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Les obligations du fonctionnaire en droit de la fonction publique camerounais.


par Philippe Roméo AMBI
Université de Yaoundé 2 - Master 2 2015
  

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PARAGRAPHE II : LE DEVOIR DE DESOBEISSANCE.

Le devoir d'obéissance cité précédemment, s'accompagne d'un devoir de désobéissance énoncé dans le même article. Face à « un ordre manifestement illégal et de nature à compromettre gravement l'intérêt public », un fonctionnaire a le devoir de désobéir. Il est important de bien peser chacun des mots qui énoncent ce principe et de ne pas le prendre à la légère car tout fonctionnaire est responsable de la tâche qui lui est confiée. Un refus de désobéir dans un cas nécessaire engage sa responsabilité ; un refus d'obéir en l'absence d'ordre manifestement illégal et de nature à compromettre gravement l'intérêt public engage de même sa responsabilité. Pour mieux appréhender le devoir de désobéissance, nous parlerons des motifs du devoir de désobéissance (A) avant de nous intéresser à la cause subjective du devoir de désobéissance (B).

A-Les motifs du devoir de désobéissance.

La désobéissance constitue comme nous l'avons précédemment dit une violation de l'obligation d'obéissance hiérarchique qui s'impose au fonctionnaire et ce dernier encourt des sanctions disciplinaires, ou des retenues sur le traitement, s'il s'agit d'un fonctionnaire français. Ainsi pour ne pas s'exposer à de telles conséquences qui seraient néfastes pour le fonctionnaire, ce dernier doit avoir des motifs de désobéissance qui l'exonèrent de ses responsabilités et qui sont acceptées par le juge. Nous retiendrons deux motifs du devoir de désobéissance : l'ordre manifestement illégal(1) et le droit de retrait des fonctionnaires (2).

1-Le devoir de désobéissance pour ordre manifestement illégal.

La plupart, pour ne pas dire toutes les réglementations francophones en matière de droit de la fonction publique s'accordent là-dessus, le fonctionnaire ne doit pas obéir à un ordre illégal. Le statut général de la fonction publique prévoit cette exception à l'obligation d'obéissance en ces termes : « toutefois, il a le devoir de refuser d'exécuter un ordre manifestement illégal et de nature à compromettre gravement l'intérêt public, sauf réquisition de l'autorité compétente établie dans les formes et procédures légales. Dans

225 Décret n° 94/199 du 07 octobre 1994 portant statut général de la fonction publique de l'Etat modifié et complété par le décret n° 2000/287 du 12octobre 2000.

Mémoire présenté et soutenu par AMBI PHILIPPE ROMEO Page 91

Les obligations du fonctionnaire en droit de la fonction publique camerounais

ce cas, sa responsabilité se trouve dégagée. Il en est de même lorsqu'il a exécuté des instructions légales et / ou données sous la forme légale »226. Cette obligation est très ancienne car elle a été instituée par le juge administratif français au profit des fonctionnaires et agents publics depuis 1944227.

En lisant les dispositions du statut et la jurisprudence, tout parait simple ; en effet, le fonctionnaire doit être très prudent lorsqu'il désobéit. La question intéressante est celle-ci : pourquoi a t-il fallu édicter une norme de désobéissance dans la fonction publique ? D'autant plus que cette norme est difficile à comprendre donc à mettre en oeuvre : qu'est-ce qu'un ordre illégal et peut-on juger de sa nature à compromettre le service public ? Il faut de plus que les deux conditions soient réunies... Doit-on obéir à un ordre manifestement illégal même s'il ne gêne pas le déroulement du service public? En fait, il semble que la volonté du législateur soit plus de secouer la léthargie du fonctionnaire que de codifier un comportement de désobéissance. Car cet état de soumission de l'agent public existe et peut s'exprimer grâce à des notions juridiques et psychosociologiques.

De plus, l'appréciation de l'illégalité de l'acte est du ressort du juge. Il peut donc arriver que le subordonné désobéisse, considérant que l'ordre est illégal (parce qu'il n'est pas conforme à la loi), mais que le juge ne soit pas du même avis que lui. De plus, si le fonctionnaire fait partie de la fonction publique militaire où l'obligation d'obéissance est très tricte du fait de la discipline, elle-même stricte, tout se complique encore. A côté de ce devoir de désobéissance, figure le droit de retrait qui est également une exception à l'obligation d'obéissance hiérarchique.

2-Le droit de retrait d'une situation de travail dangereuse.

Avant toute chose, il convient de faire remarquer que ce droit ne figure pas le statut général de la fonction publique camerounais et encore moins dans le statut général de la fonction publique français. On pourrait le déduire du droit à la protection que possède le fonctionnaire camerounais (article 25 du statut général)228. Le droit de retrait est justifié par la nécessité pour l'agent pour protéger sa vie d'une situation de travail éminemment. L'instrument

226 Article 39 alinéa 2 du décret n° 94/199 du 07 octobre 1994 portant statut général de la fonction publique de l'Etat modifié et complété par le décret n° 2000/287 du 12octobre 2000.

227 C'est dans un arrêt de 1944 que le Conseil d'État a affirmé que les agents publics ne sont pas tenus d'exécuter les instructions qui leur sont données quand elles sont de toute évidence illégales et compromettent gravement le fonctionnement du service public : CE Section, 10 novembre 1944, Langneur, où un agent est révoqué pour avoir obéi à un ordre du maire visant à permettre à ses agents électoraux de percevoir indûment des allocations chômage.

228 Article 25 : « l'Etat est tenu d'assurer au fonctionnaire protection contre les menaces, outrages, violences, voies du fait, injures ou diffamations dont il peut être victime en raison ou à l'occasion de l'exercice et des fonctions».

Mémoire présenté et soutenu par AMBI PHILIPPE ROMEO Page 92

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juridique qui le consacre en France est le décret n° 95/680 du 9 mai 1955 dont l'article 5 alinéa 6 dispose qu' «aucune sanction ni retenue de salaire ne peut être prise à l'encontre d'un agent public ou d'un groupe d'agents qui se sont retirés d'une situation de travail dont ils avaient un motif raisonnable de penser qu'elle présentait un danger grave et imminent pour la vie ou la santé de chacun d'eux ». Au regard des conditions exigées, il n'est pas sûr que le droit de retrait exercé par des enseignants à la suite d'une agression d'un collègue, soit légal. Cet « abus de droit de retrait » pose toutefois un problème que le droit ne peut résoudre.

Le droit de retrait est logiquement refusé à certains fonctionnaires assurant des missions de sécurité des biens et des personnes qui mettent précisément leur vie en danger en accomplissant, dans des conditions souvent périlleuses, leur fonction. On imagine mal des fonctionnaires du RAID ou du GIGN exercer le droit de retrait lors d'une prise d'otage ou encore d'un policier d'une brigade anti-criminalité refuser de constater un flagrant délit en arguant du caractère dangereux d'une telle mission. La seule limite à l'exercice du droit de retrait est la création pour autrui d'une nouvelle situation de danger grave et imminent résultant, précisément, d'un retrait intempestif du fonctionnaire au poste de travail. En dehors des raisons objectives de désobéissance à l'ordre du supérieur, il y a une cause subjective incitant à la désobéissance.

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