WOW !! MUCH LOVE ! SO WORLD PEACE !
Fond bitcoin pour l'amélioration du site: 1memzGeKS7CB3ECNkzSn2qHwxU6NZoJ8o
  Dogecoin (tips/pourboires): DCLoo9Dd4qECqpMLurdgGnaoqbftj16Nvp


Home | Publier un mémoire | Une page au hasard

 > 

La mémoire de l'esclavage en France, un processus douloureux de mis en forme


par Louis Skipwith
École Nationale Supérieure d'Architecture de Bretagne - Master 2 2021
  

précédent sommaire suivant

Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy

ANNEXES

Sommaire des annexes

Annexe 1. - Entretien avec J.-P. Roze, adjoint du conservateur du Musée d'histoire de Saint-Malo

Annexe 2. - Échange avec Maureen Brugaro du pôle patrimoine de l'Office du Tourisme de Saint-Malo

p. 82

p. 88

Annexe 3. - Adresses connues d'armateurs nérgiers dans Saint-Malo Intramuros

p. 92

Annexe 4. - Plans et coupe du logement de Meslé de Grandclos, actuellement le 11 rue de Toulouse

p. 94

Annexe 6. - Les 11 plus grands armateurs négriers malouins du XVIIIe siècle

Annexe 5. - Les 13 Malouins les plus riches en 1790

p. 99

p. 100

80

81

Annexe 7. - Les plus grands armateurs malouins 1756-1792

 

p. 101

Annexe 8. - Extrait du Programme Muséographique

p. 102

Annexes 1. - Entretien avec J.-P. Roze, adjoint du

conservateur du Musée d'histoire de Saint-Malo

Comment était présentée la traite dans le musée d'histoire de St-Malo avant la conception du nouveau musée ?

Le musée se partageait entre le donjon du château et la tour Solidor, qui appartenait à la même institution labellisée «Musée de France». La tour Solidor présentait l'histoire des voyages long-courriers et de la découverte du passage du Cap Horn, en revanche le donjon présentait l'histoire des corsaires, l'histoire de la ville et il y avait une vitrine depuis 1952 sur la traite des Africains qui a été nourrie précocement par des achats ou des dons, même un dépôt de l'ancien Musée national des arts et traditions populaires (actuel MuCEM). Il s'agissait d'entraves ou de fers dits «négriers», de fusils ou bracelets dits «de traite», au total une dizaine de numéros, qui étaient symboliques puisqu'elles ne provenaient pas de St-Malo et étaient donc exposées à titre d'évocation. Je (J-P Roze) suis arrivé il y a 15 ans et cela n'avait pas trop bougé, il n'y avait pas vraiment eu d'acquisitions supplémentaires, ni de recherches plus approfondies de la part du musée sur cette thématique. Une gravure représentant le transport des captifs a été largement publiée, ce qui a permis de laisser le musée dans ce réseau là, mais il s'agissait tout de même d'une parenthèse, existante, mais très limitée.

Au moment de la refonte du musée, nous avons de manière objective, sans vision mémorielle mais plus dans une «stratégie de périodisation» (comme le déclare Christine Chivallon, directrice de recherche au CNRS), pour nous il n'y avait même pas de questions.

Dans le nouveau discours muséographique, qui prendra place dans le nouveau MHM, y a-t-il eu une évolution dans le discours tenu, dans la présentation des faits, dans les acquisitions d'objets... ?

Oui, comme nous considérions que cette thématique devait être abordée, il a été programmé un « cabinet-monde », c'est-à-dire un îlot dans l'exposition permanente qui va être dédié à cette thématique de la traite. A ce moment là l'examen du fonds était presque sans appel : les entraves de par leur facture, leur matérialité et leur provenance semblaient plus symboliser la mise aux fers que la captivité des esclaves à bord ; aucune documentation n'était suffisamment probante, donc nous avons cherché comment nourrir cette thématique en requérant des dépôts, auprès du Musée du Quai Branly par exemple où il y a des entraves qui proviendraient des anciennes colonies (recherche en cours). Une acquisition d'une carte des côtes d'Angole, que j'ai pu mener, s'est aussi produite en 2020 grâce à la veille d'un site d'un spécialiste américain. Le musée avait déjà une carte des côtes de Guinée et d'autres pistes nous amènent à nous tourner vers le Musée de Saint-Brieuc qui conservent des éléments archéologiques liés à cette thématique. Il y a une épave, l'épave des Poulains, qui a été fouillée dans les années 80 et où ont été retrouvées des défenses d'éléphants, des perles de verres... donc des éléments qui ont tendance à trahir le sujet, bien qu'à ce jour ne soit encore identifiée l'origine du navire.

