WOW !! MUCH LOVE ! SO WORLD PEACE !
Fond bitcoin pour l'amélioration du site: 1memzGeKS7CB3ECNkzSn2qHwxU6NZoJ8o
  Dogecoin (tips/pourboires): DCLoo9Dd4qECqpMLurdgGnaoqbftj16Nvp


Home | Publier un mémoire | Une page au hasard

 > 

Les lanceurs d'alerte français, une espèce protégée ?

( Télécharger le fichier original )
par Julia Le Floc'h - Abdou
Paris X Ouest - Nanterre La Défense - Master II Droit pénal et Sciences criminelles 2015
  

précédent sommaire suivant

Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy

2 - Des journalistes aux frontières des lanceurs d'alerte ?

Sous réserve du principe de liberté d'expression, lors d'enquêtes et d'investigations réalisées par les journalistes, ceux-ci peuvent être mis en examen sous différents chefs d'inculpation231(*).

Les deux employés français du cabinetd'audit PwC (Antoine Deltour et Raphaël Halet) qui sont à l'origine du scandale Luxleaksont été mis en examen et poursuivis pour vol, divulgation de secrets d'affaires, violation de secret professionnel, blanchiment et fraude informatique. Organisé par le cabinet d'audit, ce scandale a mis en lumière les montages juridiques complexes permettant l'évasion fiscale au bénéfice de grandes firmes internationales. La révélation publique a été rendue possible par la remise volontaire de

30 000 documents internes au cabinet, éclairant les pratiques fiscales critiquables de multinationales installées au Luxembourg232(*).

Les deux lanceurs d'alerte ont comparu le 26 avril 2016devant le tribunal d'arrondissement du Luxembourg.Le journaliste français Edouard Perrin qui a révélé une partie de ces documents lors d'un numéro de Cash Investigation, diffusé le 11 mai 2012 sur France 2 sous l'intitulé« Paradis fiscaux : les petits secrets des grandes entreprises », a été poursuivi pour complicité de vol, violation du secret professionnel et violation du secret d'affaires233(*) et était sur les bancs des accusés en compagnie des lanceurs d'alerte.Le 29 juin 2016,Deltoura été condamné à douze mois d'emprisonnement avec sursis assorti d'une amende de 1 500 euros et Haletà neuf mois d'emprisonnement avec sursis assorti d'une amende de 1 000 euros. Perrin a, quant à lui, été acquitté. Le parquet et les lanceurs d'alerte ont fait appel.Ce jugement démontre une nouvelle fois le manque de protection et le paradoxe ambiant puisque le tribunal a reconnu que ces derniers ont bel et bien « agi dans l'intérêt général ».Il a également constaté qu'il n'existait aucune protection en droit luxembourgeois ou au niveau européen pour les lanceurs d'alerte. La nouvelle directive du secret des affaires instaurant une protection européenne n'ayant pas été transposée par les États234(*).

Les journalistes d'investigation sont-ils, dès lors, euxaussi des lanceurs d'alerte ? Poursuivi pour complicité et violation de secret, la frontière entre lanceur d'alerte et journaliste est poreuse.

Cette question purement intellectuelle et non juridique n'est pourtant pas dépourvue de sens, puisque dans certains cas, le journaliste d'investigation peut être, soit « le complice » du lanceur d'alerte, soit transmettre aux autorités compétentes des informations qu'il détient et aller au-delà de ses missions en engageant sa responsabilité. L'exemple en la matière est celui du journaliste Serge Garde dans l'affairedes fichiers Zandvoort.

Intriguée par son rôle dans cette affaire, je me suis entretenue avec Serge Garde le 1er mars 2016 afin qu'il m'explique les conséquences de ce choix éthique et moral235(*). C'est un journaliste d'investigation qui a travaillé pour le quotidien L'Humanité depuis les années quatre-vingt. À cette époque, il s'intéresse particulièrement aux faits divers et aux questions de pédocriminalité. À partir de 1987236(*), il écrit différents ouvrages sur la question et révèle des affaires non connues du grand public. Il sera poursuivi et parfois condamné pour diffamation237(*).

