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La gestation pour autrui : etude comparative entre la france et les etats-unis

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par Geoffrey WATRIN
Université de Strasbourg - Master 2 - Droit comparé 2015
  

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2. Une mise en pratique des textes : l'exemple de l'avortement

Etant donné que ces textes sont particulièrement anciens, il est important d'étudier leur interprétation contemporaine afin de comprendre la manière dont ils s'appliquent.

A défaut de disposer de jurisprudence traitant directement de la gestation pour autrui sous l'angle du droit à la liberté, il faudra recourir à un exemple qui lui est proche, à savoir l'avortement. Cette pratique consiste à offrir la possibilité à une femme de bénéficier d'une aide médicale afin de mettre fin à sa grossesse, et ceux avant l'écoulement d'un certain délai pouvant varier suivant les Etats.

Bien entendu, cette pratique est à première vue extrêmement différente de la GPA. Néanmoins, en approfondissant un peu, il est possible de s'apercevoir qu'il existe certaines caractéristiques communes. Ainsi, les deux pratiquesont un lien avec la protection du corps humain.De même, elles ont trait à la liberté pour une femme de pouvoir disposer de son corps. Enfin, la question de la légalisation de ces deux procédés s'est posée sur les sols français et américain.

Le premier des deux pays à avoir été confronté à la question de savoir si une femme pouvait avorter est les Etats-Unis. Ainsi, en 1973, la Cour suprême fut saisie de la très célèbre affaire Roe v. Wade, dans laquelle une loi texane sur l'avortement fut mise en cause, en ce qu'elle prévoyait des sanctions criminelles à l'égard de cette pratique, à l'exception toutefois des cas où elle relevait d'une prescription médicale, établie dans le cadre d'une grossesse à risque.

A cette occasion, plusieurs questions de droit ont été soumises à la Cour suprême des Etats-Unis. La première concernait par exemple la validité de la loi texane sur l'avortement à l'égard de la Constitution. L'interrogation qui s'avèrera toutefois être la plus importante concernait la due process clause du Quatorzième Amendement, et plus précisément la possibilité d'étendre le right of privacy au corps humain, afin d'admettre la validité de l'avortement.

La Cour suprême va alors décider d'invalider cette loi texane et va par ce biais, rendre le recours à cette pratique légal.

Pour fonder cette liberté de pouvoir avorter, et plus généralement de pouvoir disposer de son corps, les Justicesvont procéder à un raisonnement assez technique. En effet pour commencer, ces derniers partent de la due process clauseduQuatorzième Amendement, qui, pour rappel, vise à limiter les pouvoirs de l'Etat en particulier vis à vis de « la vie d'une personne, de sa liberté, ou de ses biens ». En utilisant la notion de liberté incluse dans cette clause, la Cour va déciderd'étendre le right of privacy au corps humain. Grâce à ce procédé, le juge Blackmumexplique dans son opinion au nom de la Cour, que la liberté de pouvoir disposer de son corps bénéficie de la due process clause, et qu'elle ne peut plus,dès lors, subir aucune immixtion injustifiée de l'Etat.

Cette manipulation juridique, la France ne la reprendra pas comme telle. Néanmoins, rien n'empêche de penser qu'elle se soit inspirée de la solution adoptée par la Cour suprême des Etats-Unis dans Roe. En effet, le Conseil constitutionnel fut saisi d'uneproblématique similaire seulement deux ans plus tard, ce qui donnera d'ailleurs lieu à la décision du 15 janvier 1975, dite IVG I.

Le rôle du Conseil fût ici de déterminer si la loi portant sur l'interruption volontaire de grossesse (ou loi Veil) était bien conforme à la Constitution. La réponse à cette question se trouvera être favorable105(*).

Pour arriver à ce résultat, le Conseil constitutionnel utilise un raisonnement moins complexe que celui de la Cour suprême des Etats-Unis. En effet, les membres du Conseil vont appliquer la DDHC à l'interruption volontaire de grossesse, et plus particulièrement son article 2106(*). Ce dernier dispose que « le but de toute association politique est la conservation des droits naturels et imprescriptibles de l'Homme. Ces droits sont la liberté, la propriété, la sûreté, et la résistance à l'oppression ».

Ainsi, de la même manière qu'aux Etats-Unis, le Conseil constitutionnel va utiliser le recours à la liberté pour justifier la possibilité offerte à une femme de pouvoir avorter.

Néanmoins, un point particulier de cette décision doit être souligné. En effet, on peut noter qu'ici, seul l'article 2 de la DDHC est cité, excluant de facto les articles 1 et 4, au sein desquels la formule consacrée à la liberté est sans doute jugée trop large107(*). Ceci démontre la volonté des conseillers constitutionnels de jouer la carte de la prudence sur une affaire pouvant s'avérer être lourde de conséquences108(*).

Dans la mesure où l'avortement est proche de la GPA selon les termes envisagés plus haut, il est possible de conjecturer que la Cour suprême des Etats-Unis réagirait de manière similaire à l'égard de la maternité de substitution. En France, le doute est de mise, dans la mesure où à l'heure actuelle, d'autres principes empêcheraient le Conseil Constitutionnel de se prononcer favorablement sur cette pratique, bien que la liberté puisse s'avérer être un fondement tout à fait admissible.

La France et les Etats-Unis disposent donc de principes communs disposant d'une interprétation similaire. Néanmoins, certains ne bénéficient pas de cette apparente symbiose.

* 105Cons. Const., n°75-54 DC du 15 janvier 1975 (IVG I),Article 1er.

* 106Cons. Const.,n°75-54 DC du 15 janvier 1975 (IVG I), décision,8ème considérant.

* 107Article 1 DDHC : « Les hommes naissent et demeurent libres et égaux en droits. Les distinctions sociales ne peuvent être fondées que sur l'utilité commune ».

Article 4 DDHC : « La liberté consiste à pouvoir faire tout ce qui ne nuit pas à autrui : ainsi, l'exercice des droits naturels de chaque homme n'a de bornes que celles qui assurent aux autres Membres de la Société la jouissance de ces mêmes droits. Ces bornes ne peuvent être déterminées que par la Loi ».

* 108Delphine TISSIER, op cit., p 283.

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"Qui vit sans folie n'est pas si sage qu'il croit."   La Rochefoucault