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Le centre de détention de CASABIANDA, emblématique prison de paradoxes

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par Paul-Roger GONTARD
Université Aix-Marseille III - Master 2 de droit, spécialité lutte contre l'insécurité 2008
  

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§ 2 : CASABIANDA au fil des décennies, jusqu'au IIIème Millénaire

Sans retracer de manière exhaustive les 40 années qui mènent jusqu'à l'an 2000, nous développeront ici les évènements marquant ou les évolutions notables de ces quatre dernières décennies.

A/ 1958-198057(*)

Le Centre Pénitentiaire Agricole accueille alors autour de 200 détenus. Les 2/3 de ceux-ci sont d'origine rurale. Les objets de leur condamnation sont avant tout les crimes sexuels (souvent d'inceste), mais aussi les homicides, le vol et l'incendie. Dans son exposé pour la commission parlementaire compétente, Madame CRISTIANI, juge d'application des peines, relève que la population pénale se répartit en « clubs » de catégorie de criminels. Ainsi « les homicides méprisent les sexuels et tout le monde déteste les voleurs ».

À noter pour cette décennie, le tournage par l'ORTF de deux reportages sur CASABIANDA, dont le second, à ma connaissance, ne fût jamais diffusé.

Le début des années 70, en 1972 pour être plus précis, voit s'ouvrir sur le domaine de CASABIANDA le village de vacance interministériel géré par le Comité National des Oeuvres Sociales Sportives et Culturelles de l'Administration Pénitentiaire (CNOSAP). Ayant obtenu en 1971 un bail emphytéotique, le CNOSAP ouvre quelques mois plus tard un Centre de vacance installé à proximité du centre pénitentiaire. La construction du village et plus tard une partie de son fonctionnement quotidien seront assurées par une équipe de détenus du centre pénitentiaire, pour beaucoup coupables de crimes ou délits à caractère sexuel mais pourtant chargés de veiller à l'entretien des plages, des sanitaires, et certaines années, de la confection des repas des fonctionnaires pénitentiaires en vacances, totalement immergés dans l'environnement des familles le temps de leurs vacances en Corse. Aucun incident grave en presque 30 ans d'activité ne sera à déplorer.

L'année 1977, a quant à elle été marquée par la disparition tragique de M. FRATANI, surveillant de service la nuit où un détenu voulu s'évader pour certains, ou s'emparer d'une hypothétique caisse renfermant de l'argent pour d'autres. Le seul évènement qui ait eu une ampleur suffisante pour engager des réformes sensibles sur la gestion de la sécurité des personnels. Il sera décidé suite à cet évènement de ne plus laisser un surveillant seul pendant ses services de nuit.

B/ 1981-2000

Fidèle à sa tradition d'expérimentation, CASABIANDA va, en 1984, ouvrir deux « chambres conjugales », permettant d'accueillir les compagnes des détenus, de leur proposer un espace d'intimité qui offre au couple le moyen de préserver une composante de son équilibre, et par là de se préserver lui-même, lorsque cela peut encore l'être.

Cette démarche autorise l'espoir d'un après dans l'imaginaire du détenu, éléments primordial lorsqu'il se préparera à sortir de détention.

Un changement notable, géographique celui-là, le Conservatoire du Littoral acheta en 1998, 280 ha du domaine pour que l'Office National de la Chasse administre la gestion de la réserve qui y est logée, rapportant la superficie du domaine à moins de 1.500 ha.

Dans un tout autre registre, fidèle à son identité de symbole, CASABIANDA va être la cible à partir de 1991 d'une série d'attentat. 1991, 1996, 1997, 1998, 1999, 2002, 2003, toutes ces années ont été marquées par une explosion ou une tentative d'attentat dans le site du village de vacance, dans la résidence des personnels, ou encore dans les bâtiments proches de la détention. Des attentats revendiqués par le FLNC, puis le FLNC Canal Historique. Le seul dernier attentat aura eu un coût évalué à 1.400.000,00 €.

Il serait illusoire de vouloir entièrement expliquer ici ces actions, mais si l'on développe les raisons qui m'ont été soumises, l'action des indépendantistes se légitimerait par la revendication des terres agricoles qui devraient être attribuées, selon eux, aux jeunes agriculteurs de l'île. Ils considèrent en effet que la République est là, comme dans toutes les autres possessions de l'Etat en Corse, en situation d'occupation de la terre du « peuple corse ». Cependant, des raisons peut être moins nobles pourraient être à l'origine de certains de ces attentats. La cible du mess des personnels par exemple correspondrait en réalité à la rancune développée par certains, de voir trop de « passants » profiter des tarifs du lieu (pourtant théoriquement réservé aux personnels de l'établissement et à leurs familles), au détriment des commerces des localités environnantes. Comme me le suggérait un de mes interlocuteurs, les cibles des attentats en Corse ne se choisissent pas par hasard, un message implicite, au-delà des revendications indépendantistes, y est toujours attaché.

De cette période d'attentat, CASABIANDA en tirera des conséquences pour sa sécurité, et pour celle de ses occupants. Le Village de Vacances fut fermé, la loge d'accueil sécurisée par des barreaux aux fenêtres pour se prémunir du lancer de cocktails molotov. La résidence des personnels fut quant à elle encerclée par un grillage et une barrière de protection, et surveillée par un dispositif vidéo58(*).

L'objet de ce premier chapitre avait pour vocation de nous imprégner de deux histoires, celle d'un lieu : le domaine de CASABIANDA, et celle d'une prison : le Centre de détention de CASABIANDA. C'est au carrefour de ces deux histoires que s'est construite l'identité de l'actuel établissement pénitentiaire de CASABIANDA. Mais comme toutes les constructions humaines, cette identité évolue quotidiennement, soumise à l'influence de ceux qui la font vivre. C'est donc un instantané de cette vie, de cette identité, que je vous propose d'étudier dans un Chapitre 2, par l'observation du fonctionnement de CASABIANDA, de ses personnels qui l'animent, et de la réglementation qui l'encadre.

* 57 Source des données : Exposé de Madame CRISTIANI, juge de l'application des peines, à la commission parlementaire compétente. 17 mars 1966.

* 58 Arrêté préfectoral du Préfet de Haute-Corse du 15/09/2005 donnant autorisation au Directeur du Centre de détention de CASABIANDA pour installer un système de vidéo surveillance dans le quartier résidence du centre de détention.

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"L'imagination est plus importante que le savoir"   Albert Einstein