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Le concept de développement durable : le cas de l'Afrique subsaharienne

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par Vincent Thierry BOUANGUI
Université de Reims Champagne - Ardenne - Diplôme d'étude approndie 1995
  

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SECTION I: LES FREINS ENDOGENES

Les freins endogènes, plus difficiles à pallier, sont les problèmes de pauvreté, de croissance démographique, de la totale dépendance des économies africaines aux ressources naturelles, de la crise financière, sociale, économique et monétaire et enfin de l'épineux problème de la dette.

PARAGRAPHE I : L'OBSESSION DU COURT TERME

Comme nous le verrons, les Etats d'Afrique subsaharienne sont présentement animés par une obsession du court terme. Cette obsession s'exprime par un recours à l'exploitation intense des ressources naturelles, rendue possible par la pression des problèmes tel que l'accroissement des franges de populations de plus en plus pauvres.

A-LA TOTALE DEPENDANCE DES ETATS AFRICAINS AUX RESSOURCES NATURELLES

Les économies africaines sont fortement tributaires des ressources naturelles, c'est le cas aujourd'hui et hélas, cela durera encore pendant plusieurs décennies. Les ressources naturelles contribuent majoritairement à la formation du produit national brut et une place de choix est faite aux cultures d'exploitation qui restent le principal secteur pourvoyeur de devises étrangères. C'est une économie de "cueillette" basée sur les activités agro-sylvo-pastorales sans grande intégration des différents composants, et sur l'exploitation pétrolière et l'extraction minière. Donc des produits dont l'utilisation et le commerce doivent être prudents et rationnels afin de promouvoir le développement durable.

Or, vu la multiplicité des problèmes pressants tels les déficits budgétaires, eux-mêmes dus aux taux de croissance insuffisants, à la crise de la dette, à la faiblesse des cours de produits de base, à la détérioration continue des termes de change, les Etats sont tentés de reléguer les politiques d'environnement au second plan, au point de créer une dette sociale et écologique dont les modalités de remboursement ne sont pas encore connues à ce jour(1).

La tendance actuelle est à une véritable obsession à la croissance économique quelles que soient les modalités de son accession. L'exploitationdestruction de la forêt tropicale, la multiplicité des grands aménagements hydrauliques, les monocultures d'exploitation figurant parmi les grands programmes menés pendant trente ans à l'encontre de toute conception environnementaliste sont loin d'être totalement abandonnées, bien que les conséquences négatives patentes de certaines de ces orientations obligent à aménager fondamentalement de nombreux projets(2).

Le manque de ressources alternatives pour faire face à la crise accentue cette exploitation des ressources naturelles, conduisant à accroître la détérioration de l'environnement. Le statut actuel des Etats africains, "Etats rentiers" (ne dépendant que des redevances de ses ressources naturelles) n'est pas favorable à l'instauration d'un développement durable. Celui-ci ne peut voir le jour que par un changement même du substrat économique dont la crise et la pauvreté des populations constituent les retombés.

(1) Emiliènne Anikpo N'TAME, op-cit, page 235

(2) Ibdem, page 153.

B-PAUVRETE ET ENVIRONNEMENT

65 à 85% de la population de l'Afrique au sud du Sahara, soit 4 sur 5 Africains vivent directement ou indirectement de l'agriculture de subsistance, qui suppose le défrichage d'une grande partie de la forêt. Ils utilisent le bois pour la cuisson des aliments et le chauffage des maisons. Cette forte population est constituée en majorité des couches très fragiles de la société et ne peut produire sans endommager l'environnement qui leur sert de base de production. Leurs pratiques culturales et les intrants qu'ils utilisent entraînent, en effet, l'appauvrissement des terres cultivées. Ainsi, la pratique des cultures sur brûlis (technique la plus répandue dont la déforestation arbustive, le déboisement et les feux de brousse sont les différentes étapes de sa réalisation) est le meilleur exemple de cette détérioration des terres qui se manifeste par l'érosion et la perte de fertilité et de productivité des sols. Donc en dépit de tous les risques écologiques qu'entraîne la destruction des forêts, partout en Afrique, au nom de la survie, celles-ci continuent d'être, dénaturées et finissent par disparaître (la superficie des forêts africaines recule de 0,2% à 4% par an: ainsi la Côte d'Ivoire qui avait 30 millions hectares de forêt au début du siècle en comptait 4 millions en 1980 et à peine 2 en 1988, au Sénégal, environ 75 milles d'hectares de forêts disparaissent chaque année...), l'équilibre entre l'homme et la nature est en train de se rompre à jamais.(3)