L'affaire des fichiers Zandvoort débute, pour lui, en 1999, à l'époque où il enquête sur l'affaire Dutroux en Belgique. Au cours de son enquête, des informateurs le poussent à mener des investigations sur une autre piste.

Serge Garde va alors rencontrer Marcel Vervloesem qui lui transmet un fichier papier, établit à partir d'un CD-Rom, détaillant de nombreux transferts financiers et virements bancaires mais également des milliers de photos d'enfants violés.Il enquête sur tous ces fichiers (8 500 fichiers), recoupe les informations et découvre qu'il est en possession d'informations relatives à un réseau de pédocriminels.Il décide, alors, de relater son enquête minutieuse dans un dossier de trois pages dans le quotidien L'Humanité, le 24 février 2000 (avec les photos floutées des petites victimes).

Face à l'inertie des autorités et au peu d'impact sur l'opinion publique, l'article sera repris par le journal Le Figaro, les 6 et 7 avril 2000.Suite à cette nouvelle parution, l'ancienne Garde des Sceaux, Elisabeth Guigou, interviendra dans le journal télévisé de France 3, le 12 avril 2000, en déclarant que la justice n'était détentrice que des fichiers papiers, ce qui était insuffisant pour ouvrir une information judiciaire.Serge Garde se résout, alors, à communiquer les CD-Rom au Procureur général auprès de la Cour d'appel de Paris.

Interrogé, il affirme que « Le lendemain de l'intervention de la Garde des Sceaux, je remets donc le CD-Rom au Procureur général auprès de la Cour d'appel. La veille de cette remise, j'ai été convoqué par la BPM (Brigade de protection des mineurs) ».

Auditionné pendant plusieurs heures en tant que témoin, il déclare « l'impression qui se dégageait de cette audition, c'était que j'étais placé en garde à vue ».

Sur les intentions des policiers, il affirme qu'« ils voulaient connaître la source de mes fichiers. Ils voulaient savoir comment je m'étais procuré le CD-Rom, ils voulaient également connaître les informations que je détenais et les noms mentionnés dans les fichiers. Étant détenteur d'images pédopornographiques, ils m'ont dit que j'étais en infraction et que je pouvais être poursuivi sous cette qualification. Mais finalement, rien ne s'est produit. Pourtant, cette épée de Damoclès pesait sur ma tête ».

Interrogé sur le rôle conséquent qu'il a joué, il indique « Un journaliste n'a pas pour essence le devoir de dénoncer directement des comportements criminels. Ce n'est pas la nature de sa fonction. Il accompagne la divulgation d'informations et enquête mais ne dénonce pas directement à l'autorité judiciaire. En dénonçant, le journaliste met en péril sa source, avec le risque d'engager la responsabilité de celle-ci. Je me suis retrouvé devant un dilemme mais, tout en protégeant ma source, j'ai décidé de fournir à la justice le matériel nécessaire à la poursuite des criminels. J'avais l'espoir qu'on stoppe ces comportements et qu'on retrouve les enfants. Les fichiers contenaient plus de 90 000 photos d'enfants, tous ces enfants « virtuels » avaient une existence réelle et quand j'analysais les données des CD-Rom, je savais que ces enfants n'étaient pas sortis de ces réseaux ».

Quant à son rôle de lanceur d'alerte, il déclare « Certes j'ai dépassé le cadre de ma profession mais je ne me considère pas comme un lanceur d'alerte. J'ai surtout été un citoyen effaré de voir la justice de mon pays ne déployer aucuns moyens nécessaires pour enquêter ».

À la suite de sa transmission, une information judiciaire et une saisine de juge d'instruction seront entreprises. L'instruction de ce dossier va se clore en 2003 par un non-lieu général.En 2001, Serge Garde, en collaboration avec Laure Beneux, écrira un ouvrage sur cette affaire238(*).

Sur les répercussions personnelles de cette affaire, il affirme « J'ai été menacé. Des menaces de mort, au moment de la sortie du livre. J'interprète cela comme des pressions, des tentatives de vouloir m'empêcher de faire mon travail, on veut me faire peur, me déstabiliser. Par ailleurs, deux procès en diffamation nous ont été intentés à la suite de la parution du livre ».

