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Le caractère supranational de la banque centrale européenne au sein du mécanisme de surveillance unique.


par Thibault Fava
Université Paris-Dauphine - Master 2 droit des affaires 2015
  

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II. L'influence potentiellement décisive de la Banque centrale européenne sur la supervision des établissements « moins importants »

La Banque centrale peut imposer des obligations aux autorités nationales en ce qui concerne la surveillance des entités « moins importantes » (A). Son pouvoir d'intervention à l'égard des établissements « moins importants » ne s'arrête pas là puisqu'elle peut également décider d'agir directement à leur égard (B).

A) Les diverses obligations imposées aux autorités nationales affaiblissant leur compétence directe auprès des établissements « moins importants »

La Banque centrale européenne influe sur la surveillance directe des autorités nationales à l'égard des établissements moins importants ; que ce soit par le biais des diverses obligations d'information qui leur sont imposées (1) ou en utilisant la voie normative (2).

1) De nombreuses obligations d'information portant notamment sur certains projets de décisions et procédures

L'autorité nationale doit notifier à la BCE « toutes les sanctions administratives imposées aux entités moins importantes » relatives aux missions de surveillance prudentielle177. Cette obligation influencera forcément les autorités nationales lorsqu'elles décideront d'infliger des sanctions

175 The single supervisory mechanism or «SSM«, part one of the Banking Union by Eddy Wymeersch

176 Article 47(1) de la directive 2013/36/UE du Parlement européen et du conseil du 26 juin 2013 concernant l'accès à l'activité des établissements de crédit et la surveillance prudentielle des établissements de crédit et des entreprises d'investissement modifiant la directive 2002/87/CE et abrogeant les directives 2006/48/CE et 2006/49/CE

177 Article 135 du Règlement (UE) n° 468/2014 de la Banque centrale européenne du 16 avril 2014

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administratives. En effet, le fait de savoir que la Banque centrale en sera informée conduira les autorités à appliquer les sanctions de façon plus objective.

Les autorités nationales doivent également informer la BCE en cas de « détérioration rapide et importante de la situation de toute entité moins importante ». En particulier si cette détérioration est susceptible de conduire à une demande d'aide financière du MES178. Cette obligation se comprend notamment par la conséquence d'une aide financière directe du MES à une entité moins importante : cette aide la fait basculer dans la catégorie des établissements importants. Cette information est donc essentielle et permet à la BCE de se préparer à exercer potentiellement la surveillance prudentielle directe d'un nouvel établissement de crédit.

L'obligation d'information majeure porte sur les procédures de surveillance prudentielle essentielles des autorités nationales afférentes aux établissements moins importants. Les informations relatives à ces procédures doivent être notifiées à la Banque centrale européenne : ces procédures concernent notamment la révocation des membres des conseils d'administration et « les procédures ayant une incidence importante sur l'entité moins importante soumise à la surveillance prudentielle »179. La notion de procédure essentielle est donc définie très largement et il appartiendra à la BCE de donner une interprétation plus ou moins large de ce qu'elle considère être une procédure de surveillance essentielle. En l'état actuel du droit, la BCE peut donc exiger des autorités nationales que lui soient communiquées toutes informations relatives à toute procédure à l'égard d'une entité moins importante. Il serait donc opportun de prévoir une liste concrète de procédures considérées comme essentielles afin d'offrir une réelle autonomie aux autorités nationales qui, actuellement, exercent leurs missions de surveillance directe avec la potentialité de devoir continuellement notifier leurs actions à la BCE. En outre, même s'il existait une liste des procédures essentielles, le règlement dispose que, en plus des obligations d'information concernant ces dernières, la BCE peut à tout moment demander aux autorités compétentes nationales des informations sur la mise en oeuvre des missions qu'elles accomplissent à l'égard des établissements moins importants180. Cela démontre une volonté des textes européens de permettre une immixtion de la Banque centrale dans la supervision directe des autorités nationales. Le guide relatif à la surveillance bancaire a mis en garde contre l'excès de notifications à la BCE par les autorités nationales181.

