simplement disposé que le navire est susceptible d'hypothèque conventionnelle.

L'application du droit commun des hypothèques s'inscrit aussi dans une logique de cohérence et de cohésion, par le recours aux procédés d'interprétation.

B. Le recours à la science de l'interprétation

169. Pour faire la lumière sur des points de droit obscurs, la jurisprudence et la doctrine doivent procéder avec méthode, la méthode d'interprétation240(*). Il est peut être impropre de parler de « la méthode d'interprétation », parce que la loi n'a pas de manière systématique dégagé les principes relatifs à l'interprétation. La doctrine s'en est chargée, et la science de l'interprétation offre aujourd'hui une multitude de méthodes241(*). Néanmoins, quelque soit la méthode dans laquelle on s'inscrit, les règles pratiques d'interprétation sont les mêmes (1), puisqu'elles tendent vers le même objectif, apporter une lumière sur une loi ou une règle de droit.

KODJO GNINTEDEM Marie Duvale, L'hypothèque maritime dans le Code CEMAC de la Marine Marchande

L'interprétation ne doit pas aboutir à l'incohérence du droit242(*), surtout qu'elle est devenue, avec l'évolution, essentiellement logique et se perd dans la logique juridique. Aussi, toute interprétation doit rechercher la cohésion et la cohérence du droit (2).

1. L'application des règles pratiques d'interprétation

170. Partant toujours du constat que la réglementation de l'hypothèque maritime est cantonnée aux aspects particuliers, ce qui ne permet pas une analyse complète de cette sûreté, il fallait trouver les éléments de droit commun qui permettraient de parachever son régime juridique. Il s'avère qu'en procédant par interprétation, on aboutit à la désignation du droit commun des hypothèques immobilières. L'interprétation n'est pas faite quant à l'objet de la sûreté, mais quant à sa nature, et « la nature commande le régime juridique »243(*)

171. L'on peut recourir à l'analogie ou extension analogique. Elle consiste à étendre la loi à des matières ou à des cas qu'elle n'a pas prévus, ce « qui implique un passage du connu à l'inconnu »244(*). De ce que la loi a statué pour une situation, on en déduit qu'elle est applicable aux situations semblables. Ainsi, dans la mesure où l'hypothèque maritime ressemble à l'hypothèque immobilière et qu'il n'est pas prévu de causes particulières d'extinction de l'hypothèque maritime, on peut déduire que les causes d'extinction de l'hypothèque immobilière sont applicables à l'hypothèque maritime. Les mêmes causes produisent alors les mêmes effets ; c'est l'argument a pari245(*). On peut aussi, en abandonnant le procédé herméneutique, faire intervenir l'analogie légale, qui intervient quand, « au lieu de réglementer distinctement deux institutions entre lesquelles il existe une certaine parenté de nature, la loi fait une économie de textes en renvoyant d'une institution à l'autre »246(*).

172. KODJO GNINTEDEM Marie Duvale, L'hypothèque maritime dans le Code CEMAC de la Marine Marchande

Certains auteurs ont vu en cette technique d'interprétation l'affaiblissement du particularisme du droit maritime247(*). Il faut pourtant reconnaître qu'en restreignant la réglementation de l'hypothèque maritime, les rédacteurs du CCMM ont eux-mêmes favorisé cet affaiblissement. Mais savoir quelles règles doivent être applicables à une institution participe de l'exigence de sécurité juridique, et renforce l'unité du droit.

2. La cohésion et la cohérence du droit

173. Comme l'a relevé POLLAUD-DULIAN, « la référence au droit commun, lorsqu'elle est légitime du moins,  assure une certaine cohérence et une certaine unité du droit, par delà les particularismes nécessaires à chaque branche »248(*).

Ainsi, l'essence de l'hypothèque ne doit pas varier selon qu'on se trouve en présence d'un navire ou d'un immeuble. Auquel cas, on aboutirait à une certaine insécurité dans le domaine des sûretés. Derrière la cohérence du droit, se cache alors le principe de sécurité juridique. Ne dit-on d'ailleurs pas que « la règle doit présenter à la fois de la cohérence et de la clarté et une certaine stabilité pour répondre au souci de sécurité juridique249(*) » ? Il en résulte que le droit des hypothèques maritimes ne doit pas avoir de conséquences tellement ravageantes qu'il ferait exception à toutes les règles édictées par les autres branches du droit privé, à moins que le législateur ait entendu lui conférer un caractère autonome. Ce qui ne semble pas être le cas du législateur communautaire.

La cohérence du droit impose aussi que les aspects du régime de l'hypothèque maritime affectés par le droit commun soient connus.

* 235 RODIERE (René) : Traité général de droit maritime, Introduction, l'armement, Paris, Dalloz, t 1, 1976, n°28, p.50.

* 236 De plus, devons nous garder à l'esprit que le droit maritime vit d'emprunts permanents aux concepts et aux institutions du droit privé général. v. RODIERE (René) : Traité général de droit maritime, Introduction, l'armement, Paris, Dalloz, t 1, 1976, n° 29.

* 237 POLLAUD-DULIAN (Frederic), op. cit., p. 929.

* 238 En effet, il n'est pas possible d'appliquer les règles du gage classique, puisque l'hypothèque maritime ne répond pas à la philosophie qui entoure cette sûreté mobilière. Et même si on devait se conformer à la nature mobilière du navire, on n'aboutirait pas à l'application du droit commun des meubles, puisque celui-ci y échappe pour se rapprocher des immeubles.

* 239 POLLAUD-DULIAN (Frederic), op. cit, p. 932.

* 240 Si en tant que « science de l'espoir ou du désespoir » elle est abondamment exercée en matière contentieuse, l'interprétation est aussi une « science d'anticipation (pour le commentateur d'une loi nouvelle) » ; v. CORNU (Gérard) : Droit civil, Introduction, Les personnes, Les biens, Paris, Montchrestien, 11e éd, 2003, n° 217.

* 241 A la méthode classique qui est celle de l'exégèse, s'opposent plusieurs méthodes modernes à savoir la méthode téléologique, la méthode historique, la méthode structuraliste, la libre recherche scientifique ; v. CARBONNIER (Jean) : Droit civil, Introduction : Paris, PUF, Thémis, 1995, n° 155.

* 242 Comme le relève CORNU, « il arrive très souvent, dans une perspective utilitariste, que, dévoyée de sa fin (et de sa fidélité au droit), l'interprétation n'oeuvre pas à faire prévaloir le sens véritable des règles, mais manoeuvre à leur faire dire ce qui peut servir au triomphe d'une cause. La science de l'interprétation dégénère alors en trituration textuelle ». CORNU (Gérard), op. cit, n° 217.

* 243 CARBONNIER (Jean) op. cit, n° 156, p. 249.

* 244 CARBONNIER (Jean) op. cit, n° 156, p. 247.

* 245 Ibid.

* 246 CARBONNIER (Jean) op. cit, n° 159.

* 247 De façon générale, l'affaiblissement du particularisme du droit maritime vient de ce que « les commentateurs qui lui appliquent leurs procédés de raisonnement, leur connaissance du droit romain et de la jurisprudence civile, le torturent et déforment les institutions les plus originales pour y voir des applications du droit commun », RODIERE (René) : Traité général de droit maritime, Introduction, l'armement, Paris, Dalloz, t 1, 1976, n°25, p.44.

* 248 POLLAUD-DULIAN (Frederic), op. cit, p. 932.

* 249 POLLAUD-DULIAN (Frederic) : A propos de la sécurité juridique, RTDC. (3), juill.-sept.2001, p. 493.

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