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Réflexions critiques sur le système de prévention des difficultés des entreprises OHADA

( Télécharger le fichier original )
par Eric Aristide MOHO FOPA
Université de Dschang-Cameroun - DEA 2007
  

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PARAGRAPHE II : LES IMPERFECTIONS DE L'ALERTE DECLENCHEE PAR LES COMMISSAIRES AUX COMPTES.

Malgré sa très grande importance, la procédure d'alerte présente aussi de nombreux inconvénients. En effet, l'alerte a toujours un caractère perturbateur et est susceptible, si elle n'est pas bien utilisée, de porter atteinte à la crédibilité de l'entreprise (A). En plus, la procédure d'alerte par les commissaires aux comptes telle que conçue par l'OHADA n'a pas été adaptée à toutes les personnes morales susceptibles de faire l'objet d'une procédure collective (B).

A- Les risques d'atteinte à la crédibilité de l'entreprise.

En principe, l'alerte doit rester confidentielle aussi longtemps que possible pour être efficace. Cette exigence est souhaitable pour la sécurité de toutes les personnes qui ont des intérêts vis-à-vis de l'entreprise. L'alerte est toujours perturbatrice pour les dirigeants et même pour la société49(*) . Elle est susceptible de nuire à l'entreprise car « la sonnette d'alarme » une fois tirée peut alimenter maladroitement les rumeurs ou éveiller les concurrents. Elle peut aussi susciter chez les partenaires de la société des doutes sur sa capacité à exécuter ses obligations futures. Ils pourront être alors tentés de revoir leurs relations avec l'entreprise. Ceci peut se manifester concrètement par l'exigence de leur part des garanties exorbitantes ou tout simplement par la volonté de rompre ces relations.

Pour toutes ces raisons, l'alerte est destinée à rester interne à l'entreprise c'est-à-dire à ne pas être divulguée en dehors des personnes directement concernées. A cet égard, les commissaires aux comptes sont astreints au secret professionnel pour les faits, actes et renseignements dont ils ont pu avoir connaissance à l'occasion de l'exercice de leurs fonctions50(*). Ceci est dû au fait que les commissaires aux comptes sont « des confidents nécessaires » appelés à connaître des données dont la divulgation pourrait nuire à la société. Ils ont le droit de tout savoir mais pas de tout dire. Mais en réalité, les informations relatives à l'alerte peuvent être connues des tiers du fait des indiscrétions ou des maladresses. Ce risque est d'autant plus grand que les commissaires aux comptes, par peur d'engager leur responsabilité pour n'avoir pas déclenché l'alerte, agiront prématurément en cas de simple doute sur la véracité de l'information dont ils ont connaissance. A vrai dire, ils sont protégés dans l'exercice de leur mission d'alerte dans la mesure où leur responsabilité ne peut être engagée pour la divulgation des faits dont ils ont eu connaissance dans l'exercice de ses fonctions51(*). Ils bénéficient donc d'une sorte d'immunité s'ils déclarent une alerte alors que la situation n'est pas compromise et que leur initiative intempestive cause préjudice à l'entreprise.

Ces observations ne valent cependant que pour certaines entreprises puisque de nombreuses organisations sociétales prévues par l'OHADA brillent par l'absence en leur sein d'un dispositif d'alerte.

B - L'absence d'un dispositif d'alerte par les commissaires aux comptes dans de nombreuses entreprises.

Cette situation peut s'observer notamment dans les personnes morales non commerçantes (1) et dans de nombreuses sociétés commerciales (2).

1- les personnes morales non commerçantes.

Aux articles 2 et 4 de l'acte uniforme portant organisation des procédures collectives d'apurement du passif, le législateur OHADA soumet également aux procédures collectives les personnes morales de droit privé non commerçantes. Par conséquent, rien ne s'oppose à l'application à leur égard du droit de la prévention.

Les personnes morales de droit privé non commerçantes sont des groupements qui exercent pour l'essentiel les activités d'animation artisanale, culturelle, sportive, humanitaire et économique sans réelle volonté de spéculation et poursuivent pour la plupart des buts d'intérêt général sans partage de bénéfices entre leurs membres52(*). Elles sont pour l'essentiel constituées par des coopératives, sociétés civiles immobilières, mutuelles, fondations et associations. De l'exercice de leurs activités, peuvent naître des difficultés d'ordre structurel, économique ou financier nécessitant l'ouverture d'une procédure collective53(*). Il serait alors indiqué, pour éviter les inconvénients d'une telle procédure, de prendre des mesures préventives. Malheureusement, ces personnes morales ne sont pas très souvent dotées d'un dispositif d'alerte comme nombre de sociétés commerciales54(*).

