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Des mécanismes de collaboration entre le conseil de sécurité de l'ONU et le conseil de paix et de sécurité de l'UA en matière de sécurité collectivepar Victor MPIENEMAGU Université de Lubumbashi - Licence (Bac+5) 2018 |
2.4. COMPETENCES EN MATIERE DE PAIX ET DE SECURITE INTERNATIONALESL'action de l'ONU en matière de maintien de la paix et de la sécurité internationales relève de la responsabilité première du Conseil de sécurité.la responsabilité première que lui reconnaît l'article 24 de la Charte n'est toutefois pas exclusive parce que l'Assemblée générale se voit reconnaître une responsabilité secondaire au titre des articles 10 à 12, 14, 24 et 35 de la Charte. En application de l'article 12, l'Assemblée générale ne doit aucune recommandation sur un différend ou une situation dont le Conseil est saisi à moins qu'il ne le lui demande. Malgré cette restriction, une certaine souplesse caractérise la pratique, l'Assemblée générale ayant par exemple adopté plusieurs recommandations relatives à l'ex-Yougoslavie alors que le Conseil de sécurité était saisi et ne lui avait pas formulé la demande. C'est au Conseil de sécurité, agissant dans le cadre du Chapitre VII, qu'il appartient de déterminer quand il y a lieu d'agir (article 39 de la Charte) et d'inviter les parties intéressées à se conformer aux mesures provisoires qu'il juge nécessaires ou souhaitables (article 40), mesures qui peuvent consister en une interruption des hostilités. C'est encore au Conseil de sécurité qu'il revient de décider de toutes autres mesures qui lui paraîtront nécessaires ou opportunes pour commander et maitriser la situation : mesures n'impliquant pas l'emploi de la force armée (article 41 de la Charte) ou action entreprise au moyen de forces aériennes, navales ou terrestres (article 42 de la Charte). Les premières peuvent revêtir la forme que détermine librement le Conseil : elles peuvent comprendre l'interruption complète ou partielle des relations économiques et des communications ferroviaires, maritimes, aériennes, postales, télégraphiques, radioélectriques et des autres moyens de communication ainsi que la rupture des relations diplomatiques116(*). Quant aux mesures d'ordre militaire, elles sont exécutées grâce aux forces armées, à l'assistance et aux facilités fournies par les Etats membres à l'invitation du Conseil de sécurité117(*). Leur emploi est déterminé conformément aux plans qu'il a établi avec l'aide de son Comité d'Etat-major118(*). Mais pour exercer sa mission générale que lui reconnaît l'article 24 de la Charte, le Conseil de sécurité n'est pas prisonnier du libellé des différends articles de la Charte : s'il mentionne fréquemment qu'il agit en vertu du Chapitre VII, c'est pour mieux faire ressortir le caractère obligatoire des mesures adoptées. Les résolutions qu'il prend à cet effet, peuvent être des recommandations ou des décisions. Le pouvoir discrétionnaire dont dispose le Conseil pour appliquer le Chapitre VII ne lui impose pas de prendre des décisions. Cette pratique conduisant à rapprocher les Chapitres VI et VII a été admise par la CIJ qui a posé aussi une méthode pour distinguer les recommandations des décisions ; il faut analyser soigneusement le libellé et, de plus, les termes de la résolution, les débats qui ont précédé son adoption, les dispositions de la Charte invoquées et tous les éléments qui pourraient aider à préciser les conséquences juridiques de la résolution, contribuent à déterminer la nature des pouvoirs utilisés119(*). Du fait qu'il vise plus particulièrement la sécurité collective, le Chapitre VII accorde au Conseil de sécurité une gamme complète des moyens pour la progression et la cohérence globale du système120(*). Les compétences énoncées au Chapitre VII lui permettent de constater et de qualifier une situation (article 39 de la Charte), d'adopter des mesures provisoires (article 40), de prendre des mesures coercitives non militaires (article 42). D'après