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La protection du tiers contractant en cas de prête-nom en droit rwandais

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par François Xavier HABAKURAMA
Université Nationale du Rwanda - Licence en droit 2008
  

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C. Protection d'un tiers par l'imprescriptibilité de l'action en déclaration de simulation

Le fait que le droit de faire déclarer un acte simulé est imprescriptible en lui-même98(*), protège les tiers dans le sens que ceux-ci peuvent saisir la juridiction toute les fois qu'ils découvrent la fraude faite dans leurs droits.

Cependant, la déclaration de simulation n'est qu'un moyen en vue d'obtenir une modification au profit du demandeur de la situation de fait existant. Son action vers ce but peut être paralysée soit par la prescription extinctive. Si par exemple pour obtenir gai de cause, il faut faire prononcer la nullité de l'acte secret, cette action en nullité étant prescriptible par 10 ans, la simulation établie n'empêche pas le demandeur de succomber99(*). Même le droit rwandais a capté écho à la législation française dans son article 196 CCLIII100(*).

En outre, l'action tendant à faire connaître le caractère fictif d'un acte ostensible et à démontrer qu'une lettre de l'une des parties reflétant la volonté réelle de ces dernières, étant une action de simulation, elle est soumise à la prescription trentenaire. Cette prescription commence à être comptée dès l'accomplissement de l'acte allégué de simulation et non dès la prescription décennale qui concerne que les actions en nullité relative101(*). Le législateur rwandais y a réagi dans l'article 647 CCLIII en disposant que toutes les actions, tant réelles que personnelles, sont prescrites par trente ans sans que celui qui allègue cette prescription soit obligé d'en rapporter un titre, ou qu'on puisse lui opposer l'exception déduite de la mauvaise foi.

§2. Sanction du prête-nom présentant un caractère frauduleux

Sous ce paragraphe, il nous est évident de préciser que lorsque les parties tiennent l'intention de nuire au fisc, elles subissent la sanction fiscale. Ainsi la sanction civile est imputée aux parties lorsqu'elles avaient l'intention de nuire aux droits des tiers.

A. Sanction fiscale

Avant tout, il faut signaler que la législation rwandaise ne reste muette quant à la réaction à la fraude fiscale. C'est ainsi que le contribuable qui se rend coupable de fraude fiscale est passible d'une amende administrative égale à deux cent pourcent (200%) de l'impôt éludé102(*).

En outre, l'administration fiscale défère le cas au procureur si la fraude fiscale a été faite intentionnellement par le contribuable par usage notamment d'une comptabilité falsifiée, usage de faux et faux en écriture ou de tout autre fait puni par la loi. En cas de condamnation, le contribuable est passible d'une peine de 6 mois à deux ans d'emprisonnement103(*).

Comme le fait constater F.TERRE, en cas de fraude fiscale, il est dû une amende du double des droits, impôts ou taxes réellement exigibles et cette amende est due solidairement par toutes les parties à l'acte104(*).

A notre sens, ici le mandant et le prête-nom serait, solidairement tenus aux amendes fiscales, s'il s'avère remarquable que la convention de prête-nom visait la diminution ou présentait le caractère élusif des impôts.

Nous ne saurions manquer de citer l'énoncé du code général des impôts en France, stipulant qu'en cas d'utilisation d'un prête-nom, de falsification d'identité ou d'adresse, une amende égale à 50% des sommes reçues ou versées est prévue par le code précité105(*).

Signalons que la convention de prête-nom peut avoir lieu avec la fraude fiscale lorsque la simulation ne porte pas sur la convention elle-même mais sur l'une des parties à cette convention. Par exemple, une personne A a l'intention de constituer une société avec B et de lui apporter une somme de 5.000.000 frws en espèce. Cette somme provient toutefois de revenu que A n'a pas déclarés au préalable et il craint, s'il intervient à l'acte constitutif et que le fisc s'aperçoit qu'il dispose de cette somme, qu'elle lui en demande la provenance.

Pour éviter de devoir répondre à cette question embarrassante, A remet la somme de 5.000.000 frws à C, qui est domicilié à l'étranger et estime être à l'abri des questions relatives à l'origine de la somme, et c'est celui qui participe à l'acte comme fondateur, sans préciser qu'il agit pour le compte de A ni même d'un tiers en général.

Alors C fait donc croire qu'il est fondateur de la société, qu'il a souscrit à son capital et s'est vu remettre des actions, alors qu'en réalité il n'avait pas la moindre intention dans cette société, et a d'ailleurs immédiatement remis les actions à A, juste après la passation de l'acte.

De surcroît, il y a dans ce cas simulation quant à l'identité d'une partie à l'acte. S'il peut la prouver, le fisc est en droit d'agir en fonction de la situation réelle, c'est-à-dire considérer que l'apport a été effectué par A et de lui demander la provenance des fonds106(*).

B. Sanction civile

Lorsque la convention de prête -nom présente le but de nuire aux intérêts des tiers, l'acte est entaché de nullité. Alors il nous est alors évident de voir la portée de cette nullité.

