WOW !! MUCH LOVE ! SO WORLD PEACE !
Fond bitcoin pour l'amélioration du site: 1memzGeKS7CB3ECNkzSn2qHwxU6NZoJ8o
  Dogecoin (tips/pourboires): DCLoo9Dd4qECqpMLurdgGnaoqbftj16Nvp


Home | Publier un mémoire | Une page au hasard

 > 

La protection financière du patrimoine public

( Télécharger le fichier original )
par Jennifer Marchand
Université des sciences sociales Toulouse 1 - Master 2 Droit public des affaires 2006
  

précédent sommaire suivant

Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy

A. La mise en valeur et l'exploitation du domaine public au fil des siècles.

Dès qu'une volonté de développer le domaine éminent20(*) apparaît, le contrat public occupe une place essentielle. Par exemple, les contrats de paréages au XIIIème siècle ont abouti à une vaste mise en valeur du domaine public, précédemment mal exploité et à la création d'environ 300 villes dans le Sud-Est de la France. Plus tard, les rois ont cherché, toujours par deux voies contractuelles ( fief et bail accensé), à faire mettre en valeur les marais, les mines, les colonies, les espaces agricoles et les quartiers. Ceci requiert des investissements, des droits étalés dans le temps et de véritables contrats publics-privés.

Rome nous a laissé de splendides constructions. Le Digeste, oeuvre juridique d'ensemble réalisée entre 528 et 530 par l'empereur Justinien, traitait en de nombreuses parties du droit administratif21(*). L'empire romain était détenteur d'immenses possessions domaniales et le fisc impérial utilisait deux sortes de concessions pour les exploiter : l'emphytéose perpétuelle et un bail temporaire d'une durée de cinq ans. La royauté et l'Eglise en France copièrent ces baux pour la gestion de leurs propres domaines.

En France, des contrats portant sur la mise en valeur du domaine public sont passés par les rois sous forme de fiefs22(*). Peu avant la fin de l'Ancien Régime, la perpétuité du contrat et la cession domaniale ont disparu. C'est le roi qui accorde discrétionnairement l'autorisation de faire l'ouvrage et d'exploiter en monopole une part du domaine public en fonction d'un tarif fixé par lui.

Au début du XVIIème siècle apparaissent des baux de longue durée spécifiquement dédiés au domaine public, associant à un travail public des services de longue durée. Si ce type de contrat trouve ses origines du temps de Henri IV, il connaîtra une considérable extension par l'action de Colbert qui les généralise pour les ponts et chaussées. Ces baux ne comportent pas de transfert domanial, si ce n'est la prise de responsabilité de l'édification et de l'entretien du domaine public. Les contractants de l'Administration s'obligent à tenir en bon état le patrimoine voire même à l'accroître et à l'améliorer. Les contrats sont rarement de plus de dix ans. Colbert, par une circulaire aux intendants, du 10 décembre 1669 imposa que les marchés des ouvrages soient accompagnés d'une phase d'entretien de huit à dix ans23(*). Ce contrat domina le XVIIIème siècle.

La Révolution n'arrête pas le processus des concessions. Elle ne supprime pas non plus les baux décennaux qui sont maintenus. Cette période clarifie les concepts en posant des principes qui sont en grande partie en vigueur aujourd'hui notamment celui de la loi des 2-17 mars 1791 établissant la liberté du commerce et de l'industrie. La Révolution et l'Empire influent directement sur les contrats domaniaux, il en résulte un nouveau régime pour le bail emphytéotique et les baux domaniaux. Pendant cette période, on abolit l'emphytéose perpétuelle. L'article 1 du décret des 18 et 29 décembre 1790 conserve néanmoins les baux de moins de 99 ans. La loi du 11 Brumaire an VII (1/11/1798) précise par la suite qu'est susceptible d'hypothèque l'usufruit ainsi que la jouissance à titre d'emphytéote des biens pendant le temps de leur durée. Cette rédaction montre que les légistes se sont rattachés à la tradition romaine pour laquelle l'emphytéose était un simple droit réel de jouissance de la chose d'autrui.

