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La cour africaine des droits de l'homme et des peuples entre originalités et incertitudes.

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par Mamadou Alpha Kokouma DIALLO
Angers  - Master 1 Droit international et européen 2015
  

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Partie II : La Cour africaine, un instrument fragile

Assurément, l'institution de la Cour africaine des droits de l'homme et des peuples comme le premier organe juridictionnel à l'échelle continentale, marque un tournant décisif dans l'histoire de la protection des droits de la personne humaine sur le continent africain. Certes, cette institution judiciaire est venue « soustraire tout un continent d'une longue apnée »83 avec des ambitions considérables au regard des ses larges compétences. Cet organe est tout aussi prometteur et porteur d'un grand espoir au sein des populations africaines éprises de justice et de liberté, au vu de son originalité et de son indépendance. Pourtant, force est de constater qu'il fait l'objet d'une certaine fragilité due à des difficultés profondes qui font que son efficacité est relative (Chapitre I) même s'il est perfectible. Pour des raisons certainement politiques, des nombreuses reformes rendent également provisoire son existence (Chapitre II).

Chapitre I : La Cour africaine, un organe à efficacité relative mais perfectible

Faisant face à des limites d'ordre politique et juridique majeures qui affectent gravement son efficacité (Section I), un grand effort de régulation est toutefois nécessaire pour une Cour africaine des droits de l'homme et des peuples effective (Section II).

Section I : Les limites juridico-politiques majeures à l'efficacité de la Cour

L'efficacité de la Cour africaine et la réalisation des objectifs qui lui sont assignés par le Protocole dépendent sans doute d'un effort collectif nécessitant une synergie d'action de tous les acteurs dont les Etats africains en particuliers. En réalité, la ratification du Protocole à un taux relativement faible depuis 1884 ans est l'une des limites à l'efficacité de la Cour (Paragraphe I) de même que l'article 34(6) dudit Protocole constitue une insuffisance dont souffre le Protocole (Paragraphe II).

83 KOWOUVIH Sitsofé, « La Cour africaine des droits de l'homme et des peuples : Une rectification institutionnelle du concept de « spécificité africaine » en matière de droits de l'homme », RTDH, n° 59, 2004, pp. 757-790, p. 760.

84 Nous faisons allusion de la période allant de 1998, date d'adoption du Protocole, à nos jours.

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Paragraphe I : Le faible taux de ratification du Protocole, une limite à l'effectivité de la Cour

De nos jours sur les 54 Etats membres de l'Union Africaine qui sont tous parties à la Charte africaine des droits de l'homme et des peuples, seuls 30 pays ont ratifié le Protocole de Ouagadougou créant la Cour. Il s'agit de : L'Afrique du Sud, l'Algérie, le Benin, le Burkina Faso, le Burundi, le Cameroun, la Côte d'Ivoire, les Comores, le Congo, le Gabon, la Gambie, le Ghana, le Kenya, la Libye, le Lesotho, le Malawi, le Mali, La Mauritanie, Maurice, la Mozambique, le Nigeria, le Niger, l'Ouganda, le Rwanda, la République arabe sahraoui démocratique, le Sénégal, la Tanzanie, le Togo, la Tunisie et le Tchad85.

Dans la mesure où la Cour est l'instrument qui garantie le respect des droits consacrés par la Charte que les Etats ont d'ailleurs massivement ratifié, il serait logique de s'interroger sur la raison du décalage entre la ratification de cette dernière et la retenue à l'égard du Protocole créant la Cour africaine. Il est toutefois difficile de donner avec précision des raisons à ce décalage. Néanmoins, elles peuvent notamment être d'ordre conceptuel.

En effet, la conception africaine des droits de l'homme présente une certaine spécificité tenant à des valeurs culturelles et traditionnelles. Cette conception africaine des droits de l'homme apparait clairement dans le préambule de la Charte où les Etats affirment qu'ils tiennent compte « des vertus de leurs traditions historiques et des valeurs de civilisation africaine qui doivent inspirer et caractériser leurs réflexions sur la conception des droits de l'homme et des peuples »86. Il est donc frappant de constater que la Charte milite en faveur d'un règlement des différends relatifs aux droits de l'homme à travers « l'institution de l'arbre à palabres ». L'on décèle ici que cette dernière est une préférence africaine de règlement non juridictionnel de différends où l'on privilégie le règlement à l'amiable par voie de dialogue et de concertation qu'au duel judiciaire entre les parties à un procès87.

Il est tout aussi important de souligner que du point de vue sociologique, le citoyen africain préfère la conciliation qu'à la décision judiciaire à connotation purement punitive88. On voit

85 Voir l'état des ratifications du Protocole de Ouagadougou, [en ligne] sur le site de la Cour africaine des droits de l'homme et des peuples : www.african-court.org.

86 Voir Charte africaine des droits de l'homme et des peules, préambule, paragraphe 5.

87 Voir à ce sujet MUBIALA Mutoy, Le système régional africain de protection des droits de l'homme, Bruxelles, Bruylant, 2005.

88 V. KAMARA Mactar, « La promotion et la protection des droits fondamentaux dans le cadre de la Charte africaine des droits de l'homme et des peuples et du Protocole facultatif additionnel de juin 1998 », RTDH, 2005, N° 63, pp. 709-727.

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donc, que le fait pour la Charte africaine de ne pas prévoir l'institution d'une Cour africaine chargée de protéger les droits de l'homme n'est pas un hasard. Elle a décidé de confier cette mission à la Commission en exigeant d'elle expressément d' « essayer par tous les moyens nécessaires de parvenir à une solution amiable fondée sur le respect des droits de l'homme et des peuples»89. Cette conception initiale de la Charte explique certainement sa ratification très massive par les Etats africains.

Cependant, l'adoption du Protocole instituant un organe juridictionnel va changer la donne et traduire l'idée d'une véritable justice institutionnelle même s'il prévoit à son tour la possibilité d'un règlement diplomatique des différends90.

Ensuite, la méfiance des Etats africains vis-à-vis du Protocole peut s'expliquer par le fait que ces derniers conçoivent ledit protocole comme une menace sérieuse à leur souveraineté, dans la mesure où l'activité de la Cour qu'il a institué est une véritable activité judiciaire.

Enfin, l'une des raisons qui semble justifiée le faible taux de ratification du Protocole est la capacité institutionnelle très limitée de certains Etats africains. Pour beaucoup parmi eux, ratifier le Protocole signifierait tout simplement s'exposer automatiquement à des condamnations à chaque fois qu'ils y sont attaqués, car ils sont conscients de la défaillance de leur système judiciaire et de leur mécanismes de protection des droits de l'homme.

C'est état de fait explique par ailleurs le fait que certains Etats africains se sont longtemps opposés à la mise en oeuvre et au respect des instruments internationaux relatifs aux droits de l'homme auxquels ils sont pourtant librement parties91. Il faut toutefois, préciser que cette situation est largement due à la mauvaise fois des Etats, sinon à un manque notoire de volonté politique de leur part pour non seulement améliorer leur mécanismes de protection des droits humains, mais aussi à ratifier le Protocole pour garantir une meilleure protection des droits de l'homme en Afrique.

89 Voir l'article 52 précité de la Charte.

90 Protocole d'Ouagadougou, préc. ,article 9.

91 KOUDE KOUSSETOGUE Roger M., « Peut-on, à bon droit, parler d'une conception africaine des droits de l'homme ? », RTDH, N° 62, 2005, pp. 539-561, p. 542.

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