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Les obligations du fonctionnaire en droit de la fonction publique camerounais.


par Philippe Roméo AMBI
Université de Yaoundé 2 - Master 2 2015
  

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CHAPITRE II :

Les obligations de responsabilité du service peuvent être regroupées en deux catégories : l'obligation de servir que nous avons analysée plus haut et les obligations de confidentialité, objet de notre étude. Ce qui fait la caractéristique de ces obligations, c'est qu'elles ont en commun le secret. En effet, le robert définit la confidentialité comme le maintien du secret d'information (dans une administration...)233. La confidentialité est donc le caractère de ce qui doit rester secret, la préservation du caractère secret d'une chose. Sur le plan juridique, le vocabulaire juridique la définit comme le caractère de ce qui est confidentiel (exemple, confidentialité de correspondance entre avocats, obligation de confidentialité. Voir secret)234.Pour mieux comprendre la confidentialité, il faut définir le terme « confidentiel ». Est confidentiel, ce qui est communiqué à quelqu'un sous l'interdiction, pour celui-ci, de le révéler à quiconque ; qui est livré par écrit ou oralement sous le sceau du secret (en confiance et confidence). Exemple, lettre confidentielle, dossier confidentiel, aveu confidentiel. Ce qui est accompli en secret comme une mission confidentielle235. Ceci fait, il revient de se poser la question suivante : quelles sont les obligations de confidentialité ? Cette question revêt son pesant juridique et pratique : sur le plan juridique, elle nous permettra de savoir quelles sont les interdictions que le droit fait au fonctionnaire sur sa liberté d'expression en ce qui concerne son travail ; sur le plan pratique elle apprend aux usagers du service quels sont leurs droits en cas de révélation de leurs secrets par un fonctionnaire qui en a connaissance. C'est dans cette optique que nous traiterons de l'obligation de réserve (section I) et des obligations de discrétion professionnelle et de secret professionnel (section II).

233 Dictionnaire le Robert de poche, 2012.

234 Cornu (G), vocabulaire juridique, PUF, 2011.

235 Cornu (G), ibid.

Mémoire présenté et soutenu par AMBI PHILIPPE ROMEO Page 96

Les obligations du fonctionnaire en droit de la fonction publique camerounais

SECTION I : L'OBLIGATION DE RESERVE.

L'obligation de réserve est la première obligation de confidentialité. Pour mieux l'appréhender, il convient de commencer par définir le terme « réserve » et donner le sens contextuel du terme. Pour commencer, il convient de préciser que la réserve dont il est question ici n'est pas la même qu'on retrouve en droit international, c'est-à- dire la clause qu'un Etat ajoute pour éviter qu'un traité soit interprété dans un sens qui ne lui convient pas, qu'il n'apprécie pas. Il s'agit en fait de la qualité de se garder de tout excès, de circonspection, retenue236. Le vocabulaire juridique définit l'obligation de réserve comme, le devoir statutaire incombant aux fonctionnaires (notamment aux magistrats) de s'abstenir de manifestations individuelles intempestives, incompatibles avec la dignité, l'impartialité et la sérénité de ses fonctions237. Dans l'exercice de ses fonctions, l'agent de la fonction publique est tenu à une prudence et doit faire abstraction de ses opinions politiques ou religieuses. L'obligation de réserve est la conséquence du principe de la neutralité de l'administration qui a pour corollaire la neutralité et l'impartialité des agents publics. Dans l'exercice de ses fonctions, l'agent doit faire preuve de la plus grande correction. Hors du service, il doit avoir un comportement irréprochable et incarner la dignité de l'Etat, il doit s'exprimer avec modération. Pour appréhender cette obligation, nous analyserons sa consistance (paragraphe I) avant de nous d'apprécier sa nature et ses modalités de mise en oeuvre (paragraphe II).

PARAGRAPHE I : LA CONSISTANCE DE L'OBLIGATION DE RESERVE.

