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Le marché des télécommunications au Sénégal: analyse économique

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par Djiby Mbodj GAYE
Université Gaston Berger de Saint LOIUS( SENEGAL) - Maitrise 2005
  

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Paragraphe II / La nécessité d'une autorité sectorielle

On libéralise en partant d'une situation largement ou totalement dominée par l'opérateur historique qui est encore public, car l'ordre logique veut que l'on crée les règles de marché et que l'on organise la nouvelle structure industrielle avant la privatisation. La création d'une agence dissociée de l'administration de tutelle (dont l'idée a été reprise du modèle américain du monopole réglementé) est d'abord là pour garantir l'indépendance du contrôle de l'Etat sur le nouveau marché quand il est lui-même encore propriétaire de l'opérateur historique. Elle permet ensuite de dissocier la réglementation économique de la régulation politique du secteur, garante de l'intérêt collectif (politique redistributive, protection de l'environnement) et de l'intérêt national en termes d'indépendance et de stratégie industrielle.

Au plan de la réglementation économique, l'autorité va avoir pour première fonction de garantir l'équité concurrentielle dans l'accès à

l' «  infrastructure essentielle » et au marché aval afin d'attirer les entrées et de rendre la concurrence effective.

Les missions de l'autorité sectorielle couvrent d'autres objectifs que la promotion de la concurrence et le contrôle de son exercice. Elle assure aussi la réglementation des activités qui demeurent en monopole de par leur nature (condition d'accès au réseau et aux interconnexions) ou pour des raisons légales (communications sur la boucle locale, vente de kWh aux ménages). Elle assure la mise en oeuvre et contrôle le respect des obligations des services publics imposés aux opérateurs en concurrence. La réglementation économique, pour répondre à ses fonctions, doit respecter un certain nombre de principes.

L'indépendance vis-à-vis du pouvoir politique

L'environnement institutionnel joue un rôle important dans la crédibilité de la fonction réglementaire. Comparant différents pays, Lévy et Spiller (1996)16(*) mettent en évidence l'importance des « dotations institutionnelles » d'un pays dans la détermination du degré d'engagement réglementaire. Le régulateur doit a minima agir indépendamment du pouvoir politique pour éviter les choix discrétionnaires imposés par le gouvernement. Mais il doit lui-même rendre compte de ses décisions, d'une part en les justifiant, d'autre part en sachant qu'il est soumis à la menace de recours devant une juridiction. Ces auteurs soulignent donc le principe selon lequel pouvoir politique ne doit pas avoir la possibilité de changer les règles du jeu arbitrairement. Son respect est conditionné par la façon dont les institutions parlementaires sont élues et fonctionnent, ainsi que par le degré d'indépendance du judiciaire.

En éloignant la fonction réglementaire du pouvoir politique, la présence de l'agence est supposée réduire le risque discrétionnaire. Le pouvoir politique et ses décisions sont soumis aux aléas du jeu électoral. Il peut imposer de façon discrétionnaire de nouveaux objectifs publics (accroissement des objectifs redistributifs, préservation de l'environnement, etc.) ou des mesures de protection des industriels nationaux. Il est plus exposé au risque de capture par les intérêts les mieux organisés que l'autorité spécialisée.

Il est donc important que les règles de financement de l'autorité (financement fixe assuré par une taxe sur les revenus du secteur), les procédures de nomination des commissaires par plusieurs instances, les conditions de stabilité de leur mandat (irrévocabilité) garantissent l'indépendance vis-à-vis de l'administration ministérielle et du pouvoir politique.

L'indépendance vis-à-vis des entreprises régulées

En supposant le pouvoir politique bienveillant, mais en asymétrie d'information par rapport aux propres informations du régulateur sur les variables pertinentes, le premier peut choisir des mesures non optimales au regard de ce qu'il aurait considéré comme souhaitable s'il avait le même type d'informations. Le régulateur peut en effet fausser les informations s'il est sous influence des entreprises régulées. Ces dernières ont d'ailleurs fait de leur activité d'influence sur les régulateurs chargés de définir et de faire évoluer les règles une priorité stratégique. Un régulateur chargé de promouvoir l'entrée de concurrents pourra ainsi céder aux groupes de pression, l'opérateur historique ou l'oligopole en place, pour rendre cette décision plus difficile.

