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Les conséquences du principe que de responsabilité pénale des personnes morales en droit camerounais


par Ivan De Nguimbous Tjat Limbang
Université de Yaoundé II - Soa - Master en droit privé 2018
  

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§-2 : Le cumul de responsabilité comme un outil de répression entre les mains des autorités de poursuites

104. Le premier constat qui est fait sur l'alinéa (c) de l'article 74-1 est son extrême souplesse. En effet, il peut aboutir soit à un cumul excessif, soit à un décumul non justifié. Ce qui dans le dernier cas viderait l'admission du cumul de sa substance. Au fond, si le législateur ne s'est pas attardé sur la question, c'est pour mieux s'en remettre aux organes comme le ministère public et le juge, ainsi l'un grâce à son opportunité de poursuites pourrait aménager l'option à lui offerte (A), et l'autre par son impérium l'organiser (B).

A- L'aménagement de la possibilité du cumul par le biais de l'opportunité des poursuites reconnue au ministère public

105. Dans d'autres pays notamment en France, l'activité des parquets en matière de cumul de responsabilité est guidée par une circulaire de 2006 du garde des sceaux277(*). Au Cameroun, le procureur pourrait s'appuyer sur certains critères pour guider son choix en matière de cumul, ainsi il choisira de poursuivre soit l'un soit l'autre ou alors deux en fonction du caractère de l'infraction (1) ou en fonction de la possibilité d'identification des personnes physiques auteurs des actes incriminés (2).

1- Le critère basé sur le caractère de l'infraction

106.Objectivement, le procureur de la république peut faire le choix ou ne pas faire le choix du cumul en fonction de la nature de la nature d'infraction. Dans ce sens, il est généralement admis sous le prisme du droit comparé que le cumul de responsabilité entre personne physique et personne morale s'impose si l'infraction est intentionnelle, mais est exclu si l'infraction revêt un caractère non intentionnel, de telle sorte que seule la responsabilité pénale de la personne morale devrait être mise en jeu. C'est le cas par exemple du modèle belge qui n'admet le cumulque pour les infractions intentionnelles278(*) mais aussi du modèle français279(*).

Toutes les infractions caractérisées par une imprudence sont imputées uniquement à la personne morale. Ce qui revient à déresponsabiliser la personne physique pour les infractions non intentionnelles mais, aussi à courir le risque d'un cumul injustifié. Un autre critère pourrait guider l'exercice de l'opportunité des poursuites.

2- Le critère basé sur l'identification des personnes physiques auteurs des actes incriminés

107.Suivant ce critère les cas dans lesquels la personne morale sera seule poursuivie se limitent à ceux où l'identification de la personne physique ayant commis l'infraction est impossible, en premier lieu lorsque l'enquête n'a pas pu les identifier, ou lorsqu'à l'exercice du pouvoir politique le vote se fait sous bulletin secret280(*).

Le cumul sera moins envisageable lorsque l'organe est constitué d'un groupe de personne -comme le conseil d'administration- surtout lorsque l'infraction résulte d'une décision collective prise à la majorité ou à l'unanimité. Poursuivre toutes les personnes physiques ayant participé au vote, ou uniquement ceux qui ont voté favorablement ou même défavorablement cumulativement avec la personne morale aboutira à une chasse aux sorcières qui s'avèrera contreproductif surtout du point de vue financier, le coût du procès pénal pesant sur l'Etat. La question est alors résolue par un autre principe, celui de l'opportunité des poursuites. Le procureur de la république aura donc libre choix quant au cumul.

D'autres questions se posent notamment celle de savoir si les deux responsabilités sont liées de telles sortes qu'elles aboutiraient aux mêmes sanctions, ou à la même décision au fond ? Ces questions seront réglées par le juge.

B- La réalisation du cumul par le biais de l'impérium reconnu au juge pénal

108. Il est nécessaire pour le juge de pouvoir faire la différence entre le sort réservé à la personne morale et celui des personnes physiques poursuivies pour les actes incriminés. De telle sorte que le cumul de responsabilité ne devrait pas être assimilé à une identité de sanction (1) ou même à une identité des décisions au fond, les deux responsabilités étant autonomes(2).

