WOW !! MUCH LOVE ! SO WORLD PEACE !
Fond bitcoin pour l'amélioration du site: 1memzGeKS7CB3ECNkzSn2qHwxU6NZoJ8o
  Dogecoin (tips/pourboires): DCLoo9Dd4qECqpMLurdgGnaoqbftj16Nvp


Home | Publier un mémoire | Une page au hasard

 > 

De la loi application en cas de violation des droits de propriété intellectuelle sur internet.

( Télécharger le fichier original )
par afrique karake
universite nationale du rwanda - licence en droit 2012
  

précédent sommaire suivant

Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy

§3. Applicabilité de la théorie d'émission et de réception

Dans une première approche, technique, le pays d'émission est déterminé à partir de la définition même de la communication au public ou, pour les systèmes juridiques qui en font une prérogative distincte, de la mise à disposition du public, telle qu'elle résulte des traités de l'OMPI de 199690.

Le raisonnement est simple, puisque le droit exclusif s'exerce dès cette mise à disposition, l'acte de violation doit être considéré comme accompli au lieu où elle se réalise. Les partisans de la loi du pays d'émission ainsi entendu soutiennent que seule cette loi doit régir les questions laissées à la lex loci protectionis.91

Les partisans de l'application des différentes lois des pays de réception répondent que tout acte d'exploitation, en droit de propriété intellectuelle, est orienté vers le public, et qu'il est donc normal de localiser à partir de cette cible le centre de gravité d'une exploitation donnée92. Ils font valoir que cette analyse se justifie d'autant plus en cas de diffusion sur les réseaux numériques qu'on est en présence d'un « consommateur » actif qui prend l'initiative de chaque utilisation, ce qui n'est pas le cas, par exemple, pour la radiodiffusion par satellite93. Et surtout, ils objectent que l'application exclusive de la loi du pays d'émission à partir d'une localisation technique permet toutes les manipulations. Ce qui est en cause concrètement est le risque de délocalisation vers des pays d'émission connaissant un niveau de protection moins élevé, risque bien réel compte tenu des différences notables qui existent entre les législations nationales, particulièrement pour les exceptions au droit exclusif, et de l'extrême facilité qu'il y a sur les réseaux numériques à manipuler le lieu d'injection94.

Cette objection est assez sérieuse pour avoir conduit la plupart des partisans de la loi du pays d'émission à changer leur fusil d'épaule et retenir, non pas le lieu d'injection matérielle dans le réseau, mais le lieu d'établissement du responsable de la diffusion, qui se

90 A. STROWEL et J.-P. TRIAILLE, op.cit, p.19

91 F. DESSEMONT, op.cit, p.7

92 Ibidem.

93 Ibidem.

94 A. Lucas, op. cit. p. 130, n°231

26

prête moins à de telles manipulations, et qui offre au surplus l'avantage d'être plus facile à déterminer.

La stabilité de ce rattachement le rend assurément séduisant. Mais, outre qu'il ne conjure pas totalement le danger de manipulations, on doit rappeler que la circulation des oeuvres sur les réseaux numériques n'est pas, le plus souvent, et sera sans doute de moins en moins le fait de véritables exploitants professionnels95, ce qui met en cause la pertinence de l'approche et complique, en tout cas, la mise en oeuvre de la règle.

Ensuite et surtout, le débat se déplace du terrain de la technique juridique vers celui de l'opportunité96. Les arguments sont bien connus. Les partisans de la loi du pays d'émission mettent en avant la sécurité juridique du diffuseur, en faisant valoir qu'il ne saurait être contraint de respecter quasiment toutes les lois de la planète, comme cela résulterait de l'application des différentes lois des pays de réception.

Les partisans de ce dernier système répondent qu'il est parfaitement arbitraire de préférer la sécurité juridique du diffuseur à celle du titulaire du droit et que si la solution ne peut passer que par le choix d'une loi unique, la loi de la résidence de ce titulaire (ou de la société de gestion collective à laquelle il adhère, plus facile à connaître pour le diffuseur) pourrait tout aussi bien faire l'affaire97. Jouent également en ce sens la territorialité traditionnelle de la loi pénale, laquelle s'imbrique étroitement avec la loi civile en matière de droit de propriété intellectuelle, et le fait que l'application exclusive de la loi du pays dans lequel est installé le responsable de l'émission permettrait à celui-ci d'exporter dans le monde entier ladite loi, ce qui est difficile à accepter pour les états jaloux de leur souveraineté, qui savent bien que le système favoriserait les pays développés où seront le plus souvent localisés les diffuseurs. Tous ces arguments paraissent s'équilibrer. C'est dire que le choix de faire pencher la balance dans un sens ou dans l'autre est bien politique (au sens large)98.

