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La justice arbitrale dans l'espace OHADA.

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par Nà¢â‚¬â„¢Gouan alphonse ANEY
Université félix Houphouêt BOIGNY - DEA de droit privé fondamental 2013
  

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SECTION II : L'ARBITRAGE SOUS L'ÉGIDE D'INSTITUTIONS NATIONALES : CAS DE LA CÔTE D'IVOIRE ET DU SÉNÉGAL

Avant l'avènement de l'oeuvre d'harmonisation en Afrique du droit des affaires, quelques Etats parties de l'OHADA avaient timidement envisagés la justice arbitrale comme mode de règlement des litiges. C'est le cas notamment de la Côte d'Ivoire et du Sénégal qui ont mis en place des institutions. Aujourd'hui, ces institutions se retrouvent doublées de la CCJA, une institution suprême nationale dans l'espace OHADA. Dans tous les cas, l'arbitrage connait des fortunes diverses dans les états parties.

PARAGRAPHE I : LA PRATIQUE ARBITRALE ET L'INSTITUTION ARBITRALE EN CÔTE D'IVOIRE32

En Côte d'Ivoire, la pratique arbitrale était essentiellement régentée par les dispositions du code de commerce, devenu code de procédure civile, commerciale et administrative ainsi que certaines dispositions du code civil. Mais en l'absence d'institutions arbitrales, et d'une législation consacrée, les opérateurs économiques s'orientaient très souvent vers les institutions internationales d'arbitrage.

A- La pratique arbitrale avant la création de la CACI

Pendant longtemps, l'arbitrage a connu un développement très embryonnaire en Afrique du fait d'une part de l'absence de réglementation légale et d'autre part de la quasi inexistence de centres ou d'organismes d'arbitrage.

32 Narcisse AKA, « La pratique arbitrale des institutions d'arbitrage en Afrique : le cas de la Côte d'Ivoire », l'OHADA et les perspectives de l'arbitrage en Afrique, colloque de Yaoundé 1999, p.151, édition Bruylant, Bruxelles 2000

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L'arbitrage n'était généralement prévu que dans les contrats internationaux qui comportaient sous la pression des partenaires extérieurs des clauses CCI, CIRDI, LCIA etc.

En 1955 déjà, pour résoudre rapidement les contestations d'ordre commercial, il fut créé une Chambre arbitrale auprès de la Chambre de commerce de Côte d'Ivoire. Après l'accession de la Côte d'Ivoire à l'indépendance, cette institution n'a pas été reconstituée. Pourtant, la Côte d'Ivoire a signé et ratifié plusieurs conventions internationales33 relatives à l'arbitrage commercial.

Avant 1993, un seul texte ivoirien concernait directement l'arbitrage ; c'était l'article 631 alinéa 2 du code de commerce ivoirien, qui validait en droit interne34 la clause compromissoire en ces termes : « Toutefois, les parties pourront au moment où elles contractent convenir de soumettre à des arbitres les contestations ci-dessous énumérées lorsqu'elles viendront à se produire». On pourrait déduire de cette disposition l'admission du recours à l'arbitrage en Côte d'Ivoire. Cependant, cette question n'est si simple, en témoigne les atermoiements de la jurisprudence. En effet, celle-ci, du fait de l'insuffisance des dispositions législatives, éprouva de sérieuses difficultés à répondre à la question de savoir si l'arbitrage constituait un mode licite de règlement des différends à caractère commercial.

Dans l'arrêt Wanson rendu par la Cour d'appel d'Abidjan le 15 juillet 1977, l'une des parties avait sollicité en référé la nomination d'un expert, en attendant l'exécution de la clause compromissoire. Les juges d'appel avaient accédé à cette demande au motif que celle-ci ne préjudiciait pas au principal. La Cour a ainsi

33 Convention de Washington du 18 mars 1965 instituant le Centre International pour le Règlement des Différends

aux Investissement (CIRDI) ;

- Convention de New York du 10 juin 1958 sur la reconnaissance et l'exécution des sentences arbitrales étrangères - Convention de Lomé IV, dont l'article 307 concerne le règlement des litiges relatifs aux marchés financés par le FED ;

- le Code des investissements (loi n° 84-1230 du 8 novembre 1984) pose en ses articles 10, 14 et 23 le principe du recours à l'arbitrage.

34 Henri MELEDJE, « La question arbitrale et la fonction juridictionnelle en Côte d'Ivoire », Annales de l'Université d'Abidjan, série A Droit, T.X, 1995, p.13

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conclu que lorsque les parties à un contrat ont prévu, dans leur convention, l'arbitrage pour tout différend éventuel, le recours à la procédure de référé n'est pas pour autant exclu s'il y a urgence. Il s'ensuit que peut être sollicitée par cette voie la désignation d'un expert, « mesure de pure information qui ne préjudicie nullement au principal ». Pourtant, l'appelant avait soulevé l'incompétence du juge des référés, en raison de l'existence d'une clause compromissoire. En accédant à la demande d'expertise sans répondre à l'objection d'incompétence, le juge ivoirien admettait implicitement le principe du recours à l'arbitrage et sa compatibilité avec le recours au juge des référés en cas d'urgence.

