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Etude comparée de l'arbitrage international dans l'OHADA et en Suisse

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par Cassius Jean SOSSOU BIADJA
Université de Genève - DEA 2006
  

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A-. LA VALIDITE MATERIELLE DE LA CONVENTION

En matière d'arbitrage international, la question de la validité matérielle de la convention d'arbitrage s'apprécie au regard de sa validité objective (arbitrabilité) 36(*) et de sa validité subjective (la validité quand au fond). Eu égard à ces deux conditions sine qua non de validité matérielle, la question à laquelle nous essayerons de donner une réponse est celle de savoir, comment dans les deux systèmes cette validité matérielle de la convention s'apprécient-elles ?

1-. LA VALIDITE OBJECTIVE DE LA CONVENTION ARBITRALE DE DIP

a.- ARBITRABILITE, LE FACE A FACE DE LA LIBRE DISPOSITION DES DROITS ET DE LA PATRIMONIALITE DE LA CAUSE

DROIT COMPARE

Art. 2 al. 1 AU.A

"Toute personne physique ou morale peut recourir à l'arbitrage sur les droits dont elle a la libre disposition".

Art. 177 al. 1 LDIP

"Toute cause de nature patrimoniale peut faire l'objet d'un arbitrage".

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La compétence du tribunal arbitral, nous le savons, est tributaire de la validité de la convention d'arbitrage liant les parties au contrat. En effet, un tribunal arbitral de DIP n'est fondé à exercer sa mission que si la convention d'arbitrage qui lui donne sa compétence est elle-même valable. Pour ce faire, la validité de la convention ne peut s'apprécier qu'au regard d'un certain nombre de règles dont l'arbitrabilité du litige.

Pour qu'un litige soit arbitrable, il est important de déterminer si son objet peut être soumis à un arbitrage, c'est tout le sens de la notion de l'arbitrabilité du litige. En effet, l'arbitrabilité, si on peut se permettre d'en formuler une définition, est la possibilité de faire trancher un litige par l'arbitrage. On parle d'arbitrabilité lorsque se pose la question de savoir si le litige peut être tranché par voie d'arbitrage (juridictionnelle) ou relever de la compétence des juridictions étatiques (voie judiciaire). Ceci étant, l'appréciation du concept d'arbitrabilité varie d'un système à un autre selon qu'il s'agit de la libre disponibilité des droits en cause, comme le propose les droits OHADA et français ou, de la patrimonialité de la cause dont les droits suisse et allemand se sont fait l'écho.

D'une manière concrète, le concept d'arbitrabilité en droit OHADA, idem en droit français, repose sur la disponibilité des droits, celle-ci se référant à l'aptitude qu'à son titulaire de pouvoir en être le maître absolu, de l'aliéner ou même d'y renoncer. Ces deux notions (soulignées), il faut le dire, sont liées et on les retrouve en filigrane dans la formulation que donne l'art. 2 al. 1 de l'AU.A de la notion de l'arbitrabilité. On retrouve cette même définition de la notion de l'arbitrabilité en droit français, lorsqu'il énonce dans les dispositions de son code civil, le principe selon lequel les droits, dont les parties ont la libre disposition, sont arbitrables37(*). Il est donc clair que, le législateur OHADA a repris in extenso le contenu du texte de loi français pour définir l'arbitrabilité. Ce choix législatif en faveur de l'option française dans la définition de la notion, n'est-il pas hasardeux voire périlleux pour ce droit qui se veut avant tout harmonisateur ?

En effet, l'interprétation juridique qui peut résulter de la libre disponibilité des droits telle qu'énoncée en droit OHADA de l'arbitrage est la suivante :

Au sein d'un système juridique, il existe plusieurs degrés de disponibilité de droit. Il en appert donc que, le droit peut se révéler indisponible tant qu'il est à l'état de droit éventuel. Dans ce cas, il est impossible de recourir à l'arbitrage. Par contre, une telle possibilité s'ouvre lorsque le droit est acquis, autrement dit, lorsqu'il s'agit d'un droit disponible à l'état de droit déjà né et actuel.

Au regard de cette interprétation et d'une manière générale, sont exclus de l'arbitrage, selon les termes du droit OHADA, les litiges relatifs au droit virtuel incertain, dont la potentialité à pouvoir en être le titulaire est hypothétique. Aussi, les droits relatifs à l'état et à la capacité des personnes et, en l'occurrence ceux qui portent sur les droits hors du commerce juridique sont exclus de la possibilité d'être soumis à un arbitrage. Enfin, ceux dont l'exercice met en cause un intérêt public et ceux auxquels la loi interdit de renoncer, sont aussi exclus de la possibilité de faire l'objet d'un arbitrage. Il se trouve, cependant, qu'il est important pour l'appréciation de l'arbitrabilité qu'on tienne compte de la législation de chaque pays, or le constat s'impose sur la variabilité des droits disponibles d'un système juridique à un autre. Il en résulte le fait qu'on peut assister à une divergence dans l'appréciation du concept d'arbitrabilité même au sein du système dit unifié de l'OHADA, qui en réalité n'en est pas un.

