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Refexion sur l'inclusion sociale - la double contrainte des collectivités territoriales entre évaluation et prévention

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par Yann WELS
Université Aix-Marseille 3 - Master 2 2006
  

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2ème PARTIE : LA BANALISATION DE L'EVALUATION PAR LES POLITIQUES D'INCLUSION SOCIALE

Depuis le mouvement de décentralisation amorcé il y a 20 ans, l'action publique se voit totalement bouleversée, de nouveaux acteurs, publics ou privés, entrent en jeu ; les politiques publiques se voient partagées entre plusieurs niveaux de décision, s'exécutent dans le cadre de partenariat, sur des territoires sans cesse redessinés allant de l'Europe à la commune en passant par les régions et les départements. Conséquemment se pose ipso facto la question de la performance de ces politiques publiques, et c'est donc logiquement que l'évaluation accompagne la montée en puissance et en complexité des politiques publiques notamment locales. N'est en jeu rien d'autre que la notion de gouvernance territoriale et sur ce terrain, l'inclusion sociale est une politique de choix pour analyser ces évolutions.

Aujourd'hui, composante de la gestion publique, l'évaluation est selon Xavier Greffe134(*) un «moyen de répondre aux trois déficits rencontrés par la gestion des pouvoirs publics : insuffisance d'informations, difficultés de communication, et exigence de contrôle». La définition officielle de l'évaluation des politiques publiques rappelle qu' «évaluer une politique, c'est apprécier son efficacité en comparant ses résultats aux objectifs assignés et aux moyens mis en oeuvre»135(*). Si toutes ces définitions paraissent claires, elles posent en réalité un certain nombre de questions qui rendent la pratique de l'évaluation pas si aisée : on peut se demander en effet, à l'aune de la définition officielle de l'évaluation, quels sont les objectifs de la politique, quels sont ses résultats attendus et comment on peut les mesurer. En pratique, les objectifs officiels des politiques sont souvent flous, contradictoires et peu susceptibles d'être rigoureusement confrontés à la réalité des effets produits.

Les politiques sociales, telles qu'elles sont conçues aujourd'hui, comme beaucoup d'autres politiques ne sont pas exemptes de tels obstacles à l'évaluation. On pourrait même affirmer que c'est précisément dans ce domaine que l'évaluation semble à la fois la plus nécessaire et la plus difficile à mettre en oeuvre. C'est pourquoi, se pose la question de la possibilité de dépasser ce dilemme entre l'impérieuse nécessité d'évaluer et sa difficile mise en oeuvre.

Il s'agira ici d'aborder cette question en s'écartant du formalisme qui règne quant aux formes d'institutionnalisation de l'évaluation en matière sociale. Dans cette perspective sera ainsi mise en exergue une véritable émergence d'un critère qualitatif comme gallon d'analyse de l'évaluation (Titre 1) aboutissant à l'enracinement d'une véritable culture performative (Titre 2).

TITRE 1er : L'EMERGENCE D'UN CRITERE QUALITATIF

L'évaluation constitue un des axes majeurs de la modernisation du management public136(*) qui se développe dans les années 90 pour répondre à la crise des finances publiques. En effet, face à une complexification croissante et à la montée en puissance des contraintes entourant la mise place de véritable politique publique137(*), l'évaluation exprime un besoin de comprendre, de mesurer, de juger, et de réformer le cas échéant les actions publiques138(*). L'évaluation des politiques publiques, des programmes publics ou, plus généralement, de l'action publique, est entrée dans le débat en France dans les années 1990, elle s'inscrit dans le processus initié à l'occasion de la RCB139(*). Cependant lorsqu'on se donne la peine de situer la genèse du phénomène évaluatif dans un contexte de critique et, en définitive, de crise de l'Etat - contexte qui était celui de la charnière entre les années 70 et années 80 - et qui a partiellement suscité l'officialisation de facteurs dits de " changements " administratifs, comme les lois de décentralisation, les techniques de communications, la multiplication des cercles de qualité, des audits... dans un grand nombre d'administrations publiques, on est conduit à considérer l'opération RCB comme prolégomènes à une démarche évaluative. En effet, l'évaluation de l'action administrative constitue un thème déjà présent dans la problématique RCB, à une époque où elle était entendue essentiellement comme une démarche d'identification et d'analyse ex post des effets de l'action administrative. Depuis la fin des années 70, la démarche évaluative avait commencé sa montée en puissance dans le cadre de la RCB, jusqu'à former un bon quart des études lancées à partir de ces années-là. C'est d'un colloque international organisé en décembre 1983 par la Direction de la prévision du ministère de l'Economie, des finances et du budget, avec l'appui du Secrétaire d'Etat chargé de la Fonction publique et des réformes administratives, en collaboration avec HEC, l'ENA et l'ENPC, que l'évaluation va apparaître comme le moyen de faire émerger un critère qualitatif :

«L'évaluation des politiques publiques, c'est-à-dire l'appréciation a posteriori des effets réels des décisions publiques, se trouve en France dans la situation paradoxale d'être à la fois souhaitée et ignorée. L'évolution de l'économie mondiale, l'accélération du changement technologique, la modification des comportements sociaux et politiques des individus conduisent à une mutation de l'action des pouvoirs publics. Les acteurs de la vie publique ressentent donc le besoin d'instruments adaptés à ce contexte de remise en cause permanente. L'évaluation paraît alors dotée de deux vertus : apporter une aide à la gestion des politiques publiques, enrichir le dialogue démocratique que la société entretient sur ces politiques. Mais en même temps, sous le terme commun d'évaluation, se font jour des conceptions et des attentes multiples. Les expériences entreprises à ce titre sont diverses, de même que les appréciations qu'elles suscitent...»140(*).

