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La mutation du droit du mariage dans la vallée du fleuve Matitanana: du droit coutumier au droit d'inspiration musulmane

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par Francis Zafindrandremitambahoaka MARSON
Université de Perpignan - Diplome d'étude approfondie 2003
  

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SECTION 2 : LES EMPECHEMENTS ET LE RITUEL DU MARIAGE

§1 : LES EMPECHEMENTS AU MARIAGE

Dans le royaume Antemoro existent plusieurs clans où des règles bien établies régissent le mariage. En l'occurrence, l'union de deux individus peut faire l'objet d'empêchements. Certains résultent de liens de parenté ou d'alliance, d'autres sont d'ordre social.

A- Les empêchements résultant des liens de parenté ou d'alliance

« Les empêchements à mariage résultant de certains liens de parenté ou d'alliance ne sont, à Madagascar, qu'un aspect d'un problème plus vaste, celui du fady, ou interdits» disait MESSELIERE118.

1- Les règles

Ces règles sont contenues dans les manuscrits JENSENIUS, pages 11, 22 et suivant traduits par MUNTHE119.

Reproduisons la traduction de quelques passages du manuscrit.

L'intitulé de la partie que nous intéresse est le suivant :« Déclaration sur les personnes admises à se marier entre elles. »

En voici les règles :

-Les arrières-petits-fils et petites filles (de la troisième génération) peuvent se marier entre eux à condition qu'ils soient descendants d'un frère et d'une soeur.

-Les arrières-petits-fils et petites filles, enfants de deux frères, ne peuvent se marier entre eux.

118 MES SELIERE, Du mariage en Droit Malgache, 1932, p.45.

119 MUNTHE, La tradition Arabico-Malgache vue à travers le manuscrit A-6 d'Oslo, p.253.

-La femme du père peut être héritée (par un membre de la famille).

-La femme d'un frère peut (en cas de décès du frère) passer à un autre

frère.

-Il est formellement interdit à un gendre de proposer à la femme de son beau-père de coucher avec elle.

-Le beau-père ne le propose pas à la femme de son gendre.

-Un gendre ne doit pas coucher avec sa belle-mère.

-La femme répudiée par un frère qui a épousé une autre femme peut être demandée par un autre frère.

-Si quelqu'un cherche à coucher avec la femme de son beau-père, il sera condamné à offrir un grand boeuf découpé, à son beau-père.

-Si quelqu'un propose à la femme de son gendre (de coucher avec elle), il lui faut, comme punition, offrir un grand boeuf à son gendre.

-Si quelqu'un cherche à coucher avec la femme de son oncle, il sera puni de « fafy », don d'un grand boeuf.

-Si quelqu'un propose à sa cousine (de coucher avec elle), comme punition, il doit payer deux boeufs... »

Tels sont quelques règles qui n'ont pas manqué de susciter quelques commentaires du traducteur.

2- Explication

MUNTHE avançait les propos suivants :

« -Les tabous et les règles qu'on trouve empêchant le mariage entre personne liée en ligne directe et proche s'harmonisent - et les Antaimoro s'en rendent compte- avec les lois du DE UTER.2 7, 20 et suivant. »120

Il rajoute que « l'union sexuelle des frères et soeurs, entre zanany d'un couple, est impossible et rigoureusement défendue chez les Antaimoro. »121

120 MUNTHE, La tradition Arabico-Malgache vue à travers le manuscrit A-6 d'Oslo, p.258.

121 MUNTHE, idem.

Ce passage soutien notre attention dans la mesure où d'autre auteur affirme le contraire en disant que « chez les Antambahoaka et chez les Antaimorona, les mariages entre frères et soeurs germains, c'est-à-dire de même père et de même mère, sont fréquents. Il est de tradition populaire dans ces populations que ces unions conduisent à la fortune » 122 disait FERRAND. Mais MUNTHE, en donnant cette explication, se base sur des textes écrits. Nous espérons que notre petite remarque sur ce point pourra éviter la reproduction de pareille confusion.