Ceci étant, nous savons que, dans une convention d'arbitrage de DIP, l'appréciation de la problématique juridique de la libre disponibilité des droits ne peut se faire que d'après la loi régissant le droit concerné, c'est-à-dire pour être plus précis, la loi applicable au fond du litige (lex causae). Si, comme nous venons de le relever, l'application du concept de libre disposition des droits subjectifs peut varier, la probabilité d'assister à l'invalidité de la convention d'arbitrage au motif que la loi applicable au fond du litige tient des droits en question pour indisponibles et donc non arbitrables, n'est pas faible. Cet état de chose pose, bien évidemment, toute la problématique sur le questionnement de l'opportunité de la prise en compte de la notion de libre disponibilité des droits dans la loi d'arbitrage, lorsqu'il s'agit de fixer les limites de l'arbitrabilité. Alors, se pose la question de savoir s'il n'est pas préférable à la législation OHADA de recourir plutôt à une autre notion moins fuyante, celle de la patrimonialité de la cause comme en droit suisse, plutôt qu'à celle contraignante et moins certaine de la libre disponibilité des droits ?

Afin d'éviter cet écueil les législateurs suisse et allemand ont préféré à la notion fuyante de libre disponibilité une autre plus concrète, réaliste et plus large celle de la patrimonialité de la cause. Contrairement au critère de la libre disponibilité des droits tel que prévu par l'AU.A en droit OHADA, le chapitre 12 LDIP se réfère plutôt à la nature patrimoniale de la cause pour définir l'arbitrabilité du litige dans ce système. Rappelons à toutes fins utiles, que l'appréciation des critères de l'arbitrabilité en droit suisse varie selon que le régime juridique applicable à l'arbitrage relève du concordat ou du chapitre 12 LDIP. Tout comme le droit français et le droit OHADA, le concordat suisse s'appesantit sur la libre disponibilité des droits pour fixer les limites à l'arbitrabilité du litige. Mais, le chapitre 12 LDIP marque une rupture dans l'appréciation de l'arbitrabilité pour innover avec la prise en compte du caractère patrimonial du litige. Ce qui est à notre avis, un critère plus adapté au regard du recours à la loi applicable au fond qui peut rendre le droit en question indisponible complexifiant l'arbitrabilité du litige. Vu le succès qu'a connu la prise en compte de la patrimonialité de la cause dans la définition de l'arbitrabilité, nous espérons que dans sa nouvelle version, le concordat intercantonal fera sienne cette définition afin d'harmoniser la législation suisse de l'arbitrage sur la question des limites de l'arbitrabilité. La pertinence de la prise en compte de la patrimonialité de la cause, dans l'appréciation de l'arbitrabilité, a fait écho au sein de la doctrine arbitrale au point où, certains commentateurs du nouveau droit OHADA de l'arbitrage se sont montrés réservés, sur l'utilisation d'un concept aussi fuyant et relatif qu'est celui de la disponibilité des droits comme critère d'arbitrabilité dans une législation uniforme.

En effet, dans son commentaire sur l'arbitrabilité du litige P. Meyer disait à bon droit "il n'empêche qu'on peut penser qu'il eut été préférable de recourir à une notion moins fuyante qui ne souffrirait pas d'interprétations différenciées selon les droits qui pourraient être utilisés pour la concrétiser. Le critère retenu par la loi fédérale suisse, qui retient la patrimonialité de la cause pour définir l'arbitrabilité, peut paraître, à cet égard, plus adéquat spécialement dans une législation uniforme"38(*). Le texte de l'art. 177 al. 1 LDIP dispose que "toute cause de nature patrimoniale peut faire l'objet d'un arbitrage". La loi ne définit pas par contre, ce qu'il faut comprendre par patrimonialité de la cause. Dans l'entendement du TF suisse, la patrimonialité de la cause recouvre "toutes les prétentions qui ont une valeur pécuniaire pour les parties, à titre d'actif ou de passif, autrement dit les droits qui présentent pour l'une au moins de celles-ci, un intérêt pouvant être apprécié en argent"39(*). Il va s'en dire logiquement par déduction que, toutes les causes de nature extrapatrimoniale sont par essence inarbitrables. Ainsi, seront exclues de l'arbitrage en droit suisse, comme le liste si bien A.BUCHER "les droits portant sur l'état civil et ceux touchant essentiellement aux relations personnelles entre les membres d'une famille. Sont également exclus de l'arbitrage certains litiges qui, opposant l'Etat à l'individu, n'ont une valeur patrimoniale que pour ce dernier, tel le contentieux administratif de l'inscription au registre du commerce, celui relatif aux demandes des brevets d'invention, de dépôts de dessins et modèles et d'enregistrement de marques ou celui concernant les mesures prises par les autorités à l'égard de certaines conventions cartellaires"40(*). Naturellement, on ne saurait exclure l'impossibilité de soumettre à l'arbitrage, selon la loi d'arbitrage suisse, les droits dont l'exercice met en cause un intérêt public et ceux auxquels la loi interdit de renoncer.