Cette définition est celle qui a dominé jusqu'à l'apparition d'un champ de controverses important sur l'évaluation à partir de l'année 1984, c'est-à-dire au moment où, précisément, la RCB disparaît sur un plan administratif avec la suppression de la commission RCB à la Direction de la prévision. Ce colloque a marqué une date capitale dans la prise de conscience du problème :

- il a permis, d'établir un premier bilan de la pratique des évaluations en France, d'engager une réflexion méthodologique et stratégique globale sur la nécessité et le statut de l'évaluation de l'action publique dans notre pays ;

- il a conduit à la création, en 1984, de l'Office parlementaire d'évaluation des choix technologiques et scientifiques...

Pourtant, bien qu'entre 1983 et 1999, l'évaluation ait fait son chemin peu de choses ont changé pour décrire une situation marquée par : un déficit d'information, les besoins auxquels l'administration est confrontée et le double objectif (près de vingt ans après) qui reste à atteindre : conceptuel d'abord, pour clarifier la notion même d'évaluation ; opérationnel ensuite, pour permettre que se développe une démarche permettant une meilleure adaptation des actions publiques aux circonstances actuelles.

S'agissant des stratégies en faveur de l'inclusion sociale dans les territoires, l'ancrage territorial et la proximité locale se sont révélés des atouts pour adapter les dispositifs régionaux et nationaux aux mutations de l'économie. Cependant, l'élaboration de stratégies territoriales intégrées, jouant sur tous les leviers de l'accès à l'emploi et du développement de l'emploi (intermédiation, formation, activités nouvelles de services, économie sociale et solidaire, création d'entreprise, développement d'entreprises...), débouche sur des formes de partenariat innovantes mais souvent complexes à mettre en oeuvre puisqu'elles impliquent la coordination des politiques menées localement par les acteurs institutionnels (Etat, Régions, Départements et Collectivités locales ou leurs groupements) et des actions conduites par les acteurs privés (employeurs et leurs groupements, associations et société civile).

Il s'agit donc par le processus évaluatif de promouvoir, dans la gouvernance territoriale, des démarches globales favorisant la coordination des acteurs locaux dans le domaine de l'emploi et de l'inclusion (Service public de l'emploi local, collectivités locales, partenaires sociaux, entreprises et associations) pour une prise en compte croisée des problématiques à caractère social des territoires.

Dans un tel contexte, il convient d'interroger le développement de l'évaluation dans les politiques publiques partenariales (Chapitre 1), pour ensuite voir l'extension de l'évaluation aux politiques publiques locales (Chapitre 2).

* 134 Xavier Greffe, professeur à la Sorbonne et membre du groupe Matisse (modélisation appliquée, trajectoires institutionnelles, stratégies socio-économiques), Economie des politiques publiques, 2ème édition revue et corrigée, Paris : Dalloz, 1999

* 135 Décret no 98-1048 du 18 novembre 1998 relatif à l'évaluation des politiques publiques, NOR: FPPX9800123D

* 136 «La pertinence des changements de l'action publique en France est plus que jamais une interrogation récurrente. La vision d'un État « efficace » fait l'objet d'une demande grandissante de la part des gouvernés. La décentralisation, l'européanisation et l'internationalisation des échanges mettent l'État dans l'obligation d'inscrire son action dans l'économie de marché. C'est tout l'enjeu d'un management public moderne». Michel de Carvalho, Entre changement(s) et recomposition(s) : une action publique hybride, Pouvoirs Locaux n°59 de décembre 2003

* 137 On entendra par politique publique la notion suivante : «action destinée à produire un changement , un mieux être à court ou moyen terme pour la société, série de mesures conformes à l'intérêt générale ; ensemble de décisions juridiques et d'actions, cohérentes et ciblées, qui sont dirigées vers un même objectif fondamental, c'est-à-dire de modifier ou de préserver la réalité économique, sociale, environnementale, sanitaire ou culturelle dans un espace donné. Chaque politique publique se distingue des autres par l'attribution d'objectifs spécifiques, de publics cibles spécifiques et de budgets spécifiques». Daniel Lamarque, L'évaluation des politiques publique locales, collection systèmes, LGDJ, 2004

* 138 «Activités déployées par une unité administrative contribuant au processus de fabrication d'une prestation; celle-ci étant une somme de contributions réalisées par une ou plusieurs unités administratives».

* 139 Rationalisation des choix budgétaire

* 140Jean-Pierre Nioche, Robert Poinsard, L'évaluation des politiques publiques, Paris, Economica, 1984

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"Je voudrais vivre pour étudier, non pas étudier pour vivre"   Francis Bacon