La même obligation de notification s'applique en matière de projets de décisions considérées comme

178 Article 96 du Règlement (UE) n° 468/2014 de la Banque centrale européenne du 16 avril 2014

179 Article 97(2) du Règlement (UE) n° 468/2014 de la Banque centrale européenne du 16 avril 2014

180 Article 97(3) du Règlement (UE) n° 468/2014 de la Banque centrale européenne du 16 avril 2014

181 Guide relatif à la surveillance bancaire-septembre 2014

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essentielles s'ils ont une incidence importante sur l'entité surveillée. Là encore, il aurait été préférable de fournir une liste qui permette aux autorités de discerner les projets de décisions qui donneront lieu à notification et les autres182.

Les autorités nationales ont, dans tous les cas, une obligation générale de faire rapport à la BCE qui peut leur demander à tout moment de l'informer sur les mesures qui ont été prises à l'égard des établissements moins importants183.

En plus de ces obligations d'information et de notification, la BCE peut agir sur la surveillance directe des entités moins importantes en adoptant des actes contraignants à l'encontre des autorités nationales.

2) La possibilité pour la Banque Centrale Européenne d'influencer la supervision directe des autorités nationales par la voie normative

Le règlement MSU prévoit que, s'agissant des entités moins importantes, les autorités nationales agissent selon les orientations ou instructions générales de la BCE précisant les modalités selon lesquelles les autorités compétentes doivent accomplir leurs missions de surveillance prudentielle et arrêter des décisions184.

Est-il encore possible de parler de surveillance directe des autorités nationales à l'égard des établissements moins importants ? La question se pose sérieusement puisque le règlement offre à la Banque centrale le pouvoir de dicter aux autorités nationales la façon d'agir auprès des entités pour lesquelles elles sont censées conserver la surveillance directe. A partir du moment où ces instructions et orientations seront en phase avec le droit de l'Union, elles devraient logiquement prévaloir sur le droit national des autorités qui seront alors obligées de suivre la BCE. Il est à prévoir que les règles relatives à l'exercice même des missions de surveillance prudentielles soient de plus en plus harmonisées. À terme, les autorités nationales auront très peu de marge de manoeuvre dans le cadre de leur compétence directe et seront cloisonnées tant par les règles issues de la BCE, qui peut également adopter des règlements, que par le manuel de supervision unique qui décrira précisément les procédures et la méthodologie à appliquer. En effet, à l'heure actuelle existe encore une certaine hétérogénéité dans le processus de supervision appliqué par les diverses autorités nationales.

En réalité, si le règlement avait laissé une indépendance totale aux autorités nationales pour la

182 Article 98 du Règlement (UE) n° 468/2014 de la Banque centrale européenne du 16 avril 2014

183 Article 99 du Règlement (UE) n° 468/2014 de la Banque centrale européenne du 16 avril 2014

184 Article 6(5)a) du Règlement (UE) n°1024/2013 du Conseil du 15 octobre 2013

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surveillance des entités moins importantes, de nombreuses disparités seraient apparues. De plus, certaines banques ne présentent pas les critères d'un « établissement important » mais représentent un réel risque systémique. En effet, la défaillance d'une institution de petite taille peut avoir un effet d'entraînement sur l'ensemble du système financier185.

Pour assurer la cohérence du Mécanisme de surveillance unique, il est également prévu que la BCE puisse, dans certains cas, non pas seulement influencer le comportement des autorités nationales, mais décider d'agir directement auprès des entités « moins importantes » et ainsi exercer une supervision directe sur ces derniers. Cette possibilité confirme la volonté de faire de la BCE une autorité supranationale dominant le Mécanisme de surveillance unique.

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"Je voudrais vivre pour étudier, non pas étudier pour vivre"   Francis Bacon