L'exemple de Serge Garde met en lumière cette frontière perméable entre lanceur d'alerte et journalisme d'investigation239(*). Ce cas est rare mais dévoile cette ambiguïté vacillante.

B - Citoyens et salariés, l'hypothétique liberté d'informer

En France, les citoyens et agents ayant un lien de subordination avec l'institution dénoncée peuvent alerter par le biais de la voie interne mais la divulgation publique est exclue.

La loi du 6 décembre 2013 a implicitement autorisé cette dénonciation médiatique mais actuellement les ressorts de cette possibilité n'ont pas été étudiés et appliqués. L'article 1er de la loi Blandin a explicitement fait référence à une divulgation publique240(*).

Récemment, la Chambre sociale a jeté un trouble en apportant plus de questions que de réponses. Dans son arrêt du 30 juin 2016 (n°15-10.557), elle a signifié que les lanceurs d'alerte seraient protégés lorsqu'ils porteront à la connaissance du procureur de la République des faits de corruption mais également en cas de dénonciation à des tiers. Par cette formule, la Cour de cassation aurait-elle autorisé implicitement une éventuelle dénonciation médiatique ?

De manière générale, les agents publics ou privés sont contraints à une dénonciation interne. Ceux qui s'autorisent à divulguer publiquement sont sanctionnés pour ce choix (1). Les citoyens diffusant des alertes mais n'ayant pas un lien de subordination, sont, eux aussi, régulièrement poursuivis (2).

1 - L'utopique liberté de communication des agents privés et publics

Les exemples d'agents publics condamnés pour avoir usé de la presse sont nombreux.

Ces fonctionnaires subissent des poursuites disciplinaires et pénales au motif qu'ils ont violé leurs obligations statutaires.À l'instar de Philippe Pichon, la policière SihemSouid fut sanctionnée pour manquement à son obligation de réserve. Elle avait alerté en interne(le Défenseur des droits et le procureur de la République) les comportements racistes, sexistes et homophobes de ses collègues policiers. Face à l'immobilisme, elle avait dénoncé publiquement ces agissements dans un livre intitulé « Omerta dans la police ». Elle fut révoquée de ses fonctions. Cette sanction sera confirmée par le Tribunal administratif et la CAA au motif que son livre avait profondément dégradé l'image de l'Administration auprès de l'opinion publique241(*).

Pour les salariés du secteur privé, la sanction est la même s'ils usent de la presse pour alerter.

La Cour de cassation, le 23 septembre 2015, a rappelé que l'exercice de la liberté d'expression ne peut constituer une faute qu'à la condition d'avoir dégénéré en abus242(*).

En l'espèce, le délégué général d'une association avait été licencié à la suite de propos tenus à l'encontred'un certain nombre d'interlocuteurs internes et extérieurs de l'association.Selon la Cour d'appel de Paris, ils caractérisaient un manquement à son obligation de loyauté et un comportement en « graves contradictions avec les fonctions confiées ».La Cour de cassation avait cassé la décision car elle n'avait pas caractérisé « l'existence, par l'emploi de termes injurieux, diffamatoires ou excessifs, d'un abus dans l'exercice de la liberté d'expression dont jouit tout salarié ».L'abus de la liberté d'expression du salarié doit, donc, être juridiquement caractérisé ; les propos tenus devantêtre injurieux,diffamatoires ou excessifs.

Le but poursuivi par le salarié sera également étudié. Si ses propos avaient pour dessein la protection d'un intérêt supérieur ou légitime (comme la santé ou l'environnement), la sanction prononcée par l'employeur sera considérée comme excessive.Il appartient à l'employeur de prouver le manquement à l'obligation de loyauté et le caractère abusif des propos tenus par le salarié.

De sorte quesi le salarié peut manifester ses désaccords, il est tenu par des obligations. Ainsi, la protection, dont il peut bénéficier, sera analysée sous différentes conditions.

