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Arbitrage et procédures collectives

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par Charlène RIET
Université Toulouse1 Capitole - Master 2 Droit fondamental des affaires 2010
  

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Chapitre 1 : Coexistence des procédures collectives et arbitrales

38. La coexistence des procédures arbitrales et collectives s'exerce de deux façons, que le Professeur Dominique Vidal a évoquées1 lors d'un colloque en parlant << de l'arbitrage dans la faillite à l'arbitrage de la faillite È. Cette citation traduit deux réalités qui seront étudiées successivement, en distinguant << l'arbitrage de la faillite È qui recouvre la question de l'arbitrabilité des procédures collectives (Section 1), puis << l'arbitrage dans la faillite È qui correspond à la situation oü une procédure collective et une procédure arbitrale se déroulent concomitamment (Section 2). Lorsque procédures collectives et arbitrales coexistent, la ligne de séparation n'est pas figée mais évolue. Cette évolution peut se faire au fil du temps comme c'est le cas pour l'arbitrabilité des procédures collectives. Mais dans le cas oü les procédures sont concomitantes, c'est un critère chronologique qui détermine la prédominance plus ou moins forte des procédures collectives.

Section 1 : L'évolution de l'arbitrabilité des procédures collectives

39. L'arbitrage de la faillite recouvre la notion d'arbitrabilité, définie par Monsieur Bucher comme << l'aptitude d'une cause à constituer l'objet d'un arbitrage2 È. Cette question de savoir si une procédure collective peut faire l'objet d'un arbitrage a donné lieu à une évolution jurisprudentielle importante. Si dans un premier temps le législateur a été très hostile à admettre l'arbitrabilité des procédures collectives (Sous-section 1), la jurisprudence et la doctrine l'ont progressivement consacrée, tout en l'encadrant (Sous-section 2).

Sous-section 1 : Les obstacles légaux à l'arbitrabilité des procédures collectives

40. Le domaine des procédures collectives est fortement empreint d'ordre public et ce dernier constitue l'obstacle majeur à l'arbitrabilité des procédures collectives (1). Par conséquent, les procédures collectives font l'objet d'une attribution exclusive de compétence au profit des juridictions étatiques dont il convient d'examiner les raisons (2).

§ 1 L'ordre public comme limite à la compétence de l'arbitre

41. Bien que l'institution arbitrale bénéficie d'une véritable autonomie, l'ordre public limite la compétence de l'arbitre en bridant l'indépendance de cette justice privée (A) et en excluant l'arbitrage des matières qui sont fortement marquées par l'ordre public (B).

1 Rapport de synthèse, colloque de Nice Sophia-Antipolis sur les entreprises en difficulté, LPA, 9 janvier 2002, n° 7, p 76.

2 A. Bucher, Le nouvel arbitrage international en Suisse, éd. Helbing et Lichtenhahn, Théorie et pratique du droit, 1988, n° 86, p. 37.

A - L'ordre public : rempart contre l'autonomie de l'arbitrage

42. L'arbitrage est un mode alternatif de règlement des litiges distinct de la justice étatique. Par conséquent, il doit en principe obéir à des règles qui lui sont propres, sans que l'Etat puisse lui imposer ses règles légales. Néanmoins, si les Etats reconnaissent pleinement l'autonomie de l'arbitrage (1°), leur ordre public constitue un garde fou efficace pour limiter ou interdire l'arbitrage de certains litiges (2°).

1 Le principe d'autonomie de l'arbitrage

43. L'arbitrage laisse une place importante à la volonté des parties qui peuvent ainsi librement décider de soustraire un litige à la compétence des juridictions étatiques. Mais leur volonté peut aller encore plus loin car le concept d'autonomie de l'arbitrage couvre deux réalités : d'une part, l'indépendance de l'institution arbitrale vis-à-vis des juges étatiques, mais aussi l'autonomie de l'arbitrage vis-à-vis des lois1. Ainsi, la convention d'arbitrage peut être soumise à une loi différente de celle qui régit le contrat principal. Les règles de droit applicables à l'arbitrage sont donc détachées de celles du droit étatique.