Par ailleurs, le surpâturage (au Tchad, au Niger, au Mali, au Soudan et en Mauritanie...) et les pratiques culturales minières qui exposent les sols au lessivage et, dans certains cas, en accélèrent la concrétion et l'induction constituent le quotidien des population de l'Afrique au sud du Sahara qui animées par l'instinct de survie et faute de techniques et technologies fiables

(3)Revue française d'administration publique, Janvier-Mars 1990, n° 53, page 101.

n'ont d'autre choix que celui de polluer et d'exploiter au jour le jour leur environnement.

Selon les chiffres de 1991, l'Afrique s'enfonce davantage dans la pauvreté, son revenu par habitant est tombé à 0,6%. Le nombre des pays les moins avancés (PMA) dans le monde est passé de 31 à 49 entre 1980 et 1994, et le total en Afrique subsaharienne est aujourd'hui de 34, d'après la décision du Conseil économique et social de l'Onu qui a ajouté l'Angola et l'Erythrée sur la liste, soit 68% des pays les plus pauvres du monde. Le revenu annuel par habitant est de l'ordre de 80 à 300 dollars, soit 1,40FF par jour. Cette situation vient empirer le sort réservé à l'environnement car comme les experts l'ont démontré à Rio, une fois menacé, l'environnement appauvrit davantage les populations. La pauvreté dans ce continent est loin de ménager avec la protection de l'environnement: 80% des ressources énergétiques sont tirées des bois de feu. L'éradication de la pauvreté paraît à cet instant comme un défi préalable à l'instauration du développement durable. Ceci n'est pas une révélation, car bien connu de tous. Mais il s'agit maintenant de mettre en pratique cette politique.

Selon le rapport du CMED, "la pauvreté est à la fois la cause majeure et l'effet des problèmes environnementaux globaux. Il serait futile de vouloir aborder ces problèmes sans prendre en compte le facteur sous-jacent de la pauvreté et de l'environnement international dans la perspective large".

Or, c'est là où le continent africain semble se trouver dans un cercle vicieux, voire un labyrinthe. En effet, regorgeant une population de pauvres, l'Afrique ne dispose pas de moyens de leur donner une meilleure vie, l'éradication de la pauvreté ne pouvant s'obtenir que par une forte croissance. Dans le cadre africain (celui de son infrastructure technologique), cette

croissance n'est possible que par une exploitation intense de ses ressources naturelles, autres formes de détérioration de l'environnement. D'ailleurs, le document de synthèse du PNAE congolais signale bien ce fait en ces termes: "la conséquence directe de cette situation est de préconiser des activités extractives et de politiques de développement qui ne tiennent pas automatiquement compte de la dimension long terme du développement mais qui favorisent le fait que les ressources soient hypothéquées et exploitées de manière inconsidérée". Le document ajoute que "Devant une baisse de niveau de vie, la réaction normale des populations est de se retourner vers une exploitation des ressources naturelles qui ne demande aucun investissement initial et qui peut générer de revenus rapides, mais qui a des impacts dévastateurs sur l'environnement"(4) M Mbaya KANKWENDA* a aussi abordé le problème dans le même sens "...Ce n'est pas par l'institution des parcs et réserves, la mise en oeuvre des règlements et autres appareils de protection pour les besoins du tourisme, de la science ou de l'amour de la nature que l'on peut sauvegarder l'environnement et assurer la vie aux générations futures en Afrique si les générations présentes sont complètement démunies et condamnées à surexploiter l'environnement. Mais c'est plutôt en assurant à ces derniers ou mieux en les engageant dans un processus de croissance soutenue et équitable que le discours sur la protection de l'environnement peut réussir. L'Afrique de demain sera nue au sens propre et au sens figuré si une telle croissance n'est pas réussie aujourd'hui"(5).