2 - Le discours admissible des citoyens

Se pose la question des citoyens ou associations non soumis à un lien hiérarchique dénonçant les agissements d'une entreprise ou d'une institution. Aucune protection spécifique n'a été envisagée dans ce cas d'espèce (sauf la loi Blandin sous certaines conditions). Rappelons que tous les textes français ou européens énonçant les critères d'un lanceur d'alerte maintiennent cette obligation de subordination hiérarchique.Symbole de cette problématique, deux exemples sont à citer.

D'une part, Robert Bell et un jugement important intervenu en 1998.

En l'espèce, Bell, dans son livre Les Sept Péchés capitaux de la haute technologie243(*), critiqua avec virulence la société Eurotunnel pour sa gestion de la sécurité du tunnel sous la Manche.

Exposé à un risque d'incendie insuffisamment pris en compte pour des raisons économiques, il le qualifia de « plus long crématorium du monde »244(*).La société intenta une action en justice sur le fondement de l'infraction de dénigrement 245(*) et l'article 1382 du Code civil.

Le TGI de Boulogne-sur-Mer246(*) relaxa Robert Bell au bénéfice que « si la critique émise était vigoureuse, elle est d'une tonalité professionnelle exempte d'excès polémiques et assortie d'un argumentaire technique et économique très élaboré »247(*).Dans leur motivation, les juges avaient relevé que la liberté d'expression doit être reconnue« alors même que les inquiétudes et les alarmes exprimées dans ce livre pourraient être excessives et infondées » et qu'elle « doit être d'autant plus garantie qu'il s'agit d'un risque collectif [...] ce qui justifie qu'une réflexion sur la sécurité du tunnel sous la Manche soit rendue publique et dépasse le milieu discret des spécialistes de l'entreprise ».Ainsi, sur le fondement de la liberté d'expression, un citoyen a pu dénoncer avec force la prééminence d'intérêts économiques au détriment d'intérêts humains.

D'autre part, l'association L.214Éthique et Animaux.

Elle a pour but d'enquêter et de médiatiser les conditions d'élevage, de pêche, de transport et d'abattage des animaux dans l'industrie agroalimentaire. Elle dévoile régulièrement des vidéos tournées clandestinement afin d'ouvrir le débat sur la condition animale en France.

Àchaque sortie médiatique de vidéos, l'association se voit opposer des arguments juridiques remettant en cause l'obtention et l'utilisation des images.Diffamation, dénigrement de marque et d'image, atteinte à la réputation, recel d'images, infractions d'espionnage portant atteinte à l'intimité (auditif ou audiovisuel), violation du domicile constituent des infractions régulièrement opposées à l'association.

Certains attribuent à l'association le statut de lanceur d'alerte. Pourtant, juridiquement les conditions ne sont pas réunies.Le salarié, travaillant dans l'industrie agroalimentaire, diffusant les images à l'association peut être qualifié de lanceur d'alerte si les critères requis sont rassemblés (ce qui n'est pas le cas actuellement, puisqu'aucune législation française dispose que la poursuite du respect de la condition animale permet d'accéder au statut de lanceur d'alerte).

Brigitte Gothière, porte-parole de L.214, avait déclaré à ce propos« On ne dira rien sur comment on a obtenu ses images parce que nous avons des personnes à protéger ».

Lors du Colloque du 2 juin 2016« Animal Politique : Comment mettre la condition animale au coeur des enjeux politiques ? » qui s'est déroulé à l'Assemblée nationale, l'avocate Hélène Thouy (avocate de l'association L.214) a préconisé une extension de la loi Blandin.En effet, la loi Blandin de 2013 énonce que « toute personne physique ou morale a le droit de rendre publique ou de diffuser, de bonne foi, une information concernant un fait, une donnée ou une action, dès lors que la méconnaissance de ce fait, de cette donnée ou de cette action lui paraît peser un risque grave sur la santé publique ou sur l'environnement ».Cette loi a élargi le champ à toute personne physique ou morale (donc hors du lien de subordination) dans le domaine de la santé publique ou environnemental. Hélène Thouy a recommandé que le champ matériel de l'alerte s'étende à la protection animale, et que des associations intègrent le domaine dévolu en la matière248(*).Innovation de la loi Blandin, elle a autorisé l'alerte sanitaire par la voie publique.