Le régulateur sectoriel court plus de risques de capture par les entreprises que les autorités de la concurrence en raison de l'origine professionnelle des membres de l'agence que l'on est tenté d'aller chercher au départ dans les entreprises régulées ou les administrations de tutelle, pour bénéficier de leur expertise et du contact permanent avec les entreprises du secteur qu'elles régulent.

Pour limiter ce risque, les résultats théoriques invitent à doubler les agences en charge de la régulation d'un secteur. Ceci rendrait moins efficace la stratégie d'influence des groupes de pression pour lesquels les sommes investies connaîtraient un bien moindre retour. Concrètement, dans des champs complémentaires, comme l'électricité et le gaz, ou les télécommunications et l'audiovisuel, une façon de procéder pourrait être d'avoir une autorité par champ. Mais l'ensemble entraîne un mode de contrôle plus coûteux et plus lent. Par contre, le chevauchement relatif de compétences avec les autorités de la concurrence pourrait répondre en partie à cette objection.

Les règles de composition et de fonctionnement de l'agence affaiblissent également les tentations de collusion. La nomination de membres en provenance des entreprises peut être interdite et le pouvoir de nomination dispersé entre plusieurs instances pour assurer une diversité de cultures . De même, des règles d'éthique en matière d'embauche des membres des autorités de régulation par les entreprises régulées après leur départ peuvent être décidées. Cependant, la tentation de collusion peut être forte si un régulateur a un éventail réduit d'opportunité de réemploi après son départ.

Dépérissement de la régulation sectorielle

On justifie traditionnellement la présence d'un régulateur sectoriel par la nécessité d'organisation de la concurrence et de ses règles dans un secteur structuré auparavant en monopole et dans lequel l'opérateur historique reste en place. Mais son utilité ne serait que temporaire .Après la maturation des règles de marché et la découverte par tâtonnement de la bonne organisation industrielle, l'autorité sectorielle perdrait sa raison d'être. Les questions d'accès au réseau peuvent être englobées dans la supervision de la concurrence par l'autorité antitrust en se référant à quelques principes transparents et à la jurisprudence. Dans les secteurs où on peut se concurrencer par les infrastructures, on peut imaginer que la menace d'entrée par la mise en place d'une nouvelle infrastructure est suffisante pour discipliner le détenteur de l'infrastructure en place.

On peut rendre automatiques les ajustements des tarifs d'accès réseau s'ils sont règlementés. Les obligations de service public peuvent être remplacées par des modes de traitement marchand ou par un mode de financement direct par le budget de l'Etat qui est le mode optimal au regard de la théorie. Par exemple, pour une région défavorisée dans l'accès aux services de réseau, ce serait à l'Etat de soutenir directement cette région sans fausser le jeu concurrentiel, en modifiant par exemple le prix d'accès au réseau par une taxe pour financer la péréquation17(*). Mais on peut observer qu'à l'ouverture complète à la concurrence dans les télécommunications (accès à la bouche locale) ou dans les secteurs électriques et gaziers n'a pas encore succédé une dimension des missions des autorités sectorielles. En se référant aux enseignements de l'économie publique positive, il est possible que les autorités sectorielles cherchent à défendre leur budget et leur fonctions et pour cela entretiennent dans le futur leur justification en se servant de leurs fonctions distributives ou de la complexité des enjeux. Mais les problèmes relevant d'échec de marché sont de nature et d'ampleurs assez différentes selon les industries et sont loin de pouvoir tous être résolus de la même façon. Il est probable que d'importants segments d'activités de certaines industries de réseau vont continuer à demander des régulations spécifiques. La complexité des transactions et du fonctionnement des marchés électriques et gaziers, par exemple, est telle qu'il parait difficile d'imaginer un effacement de l'autorité sectorielle dans le futur. On peut

aussi douter que les obligations de service public se contractent aisément car il faudra maintenir l'acceptabilité des réformes de libéralisation.

* 16 Levy B. et Spiller P.T.(1996), Regulations, Institutions and Commitment : Comparative Studies of Telecommunications, Cambridge, Cambridge University Press.

* 17 C'est la répartition équitable des ressources ou des charges entre ceux qui doivent les consommer ou les supporter.

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"La première panacée d'une nation mal gouvernée est l'inflation monétaire, la seconde, c'est la guerre. Tous deux apportent une prospérité temporaire, tous deux apportent une ruine permanente. Mais tous deux sont le refuge des opportunistes politiques et économiques"   Hemingway