l'article 39 de la Charte, le Conseil de sécurité peut constater l'existence d'une menace contre la paix, d'une rupture de la paix ou d'un acte d'agression (phase objective). Ensuite, le Conseil de sécurité procède à la qualification juridique de ce fait matériellement constaté (phase subjectif). Ce faisant, il s'est attribué une grande liberté d'appréciation pour procéder à cette étape préalable à la mise en oeuvre du Chapitre VII. Et malgré l'adoption en 1974 de la résolution 3314 (XXIX) de l'Assemblée générale portant définition de l'agression, il évite la plus part du temps de prononcer ce mot qui fait peur121(*). La constatation d'une menace à la paix ou d'une rupture de la paix est, aux termes de l'article 39 de la Charte, la première décision que le Conseil de sécurité doit prendre et qui détermine tout le développement ultérieur de sa mission. Pour le faire, en connaissance de cause, il peut procéder à l'enquête préalable de l'article 34122(*). Même sans habilitation spéciale, le Conseil peut toujours décider de connaître la matérialité des faits par des enquêtes ordinaires. Il est fondé même à créer des commissions d'enquête ou de bons offices au titre de la prévention des conflits. Il peut aller plus loin, sur base de l'article 34 et procéder à une enquête spéciale : il cherche alors à déterminer si la prolongation d'un différend ou d'une situation semble devoir menacer le maintien de la paix et de la sécurité internationales. L'objet de l'enquête est plus ambitieux, puisqu'elle aboutit à des conclusions de fond relatives à la qualification juridique des faits ; ces conclusions peuvent constituer la première étape vers une prise de positions sur le maintien de la paix123(*). Une fois établie la matérialisation des faits, il faudra les qualifier ; ce qui n'est pas une tâche aisée pour des raisons de fond liées à la complexité des relations internationales et des procédures liées à l'usage du veto au sein du Conseil de sécurité des Nations Unies. En revanche, le Conseil marque une grande hésitation pour qualifier une situation d' « agression », même lorsque celle-ci est flagrante124(*). Par ailleurs, afin d'empêcher l'aggravation de la situation constatée et qualifiée, le Conseil de sécurité peut inviter les parties à la mise en application des dispositions de l'article 40 de la Charte. Il peut aussi recommander un cessez-le-feu entre des belligérants, les mesures recommandées provisoirement ne préjugeant en rien de la suite de la procédure. Ce n'est qu'à l'issue de cette phase préliminaire que le Conseil de sécurité peut prendre des mesures coercitives impliquant ou non l'emploi de la force armée (article 41 et 42 de la Charte). Bien entendu, le Conseil de sécurité est autorisé à agir même si l'Etat ou les Etats qui sont à l'origine de la crise ou qui ont déclenché les hostilités sont eux-mêmes en dehors de l'Organisation. Lorsqu'il est saisi en vertu des articles 37 et 38, le Conseil peut recommander les termes d'un règlement. Ce faisant, il exerce la fonction de médiateur ou de conciliateur. De plus en plus, le Conseil de sécurité, agissant sur base de l'article 29 de la Charte, a tendance à créer des organes subsidiaires qui lui sont directement subordonnés et dont la mission est de l'assister dans sa tâche. Dans la plupart des cas, ce sont des organes ad hoc125(*)(on peut citer le cas de l'ONUC-MONUC-MONUSCO en République Démocratique du Congo). * 116 Idem, p. 54. * 117 Article 43 de la Charte des nations Unies. * 118 Article 46 de la Charte des Nations Unies. * 119 CIJ, D.C du 21 juin 1971 : conséquences juridiques pour les Etats de la présence continue de l'Afrique du sud en Namibie (Sud-Ouest africains), Recueil CIJ, 1971, p. 16. * 120 KISHIBA FITULA Gilbert, op.cit, p. 55. * 121 René-Jean DUPUY, cité par Yves PETIT, op.cit, p. 25. * 122 NGUYEN QUOC DIHN, op.cit, p. 812. * 123 Idem * 124 KISHIBA FITULA Gilbert, op.cit, p. 55. * 125 NGUYEN QUOC DIHN, op.cit, p. 813. |
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