Il importe de relever que, l'intérêt de la distinction, entre la libre disponibilité et la patrimonialité de la cause, porte sur le fait qu'avec le critère de la patrimonialité l'option est faite pour l'application d'une règle matérielle dans la définition de l'arbitrabilité. Cette règle "a l'avantage de la simplicité et de l'uniformité de la solution, car elle ne fait pas dépendre l'arbitrabilité du droit applicable au fond"41(*). Contrastant, de ce fait, le critère de libre disponibilité qui exige la démarche conflictuelle pour déterminer le droit applicable à l'arbitrabilité du litige.

Du point de vue du droit comparé, la ZPO42(*) rejoint la législation suisse, elle dispose en son § 1030 que: "toute cause de nature patrimoniale peut faire l'objet d'une convention d'arbitrage." En résumé nous pouvons conclure que, le critère de la nature patrimoniale choisi par le législateur suisse à l'art.177 al.1 prend en compte l'arbitrabilité dans son acception la plus large que celui privilégié par le droit OHADA et français de l'arbitrage international43(*).

Toutes les matières ne sont pas arbitrables, que ce soit en droit OHADA ou en droit suisse de l'arbitrage international. En effet, outre les impossibilités de recourir à l'arbitrage, dont nous avons parlées eu égard aux différents droits concernés, le respect de l'ordre public international s'impose aussi comme une autre limite à l'arbitrabilité du litige. Nous ne disserterons pas cette vaste problématique qui porte sur l'arbitrabilité et l'ordre public international. Enfin, l'existence d'une attribution impérative de compétence au profit d'une autre juridiction se révèle être aussi une limite. Ainsi, sont non arbitrables les litiges portant notamment sur le droit pénal, l'ouverture des procédures collectives ou encore la validité des brevets. Les deux systèmes n'échappent pas non plus à la reconnaissance de ce principe universel du droit de l'arbitrage.

Nous ne détaillerons pas toutes ces sections relatives aux limitations à l'arbitrabilité dans les deux systèmes par soucis de limitation de pages. Par contre, l'absence de réserve à l'arbitrabilité du fait de la participation d'une personne morale publique ne manque pas d'intérêt pour cette étude comparée. Les deux lois d'arbitrage respectent-elles la tendance généralisée de la pratique du droit de l'arbitrage international qui vise à interdire à l'Etat et aux entités dont il a le contrôle, de refuser de se soumettre pleinement à un arbitrage dont ils sont parties ?

* 36 L'arbitrabilité est une condition de validité de la convention d'arbitrage et de la compétence des arbitres, il s'agit de la validité objective du contrat d'arbitrage dans la mesure où cette condition est indépendante de la qualité et de la volonté des parties.

* 37 Art. 2059 code civil français : Toutes les personnes peuvent compromettre sur les droits dont elles ont la libre disposition.

* 38 P. Meyer, OHADA Droit de l'arbitrage, Bruylant 2002, p. 101.

* 39 23 juin 1992, Fincantieri, ATF 118, II. P.356; bulletin ASA, 1993, p.58; Rev. Arb., 1993, p. 691, note F. Knoepfler

* 40 Cf. Andreas Bucher, le nouvel arbitrage international en Suisse Helbing & Lichtenhahn 1988 p. 39.

Référence doit être ici faite pour toute la théorie sur l'arbitrabilité du litige en droit suisse au même livre p. 39-42

* 41 G. KAUFMANN-KOHLER / A. RIGOZZI, arbitrage international droit et pratique à la lumière de la DIP, éd. Weblaw, Berne 2006, Schulthess, Zurich/Bâle/Genève 2006, p. 69.

* 42 ZPO (Zivilprozessordnung) loi de procédure civile allemande du 22 décembre 1997.

* 43 Cf. Andreas Bucher, le nouvel arbitrage international en Suisse Helbing & Lichtenhahn 1988, n. 93 p. 39.

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