82

83

Ce discours présente donc des faits historiques de manière objective, y a-t-il une part de mémoire de la traite ou bien ce n'est pas le rôle du musée ?

C'est une question intéressante, j'ai sur mon bureau les actes du colloque international organisé en 2011 et qui s'intitulait «Exposer l'esclavage : méthodologies et pratiques».

Dans ce colloque, il y a 3 stratégies de présentées : la stratégie de périodisation, comme je le disais précédemment, et c'est la conception muséographique qui a été validée, c'est une vision historique sur la base des archives, de statistiques. C'est une vision un peu froide certes, qui peut-être critiquée, notamment parce qu'elle ne semble pas revêtir un caractère humanisé et se constituer sur des témoignages, mais c'est un parti assumé aussi par le Conseil scientifique. C'est le cas du Musée d'histoire du château des ducs de Bretagne de Nantes, le cas de musée de Bordeaux aussi. Il y a aussi la stratégie mémorielle qui est plus liée à une représentation physique sur le site, une autre stratégie mémorielle qui est liée aux témoignages, pour laquelle la parole est donnée aux descendants, aux acteurs de la recherche scientifique ou culturelle d'origine africaine ou antillaise.

La stratégie de périodisation, cette vision statistique et historique, fait écho au discours général dans le futur musée et elle s'appliquera aussi pour les autres «cabinets-monde» (la pêche à Terre-Neuve, le marché espagnol, les Indes orientales). En revanche, j'utilise plus prudemment aujourd'hui l'expression «traite des Africains», car les lectures faites et la compréhension du sujet offrent une vigilance qu'il faut savoir appliquer dans la formulation comme dans la rédaction des textes. Depuis 10 ans, nous parlions de «traite négrière» ou de «traite des noirs», avec la conscience objective, je le crois, du sujet, mais les mots sont apparus d'un coup très déshumanisés. Ces expressions doivent être révoquer, il me semble, puisque nous savons quelles étaient ces communautés d'esclaves, quels étaient les comptoirs de vente. L'aspect chronologique ou l'aspect statistique ne peuvent suffire lorsqu'il s'agit de déportations et de phénomènes de ce type.

En lien avec la politique nationale de reconnaissance de la traite, est-ce qu'il y a des directives nationales qui ont été mises en place ?

Il n'y a pas eu de directives, suite à 2011, à ce colloque et aux autres événements programmés, des circulaires ont été transmises notamment pour permettre d'identifier des sections muséographiques consacrées à cette thématique ou de comptabiliser les biens s'y rattachant. Il y a une Fondation pour la mémoire de l'esclavage créée en 2017, qui est une sorte d'entité intellectuelle et référente. En tant que musée dépositaire de cette histoire, et comme il a été convenu avec le Conseil scientifique, nous pensons qu'une fois le discours muséographique stabilisé (cartels, textes, scénographie), il sera légitime de le soumettre aux membres de cette Fondation. Il existe toutefois une dimension fortement politique dans ce sujet qui transparaît aussi au niveau des collectivités territoriales et des villes - l'ancien premier ministre et maire de Nantes, J.-M. Ayrault, est actuellement le président de la Fondation. Le programme du futur musée a été souvent questionné, nous directement ou par voie de presse, parfois en conseil municipal. Cela n'a jamais été sujet à polémique, puisque nous savions que l'exposition permanente traiterait de la traite des Africains et que des collections existaient. Il faudrait être naïf toutefois pour ne pas sentir certaines tentatives d'instrumentalisation politique, mais cela ne nous concerne pas.

Lorsque j'ai réalisé mon projet l'année dernière, j'avais l'impression qu'il y avait des réticences à nous donner des informations, du moins c'était extrêmement prudent dans la manière de nous répondre. On avait l'impression que les autorités municipales ou portuaires n'avaient pas envie que ce passé négrier se sache ou se découvre. Donc là, à l'inverse vous me dites qu'il y avait des pressions municipales pour que ce soit exposé dans le musée ?

Et concernant les personnalités politiques telles que Mahé de la Bourdonnais ?

