Introduction
Grâce aux données historiques, nous sommes bien
enseignés que la créativité humaine joue toujours le
rôle déterminant dès l'Antiquité dans
l'évolution de la société sur tous les domaines. A titre
d'exemple, l'invention des « machines à vapeur »
à la fin du XVIIIème siècle (attribuée
à l'Ecossais James Watt) déboucha sur la Révolution
industrielle, sans précédent, en Europe occidentale. De
même, sur le plan culturel, nous tenons à évoquer les
oeuvres littéraires et artistiques de Molière, Balzac, Renoir,
Gauguin... qui contribuèrent immensément à la
prospérité de la civilisation française. En somme, nous
pouvons estimer que le développement d'une nation est largement
conditionné par l'ampleur des idées créatives ou
inventives de sa population.
Or, les diverses idées qui circulent dans chaque
société ne sont pas tous créatives et que tout le monde ne
peut pas devenir « créateur » par toutes les
idées qu'il exprime. Autrement dit, les idées susceptibles
d'être qualifiées comme créatives sont en fait moins
nombreuses, voire très rares. A cet égard, afin d'éviter
toute ambiguïté et de récompenser cette précieuse
« rareté intellectuelle », le législateur
intervient en adoptant, d'une part, de multiples lois qui prévoient de
la qualification des oeuvres de l'esprit. D'autres part, il met en place les
mesures nécessaires destinées à les protéger en
reconnaissant au profit de leurs auteurs un certain nombre de droits et
prérogatives. D'une façon générale, nous constatons
que ces derniers relèvent du droit de la propriété
intellectuelle.
S'agissant de la propriété intellectuelle, le
droit français entreprend, à partir de la fin du
XIXème siècle, la distinction fondamentale entre les
droits de la propriété industrielle et ceux de la
propriété littéraire et artistique. Les premiers
concernent toutes les créations dont le but est, comme son appellation
nous indique, industriel et technique. C'est le cas notamment des brevets
d'invention et des marques. Quant aux seconds, ils se rapportent plutôt
à l'ensemble des créations qui figurent dans le
périmètre culturel. Le plus souvent, quand l'on parle des droits
littéraires et artistiques, on sera incité
considérablement à songer à l'institution du droit
d'auteur. Alors, de quoi s'agit-il ce dernier ?
D'après plusieurs constats, le droit d'auteur
consistant essentiellement à protéger les intérêts
des créateurs de « l'oeuvre de l'esprit » est
toujours un des droits les plus affectés par l'évolution
technique et sociale. A partir de l'invention des techniques modernes de
l'imprimerie (au milieu du XVème siècle)
jusqu'à l'époque contemporaine, marquée par la
prédominance ubiquiste de la
« numérisation », nous observons que le droit
d'auteur a fait l'objet de plusieurs retouches spectaculaires. Bien
évidemment, la protection du droit d'auteur constitue constamment une
tâche très énorme pour le législateur qui est
obligé de soutenir le secteur de création intellectuelle sans
pourtant marginaliser des autres libertés et droits. Certes, cet esprit
est également retenu par le système juridique français. De
plus, nous constatons que le législateur français est
particulièrement acharné à mettre à jour les
dispositifs concernés en vue d'assurer l'existence de son droit
d'auteur. Cette détermination admirable peut être
témoignée par la récente adoption du projet de la loi dite
« DADVSI » ou, encore, « DADvSI » (la
loi sur le droit d'auteur et des droits voisins dans les sociétés
d'information) par l'Assemblée nationale.
Pour autant, si nous examinons de manière plus
attentive ce qui se passe réellement et actuellement autour de nous,
nous constaterons qu'il existe beaucoup de soucis relatifs à
l'efficacité juridique du droit d'auteur. L'une de ces
préoccupations résulte de la coexistence entre le droit d'auteur
et les techniques avancées dont l'Internet et le numérique. En
fait, ce n'est pas cette coexistence pure et simple qui est à l'origine
de problèmes. Par contre, ce sont des dangers découlant de ces
techniques qui suscitent de nombreux débats concernant
spécialement la sauvegarde du droit d'auteur. Plus
précisément, nous devons reconnaître qu'il y a de plus en
plus aujourd'hui certaines pratiques, réalisées par lesdits
procédés, notamment « les
téléchargements illégaux », qui portent
atteinte sévèrement au droit sacré des créateurs.
Face à ce nouveau phénomène social, nous constatons une
pluralité des hypothèses relatives au sort du droit d'auteur.
Parmi ces hypothèses, il y a une qui nous étonne
considérablement car elle énonce la survenance d'un
« monde sans droit d'auteur ».
De ce propos provocateur, nous aurions l'impression que le
vocable « un monde » ici se réfère, par
métonymie, à « une société » ou
« un pays » où le droit d'auteur n'est pas
présent. Pourtant, eu égard aux situations actuelles du droit
d'auteur sur le plan international, rien ne nous empêcherait de prendre
l'expression « un monde » en cause comme « la
Terre », c'est-à-dire « le monde entier »
en tant que tel. De toute façon, pour assurer un meilleur traitement de
sujet, nous nous contentons de considérer plutôt « un
monde » de notre cas dans la première signification.
Vis-à-vis de cet énoncé, nous pourrions
en plus nous interroger si un tel monde a d'ores et déjà
existé. Et, si c'est le cas, où se trouve-t-il exactement ?
Comment peut-il avoir lieu ? Quand surviendrait-il ? etc. Cependant,
ces questions ne sont que celles accessoires. A l'inverse, les principaux
éléments qui mériteraient effectivement notre attention
maximale consistent à savoir, premièrement, comment nous
sommes en mesure de déterminer une absence du droit d'auteur et
si cette absence est appréciée uniquement sur le plan
juridique ou, au contraire, sur le plan factuel
ou sur tous les deux conjointement.
Deuxièmement, étant le corollaire de la première,
quels seront les facteurs de l'absence du droit d'auteur.
Troisièmement et dernièrement, il s'avère aussi
incontournable de nous nous interroger des conséquences de cette
absence.
Avant d'établir des réponses mûres et
solides à ces questions, nous ne pouvons maintenant que dire qu'avec
l'avènement de la nouvelle loi portant sur le droit d'auteur, le
législateur français demeure encore fidèle à
l'existence de ce dernier. De toute façon, nous devons concéder
en même temps que le concept traditionnel du droit d'auteur est de nos
jours mis en cause sur le plan pratique.
En raison de faveurs documentaires, notre étude
s'appuiera essentiellement sur le système actuel du droit d'auteur
français. Toutefois, le cas échéant et si possible, nous
allons évoquer aussi certains aspects des législations
étrangères afin d'éclaircir nos démarches.
Alors, en plaçant notre objectif global sur la
détermination du contexte d'une société
dénuée du droit d'auteur, nous allons aborder en premier lieu ce
que nous appelons « L'absence du droit
d'auteur ? » (CHAPITRE I). De cet intitulé
interrogatif, il nous conviendra de faire des analyses du défaut de
droit d'auteur, sur deux terrains contradictoires à savoir juridique et
factuel. En second lieu, quel que soit la réponse dégagée
du premier chapitre, nous traiterons d'une part des conséquences issues
de l'absence du droit d'auteur et d'autre part les mécanismes que nous
devrions mettre en oeuvre afin de prévenir la disparition du droit
d'auteur. Ces deux grands points seront ainsi examinés dans
« Les conséquences de l'absence du droit d'auteur et
les solutions » (CHAPITRE II).
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