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Liberté de la presse et droits fondamentaux en France et en Ecosse: influence de la CEDH

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par Abderrahman BENYAHYA
Université d'Auvergne Clermont I - DU Etudes Juridiques et Politiques Comparées 2007
  

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Titre II: L'assouplissement de la protection du droit à un procès équitable

En dehors de l'impartialité de la justice mentionnée à l'article 10(2), et qui est la protection d'un intérêt public, la liberté de la presse peut aussi être en confrontation au cours d'affaires judiciaires avec le droit individuel au procès équitable reconnu à l'article 6(1) qui dispose que « l'accès de la salle d'audience peut être interdit à la presse et au public pendant la totalité ou une partie du procès » en mentionnant comme fondement de cette restriction « la protection de la vie privée des parties au procès». En outre, l'article 6(2) qui énonce que « toute personne accusée d'une infraction est présumée innocente jusqu'à ce que sa culpabilité ait été légalement établie. », est aussi parmi les « autres droits d'autrui » qui pourrait justifier les mesures de limitation de la liberté de la presse. La France aussi bien que l'Ecosse dispose de législations très protectrice de la présomption d'innocence (section 1) qui ont été remises en cause par la Cour Européenne au nom d'une protection élevée de la liberté de la presse lorsqu'est en jeu un débat public d'intérêt général où la presse se doit de jouer un rôle de «chien de garde » (section 2).

Section 1: Deux législations nationales très protectrices de la présomption d'innocence

Le système français met l'accent sur la protection de l'intérêt individuel avec des dispositions issus du droit civil (paragraphe 1) contrairement au royaume-uni où le Contempt of Court trouve ses racines dans une notion très anglo-saxonne de l'autorité et de l'impartialité de la justice (paragraphe 2)

Paragraphe 1: le système français de protection de la présomption d'innocence.

La présomption d'innocence est un fondement essentiel du droit individuel à un procès équitable. Elle est aussi bien garantie par l'article 9 de la DDHC « Tout homme étant présumé innocent jusqu'à ce qu'il ait été déclaré coupable »que par l'article 9-1 du code civil « Chacun a droit au respect de la présomption d'innocence ». La Cour de cassation définit l'atteinte à ce principe comme consistant « à présenter publiquement comme coupable, avant condamnation, une personne poursuivie pénalement »281(*). Ainsi la liberté de la presse peut porter une atteinte à ce droit fondamental lorsque les publications doivent rendre compte du suivi d'affaires criminelles. Ainsi, l' « affaire d'Outreau » qui a été rendu célèbre pour les erreurs judiciaires dues aux dysfonctionnements certains de la justice282(*) , il ne faut pas l'oublier, n'aurait pas atteint un tel niveau sans l'influence considérable de la presse.283(*) En effet dans cette affaire, les médias ne se sont pas contentés de rapporter le déroulement du procès mais, la majorité écrasante a condamné sans appel comme coupable de pédophilie ceux qui seront plus tard présentés comme victimes de la faillite judiciaire284(*). Les dommages traumatiques et l'atteinte à l'honneur provoqués par de tels propos obligent à s'interroger sur les limites entre droit à l'information et protection de la présomption d'innocence. La loi du 15 Juin 2000285(*) dite Guigou avait modifié la loi de 1881 et l'article 9-1 du Code civil pour renforcer la répression des atteintes par voie de presse aux droits de la défense. Ainsi, lorsqu'une personne est présentée publiquement comme coupable avant toute condamnation, le juge peut, faire cesser l'atteinte à la présomption d'innocence par des mesures telle que la diffusion d'un communiqué au frais du responsable.286(*) En outre, toute diffusion de l'image d'un prévenu portant des menottes ou entraves ou placé en détention provisoire sans accord préalable est prohibée287(*). De même, la publication ou le commentaire d'une consultation portant sur la culpabilité d'un accusé sont punis288(*). La législation vise aussi à interdire la reproduction des actes d'accusation et de procédure criminelle ou correctionnelle avant lecture publique289(*). Enfin, le code de procédure pénal prévoit que le tribunal puisse ordonner que le procès se déroule en huis clos290(*).

Dans ce domaine, la cour de cassation exige des écrits incriminés plus que de simples imputations sous forme dubitatives: il faut en effet que les allégations puissent être regardées comme « comportant des conclusions définitives tenant pour acquise la culpabilité » de l'accusé.291(*) En outre, lorsque les articles incriminés relatent objectivement les débats judiciaires (sans préjudice de l'article39), « sans appréciation personnelle du journaliste sur la personnalité des accusés », ils bénéficient de l'immunité du compte rendu judiciaire prévue par l'article 41 de la loi de 1881.292(*) En effet pour porter atteinte à la présomption d'innocence, il faut par exemple que les écrits litigieux contiennent uniquement « des témoignages à charge et qu'ils présentent la culpabilité de la personne comme certaine ».293(*)

Lors d'affaires judiciaires, la législation met aussi l'accent sur la protection des victimes et plus particulièrement celles des enfants. Ainsi, la reproduction des circonstances d'un crime ou délit sans l'accord de la victime est interdite si elle porte « gravement atteinte à sa dignité »294(*) , la diffusion de l'identité d'une victime d'une agression ou d'une atteinte sexuelles ou l'image de cette victime sauf accord écrit295(*). Il est aussi fait mention de l'interdiction de rendre compte de l'audience (prise d'image etc.) et de certain procès dans leur ensemble dans le but de protéger la vie privée des parties (ne s'applique pas aux dispositions). Le pouvoir pour les cours dans les affaires civiles d'interdire le compte-rendu du procès est par ailleurs consacré. 296(*)

* 281 Cass. Civ1, 6 Mars 1996, n° de pourvoi : 93-20478

* 282 A ce titre la réforme législative relative au recrutement, à la formation et à la responsabilité des magistrats votée dans ce contexte a été partiellement censurée par Décision n° 2007-551 DC - 1er Mars 2007 du Conseil Constitutionnel

* 283 Acrimed, par T. Cara « Affaire d'Outreau » : Après le « délire » médiatique, l'amnésie collective, mercredi 14 Décembre 2005 < http://www.acrimed.org/article2221.html> Voir aussi `La part de responsabilité des journalistes`, par Jean-Yves Monfort paru dans Le Monde du 7 Février 20006

* 284 G. Balbastre, `Délation, compassion, mépris social : les faits divers, ou le tribunal implacable des médias` dans Le Monde Diplomatique de Décembre 2004 < http://www.monde-diplomatique.fr/2004/12/BALBASTRE/11719>

* 285 Loi No 2000-516 du 15 Juin 2000 renforçant la protection de la présomption d'innocence et les droits des victimes

* 286 Article 9-1 du Code Civil

* 287 Article 35 ter I de la loi de 1881

* 288 Ibid. Art 35 quater

* 289 Ibid. Art 38

* 290 Art. 400 du Code de Procédure Pénal

* 291 Cass. Civ1, 21 Février 2006

* 292 Cass. Civ2, 8/03/2001, N° de pourvoi : 99-14995

* 293 Cass Civ2, 20/06/2002, N° de pourvoi : 00-11916

* 294 Article 38 Ter, loi de 1881

* 295 Ibid. Art 39quinquies

* 296 Ibid. Art 39

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"Ceux qui vivent sont ceux qui luttent"   Victor Hugo