Cela renvoie à une autre question propre aux musées : nous sommes contraints dans nos espaces et il faut savoir parfois réserver un thème ou un sujet pour des expositions temporaires. C'est a priori le cas de Mahé de La Bourdonnais, car c'est un beau sujet et un sujet complexe qui permet d'aborder le commerce maritime, sa structuration et la colonisation, ainsi que les relations avec les Indes, la côte du Mozambique et l'Arabie.

La question renvoie à des réalités culturelles et politiques plutôt classiques : l'effort de mémoire sur le sujet a été a priori plutôt conduit par des adeptes à la doctrine socialiste ou de gauche. La problématique qui pourrait davantage nous surprendre et nous questionner, c'est la matérialisation de cette histoire dans la ville en effet. La perspective de faire figurer ce thème au moins dans l'exposition permanente du futur Musée d'Histoire Maritime est apparue déjà comme une position équilibrée.

Est-ce qu'il y a des comptes-rendus de conseils municipaux, des procès verbaux, des écrits de vos réunions entre la municipalité et le musée qui serait accessibles ?

Les délibérations des conseils municipaux sont des documents accessibles, mais il serait surprenant qu'on y rentre dans le détail. J'imagine que l'intitulé de la section muséographique pourrait figurer quand même dans quelques documents officiels.

Le programme scientifique détaillé reste par contre la base et comme il a été annexé lors des différentes phases du projet aux documents émis par la Ville de Saint-Malo, c'est en quelque sorte le «juge de paix».

J'ai une dernière question concernant le musée, au sujet des héros locaux controversés tels que Surcouf ou Chateaubriand père, comment se fait la présentation de ces personnages ?

En résumé, le programme est né de l'archéologie sous-marine et des découvertes en baie de Saint-Malo des années 2000. Elles ont révélé la vie des hommes embarqués. Nous n'étions pas dans le mythe du héros avec cet énorme fonds patrimonial mis au jour. L'ancien concept du musée pourrait avoir été en partie inspiré par cette mythologie dans les domaines de la course, de l'exploration, de la littérature, etc. Sauf que le programme scientifique validé par le ministère et la Ville a clairement défini une autre stratégie de valorisation et diffusion culturelle que nous trouvions plus dans l'ère du temps, convergente avec les recherches universitaires ou scientifiques et avec la vision de l'histoire du moment. L'objectif est simplement de s'appuyer sur les collections comme tout musée. Le portrait de Robert Surcouf en armateur figurera aux côtés d'un portrait d'un des plus grands armateurs négriers malouins, Meslé de Grand-Clos, actuellement conservé au Musée d'Avranches. Les cartels traduiront simplement la réalité historique à cet endroit de l'exposition. On sera limité par une seule chose, c'est le principe du musée, on sera limité par le nombre de signes, le nombre de phrases que l'on pourra mettre pour que ce soit lisible. Il me semble qu'il n'existe aucun frein ou aucun obstacle à l'objectivité. En 1974 il y a eu une exposition ici sur Surcouf, il n'y avait que deux lignes sur ses activités négrières. Les ouvrages par leur silence en disent long et il est plutôt rare de lire plusieurs lignes sur la traite des Africains dans les parutions de la première moitié du 20e siècle ayant pour sujet Saint-Malo. C'est le travail expert d'Alain Roman qui a définitivement réveillé les consciences (un ouvrage de synthèse est paru en 2003).

84

Vous avez parlé de travail d'historien, je voulais savoir si dans la conception du projet scientifique et culturel, vous aviez travaillé en collaboration avec les historiens locaux tels qu'Alain Roman et André Lespagnol ?

Pas dans le projet à la base parce que c'est plus un travail interne mais dans la programmation, lorsqu'elle a été lancée, il a fallu selon les coutumes des musées réunir un Conseil scientifique et André Lespagnol a été évidemment contacté très vite. On l'avait contacté depuis longtemps, on a travaillé de façon très régulière avec lui, il était en quelque sorte le représentant universitaire indiscutable et la . Nous avons aussi échangé avec Alain Romain étant donné son expertise. C'est donc naturellement que le sujet des la traite a été abordé en séances du Conseil scientifique, il y a eu de vrais discussions sur la vision muséographique et le discours scientifique à tenir et de vrais compromissions à envisager parce qu'un musée ne pourrait être un ouvrage universitaire.

Nous avons parlé d'histoire mais est-ce qu'il y a des porteurs de mémoire qui se revendiquent à St-Malo, qui prennent les devants pour faire changer les choses ?