Actuellement, le seul moyen de défense que peut opposer une association ou un citoyen dénonçant publiquement des comportements répréhensibles est le droit à la liberté d'expression. Seul fondement possible, celui-ci primera en vertu de la place première qu'il occupe.Cependant, certains vont les poursuivre au motif qu'ils ont abusé de celle-ci sur le fondement de la loi du 29 juillet 1881249(*).

Ces infractions, permettant de rentrer en voie de condamnation contre les lanceurs d'alerte, sont d'autant plus faciles à mobiliser que les lois récentes ont exclu la possibilité de passer par la presse ou par les nouvelles technologies numériques250(*).

Détenteur d'un savoir important, le lanceur d'alerte initie une nouvelle forme de citoyenneté. En décidant d'alerter ou de contourner la loi et d'en subir les conséquences, il suscite un débat servant l'intérêt général.Pourtant le droit d'alerter est limité par natureaux autorités judiciaires, administratives ou associatives compétentes.

L'alerte ne peut être diffusée sans respecter une procédure formelle et ne s'étend pas à tous les domaines et comportements répréhensibles. Les agents lanceurs d'alerte doivent obéir à plusieurs critères (nécessaires mais trop strictes) qui les placent dans l'impossibilité de bénéficier d'un statut protecteur.Pour rappel, en France, malgré le foisonnement de lois et jurisprudences, aucun individu n'a pour l'heure profiter de ce statut. À l'exception du récent arrêt de la Chambre sociale du 30 juin 2016 qui a fait application pour la première fois de la loi du 13 novembre 2007 relative à la lutte contre la corruption.

Pour une meilleure articulation des règles et procédures, une cohérence des textes normatifs devra être à l'avenir élaborée.

La restriction des champs de compétence des canaux d'alerte asphyxie une réelle protection.

Le multiplication d'organisme pouvant recevoir les alertes est également un obstacle à une protection efficace puisque les décisions prononcées par ceux-ci revêtent des solutions contraires.Il y a, donc, une dispersion et une absence de coordinationdes instances chargées de protéger les lanceurs et de traiter les alertes.Pour remédier à cette situation, une réflexion devra s'engager prochainement pour la création d'une autorité administrative indépendante qui aura à sa disposition les instruments et pouvoirs suffisants pour recueillir, traiter et analyser les alertes, tout en protégeant les lanceurs.

Au vu des carences de ce droit d'alerter, certains empruntent la voie publique pour dénoncer des agissements sibyllins pénalement répréhensibles ou des dysfonctionnements larvés.

Lorsqu'ils prennent ce chemin public, un principe fondamental va primer : la liberté d'expression. Mais elle sera mise à l'épreuve car n'étant pas absolue, des dérogations sont possibles. Ainsi lorsque la voie médiatique est utilisée, la prudence est de mise puisqu'il sera possible d'opposer aux lanceurs d'alerte des abus à la liberté d'expression.

En conclusion, malgré les différentes procédures et règles pour protéger les lanceurs d'alerte, un défaut de lisibilité, un manque de cohérenceet une inévitableimprévisibilité se sont forgés. Faisant rejaillir, inéluctablement, une insécurité juridique sur eux.

* 231Violation du secret de l'instruction et de l'enquête, violation du secret professionnel, vol et recel de vol, infraction d'espionnage (infraction portant atteinte à l'intimité de la vie privée), diffamation publique ou injure publique.

* 232 Voir annexe 8, p. 154

* 233Le reste des documents, ainsi que de nouveaux accords fiscaux provenant de PwC, avaient ensuite été publiés en novembre 2014 par le Consortium international de journalistes d'investigation (ICIJ), à l'origine des Panama Papers.

