WOW !! MUCH LOVE ! SO WORLD PEACE !
Fond bitcoin pour l'amélioration du site: 1memzGeKS7CB3ECNkzSn2qHwxU6NZoJ8o
  Dogecoin (tips/pourboires): DCLoo9Dd4qECqpMLurdgGnaoqbftj16Nvp


Home | Publier un mémoire | Une page au hasard

 > 

L'accès aux médicaments et le droit des brevets

( Télécharger le fichier original )
par Magloire AKOGBETO
Université Jean Moulin Lyon 3 - Master droit et management des structures sanitaires et sociales  2005
  

précédent sommaire suivant

Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy

2.2.2.2. Les limites du droit d'accès au médicament

Si l'Etat français reconnaît juridiquement l'existence d'un droit d'accès au traitement médicamenteux, il faut néanmoins souligner que ce droit, dans la réalité, s'accompagne, pour reprendre la formule de M. Mourgeon, d'un « régime de surveillance restrictif »70.

67 La consommation pharmaceutique des ménages français représentait, en millions de francs constants, pour

1970 : 21 842 ; 1975 : 36 285 ; 1980 : 44 887 ; 1985 : 66 997 ; 1990 : 99 099 ; 1995 : 126 325. (Source : ECO-SANTE France - CREDES).

68 C. Le Pen, E. Levy. Op. cit. p. 1.

69 R. Launois. « Qu'est ce que la régulation médicalisée ? ». In Actes du colloque CREDES-CES « De l'éconolie aux politiques de santé ». Paris, 16, 17, 18 décembre 1992, Publiée par SNIP-Editions John Libbey, p. 12.

70 MOURGEON (J.), Les droits de l'homme, Paris, P.U.F. coll. "Que sais-je ?" 6° éd. 1996 p. 90.

La jurisprudence de la Cour de Cassation donne d'abord une lecture stricte de l'article

L. 162-17 du Code de la sécurité sociale71. La Haute juridiction a cassé les jugements des tribunaux des Affaires sociales ou des cours d'appel ayant autorisé pour un patient déterminé, en raison de la situation particulière dans laquelle se trouvait placé le malade, le remboursement de certains produits non inscrits sur la liste des médicaments remboursables. Ainsi, dans l'arrêt de sa chambre sociale du 6 janvier 198872, la Cour de Cassation, après avoir rappelé le principe de l'inscription obligatoire sur la liste des médicaments remboursables, casse l'arrêt de la Cour d'appel de Saint-Denis de la Réunion qui avait imposé le remboursement de produits diététiques, seuls produits permettant d'assurer la survie d'un enfant atteint d'une maladie grave et rare. La rareté de cette maladie expliquait pour la Cour d'appel qu'aucun produit de nature à y remédier ne soit inscrit sur la liste des médicaments remboursables, ce qui entraînait des "discriminations entre les individus, privant du droit aux soins les porteurs de maladies rares". La n'a pas voulu suivre la Cour d'appel sur le terrain d'une équité juridiquement difficile à fonder, et rappelle « qu'il n'appartient qu'au législateur et à l'autorité réglementaire de fixer les conditions de prise en charge » des frais pharmaceutiques médicaux.

Pour la Cour, ni le principe de "la plus stricte économie"73, ni celui de l'équité ne sauraient fonder une conception extensive du droit d'accès au traitement médicamenteux et justifier l'extension du remboursement à des produits non inscrits sur la liste des spécialités remboursables par le pouvoir réglementaire74. Le juge suprême étant lié par le dispositif légal d'inscription sur la liste des médicaments remboursables, il est donc très souvent amené à se calquer sur la position adoptée par l'administration sanitaire et sociale. Le droit d'accès au traitement médicamenteux semble donc être strictement entendu, de sorte qu'il ne saurait être étendu au-delà de la limite que fixe le pouvoir réglementaire. Le principe de remboursement qui masque généralement les difficultés des populations à accéder aux traitements médicamenteux trouve ici ses réelles limites.

On se rend compte que, plus les médicaments seront chers, moins ils seront remboursés, et moins les populations auront accès aux soins notamment les personnes en situation de précarité. Ce qui pose d'ailleurs un problème éthique et social très important.