Tout part du constat concret selon lequel dans les pays membres de l'OHADA, seuls les commerçants personnes physiques ou morales se soumettent généralement aux obligations comptables conformément aux dispositions de l'Acte uniforme sur le droit commercial général55(*). Les autres personnes morales de droit privé ne se sentent pas très concernés par la tenue d'une comptabilité régulière malgré les dispositions claires de l'article 2 de l'Acte uniforme portant organisation et harmonisation des comptabilités des entreprises. De même, elles fonctionnent très souvent sans commissaires aux comptes, la désignation de ces derniers y étant purement facultative. Quand bien même ces derniers existent, ils sont simplement désignés parmi les membres de l'association et ne justifient pas des compétences nécessaires pour l'exercice de la profession. C'est le cas précisément des associations tontinières qui pullulent au Cameroun avec désormais un réel impact sur l'économie nationale. Cette situation rend difficile l'application à leur égard des procédures collectives d'apurement du passif.

Les textes étant clairs en la matière, il revient aux promoteurs et dirigeants de telles structures de s'en imprégner véritablement pour une gestion rationnelle et une meilleure adaptation aux techniques préventives des difficultés.

2- L'absence de commissaires aux comptes dans de nombreuses entreprises commerciales.

Toutes les sociétés ne sont pas tenues de nommer en leur sein des commissaires aux comptes. Ceci est vrai pour les personnes morales non commerçantes, mais aussi pour certaines entreprises commerciales. Ainsi, seules les sociétés anonymes doivent obligatoirement désigner des commissaires aux comptes devant assurer le contrôle de leur gestion (article 10 AUDSCGIE)56(*). Pour les autres sociétés, la nomination des commissaires aux comptes est facultative. Ainsi, l'article 376 de l'AUDSCGIE précise que seules les sociétés à responsabilité limitée disposant d'un capital supérieur à dix millions (10 000 000) de Francs CFA ou réalisant un chiffre d'affaire annuel supérieur à deux cents cinquante millions (250 000 000) de francs CFA ou encore possédant un effectif permanent supérieur à cinquante (50) personnes sont obligées de désigner des commissaires aux comptes. En dehors de ces hypothèses, les SARL ne sont pas astreintes à cette formalité, pas plus que les autres sociétés de personnes. Cette situation peut mettre à mal la transparence dans ces sociétés et partant les opérations de dépistage des difficultés. On peut redouter des déguisements de la situation financière et économique réelle dans ces sociétés où les dirigeants peuvent être tenus solidairement et indéfiniment du passif social57(*). La crainte de la faillite pourra ainsi les pousser à retarder à l'extrême la prise des mesures qui auraient été salutaires si elles avaient été prises plus tôt58(*). Cette hypothèse navrante peut déjà traduire le caractère mitigé des résultats de la détection des difficultés par les associés.

* 49 Voir NGUIHE KANTE (P), article préc. p.97.

* 50 Article 717 AUDSCGIE

* 51 Cf Art. 725 al. 2 de l'AUDSCGIE.

* 52 Cf TCHEUMALIEU FANSI (MR), L'application des procédures collectives aux personnes morales de droit privé non commerçantes, mémoire, DEA, 2001, p. 9.

* 53 Bien que n'étant pas commerçantes, certaines d'entre elles peuvent régulièrement se livrer à des activités lucratives. Il s'agit de la « paracommercialité ». voir en ce sens GUYON (Y), « Le monde associatif », Rapport de synthèse présenté au 92e congrès des notaires de France, Rap Defrenois, 1996, note 17, cité par TCHEUMALIEU FANSI Op. Cit., p. 14.

* 54 Cette absence peut s'expliquer par le fait ces groupements poursuivent le plus souvent des buts d'intérêt général et de réalisation des oeuvres gratuites (cas des associations et des fondations).

* 55 Cf Art. 13 et suivants de l'AUDCG.

* 56 A raison d'un commissaire titulaire et d'un suppléant si la société ne fait pas publiquement appel à l'épargne et deux commissaires titulaires et deux suppléants si la société fait publiquement appel à l'épargne.

* 57 S'ils sont en même temps associés.

* 58 Contrairement au commissaire aux comptes qui doit agir rapidement sous peine d'engager sa responsabilité, les associés sont totalement libre de dénoncer les difficultés ou pas. Or l'espérance d'un retour à meilleure fortune ou alors de voir la conjoncture redevenir favorable incitera les dirigeants à retarder autant que faire ce peut la mise en oeuvre de l'alerte.

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