Sur l'aspect mémoriel et sur l'effort que la ville devrait faire, il n'a que les éléments qui se trouvent dans la presse, à ma connaissance. Il existe un «geste mémoriel» intéressant qui ne se rapproche pas du sujet, mais qui pourrait donner à réflexion : un cairn a été inauguré à Saint-Malo en 2013 (suite à l'inauguration à Saint-Pierre-et-Miquelon d'un autre monument) à la mémoire des cinq siècles de pêche morutière. La question est de savoir s'il s'agissait d'une bonne matérialisation, d'un témoignage suffisant et approprié ; mais je dirais que ce n'est pas de l'ordre des musées et que nous ne sommes pas spécialistes de la stratégie mémorielle.

Concernant le patrimoine de la traite maintenant, quelle forme prend-il ? Est-ce qu'il se manifeste par des statues, des noms de rues, les malouinières... ? Comment la reconstruction de la ville après 1944 s'est faite et selon quelle volonté ?

Je vous transmettrai cet article qui figure dans un Cahier de la Compagnie des Indes intitulé «Lorient, la Bretagne et la traite» (2006). Je ne suis pas un grand spécialiste de l'urbanisme mais il semblerait que lorsque St-Malo se lance dans la traite négrière, après les années 1710 ( et il va y avoir plutôt des grands armements dans la deuxième moitié du XVIIIe ), les hôtels particuliers de Intra-Muros sont déjà construits. Donc ça veut dire que l'argent pour permettre les accroissements, comme cela est appelé, provient surtout du commerce avec l'Espagne et des voyages à la mer du Sud (Chili, Pérou). C'est une réalité historique, les grandes fortunes qui se sont bâti leurs hôtels particuliers et leurs malouinières sont des fortunes qui ne sont pas réellement nées de la traite, qui sont antérieures. Après les bombardements et la destruction de la ville historique à 80%, le concept architectural se concentre sur la silhouette. Les architectes de la reconstruction, dont Louis Arretche, visent sans doute une impression générale dans leurs travaux - on reconstruit des îlots, on évoque par des façades et des élévations un caractère ancien. Il ne semble pas aujourd'hui que la vision restitutive et archéologique

85

a été possible et privilégiée. A Saint-Malo, nous sommes loin des hôtels particuliers de Nantes et de toute façon, à cette époque, la question est de reloger les habitants et de tourner la page sinistre de la guerre. Une chose semble témoigner quand même de l'histoire de la traite dans l'urbanisme, c'est un mascaron (identifié comme une tête africaine) qui figure au-dessus d'une grande-porte en bois de l'un des hôtels qui fait face à la porte principale (Saint-Vincent). Hormis cela, la reconstruction n'a rien provoqué, ni d'ailleurs extra-muros, et aucune trace matérielle et patrimoniale ne semble pouvoir être associé à notre sujet. Les consciences au lendemain de la guerre ne sont évidemment pas portés sur cette question.

Concernant les traces secondaires ? St-Malo n'ayant pas le même arrière pays que Nantes, ils devaient bien entreposer les marchandises quelque part ?

Eh bien non, c'est ça justement la complexité du cas malouin, il n'y a pas ce phénomène d'arrière pays ou d'entrepôts et de stockage qui a été développé à St-Malo. St-Malo n'a jamais eu d'entrepôts, je parle là de constructions durables et pérennes, ils ont eu dans leurs caves, dans les malouinières, des éléments de stockage, mais pour résumer les marchandises n'étaient pas écoulées à St-Malo. Quand les malouins vont faire le commerce des toiles bretonnes, le commerce de l'argent, le commerce des esclaves africains, ils vont souvent revenir et s'arrêter soit sur Nantes, soit sur Lorient, soit sur le Havre ou sur Bordeaux et voire même aux Pays-Bas. Par exemple, le sucre et l'indigo rentreront dans le marché français sans forcément passer par le port de Saint-Malo. C'est toute l'histoire d'un régime de droits et d'exonérations de la monarchie et d'un savoir-faire d'armateurs-négociants dont il s'agit ici. Matériellement, les retombées de la traite des Africains ne se voient pas comme les autres ou encore moins que les autres. Certes, il doit y avoir des indices dans les achats fonciers de tel ou tel armateur, Meslé de Grand-Clos par exemple, mais c'est assez opaque quand on ne s'y intéresse pas.

Il n'y a donc pas eu de politique de cacher les traces, c'est simplement qu'il n'y en a quasiment jamais eu ?