71 L'article L.162-17 du Code de la sécurité sociale pose le principe fondamental selon lequel "les médicaments spécialisés, visés à l'article L. 601 du Code de la santé publique ne peuvent être pris en charge ou donner lieu à remboursement par les caisses d'assurance maladie que s'ils figurent sur une liste établie dans les conditions fixées par décret en Conseil d'Etat".

72Cass. soc. 6 janvier 1988, pourvoi n° 85-18.219, Caisse générale de sécurité sociale de la Réunion c/M. Chatelain

73 Principe qui implique l'évaluation du "du non coût" résultant d'un choix thérapeutique donné.

74 Voir : Cass. soc. 11 juillet 1991, pourvoi n° 89-19.115, C.P.A.M. de la Manche c/Mme. Josselin

Le déremboursement est donc de loin la solution adéquate pour résoudre l'équation de la constante augmentation des dépenses de santé. Il serait alors intéressant d'explorer d'autres terrains.

L'hypothèse des génériques nous semble apporter une solution pertinente qui tienne compte du double souci de l'Etat de maîtriser les dépenses de santé tout en assurant l'accès aux soins des populations. Ces équivalents thérapeutiques aux produits originaux dont le brevet est arrivé à échéance et proposés à un prix plus compétitif seront au centre de nos réflexions dans la seconde partie de notre travail.

PARTIE 2 :
LE DROIT A L'ÉPREUVE DES FAITS : LA SOLUTION DES
GÉNÉRIQUES FACE AUX PROBLÈMES SOULEVÉS PAR
LES MÉDICAMENTS SOUS BREVET ET SES
IMPLICATIONS EN DROIT

Les dépenses de médicaments progressent à un rythme élevé : depuis 1990, elles ont plus que doublé. Les Français sont parmi les plus grands consommateurs mondiaux de médicaments (3 milliards de boîtes consommés par an, soit un peu moins d'une boîte par personne et par semaine)75. Cependant, les patients souffrent d'un accès encore insuffisant à certaines innovations. Chaque année sont mis sur le marché des médicaments apportant des améliorations majeures. Ces produits sont de plus en plus coûteux : la recherche est longue et hasardeuse, les techniques employées de plus en plus sophistiquées, le nombre de patients pouvant bénéficier peut être faible76.

Les médicaments génériques, à la croisée de l'ensemble de ces problématiques, ont suscité beaucoup d'attentes. Le développement du générique en France a longtemps été freiné par le système de régulation du marché et par une réticence des pouvoirs publics en la matière. Mais depuis 1996, ces derniers ont mis en oeuvre des mesures qui ont permis au générique de conquérir des parts de marché significatives. Il existe cependant des incertitudes sur l'avenir de cette politique, qui devrait néanmoins être poursuivie. Le générique contribue en effet à stimuler l'innovation et à maîtriser les dépenses mais il ne constitue qu'un instrument parmi d'autres. Notre analyse dans cette partie portera d'une part sur l'enjeu que constituent les génériques pour le système de santé français et les obstacles qui entravent son développement. Nous finirons notre étude par une confrontation de l'intérêt des patients et celui des laboratoires pharmaceutiques.

Face à une augmentation sans cesse croissante des dépenses pharmaceutiques et le peu d'efficacité des mesures77 adoptées pour y remédier, une solution paraît incontournable : le recours aux génériques.

75 Source : CNAM, Etude GENERICAM les chiffres-clés des médicaments génériques remboursés par le régime général en 2000 et en 2001.

76 Par exemple, le traitement par le Glivec revient à 30 000 par an (pour la leucémie myeloïde chronique) par patient, Kineret utilisé dans la polyarthrite rhumatoïde se situe au même niveau de coût, le traitement par l'Herceptine pour certaines formes de cancer du sein coûte plus de 12 800 ...

77 Il s'agit des mesures prises pour résorber les déficits de l'assurance maladie. Ces mesures ont été principalement comptables (tendant à modifier la rémunération des professionnels de santé si cette activité dépasse un plafond de dépenses de santé défini a priori), ou financières, c'est-à-dire à visée budgétaire. Quant à la politique du médicament, elle a surtout eu recours au prix, au taux de remboursement et de plus en plus au déremboursement.

précédent sommaire suivant






Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy








"Le don sans la technique n'est qu'une maladie"