Le traducteur continue son explication en disant que :

-Les Antaimoro « n'acceptent pas non plus le mariage de la deuxième génération entre les petits enfants d'un couple, appelés ny zafy. Ceux qui se marient contre la volonté des ancêtres sont considérés « mpanota-fady (violateur d'un tabou) et condamnés à payer au moins trois boeufs. »123

- « Quant à la troisième génération, ny zafiafy (les arrière-petits-fils et petites filles) le mariage est toléré, mais exige toujours l'offre d'un ou deux boeufs et aussi l'accord des deux familles concernées. »

Les enfants de la quatrième génération appelés ny zafindohalika sont admis à se marier entre eux à condition qu'ils fournissent ny fafimpanambadiana (l'offre consolatrice) pour les deux familles. »

Les enfants de la cinquième génération appelés zafim-paladia peuvent se marier entre eux. Le fafim-panambadiana n'est pas exigé car il ne reste plus beaucoup de relations familiales entre eux. »

La sixième génération qui s'appelle kitro (petit orteil du pied) peut se marier librement entre elle. » 124

MUNTHE fait remarquer l'amusante et démonstrative manière de classer les générations en leur donnant les noms des membres du corps humain en descendant du genou aux pieds jusqu'à ce qu'il ne reste plus rien de sang commun.

122 FERRAND, Les Musulmans à Madagascar, 1893, fascicule II, p.20. Propos reporté par MES SELIERE, Du mariage en Droit malgache, 1932, p.50

123 MUNTHE, La tradition Arabico-Malgache vue à travers le manuscrit A-6 d'Oslo, p.258.

124 MUNTHE, La tradition Arabico-Malgache vue à travers le manuscrit A-6 d'Oslo, p.258.

Bref, sont considérés comme fady le mariage en ligne directe, entre ascendants et descendants et alliés dans la même lignée. Il en est de même pour le mariage en ligne collatérale entre frères et soeurs, entre oncle et nièce, entre tante et neveu, entre enfants issus de deux soeurs au premier et second degré.

Telles sont donc les règles qu'il faut observer par les futurs époux et que le loholona est censé savoir avant qu'il célèbre le mariage. La présence des futurs époux dans l'un des cas cités plus haut constitue un obstacle, parfois insurmontable au mariage, si le degré de parenté est trop proche. Le loholoma ne peut pas le célébrer. Qu'en est-il de l'empêchement d'ordre social ?

B- Les empêchements résultants du régime de castes, ce sont les empêchements d'ordre social.

Des fady ou interdits assurent l'ordre social Antemoro -qui ne se marie pas avec n'importe qui. Les Antemoro se marient entre Antemoro. L'endogamie existe. « Il n'y a pas à Madagascar d'autres peuplades où les mésalliances soient si sévèrement prohibées, où l'on s'efforce de maintenir aussi intacte la division des tribus et des castes et de les préserver de tout mélange et de toute contamination : très peu de femmes violent la loi. » 125

« Il existe cependant une certaine exogamie chez les Antaimorona, disait JULIEN, l'usage est en effet d'aller chercher d'alliance non dans les familles d'un même kibory, mais dans celle d'un kibory étranger. Agir autrement serait mal vu de tous et réprimé à l'égal de l'inceste. » 126

Comment est divisée la société Antemoro ? Telle est la question que nous posons.

125 SHAW, The arab element in South Madagascar (in Antananarivo annmal, 1894,p.208-209)

126 JULIEN, Histoire de Tatsimo

1- Les castes Antemoro

Le premier zélateur de l'islam en l'occurrence Ramakararube est arrivé dans la région de la Matatana en l'an 542 de l'ère mohamétane.127 Il n'est pas venu seul. Ramalitavaratra l'astronome et Ranaha, son ministre, l'a accompagné avec des cafres qu'ils ont amenés. Des autochtones vivaient déjà dans la région à l'époque. Ramakararobe a engendré Ramaroala qui a constitué le caste Anteony.

