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Le droit à la présomption d'innocence face au droit à l'information

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par Ouaogarin Roger SANKARA
Université Ouaga 2 - Master de recherche en Droit Privé Fondamental 2015
  

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B. L'échec de la révision du vocabulaire juridique tendancieux

Si la notion de mise en examen a semblé protéger l'innocence en France, force est de reconnaître que par le langage juridique, la personne poursuivie continue à être désignée de façon tendancieuse (1). Dans les systèmes juridiques où la notion de mise en examen est inconnue, tout se passe comme si le présumé coupable a remplacé le présumé innocent (2).

1. La permanence de la désignation tendancieuse des personnes poursuivies en droit français

L'article 80-1 du Code de procédure pénal français parle «d'indices graves de culpabilité» pesant sur le mis en cause. Ici, c'est la culpabilité qui est avancée et non l'innocence présumée. « L'indices graves et concordants de culpabilité, puis les charges, sont de véritables présomptions de culpabilité, et celui qui est confronté à la justice [...] est un innocent de principe contre lequel pèsent de telles présomptions de culpabilité qu'il est déjà un semi-coupable qui devra, s'il veut échapper à la condamnation, détruire les indices accumulés contre lui 122(*)», écrit Arnaud Coche

Au vrai, ces atteintes langagières à la présomption d'innocence traduisent la portée limitée de ce droit. En France, de nombreuses présomptions de culpabilité existent. Ces présomptions concernent entre autres les faits qualifiés de proxénétisme123(*), d'association de malfaiteurs124(*), de diffamation125(*), etc.

Ces présomptions de culpabilité foisonnent au point où Jean Pradel relève «que certains esprits en tirent la conséquence qu'il n'existe pas de présomption d'innocence en France ».

Pour mettre fin au caractère stigmatisant de la mise en accusation et des présomptions de culpabilité qu'elle évoque, Arnaud Coche propose de la remplacer par «l'ouverture de la procédure126(*)».

Mais quid des systèmes juridiques comme les nôtres où la réforme n'a pas été amorcée?

2. La réforme non amorcée en droit burkinabè

On peut saluer la réforme du vocabulaire juridique attentatoire à la présomption d'innocence, opérée en droit français, même si certains auteurs et praticiens du droit estiment qu'elle n'est pas satisfaisante.

En droit burkinabè, la notion de «mise en examen» est inconnue. C'est le règne de «l'inculpation» et de ses conséquences langagières sur le droit à la présomption d'innocence. Ainsi, on peut relever dans les articles 94 à 98 du Code de procédure pénale burkinabè relatifs aux transports, perquisitions et saisies, l'usage répété du mot «inculpé». Il en est de même aux articles 111 à 118 du CPP burkinabè concernant les interrogations et les confrontations. A titre illustratif, l'article 111 dispose: «Lors de la première comparution, le juge d'instruction constate l'identité de l'inculpé, lui fait connaître chacun des faits qui lui sont imputés et l'avertit qu'il est libre de ne faire aucune déclaration. Si l'inculpé désire faire des déclarations, celles-ci sont immédiatement reçues par le juge d'instruction».

En France, si le débat porte sur la correction des avatars langagiers « de la mise en examen» et «des indices graves et concordants de culpabilité», au Burkina Faso, il faut espérer pour le moment l'extirpation de la notion primaire127(*) d'inculpation du droit positif national.

Pour l'heure, les personnes mises en cause par la justice sont plutôt des présumés coupables (la culpabilité est mise en avant) que des présumés innocents (l'innocence est mise en exergue).

Cette expression malencontreuse est diffusée à grande échelle par la presse, elle-même informée par les policiers, les juges d'instruction et les chefs de parquet dont ils rendent compte des conférences de presse de présentation de personnes arrêtées ou de rapport d'étape de procédure. On peut lire dans Sidwaya n°7 295 du 14 novembre 2012, à la page 35 : « Ce jour-là, on procédait à l'audition des présumés coupables de la crise dite de Passakongo 128(*)».

* 122 A. COCHE, « Rendre effective la présomption d'innocence : l'obsession de l'avocat, le devoir du juge », p.2 disponible sur www.avocats-poitiers.com, consulté le 11 décembre 2016 à 17 heures 20 mn 17 s.

* 123 Art. 225-6 du Code pénal français

* 124 Art. 450-1 du Code pénal français

* 125 Art 35 bis de la loi du 29 juillet 1881 sur la presse

* 126 A. COCHE, Op. cit., p. 2, disponible sur www.avocats-poitiers.com, consulté le 11 décembre 2016 à 17 heures 20 mn 17 s.

* 127 Cette notion n'existe plus en France il y a deux décennies.

* 128 Voy. L'Observateur Paalga n°8275 du lundi 17 décembre 2012, à la page 23, le journal parle de « présumé assassin » d'un conseiller municipal froidement abattu et Sidwayan° 716 du jeudi 21 juin 2012, à la page 13, dans lequel il est question, dans la légende de la photo d'illustration, « de quatre présumés coupables ».

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