On comprend donc la circonspection des tribunaux, dont un exemple frappant est fourni par une décision de la Cour suprême du Canada rendue le 30 juin 2004 dans l'affaire Société canadienne des auteurs, compositeurs de musique c. Association canadienne des fournisseurs internet99. Il s'agissait de savoir si les activités des intermédiaires ouvraient droit à redevances dès lors qu'elles concernaient des oeuvres musicales téléchargées au Canada à partir d'un serveur localisé dans autre pays. La Cour suprême, par la plume du Juge

95 F. DESSEMONTET, op.cit.p.39

96 G. KOUMANTOS, op.cit.p. 204

97 A. STROWEL et J.-P. TRIAILLE, op.cit, p.30

98 H. Desbois, Le droit d'auteur en France, Paris, Dalloz, 3e éd., 1978, n.791 bis.

99 G. KOUMANTOS, op.cit.p. 156

27

BINNIE100, estime que le critère faisant dépendre l'existence d'une communication au Canada de la localisation du serveur dans ce pays est « trop mécanique et trop rigide ». Pour elle, « l'applicabilité de la loi sur le droit d'auteur à une communication à laquelle participent des ressortissants d'autres pays dépend de l'existence entre le Canada et la communication d'un lien suffisant »101.

Dans cette optique, « le lieu de réception peut constituer un facteur de rattachement tout aussi "important" que le lieu d'origine ou d'émission (sans compter l'emplacement physique du serveur hôte, qui peut se trouver dans un pays tiers »)102.

Pour les communications sur internet, « le facteur de rattachement pertinent est lex situs103 du fournisseur de contenu, du serveur hôte, des intermédiaires et de l'utilisateur final », étant précisé que « l'importance à accorder au situs de l'un d'eux en particulier varie selon les circonstances de l'affaire et la nature du litige »104. Force est de reconnaître que les pistes ainsi ouvertes restent trop vagues pour donner aux opérateurs la sécurité à laquelle ils aspirent légitimement.

En faveur de la loi du fait générateur, on invoque principalement le fait qu'il pourrait apparaître choquant qu'un individu puisse être déclaré responsable en application de la loi du lieu du préjudice, alors pourtant que l'acte était licite dans le pays où il a été commis105.

A l'inverse, en faveur de la loi du préjudice, on invoque le fait que c'est cette loi que la victime a le plus de chance de connaître. En outre, la loi du fait générateur serait trop favorable à l'auteur du délit, notamment en matière de communication via l'Internet, puisqu'il a radicalement la possibilité de choisir le pays d'émission106. Enfin, la loi du lieu du préjudice a l'avantage de mieux refléter les fondements actuels de la responsabilité civile, qui résident plus dans l'existence du préjudice que dans de la faute, en raison du développement de nombreuses responsabilités objectives, c'est-à-dire sans faute.

Pendant longtemps la jurisprudence française a été favorable à la compétence de la loi du lieu du dommage la lex loci damni arrêt « Horn y Prado » de la première chambre civile de la Cour de cassation du 8 février 1983)107. Mais dans son état le plus récent, la jurisprudence

100 J. RAYNARD, Droit d'auteur et conflits de lois, Paris, Litec, Bibliothèque de droit de l'entreprise, 1990, n.651

101 E. ULMER, La propriété intellectuelle et le droit international privé, préc., note 4, n.76-77.

102 T. DREIER, in Copyright in Cyberspace, préc., note 12, p.301.

103 J. C. GINSBURG, Private international law aspects of the protection of works and

Objects of related rights transmitted through digital networks, Doc. OMPI GCPIC/2, 1998, p.32.

104 G. KOUMANTOS, op.cit.p. 133.

105 Ibidem.

106 Idem. p. 65.

107 Arrêt « Horn y Prado » de la première chambre civile de la Cour de cassation du 8 février 1983.

28

de la Cour de cassation semble admettre que, par principe, l'existence de la loi du lieu du fait générateur et la loi du lieu du dommage ont égale vocation à s'appliquer.

Le principe de proximité permettant de les départager aux vues des circonstances concrètes.

précédent sommaire suivant






Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy








"Piètre disciple, qui ne surpasse pas son maitre !"   Léonard de Vinci