Le concept de contrat domanial de longue durée est conservé. Pourtant, l'emphytéose semble avoir été ignoré par le Code civil. Le droit réel semble avoir été supprimé faute d'être cité par le Code. Toutefois, de nombreuses décisions de jurisprudence confirment le droit réel de l'occupant et la doctrine pencha majoritairement pour cette solution : l'emphytéose consistait en un droit réel immobilier. L'article 1er de la loi du 26 juin 1902, trancha définitivement la question en déclarant que : « le bail emphytéotique des biens immeubles confère au preneur un droit réel susceptible d'hypothèque, ce droit ne peut être saisi et cédé dans les formes prescrites pour la saisie immobilière ».

Suite à cette rétrospective, comment ne pas être frappé de la persistance du but de valorisation du domaine public ? Les lois des 5 janvier 1988 et 25 juillet 1994 n'ont fait que consacrer le rôle des baux emphytéotiques dans la protection de la valeur économique et financière du patrimoine public. Il existe depuis de nombreuses années une réelle volonté de valorisation du domaine public tant par l'État que par les collectivités territoriales24(*). Ce mouvement a longtemps été limité par les règles classiques de la domanialité qui ont pu décourager des investissements privés significatifs qui ne trouvaient pas un environnement juridique assez sûr à leur goût. C'est dans cette optique que la loi, en 1988 pour les collectivités territoriales, et en 1994 pour l'État, a permis la constitution de droits réels sur le domaine public. Cette tendance est aujourd'hui perpétuée par le CGPPP.

En plus de la valorisation, un aperçu historique montre que la recherche de la rentabilité constitue bien un objectif pour l'ensemble du domaine au-delà d'une conception simpliste de la summa divisio domaine public/ domaine privé qui pourrait laisser penser que la rentabilité est un objectif naturel pour le second et illicite pour le premier.

* 20 On oppose le domaine éminent d'exploitation par investissement au domaine utile d'exploitation directe.

* 21 Par exemple, le titre IX indique la possibilité de contracter avec la puissance publique pour la jouissance d'un lieu public et de la protection de l'occupant du domaine public : « Le préteur s'exprime ainsi : je défends qu'on empêche par violence celui à qui un lieu public, aura été donné à bail ». Il est clair que cet interdit a pour but l'utilité publique puisqu'il soutient la cause des revenus publics

* 22 On distingue notamment le fief en terre, qui était attribué à un inventeur ou un financier qui obtenait la cession d'une portion du domaine utile afin d'y établir un ouvrage dans un délai et pour un péage déterminé et le fief en fonction

* 23 « Monsieur, étant important pour la commodité publique et la finalité du commerce, que les ponts et chaussées soient toujours en bon état, je vous prie de passer promptement des marchés pour l'entretennement des ouvrages nouvellement faits, et d'observer avec soin à l'avenir de ne faire aucun marché pour le rétablissement des ouvrages que nous n'obligiez en même temps les entrepreneurs à se charger de les entretenir »

* 24 Si l'on prend l'exemple de l'Etat, le parallèle entre la loi de 1902 et celle de 1994 est particulièrement explicite puisque la loi n° 94-631 du 25 juillet 1994 a donné la faculté à l'État et à ses établissements publics de consentir des titres d'occupation du domaine public constitutifs de droits réels sur les ouvrages, constructions et installations de caractère immobilier que le titulaire réalise pour l'exercice d'une activité autorisée. Ce droit réel confère à son titulaire, pour la durée de l'autorisation et dans les conditions et limites précisées par la législation domaniale, les prérogatives et obligations du propriétaire. La nature immobilière du droit réel constitué par le titre a été confirmée par le décret n° 95-595 du 5 juin 1995, qui a modifié l'article 28 du décret n° 55-22 du 4 janvier 1955.

précédent sommaire suivant






Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy








"La première panacée d'une nation mal gouvernée est l'inflation monétaire, la seconde, c'est la guerre. Tous deux apportent une prospérité temporaire, tous deux apportent une ruine permanente. Mais tous deux sont le refuge des opportunistes politiques et économiques"   Hemingway