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La mutation du droit du mariage dans la vallée du fleuve Matitanana: du droit coutumier au droit d'inspiration musulmane

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par Francis Zafindrandremitambahoaka MARSON
Université de Perpignan - Diplome d'étude approfondie 2003
  

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B- Le pourparler proprement dit

Le pourparler a un double objectif : d'abord la réintégration du ravisseur dans sa famille d'origine, ensuite sa réconciliation avec la famille de la fille pour éviter la vengeance.

Une remarque s'impose. Nous avons choisi d'aborder cette approche pour pouvoir démontrer l'évolution du pourparler dans la période même que nous étudions. Cette évolution résulte des actions du prince Ali qui s'est fait d'abord rejeter par ses parents musulmans, et qui, ensuite, a pu réintégrer sa famille après atténuation des règles du droit musulman en matière de mariage.

Nous sommes dans la période de la constitution du Royaume Antemoro. Les premiers sultanats musulmans ne pouvaient pas encore appliquer à la lettre la loi islamique. La réintégration du prince Ali dans sa

famille ne dépendait pas de son père, qui ne pouvait pas décevoir son allié dont la femme a été enlevée.

Pour mieux comprendre, nous allons reproduire le passage du manuscrit, commenté par JULIEN, relatif à ce sujet : « L'abord de Ramakararube est cordial, les questions qu'il pose précises et nettes. Son fils Ali, a encouru son ressentiment pour avoir suborné la femme de son parent (...)

-Comment en pareil cas se règlent les violations de la loi matrimoniale ? demandent les deux négociateurs.

-Notre loi, sur ce point, répond Ramakararu, est très sévère, mais je n'oublie pas que nous sommes ici des étrangers et qu'elle doit nécessairement s'adapter aux circonstances.

-Enoncez-nous donc la stipulation de cette loi afin d'y satisfaire autant que possible. Et Ramakararube, parle d'abord d'une correction : cent coups de verge. Mais (les deux négociateurs) n'entendent point de cette oreille. Ils veulent bien payer une amende, mais point que des coups soient distribués »

40

Ramakararube estimant équitable cette manière 41 de dédommager l'Andriambuadziribe se décide à le convoquer. »

Nous remarquons qu'il y a lieu d'abord de satisfaire le côté lésé par l'enlèvement, c'est-à-dire celui d'où vient la femme enlevée, avant de s'occuper du sort du ravisseur.

40 JULIEN, Pages Arabico-madécasses, Paris 1929, p.93

41 Nous verrons dans le paragraphe suivant les propositions des négociateurs

JULIEN poursuit la traduction et annonce qu' « il dépêche auprès de lui des messagers (...) »

Quelques explications préalables sont échangées sur le but de la visite, après quoi, les habitants de la Manampatra 42 sont réunis en grand conseil. »

Ramakararobe assiste d'après le manuscrit à la grande réunion.

« Puis il ne s'indigne pas que son fils Ali se soit si mal comporté à son égard. S'il l'a convoqué, lui, l'outragé, c'est afin qu'on s'entende à l'amiable sur les détails d'une nouvelle loi à établir sur le mariage, loi qui sera moins rigide que celle des Musulmans, car la loi islamique est bien stricte pour le pays de Matatana. »43

JULIEN poursuit son commentaire. « Pressé de faire connaître les prescriptions de sa règle à lui, l'Andriambuadziribe énonce une sorte de loi du talion (...) »

Après avoir insisté une fois encore sur la rigueur des règles matrimoniales musulmanes, comprenant sans doute qu'user de conciliation serait pour lui moins dommageable, l'Andriambuadziribe, ayant réfléchi quelques instants, ajoute :

- Vous êtes, vous autres, les maîtres de ce pays ; nous sommes, nous, que des étrangers. Nous ne saurions vous imposer notre loi. Voyez donc vous- mêmes et faites pour le mieux. »44

JULIEN poursuit son commentaire en disant qu' « il apparaît dès lors que la cause d'Ali est gagnée. Non seulement les tribus qui l'ont élu roi verseront une amende atténuée, mais elles auront imposé à l'Andriambuadziribe, sa victime, une sorte de reconnaissance de vassalité. »

42 Manampatra, une région dans le pays de la Matatana.

43 JULIEN, Pages Arabico-madecasses, Paris 1929, p.94

Nous comprenons à travers ces lignes pourquoi le mariage par rapt se pratiquait encore récemment. Le prince « rebelle » qui pratiquait la coutume autochtone en faisant le rapt est devenu roi de plusieurs tribus. Il a réussi à atténuer l'application de la loi islamique dans la religion, au bénéfice du droit coutumier du mariage pendant l'époque de la constitution du Royaume Antemoro.

Bref, voilà ce que l'on peut dire sur le rapt et le pourparler. Dans les lignes qui vont suivre, nous allons essayer de décrire le mécanisme du fonctionnement de la société autochtone.

Le système est basé sur l'idée de communauté d'une part, et sur la croyance en la continuité de la vie terrestre avec l'au-delà de l'autre.

C'est pourquoi, le mariage par rapt ou mariage par enlèvement concerté rompt l'équilibre social et l'équilibre cosmologique dans la croyance traditionnelle.

A partir de l'idée que le droit est un système de contrôle social établi dans le but de maintenir un ordre dans une société, l'ordre dans la société autochtone est réalisé par le respect de ces deux équilibres qu'on a cité plus haut. Le rapt rompt ces équilibres. Le mariage est consommé dès lors qu'ils sont de nouveau rétablis.

44 JULIEN, Idem.

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"Le doute est le commencement de la sagesse"   Aristote