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Recherches sur la conformité du droit national au droit communautaire de la CEMAC : Le cas de la Taxe sur la Valeur Ajoutée

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par Dieudonné TONGA
Université de Yaoundé II-Soa - Diplôme d'Etudes Approfondies en Droit Public-option Droit Public Interne 2008
  

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§ 1 - Les violations par addition

Il importe de préciser au préalable que le qualificatif ``positives'' n'est pas ici employé pour légitimer ou justifier la violation du droit communautaire à l'échelle nationale. Il a simplement vocation à traduire l'idée d'ajouts non-conformes audit droit, lesquels ajouts consistent en la consécration d'exonérations non visées par la directive (A) et en la pratique de taux non-conformes (B) à ceux indiqués impérativement par cette dernière.

A - La consécration d'exonérations non visées par la directive

La directive TVA détermine elle-même les opérations exonérées de ladite taxe. Il s'agit d'une détermination qui se veut impérative et dénote de la volonté du législateur communautaire de ne laisser aucune marge de manoeuvre aux Etats en la matière. Le texte communautaire précise en effet qu'en dehors des biens et services par lui visés, « les Etats membres n'accordent pas d'autres exonérations ou exemptions de Taxe sur la Valeur Ajoutée. En particulier, aucune exonération ou exemption n'est accordée par les Etats membres dans le cadre de mesures d'incitation à la création d'entreprises et à l'investissement, dans le cadre de mesures ou dispositions visant des secteurs particuliers, ou dans le cadre de conventions particulières »259(*). Il est pourtant loisible de constater que des exonérations non visées par la directive sont consacrées aussi bien par le CGI (1) que par des textes particuliers (2).

1) Les exonérations consacrées par le Code Général des Impôts

En dépit des très expresses défenses du texte communautaire, le CGI consacre propio mutu de nombreuses exonérations non-visées par cette dernière. Il s'agit à la fois d'exonérations générales et d'exonérations touchant spécifiquement aux biens dits de première nécessité.

Dans la première catégorie, mention peut être faite de l'exonération des ventes de produits pétroliers destinés à l'avitaillement des aéronefs des sociétés ayant leur siège au Cameroun. Il est à souligner à cet effet que la seule exonération visée par la directive et touchant aux aéronefs et navires est celle relative aux opérations d'entretien et d'avitaillement de ces derniers260(*). L'on peut également noter l'exonération des intrants de certains biens d'équipement261(*) acquis par les sociétés de presse ou d'édition de journaux et périodiques. Cette exonération est, elle aussi, non-conforme au texte communautaire qui n'exonère que les opérations de composition, impression, importation et ventes des journaux et périodiques elles-mêmes, à l'exclusion de leurs intrants262(*). L'exonération des intrants est du reste considérée par le FMI comme « un cas de dérive des exemptions »263(*).

Dans la deuxième catégorie, les exonérations de l'annexe I de l'article 128 du CGI ci-après peuvent être mentionnées qui ne sont nullement visées par la directive264(*). Il s'agit des :

- OEufs ;

- autres maïs destinés à l'industrie avicole ;

- sel brut non-raffiné ni iodé ;

- fongicides ;

- herbicides ;

- désinfectants ;

- poissons ;

- sons, remoulages et autres résidus ;

- tourteaux ;

- pétrole lampant ;

- gaz domestique.

Lorsque ces exonérations ne sont pas le fait du CGI, elles sont subrepticement glissées dans certains autres textes à portée fiscale.

2) Les exonérations consacrées par des textes particuliers

Les exonérations consacrées par les textes particuliers ont en commun de n'être pas prévues par le droit communautaire. Or, ainsi que nous l'avons déjà souligné, ce dernier fait interdiction aux Etats d'envisager des exonérations autres que celles par lui visées. Il en résulte qu'elles constituent une violation de la directive. Certaines de ces exonérations ont une base conventionnelle cependant que d'autres revêtent un caractère purement exceptionnel.

Les exonérations conventionnelles de TVA résultent pour l'essentiel de conventions d'établissement signées entre l'Etat du Cameroun et certaines entreprises265(*). Sont concernées par l'exonération de TVA dans lesdites conventions, les importations et achats locaux de matériels et d'équipements, ainsi que les prestations de services directement liées auxdites opérations. L'objectif de ces exonérations conventionnelles que l'on a pu qualifier de « véritable déni de fiscalité »266(*), est d'attirer les investisseurs et de faciliter la réalisation de grands projets. L'on désigne ainsi les projets qui ont un impact positif sur le développement notamment grâce au nombre important d'emplois qu'ils suscitent.