En vertu de l'art.1099 al.2 du Code civil français, toute donation entre époux si elle est déguisée ou faite à personne interposée sera nulle. Cette solution vise notamment les donations déguisées à l'aide d'un contrat de mariage. A vrai dire, c'est la simulation qui est sanctionnée en elle-même, puisque les donations entre les époux ne sont pas nulles en principe107(*). L'art.911 al.1 du Code civil français parle également de la nullité, des libéralités (au profit d'un incapable) déguisées sous la forme d'un contrat onéreux ou par personne interposée au profit d'un incapable108(*).

Nous pensons que le même cas peut être apparu au Rwanda, malgré l'absence d'une disposition légale à l'appui. Pour résoudre un tel cas, le juge rwandais se réfèrerait à la doctrine étrangère. C'est ainsi que dans une affaire, le T.P.I. de NYAMIRAMBO a rendu nulle la convention de donation déguisée en vente faite par personne interposée dont le bénéficiaire était une concubine109(*).

L'on est pourtant demandé si la nullité comme sanction civile consistant dans l'anéantissement judiciaire et rétroactif des actes juridiques irrégulièrement formés110(*), n'atteignait que la contre-lettre. C'est-à-dire pratiquement l'obligation pour l'acheteur de payer la fraction du prix qui ne figure pas dans l'acte apparent ou si au contraire l'opération devait être anéantie dans son ensemble en raison de l'indivisibilité existant entre l'acte ostensible et l'acte secret111(*).

L'anéantissement de l'ensemble est plus satisfaisant pour l'esprit du législateur car il correspond, par hypothèse, à la volonté des parties112(*).

DE PAGE précise qu'en droit belge, l'acte est nul s'il est fait par personne interposée113(*). Et à notre avis cet acte est nul lorsque revêt la forme de fraude. C'est d'ailleurs le droit commun. L'acte fait par interposition des personnes est un acte simulé et si l'acte est prohibé directement, la simulation s'inspire d'une fraude à la loi. La preuve de l'interposition sera donc à la charge du demandeur en nullité. Cette preuve pourra, toutefois, être faite par toute voie de droit puisqu'il s'agit d'une fraude114(*).

Outre l'action en déclaration de simulation, la sanction fiscale et civile que les parties peuvent subir, le tiers lésé est doté d'une faculté d'invoquer l'acte secret.

* 98 M. PLANIOL, G. RIPERT, Traité pratique de droit civil français, T. IV., 2ème éd., Paris, L.G.D.J., 1959, p. 448.

* 99 Idem, p. 443.

* 100 Cet article dispose « Dans tous les cas où l'action en nullité ou en rescision d'une convention n'est pas limitée à un moindre temps par une loi particulière, cette action dure dix ans. Ce temps ne court, dans le cas de violence, que du jour où elle a cessé; dans le cas d'erreur ou de dol, du jour où ils ont été découverts »

* 101 H. XAVIER, A. TISSERAND et G. VENANDET, op.cit., p. 701 no82 et s.

* 102 Art. 64 al.1 de la loi no25/2005 du 04/12/2005 portant code de procédure fiscale, J.O. no 01 du 1er janvier 2006.

* 103 Art. 64 al. 2 de la loi no25/2005 du 04/12/2005 portant code de procédure fiscale, J.O. no 01 du 1er janvier 2006.

* 104 F. TERRE, op. cit., p. 450.

* 105 CABINET HERVIEU-COGEN, « Sanction fiscale » en ligne sur « http://www.gestion-conseils.com/html, consulté le 20 octobre 2008.

* 106 F. MASENGO, Droit fiscal, Notes de cours, Butare, UNR, Faculté de Droit, 2007, p. 44. inédit

* 107 ENCYCLOPEDIE DALLOZ, op. cit, p. 5 no 47.

* 108 H. XAVIER, A. TISSERAND et G. VENANDET, Code civil, Paris, Dalloz, 2000, p. 770.

* 109 R.C. no 29784/99 citée supra note 35.

* 110 M. Martin, Lexique, Droit civil en ligne sur : http://www.google.rw/search?hl=fr&ir=&q=lasanction+civile+de+pr%c3%AAte-nom&start=1%sa=p, consulté le 20/10/2008.

* 111 J. BOULANGER, «Usage et abus de la notion d'indivisibilité des actes juridiques», RTD, civ. 1950. 1 et s. cité par H. CAPITANT, F. TERRE, op.cit., p. 150.

* 112 H. CAPITANT, F. TERRE, op.cit., p. 151.

* 113 HENRI DE PAGE, Traité élémentaire de droit civil belge, 2ème éd., tome 4, Bruxelles, Emile BRUYANT, 1951, p. 109.

* 114 Ibidem.

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"Je ne pense pas qu'un écrivain puisse avoir de profondes assises s'il n'a pas ressenti avec amertume les injustices de la société ou il vit"   Thomas Lanier dit Tennessie Williams