Pendant la conférence de Rio, le problème de la pauvreté a été pris en compte; la lutte contre la pauvreté est inscrite dans la déclaration comme une

(4)Document de synthèse, stratégies sectorielles, volume II, scénarios sectoriels, stratégies nationales

1992

*Chef de division du programme régional et de l'analyse des politiques, bureau régional pour l'Afrique,

PNUD

(5)CColloque sur le thème: Les Nations-unies et le développement, le cas de l'Afrique, Marseille, des 3 -4 Décembre 1993, page 108, éd A Pédone, Paris 1993.

priorité de la communauté internationale. Mais le retard enregistré jusqu'à présent dans la reconstitution des fonds visant à lutter contre ce fléau n'est pas de nature à diligenter l'établissement d'un développement durable en Afrique. En plus, la lutte contre la pauvreté en Afrique suppose une transformation fondamentale de ses structures économiques, politiques et socio-cuturelles, ce qui sous-entend qu'en attendant qu'elle bat en retraite l'Afrique aura déjà connu une forte dégradation et le développement durable risquera de devenir pour ce continent qu'un voeu pieux comme l'autosuffisance alimentaire et santé pour tous, pour ne citer que ceux-là.

On peut dès lors se demander si l'Afrique devra t-elle compter avec la communauté internationale pour éradiquer le fléau de la pauvreté? Nous sommes très sceptiques, les précédents en ce domaine nous renseignent mieux. Le continent a déjà fait l'objet d'études et de résolutions en vue de l'éradication de la pauvreté, mais ces bonnes intentions n'ont jamais été suivies d'actions concrètes. On se rappellera du programme d'action des Nations Unies pour le redressement économique et le développement de l'Afrique (1986-1990) adopté par l'assemblée générale à la mi-1986 et prolongé le 21 Avril 1992 par l'adoption de l'ordre du jour des Nations Unies pour le développement durable de l'Afrique dans les années 90.

Edem Kodjo,* appelant l'élite africaine à une intériorisation de cette prétendue solidarité internationale sur la lutte contre la pauvreté dans les pays en développement, écrivait "que les Africains ouvrent les yeux sur les réalités du monde, ils verront que les puissances industrielles confrontées à d'intenses difficultés sociales avec leurs millions de chômeurs ont déjà fort à faire pour réduire la pauvreté chez elles, et qu'en toute logique, elle ne peuvent situer au premier rang de leur préoccupations l'éradication de la misère dans les

* Intellectuel africain et Premier ministre Togolais

contrée lointaines" et de conclure "il faut donc, dans le cadre de la politique économique mondiale nous convaincre que notre continent possède des atouts et nous sommes les seuls à pouvoir créer avec ou sans aide extérieure- notre propre richesse par un développement conçu en fonction de nos besoins"(6). L'Afrique a-t-elle des besoins spécifiques à elle? Cela se pourrait, mais ce qui est sûr c'est que malgré la prise de position officielle des autorités africaines à Rio et la rédaction des PNAE, la question de la pauvreté demeure l'obstacle majeur.

Mais le pire pour le continent noir est qu'à côté de ce fléau, il y a celui de l'augmentation démographique et les pesanteurs socio-culturelles qui rendent le développement durable très hypothétique.

PARAGRAPHE II: LA CROISSANCE DEMOGRAPHIQUE ET LES
PESANTEURS SOCIO-CULTURELLES

Il s'agit là de deux facteurs déterminants dans la mise en oeuvre du développement durable. En Afrique, comme nous le verrons par la suite, ces facteurs ont atteint un niveau tel que si rien n'est fait ils résisteront à toutes politiques environnementales. Mais à propos de l'augmentation démographique, il faut être très lucide pour éviter de tomber dans des conclusions mécaniques et simplistes que nous rencontrons dans plusieurs discours.

(6) L'occident du declin au défi, page 120

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"L'imagination est plus importante que le savoir"   Albert Einstein