C'est en quelque sorte cela. Vous évoquiez les statues précédemment et c'est un sujet d'actualités justement qui pourrait être mis en perspective par rapport à notre sujet. Quelle statue incarne ce passé ? Quel texte est inséré au piédestal ? Vous connaissez sans doute la réponse : à l'heure du réflexe commémoratif, l'objectivité est rarement invoquée.

Si on évoque «l'occultation« des traces, est-ce propre à St-Malo ou est-ce que cela participe de la politique de l'oubli qui a été mise en place à l'abolition de la traite dans toute la France ?

Des documentaires sont récemment parus sur ARTE et en quatre épisodes, à charge pour certains critiques, le sujet de l'occultation a été abordé. Ce problème dépasse largement la France, on le voit en Angleterre comme on voit de grands efforts aussi produits (à Liverpool ou Birmingham). Ces documentaires ont mis la lumière sur plusieurs choses, et une qui me semble essentielle, les conséquences économiques favorables de la traite pour les monarchies européennes. Et la relation existante entre une tasse en porcelaine chinoise arrosée d'un café ou d'un ingrédient sucré avec la surproduction des colonies et l'esclavage. Forcément, l'occultation a existé car il n'était pas si facile de comprendre la liaison entre les choses.

Nantes a fait le choix de dissocier son musée de son mémorial, Bordeaux a décidé de mettre des plaques explicatives sur les noms de rues et les statues, il est intéressant de voir les différentes approches des villes sur

86

cette thématique.

C'est vrai, il y a deux façons d'habiter la ville avec ce sujet, c'est soit par le mémorial, la position de Nantes je la trouvais très réussie, mais celle de Bordeaux pourrait être aussi très intéressante pour St-Malo.

Est-ce qu'on peut trouver des preuves de cette «occultation« ?

L'article d'Alain Roman (2006) renvoie à cette préoccupation d'occultation. La preuve de la dissimulation elle est induite, elle n'est pas explicite. C'est en filigrane, en observant un cartel de statue, vous comprenez sur quelles parties de la biographie du personnage représenté a été posé le projecteur. Il pourrait être intéressant d'initier des échanges avec les descendants et se demander s'ils conservent des traces jusqu'alors intentionnellement dissimulées, ou interroger les acteurs culturels des Malouinières pour savoir s'ils font référence à la question. Alain Roman avait un regard très critique du point de vue sociologique et objectif. Il avait des éléments pour en tout cas.

Pensez-vous que la création du mémorial de Nantes, et les colloques qui avaient eu lieu ont changé quelque chose dans la politique de St-Malo ?

Non pas du tout, je pense que les gens intéressés par le sujet se sont satisfaits de l'intention et du geste, mais Nantes est une métropole et une ville universitaire, le contexte est forcément différent. Il ne me semble pas qu'au moment de l'ouverture du mémorial de Nantes, il y a eu des échos du côté de Saint-Malo à l'époque. Récemment, les choses auraient tendance à prendre une nouvelle tournure comme nous en parlions précédemment.

On va donc avoir un nouveau Musée d'Histoire Maritime à St-Malo, qu'est-ce qui a motivé la construction de ce nouveau musée ?

A la base, c'est une refondation du programme muséographique. Ensuite il y a eu des fouilles archéologiques pendant 10 ans qui ont fait surgir un nouveau patrimoine scientifique inédit pour St-Malo. Ce projet n'est pas né d'une volonté hors-sol, c'est un constat de professionnels qui a conclu que le musée devait changer de peau pour l'avenir de ses collections et la valorisation de ses missions.

Pourquoi avoir choisi ce musée plutôt qu'une autre proposition étant donné qu'il est aujourd'hui controversé ?

Faisant parti de la commission d'analyse, l'équipe du musée, le conservateur et moi-même, nous avons consulté plus de 130 candidatures avec des grosses pointures... Il a fallu arriver à une shortlist de 4. Donc l'analyse s'est faite d'un point de vue fonctionnel. Evidemment que j'avais un avis esthétique mais celui-là je le gardais pour moi. Cette analyse a permis de pointer des dépassements probables de coûts, des impossibilités ou des incohérences formelles, des dysfonctionnements ou des complexités, des gestions problématiques en termes de flux de visiteur, de croisements ou de mouvements de collections, etc.

Il y a eu une vraie réalité chez Kuma, c'est qu'il a proposé des volumes avec des latitudes d'organisation intérieure qui sont très intéressantes pour un musée, ce qui n'était pas le cas chez Aires Mateus par exemple.

87

précédent sommaire suivant






Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy








"Le doute est le commencement de la sagesse"   Aristote