Quant aux exonérations exceptionnelles, elles sont souvent accordées au travers de simples attestations de l'administration fiscale. Elles bénéficient pour l'essentiel à des particuliers et à certaines associations ou congrégations religieuses267(*). Elles ont la particularité de marquer une double violation du droit communautaire et de celui national. De la lecture de l'article 128 du CGI relatif aux exonérations en matière de TVA, il ressort en effet que les associations et autres congrégations religieuses ne sont pas visées. Il en est d'autant plus ainsi que dans son essence, l'exonération de TVA porte généralement sur une activité et non sur une personne ou sur une structure268(*). La seule possibilité offerte aux associations et organismes est celle du remboursement en fin d'exercice269(*). Encore faut-il pour cela que ces derniers soient sans but lucratif et soient reconnus d'utilité publique.

Ces exonérations exceptionnelles révèlent la trop grande importance prise par la doctrine administrative en matière fiscale, au détriment de la loi270(*). On sait pourtant qu'en vertu de la hiérarchie des normes, la doctrine administrative ne peut empiéter sur des règles de niveau supérieur. La règle étant édictée par le souverain ou ses représentants, l'administration ne doit rien y ajouter ou retrancher271(*).

Au total, qu'elles soient conventionnelles ou exceptionnelles, les exonérations de TVA précitées marquent une violation du droit communautaire. Et lorsqu'à cette violation s'ajoute celle des taux, l'on est en présence d'une rupture profonde d'avec le droit communautaire.

* 259 Article 6 de la directive TVA.

* 260 Article 6 (14)-c.

* 261 Il s'agit de biens d'équipement destinés aux opérations de composition, impression, importation et ventes de journaux et périodiques.

* 262 Article 6 (12).

* 263 M. KEEN, Mario MANSOUR, Anne-Marie GEOURJON, Gilbert MENARD, op. cit. p. 22. Le rapport du FMI souligne en substance : « il s'agit ici clairement d'un cas de dérive des exemptions, où le désir d'avantager certains produits en les exonérant pousse à poursuivre la même logique en exonérant également les produits entrant dans leur production ».

* 264 Annexe 3 de la directive n°1/99-CEMAC-028-CM-03 du 17 décembre 1999.

* 265 Au rang des entreprises actuellement sous convention d'établissement avec le gouvernement camerounais, figurent en bonne place ALUCAM, AFKO CEMENT, AES SONEL (pour le projet gazier de Kribi), CAMRAIL, CHANTIER NAVAL ET INDUSTRIEL DU CAMEROUN, COTCO et NOBLE ENERGY CAMEROON LIMITED.

* 266 G. R. KAKE KAMGA, L'attractivité du système fiscal camerounais, Mémoire de DESS Administration fiscale, Université Paris Dauphine - Panthéon Sorbonne, 2006, p. 38.

* 267 V. notamment lettre n°2765/MINFI/DI/LC/L du 26 mai 2004 relative au régime fiscal de l'Archidiocèse de Yaoundé.

* 268 En effet, la TVA est par définition un impôt réel. Sa personnalisation aboutit à créer d'énormes distorsions entre les opérateurs économiques.

* 269 V. article 149 (3) in fine.

* 270 Certes, les contribuables sont garantis contre les changements de doctrine, ce qui constitue une limite incontestable à l'arbitraire administratif. Mais cette garantie elle-même ne va pas sans poser de problèmes au regard de l'ordre juridique. Comme le note M. BOUVIER, étant applicable même dans la cas où la doctrine administrative a un caractère illégal, elle constitue en effet un mécanisme de régulation difficilement compatible avec la cohérence de l'ordre juridique et la hiérarchie des normes (M. BOUVIER, « La doctrine administrative en doit fiscal : entre droit et politique », In Revue française de finances publiques, n°75, septembre 2002, p. 87).

* 271 A. BARILARI, « La doctrine administrative : interprétation ou réorchestration ? », In Revue française de finances publiques, n°75, septembre 2002, p. 44.

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