La consistance de l'obligation de réserve que nous allons étudier ici, fait référence à ce qui constitue l'obligation de réserve. Le statut général de la fonction publique permet saisir, même s'il n'est pas très précis, la consistance de l'obligation de réserve. L'article 40 du statut dispose que : « (1) Tout fonctionnaire est tenu à l'obligation de réserve dans l'exercice de ses fonctions. (2) L'obligation de réserve consiste pour le fonctionnaire, à s'abstenir d'exprimer publiquement ses opinions politiques, philosophiques, religieuses, ou de

236 Voir Dictionnaire le Robert de poche, 2012.

237 Cornu (G), vocabulaire juridique, PUF, 2011.

Mémoire présenté et soutenu par AMBI PHILIPPE ROMEO Page 97

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servir en fonction de celle-ci »238. De cette disposition, il ressort deux volets de cette obligation : l'interdiction d'exprimer publiquement ses opinions (A) et l'interdiction de servir en fonction desdites opinions (B).

A-L'interdiction d'exprimer publiquement ses opinions.

L'interdiction que pose cette disposition du statut général de la fonction publique, concerne bien évidemment, l'expression des opinions politiques, philosophiques et religieuses publiquement. Il convient de préciser ici et maintenant cette interdiction ne se limite pas à la restriction de la liberté d'expression des opinions, elle s'étend aux gestes dans certains corps de la fonction publique mais le statut ne parle pas du type d'opinions politiques, philosophiques et religieuses. C'est dans ce sens que nous verrons l'imprécision de la restriction textuelle de l'expression des opinions (1) avant de parler de la précision jurisprudentielle de la restriction des opinions (2).

1-L'imprécision de la restriction textuelle de l'expression des opinions.

Le statut général oblige le fonctionnaire d'exprimer publiquement ses opinions politiques, philosophiques et religieuses. Cela signifie sans doute par interprétation négative du texte que le fonctionnaire est libre d'exprimer de telles opinions en privé. On peut aussi comprendre par là que le statut interdit l'expression de ces opinions pendant le service, vu que l'administration est un lieu public, tout comme dans tout autre lieu public. Toutefois, comme nous l'avons dit, le statut ne précise pas le type d'opinions politiques, philosophiques et religieuses prohibées. S'agit-il de toutes les opinions politiques, philosophiques et religieuses ?

Dans les législations étrangères, on trouve des éléments de réponses. Au Gabon, tout proche de nous, le statut général de la fonction publique dispose que : «Dans l'exercice de ses fonctions, l'agent public est également soumis à :... l'obligation de réserve en se gardant notamment de donner à l'expression de ses opinions une forme excessive ou insultante à l'égard des collègues, des chefs hiérarchiques ou des pouvoirs publics »239.Ce qui revient à dire que le fonctionnaire ne doit pas tenir des propos mettent du discrédit sur l'administration. Dans la même lancée, le statut général de la fonction publique tchadien apparait plus précis que le statut général camerounais. En effet, son article18 dispose que : «...le fonctionnaire est

238 Article 40 du décret n° 94/199 du 07 octobre 1994 portant statut général de la fonction publique de l'Etat modifié et complété par le décret n° 2000/287 du 12 octobre 2000.

239 Article 43 de Loi n°001/2005 du 4 février 2005, portant statut général de la fonction publique.

Mémoire présenté et soutenu par AMBI PHILIPPE ROMEO Page 98

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tenu de servir les intérêts de la nation avec efficacité, loyauté, dignité, dévouement et intégrité. Il doit veiller à tout moment à la protection et à la promotion des intérêts de la collectivité et éviter tout ce qui est de nature à ternir l'image de l'administration publique... »240.