Ramalitavaratra et Ranaha, les compagnons de Ramakararobe ont constitué le caste Antalaotra.

Les cafres qu'ils ont amenés sont les Ampanabaka.

Les autochtones sont essentiellement les Onjatsy.

Sans entrer dans les détails, précisons que les castes nobles sont les Anteony et les Antalaotra. Les roturiers sont les Onjatsy avant les Ampanabaka et les autochtones. Puis des Andevo ou Velombazaha (des Kafirs) amenés par les immigrants arabes constituent un autre caste. « Tout au bas de l'échelle sociale Temoro se trouvent les Antevolo, véritable « intouchables », que rien dans leur aspect ne distingue des autres Temoro. »128

Telle a été la division des castes dans le Royaume Antemoro.

Quelle est la loi du Royaume en matière de mariage ? 3- La loi du mariage

Il n'y a pas à proprement parler de loi unique en matière de mariage pour toutes les castes. Chacun définit ses propres lois. Ces lois peuvent varier à leur tour selon les sous-clans. Chez les Anakara, sous-clan noble

127 JULIEN, Pages Arabico-Madecasse, Paris, 1929, p.1 0.

128 DESCHAMPS, Les Malgaches du Sud-Est, 1959, p.48.

Antalaotra, « le mariage est endogame par rapport au clan, exogame entre lignée et quartiers.» 129

Mais pour les Antalaotra en général, « La cohésion du clan est particulièrement solide : l'endogamie est, de nos jours encore, extrêmement stricte parmi eux. » 130. Ce qui leur a permis de perpétrer l'usage de la langue arabe, disait DESCHAMPS.

Par contre, « l'usage de l'arabe se perdit plus vite chez les Anteony, poussés par les exigences de la royauté à une exogamie masculine, donc à l'adoption rapide de la langue locale » 131.

Les Onjatsy sont plutôt endogames. Pour montrer cette endogamie, DESCHAMPS rappelle que la mère de Ramarohala, le grand ancêtre Anteony, était Onjatsy.

4- Les sanctions.

« Une femme Anteony ou Antalaotra ayant couché avec un homme d'une autre tribu ou avec un esclave, sera condamné à mort par noyade. De gros blocs de pierres devront être attachés au milieu de son corps et elle devra être jetée dans l'eau pour périr. » 132 L'exogamie de classe est strictement interdite.

Un homme Ampanabaka ne peut pas donc épouser une fille noble Antoeny, elle sera « considérée comme n'ayant pas existé » 133 c'est-à-dire rejeté du clan.

129 FAUBLEE, Notes sur quelques points de droit coutumier du Sud de Madagascar, in POIRIER, Etudes de Droit Africain et de Droit Malgache, p.37.

130 DESCHAMPS, Les Malgaches du Sud-Est, 1959, p.43.

131 DESCHAMPS, Les Malgaches du Sud-Est, 1959, p.41.

132MUNTHE, La tradition Arabico-Malgache vue à travers le manuscrit A-6 d'Oslo, p.257 133 ROUHETTE, L 'organistion politique et sociale du Royaume Antemoro, p.11 3.

On se rend compte que l'exogamie, pour la femme noble qui épouse un homme de même catégorie sociale que la sienne, n'échappe pas à des sanctions, même si elles sont allégées. La condamnation à mort est plus sévère que le rejet. Et la fille rejetée sera exclue du kibory ou tombeau familial. Quand il y a une réjouissance dans sa famille d'origine, « elle participe aux servitudes mais est exclue pour chaque part d'honneur. »134

Bref, l'endogamie de classe est chère aux Antemoro.

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"Enrichissons-nous de nos différences mutuelles "   Paul Valery