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Le pouvoir discrétionnaire du Procureur de la Cour pénale internationale

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par Pierre GIRAUD
Paris 2 Panthéon Assas - Institut des hautes études internationales  - Certificat de recherche approfondie 2012
  

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B- Le contrôle judiciaire de l'action discrétionnaire du Procureur

L'instauration d'un tel mécanisme a été voulue par les Etats parties comme contrepartie au pouvoir d'initiative du Procureur, afin notamment de garantir qu'aucune accusation ne soit lancée sans motif valable, les craintes étant que le Procureur soit soumis aux pressions politiques émanant notamment des organisations non gouvernementales.

Certains Etats avaient d'ailleurs souhaité qu'un appel puisse être interjeté à l'encontre des décisions d'enquête et de poursuites du Procureur mais c'est finalement un contrôle judiciaire a priori qui a été retenu. En effet, en application de l'article 15 (3) du Statut : « s'il conclut qu'il y a une base raisonnable pour ouvrir une enquête, le Procureur présente à la Chambre préliminaire une demande d'autorisation en ce sens accompagnée de tout élément justificatif recueilli ». La Chambre préliminaire peut alors autoriser ou non l'ouverture d'une enquête54.

La Chambre préliminaire est peu exigeante concernant les éléments rapportés à ce stade par le Procureur au soutien de sa demande proprio motu. Elle se borne à exiger que ces éléments soient « complets » ou « déterminants » compte tenu du stade procédural peu avancé. Elle paraît effectuer un contrôle très restreint précisant d'ailleurs qu'admettre à ce stade que les éléments présentés par le Procureur constituent une base raisonnable de penser qu'un crime relevant de la compétence de la Cour a été commis, ne préjuge en rien de la suite.

Son appréciation est autonome. Et si dans sa décision sur la situation au Kenya du 31 mars 2010, la chambre préliminaire a jugé que la base raisonnable dont elle était amenée à s'assurer de la caractérisation55 recouvrait la même acception que celle devant être prouvée par le Procureur56, elle a précisé l'approche qu'il convenait d'avoir de certains critères, complétant ainsi la lecture qu'en avait le Bureau du Procureur.

Ainsi par exemple de la notion de gravité, la Chambre jugeant dans la décision précitée que la gravité des crimes peut être appréciée tant quantitativement que qualitativement et que

54 Au sein du Tribunal pénal international pour l'ex- Yougoslavie et du Tribunal pénal international pour le Rwanda, le Bureau du Procureur est un organe distinct du Tribunal mais toute mise en accusation proposée doit être soumise à un juge pour approbation. Le pouvoir discrétionnaire du Procureur d'entamer des poursuites devant ces tribunaux est donc également tempéré par un contrôle judiciaire.

55 article 15-4

56 Article 15-3 et 53-1

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« sur le plan qualitatif, ce n'est pas le nombre de victimes qui importe, mais plutôt l'existence de certains facteurs aggravants ou qualitatifs liés à la commission des crimes qui font qu'ils sont graves ».

De plus, la Chambre a circonscrit dans le temps, la période pour laquelle elle autorisait le Procureur à enquêter alors même que celui-ci était approximatif dans sa demande se bornant à citer des évènements commis en 2007 et en 200857. Enfin la Cour n'a pas hésité à préciser le champ matériel possible pour l'enquête, à savoir, les seuls crimes contre l'humanité visés dans la demande du Procureur58.

Le contrôle judiciaire s'exerce sur le pouvoir discrétionnaire du Procureur d'ouvrir une enquête d'initiative mais pas dans ce seul cas de figure. Ainsi, lorsque le Procureur décide de ne pas ouvrir d'enquête ou de ne pas poursuivre et qu'il s'agit d'une situation déférée par le Conseil de sécurité ou par un Etat partie, le Conseil ou l'Etat partie peut saisir la Chambre préliminaire afin qu'elle examine cette décision. La Chambre peut éventuellement demander au Procureur de la reconsidérer.

La Chambre préliminaire peut également contrôler d'office les décisions de ne pas enquêter ou de ne pas poursuivre du Procureur prises sur le seul fondement des intérêts de la justice ainsi qu'en dispose l'article 53-3 (b) du Statut.

Dans la mise en oeuvre de sa marge d'appréciation, le Procureur est donc incontestablement soumis au respect de la règle de droit. L'enserrement de ses décisions dans des critères étroits dont il assure l'application et dont il contribue avec la Chambre préliminaire à fixer les contours, confirme qu'il est en situation de pouvoir discrétionnaire et jamais d'arbitraire. En l'état du nombre réduit de décisions judiciaires l'autorisant à enquêter et en l'absence de décision judiciaire relative à un refus du Procureur d'enquêter ou de poursuivre, son pouvoir discrétionnaire n'apparaît pas entamé. De l'intensité du contrôle judiciaire sur ses décisions dépendra en effet, l'étendue de son pouvoir discrétionnaire car ainsi que le formule le Professeur CHAPUS, « au fur et à mesure que s'accroît le contrôle du juge, l'opportunité

57 La Chambre a ainsi fixé une période comprise entre le 1er juin 2005 date à laquelle le Statut est entré en vigueur pour le Kenya et le 26 novembre 2009, date à laquelle le Procureur a déposé sa demande d'autorisation à la Cour.

58 Le Juge Hans-Peter KAUL a émis une opinion dissidente considérant que la Chambre aurait dû
refuser d'autoriser le Procureur à ouvrir une enquête. Le juge s'est principalement fondé sur le fait que

les actes qui ont été commis sur le territoire de la République du Kenya ne constituaient pas selon
lui, des crimes contre l'humanité relevant de la compétence de la Cour.

s'échappe59 È.

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59 In CHAPUS (R), op.cit p. 1058

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