Cette imprécision des textes est telle que même les statuts spéciaux parlant de l'obligation de réserve ne disent pas qu'il s'agit de celle-ci. C'est après interprétation qu'on se rend compte qu'il s'agit de cette obligation. A titre d'exemple, l'article 53 du statut spécial des fonctionnaires de l'administration pénitentiaire241 dispose en son article 26 alinéa 6 que : « les fonctionnaires de l'Administration Pénitentiaire doivent en tout temps qu'ils soient en service ou non, s'abstenir en public de tout acte, geste, parole ou manifestation quelconque de nature à porter le discrédit sur les institutions nationales, sur le corps auquel ils appartiennent ou à troubler l'ordre public ». C'est peut-être parce que le juge administratif avait déjà apporté des précisions que la réglementation possède des lacunes.

2-La précision jurisprudentielle de la restriction des opinions.

Fort heureusement, le juge administratif a remédié à cette lacune des textes dans la retentissante jurisprudence Ateba Victor242. En effet, ce n'est que dans cette jurisprudence que le sens exact des attitudes et déclarations prohibées se déclinera. On peut en effet y lire que : « l'obligation de réserve qui ne se confond pas avec l'obligation de discrétion professionnelle, se confond avec l'exigence d'un comportement qui ne soit pas à même de jeter le discrédit sur la fonction publique ; que de façon plus exigeante, l'obligation de réserve vient sanctionner des attitudes ou des déclarations du fonctionnaire excessivement critiques à l'égard de lui-même ou du service ». Etendons par discrédit ici, la perte d'une estime acquise.

Autre exemple d'explication de la jurisprudence, l'affaire Mama Eloundou243. En effet, le Sieur Mama Eloundou a, dans le n° 32 en date du 26 novembre 1956 du quotidien KAMERUN MON PAYS, organe progressiste d'information paraissant à Douala, publié l'article suivant : « Il faut nous entendre de façon solennelle. On a trop hésité. On a trop travaillé dans l'obscurité. Ce n'est pas là le remède du mal. Que ne serviraient or, argent,

240 Loi 01-017 2001-12-31 PR portant statut général de la fonction publique.

241 Décret n°2020/365 du 29 novembre 2010 portant statut spécial du corps des fonctionnaires de l'Administration Pénitentiaire.

242 Jugement n° 99/82-83 du 29 septembre 1983, ATEBA Victor c/ Etat du Cameroun.

243 Arrêt n°674/CCA. , du 13 décembre 1957 Mama Eloundou Engelbert c/ Etat du Cameroun.

Mémoire présenté et soutenu par AMBI PHILIPPE ROMEO Page 99

Les obligations du fonctionnaire en droit de la fonction publique camerounais

canon, bombe atomique et ces policiers au garde-à-vous chaque matin si au milieu de ces forêts denses qui m'ont vu naître, personne ne peut dire exactement ce à quoi il pense. Et bien, j'en suis à bout. Que les français comprennent que leurs comportements vis-à-vis de ceux qui sont fiers d'être ce qu'ils sont, mènent chaque jour à des conflits. Je me prononce, bien que policier pour mon pays. Car, pour ma part, mon pays reculant toujours derrière ses libertés, les manoeuvres françaises s'épuiseront à le poursuivre, l'organe international fera le reste. En terminant, je lance un vibrant appel à tous les compatriotes, à quelques professions qu'ils appartiennent, de se souvenir des nuits d'octobre où les nobles et seigneurs français de 1790 ont été les premiers à supprimer leurs privilèges, pour se joindre au peuple qui souffrait ». Le juge estima ainsi que le Sieur Mama Eloundou, inspecteur de police, a manqué au devoir de réserve en publiant cet article, au motif qu'en sa qualité de policier, il doit s'interdire, même en dehors du service et à l'occasion d'une campagne électorale de tenir publiquement des propos excessifs pouvant être interprétés comme un appel à la rébellion ou comme une critique de l'action de leur service, propos de nature à jeter le trouble dans les esprits et le discrédit sur le corps auquel il appartient244. L'autre volet de la consistance de cette obligation réside dans l'interdiction de servir en fonction de ses opinions.

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"Il y a des temps ou l'on doit dispenser son mépris qu'avec économie à cause du grand nombre de nécessiteux"   Chateaubriand