* 234Cependant, la CJCE admet que la directive peut être invoquée contre un Etat membre qui ne l'a pas transposée ou qui l'a mal transposée. C'est l'effet direct vertical des directives qui suppose trois conditions : que la directive contienne des obligations suffisamment précises et inconditionnelles pouvant être appliquées sans mesure nationale de transposition (CJCE, 4 décembre 1974, Van Duyn) ; que le délai de transposition soit échu (CJCE, 5 avril 1979, Ratti) ; et que la directive soit invoquée par un particulier contre l'Etat qui n'a pas transposé ou mal transposé. En se fondant sur l'effet direct vertical d'une directive, un particulier poursuivi peut invoquer l'incompatibilité d'un texte pénal national avec une directive non transposée ou mal transposée. En cas d'incompatibilité, la juridiction pénale nationale neutralise la disposition pénale nationale.?

Par ailleurs, l'obligation d'interprétation conforme(CJCE, 10 avril 1984, Van Colson et Kamann) impose d'interpréter les dispositions nationales à la lumière du droit communautaire, même lorsque celui-ci résulte d'une directive non transposée. Cette obligation est applicable en droit pénal, ce qui signifie que les juridictions nationales, pour l'interprétation des textes nationaux d'incrimination ou des règles de responsabilité pénale, doivent prendre en compte le contenu du droit communautaire. Toutes ces règles pourront être invoquées lors du jugement en appel dans l'affaire LuxLeaks.?

* 235Voir annexe 3, p.136

* 236 Voir : S. GARDE, L'industrie du sexe, Temps Actuels, 26 août 1987, 190 pages

* 237Il sera poursuivi trente-six fois pour l'ensemble de son travail.

* 238Voir : S. GARDE et L. BENEUX, Le Livre de la honte : les réseaux pédophiles, Le Cherche-Midi, 12 octobre 2001, 200 pages.

* 239L'affaire de la journaliste Florence Hartmann démontre également la problématique de la protection des journalistes dénonçant des comportements répréhensibles et de la lisière entre journalisme et lanceur d'alerte.

* 240 Art. 1er de la loi Blandin : « Toute personne physique ou morale a le droit de rendre publique ou de diffuser de bonne foi une information concernant un fait, une donnée ou une action, dès lors que la méconnaissance de ce fait, de cette donnée ou de cette action lui paraît faire peser un risque grave sur la santé publique ou sur l'environnement.
L'information qu'elle rend publique ou diffuse doit s'abstenir de toute imputation diffamatoire ou injurieuse ».

* 241TA Paris, 13 juillet 2011, Mme Souid, n°10211146/5-1 ; CAA Paris, 31 décembre 2014, Mme Souid, n°13PA00914

* 242Cass, Soc, 23 septembre 2015, n°14-14021

* 243 R. BELL, Les Sept Péchés capitaux de la technologie, Paris, Le Seuil, août 1998

* 244JP FOEGLE, Les lanceurs d'alerte, étude comparée France-Etats-Unis, op. cit., p. 60-167

* 245Le dénigrement consiste à jeter le discrédit sur les produits, le travail ou la personne d'un concurrent. Il ouvre droit à réparation lorsque l'entreprise visée est désignée, expressément ou implicitement, ou identifiable par sa clientèle.

* 246 TGI Boulogne-sur-Mer, 12 août 1998, Société Eurotunnel c/ R. Bell et Editions Le Seuil, inédit

* 247 C. NOIVILLE et M-A HERMITTE, « Quelques pistes pour un statut juridique du chercheur lanceur d'alerte », Dossier, Revue Natures Sciences Sociétés, vol. 14, EDP Sciences, 2006, p. 4-9 http://www.nss-journal.org/articles/nss/pdf/2006/03/nss6306.pdf

* 248 En la matière, des changements ont été apportés par le projet de loi Sapin II - Voir : Conclusion générale, p. 121

* 249 Voir Titre II, Section 2, Paragraphe I

* 250 À l'exception de la loi Blandin en matière de protection de l'environnement et de sécurité sanitaire et la loi du 6 décembre 2013 qui a implicitement permis cette dénonciation médiatique.

précédent sommaire suivant






Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy








"En amour, en art, en politique, il faut nous arranger pour que notre légèreté pèse lourd dans la balance."   Sacha Guitry