Dans le 2e arrêt MARBLOC rendu par la Cour d'appel d'Abidjan le 23 janvier 1981, l'un des plaideurs avait soulevé l'incompétence du Tribunal de première instance, en raison de l'existence d'une clause compromissoire. Son adversaire relevait l'illicéité de ladite clause. Les juges du fond ont souligné le caractère illicite de la clause compromissoire, en l'absence d'une réglementation légale de l'arbitrage. «Le premier juge s'est fondé sur les dispositions combinées des articles 5 et 9 du Code de procédure, qui donnent compétence aux tribunaux de première instance dans toutes les affaires civiles et commerciales et qui déclarent nulle toute convention dérogatoire à cette règle ; en se prononçant ainsi, le premier juge a bien jugé35 ».

L'affaire TALAL contre OMAÏS peut être considérée comme constituant l'illustration la plus éclatante des hésitations de la jurisprudence, La Cour d'Appel d'Abidjan, saisie des incidents relatifs à l'exequatur d'une sentence arbitrale, avait conclu à la régularité de cette décision par un arrêt du 17 mai 1985. Elle déclarait notamment: «II est clair que l'article 631 du Code de commerce autorise la clause compromissoire voulue et acceptée par les parties en cause, celles-ci ont même expressément renoncé à tout recours aux tribunaux pour connaître de leurs litiges éventuels (...). Il s'ensuit que la sentence présentement attaquée est valable36 ».

35 Cour d'appel d'Abidjan, 23 janvier 1981, Arrêt MARBLOC

36 Cour d'appel d'Abidjan, 17 Mai 1985, arrêt TOLAL contre OMAÏS

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Mais la Cour suprême fut d'un avis différent. Par arrêt du 29 avril 1986, elle cassa la décision de la Cour d'appel d'Abidjan au motif que : « Les parties peuvent insérer dans l'acte qui les lie une clause compromissoire visant à une procédure d'arbitrage ; il n'en reste pas moins vrai que les conditions et les modalités de cet arbitrage doivent être prévues par le législateur»37. La Cour suprême reconnaissait la validité des clauses compromissoires. Elle estimait, toutefois, qu'à défaut de réglementation étatique en la matière, la sentence arbitrale ne pouvait être validée.

La Cour d'appel de Bouaké (Cour de renvoi), dans un arrêt rendu le 25 novembre 1987 refusait de se plier à cette interprétation. Elle soutenait que « la sentence arbitrale ne contenant rien de contraire à l'ordre public, c'est à tort que l'ordonnance accordant l'exequatur à ladite sentence a été rétractée »38.

Face à cette résistance du juge du fond, la Cour suprême consacrait la licéité et la validité de la sentence arbitrale en ces termes : « ...il s'induit de ce texte que le principe du recours à l'arbitrage est admis en Côte d'Ivoire; Que s'il est constant que le Code de procédure civile, commerciale et administrative n'a ni prévu, ni organisé l'arbitrage, il est non moins constant que pour l'application dudit texte, les juridictions ivoiriennes ont recours soit aux principes généraux du droit, soit aux dispositions du livre du code de procédure civile français à titre de raison écrite. Qu'il s'ensuit que la Cour d'appel, en déclarant valable la clause compromissoire et la sentence qui en résulte n'a aucunement violé les textes visés au moyen »39.

Le décret 92-21 du 8 janvier 1992 créant et organisant la Chambre de commerce et d'industrie de Côte d'Ivoire va ouvrir une brèche dans la reconnaissance de l'arbitrage comme mode de règlement des différends, en donnant la possibilité à cette chambre de créer en son sein des chambres arbitrales

37 Laurence IDOT, « La Cour Suprême et la règlementation de l'arbitrage en Côte d'Ivoire : à propos de l'arrêt du 29 avril 1986 », RIDEC, juillet 1989, pp.11-12

38 Laurence IDOT, Ibid

39 Laurence IDOT, Ibid

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et d'en assurer le fonctionnement. Une année plus tard, le 9 août 1993, le Parlement Ivoirien adoptait une réglementation de l'arbitrage par la loi n° 93-671 relative à l'arbitrage largement inspirée - comme c'est souvent le cas - de la législation française.

Cette loi mettra définitivement fin aux nombreuses années d'hésitations jurisprudentielles. Peu après cependant, le 17 octobre 1993, la Côte d'Ivoire et 13 pays de la zone franc signaient à Port Louis (Ile Maurice) le Traité relatif à l'Harmonisation du Droit des Affaires en Afrique. Ce traité réserve une place importante à l'arbitrage comme mode de règlement des différends contractuels et confie à la CCJA une fonction de centre d'arbitrage. Enfin, l'adoption à Ouagadougou d'un Acte Uniforme particulièrement libéral portant sur l'arbitrage constitue le dernier palier important franchi pour la promotion de l'arbitrage, d'autant qu'à l'exception de la Côte d'Ivoire, du Mali, du Sénégal et du Togo, les autres pays signataires du Traité ne disposaient pas de législation spécifique en matière d'arbitrage.

II résulte de tout ce qui précède que la pratique arbitrale est relativement récente en Côte d'Ivoire et que les institutions d'arbitrage comme la CACI en Côte d'Ivoire ont un rôle prépondérant à jouer dans la vulgarisation de l'arbitrage. Toutefois, certaines pesanteurs sont susceptibles de bloquer le développement de l'arbitrage en Côte d'Ivoire40.

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