1- Le choix de sanctions différentes pour des sujets différents

109. Le juge doit nécessairement dans le choix de la sanction, et ce malgré la liberté qui lui est reconnu en ce domaine différencier les peines et mesures de sûreté applicables à la personne physique et à la personne morale reconnue coupable. Ceci d'abord à cause du principe de l'individualisation de la peine, qui recommande au juge d'adapter la peine ainsi que ses modalités d'exécutions à la personnalité de l'auteur de l'infraction et aux circonstances de celle-ci. Ensuite à cause de l'inadéquation entre les peines applicables aux personnes physiques et la nature de la personne morale.

Ainsi, des circonstances atténuantes bénéficiant aux personnes physiques ne s'étendront pas nécessairement aux personnes morales ou même les circonstances aggravantes, enfin, le juge devra se référer à la pénologie particulière de chaque type de justiciable pour attribuer une peine.

2- Autonomie des responsabilités

110.Logiquement, l'admission d'un cumul de responsabilité ne doit pas laisser envisager l'hypothèse dans laquelle l'acquittement de la personne morale entrainerait l'acquittement de la personne physique et vice versa281(*). En effet, l'hypothèse du cumul nécessite de détacher la personne physique en tant qu'individu, du personnage d'organe ou de représentant dont il assume le rôle, et donc dans ce sens, d'arriver à des mécanismes d'imputation différents, des culpabilités différentes et donc à des sanctions différentes. Ainsi donc la personne morale seraresponsable pénalement et le cas échéant reconnue coupable, parce qu'elle a personnellement commise une infraction à travers des personnes lui servant de support physique pour matérialiser sa volonté de faire du profit ou de mener à bien sa politique. Il lui sera donc appliqué des sanctions spécifiques. La personne physique quant à elle sera pénalement responsable parce qu'elle a agi librement et consciemment et sera le cas échéant coupable parce qu'elle a commise une faute. On retrouve donc ici chez elle les notions classiques de discernement et de libre arbitre.

Dans ce sens l'on pourra aboutir à des cas où la culpabilité de personne physique ayant commis les actes incriminés est prouvée parce qu'elle a agi volontairement au mépris des dispositions légales, mais celle de la personne morale sera exclue parce qu'elle a pu démontrer que sa volonté illicite ne peut être établit, l'infraction n'ayant pas été réalisé pour son compte par le personnage lui servant de substratum humain.

Tout comme dans une autre hypothèse, la responsabilité de la personne morale pourra être engagée et sa culpabilité démontrée mais celle de la personne physique ne sera même pas envisagée parce qu'il n'avait pas la capacité de discernement, ou alors parce que sa volonté était abolie.

* 277L. n° 2004-204 du 9 mars 2004 généralisant la responsabilité pénale des personnes morales, CRIM 2006. 03 E8/13-02-2006 (NOR : JUSDO630016C.

* 278V. STRETEANU (F.), « La responsabilité pénale des personnes morales en droit roumain », in Revue de droit pénal et de science pénitentiaire, n° 2,2007 p. 340.

* 279 V. La loi du 10 Juillet 2000 et la Circulaire CRIM 200603 E8 du 13 février 2006, Ministère de la Justice. ROBERT(J.-H.), « Le coup d'accordéon ou le volume de la responsabilité pénale des personnes morales », in Les droits et le Droit : mélanges dédiés à Bernard Bouloc, Paris : Dalloz, 2007, p. 986.

* 280REINALDET DOS SANTOS (T-J), La responsabilité pénale à l'épreuve des personnes morales : étude comparée franco-brésilienne, op.cit. p. 118.

* 281« Par ailleurs, il faut dire que ces deux responsabilités sont indépendantes - de sorte que la relaxe prononcée en faveur de l'une n'a pas d'autorité à l'égard de l'autre. Dans le sens contraire, la condamnation prononcée contre la personne physique n'a pas d'autorité par rapport à la personne morale et vice versa ».REINALDET DOS SANTOS (T. J.), Thèse, op.cit. p 288. MARÉCHAL (J.-Y.), « Responsabilité pénale des personnes morales », op.cit. p. 27. On rencontre cette indépendance entre la responsabilité de la société et celle des dirigeants sociaux aussi en droit civil, voir par exemple Cour de cass., 2e Ch. civ., 17 juillet 1967, Gaz. Pal. 1967, p. 235. Par ailleurs, le paragraphe premier de l'article 41 du projet de nouveau Code pénal brésilien (Projet de Loi au Sénat n° 236/2012) souligne cette indépendance en énonçant que « la responsabilité des personnes morales n'est pas dépendante de la responsabilité des personnes physiques ».DOS SANTOS (T.J.), Thèse, op.cit. p.288.

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