De ce fait, les arbitres sont libres de s'affranchir des règles de droit de la procédure judiciaire, en vertu de l'article 1460 alinéa 1 du nouveau Code de procédure civile2. En outre, ils disposent de pouvoirs étendus quant à la détermination des règles applicables aux litiges car leur pouvoir dépend de la volonté des parties. Ils peuvent recevoir mission de statuer en appliquant les règles de droit ou de statuer en amiable composition, dans ce cas les règles de droit s'appliquant normalement sont écartées et les arbitres statuent en équité. Ils choisissent alors la solution qui leur appara»t la plus juste eu égard à l'équité ou encore aux usages du commerce3. Mais si les parties n'ont rien prévu4, les arbitres doivent appliquer les règles de droit.

44. L'arbitrage international étant lui aussi autonome, l'arbitre peut ne pas avoir recours aux lois nationales et retenir des normes non étatiques, ou bien appliquer des lois qui ne sont rattachées à aucun ordre juridique étatique5. Par conséquent, la convention d'arbitrage internationale n'a pas à être rattachée à une loi étatique pour être valable. Elle est donc décrite comme un << contrat sans conflits de lois È sans être << un contrat sans lois6 È. De sorte que la validité de la convention

1 En ce sens, Ph. Fouchard, préface thèse << L'arbitrage commercial international et l'ordre public È, J-B Racine, LGDJ, 1999.

2 Art 1460 al 1 NCPC : << Les arbitres règlent la procédure arbitrale sans être tenus de suivre les règles établies pour les tribunaux, sauf si les parties en ont autrement décidé dans la convention d'arbitrage È.

3 X. Linant de Bellefonds, L'arbitrage et la médiation, Que sais-je ?, 2003, p. 61.

4 Art 1474 NCPC : << L'arbitre tranche le litige conformément aux règles de droit, à moins que, dans la convention d'arbitrage, les parties ne lui aient conféré mission de statuer comme amiable compositeur È.

5 En ce sens, J-B. Racine, op. cit.

6 P. Fouchard, E. Gaillard, B. Goldman, Traité de l'arbitrage commercial international, Litec, 1996, p. 251.

d'arbitrage est appréciée indépendamment de toute loi étatique.

Néanmoins, la compétence de l'arbitre est subordonnée au respect des règles d'ordre public. Car si l'arbitrage est autonome, il ne doit pas être un moyen de porter atteinte à l'ordre public d'un Etat.

2° L'autonomie de l'arbitrage limitée par l'ordre public

45. La notion d'ordre public recouvre l'ensemble des Ç valeurs fondamentales d'une société auxquelles les parties à un acte juridique ne peuvent déroger par des stipulations contraires1 È. C'est un concept difficile à appréhender dans la mesure oü chaque pays a son propre ordre public. En effet, l'ordre public correspond à un ensemble de valeurs jugées essentielles, dans une société donnée - à un moment donné. C'est pourquoi, l'ordre public est à la fois Ç relatif et évolutif2 È : non seulement il est propre à chaque Etat, mais il est aussi progressivement modifié en fonction de l'évolution de la société. Notons qu'il existe aussi un ordre public international, qui permet d'évincer toute législation étrangère3 qui heurterait Ç manifestement È les valeurs d'une société et qui serait alors remplacé par la loi du for4. Il a pour effet de limiter la compétence de l'arbitre lorsqu'il doit statuer en droit.

46. On peut avancer que l'ordre public est avant tout une manifestation de la suprématie de l'Etat et de sa justice étatique. Il vient contrecarrer l'indépendance de cette justice privée qu'est l'arbitrage afin d'en limiter les excès. C'est pourquoi, le Professeur Philippe Fouchard parle de Ç rempart contre l'autonomie5 È de l'arbitrage.

Il en résulte que la compétence de l'arbitre est limitée par le respect de l'ordre public, qui impose des normes impératives, que la seule volonté des parties ne peut exclure. Or les procédures collectives sont fortement marquées par l'ordre public, ce qui limite ipso facto la compétence de l'arbitre. Et fait également peser une suspicion légitime d'inarbitrabilité des procédures collectives6.

1 Dictionnaire du vocabulaire juridique, Objectif droit, Litec, 2004.

2 Cours de droit international privé, UT1, 2010.

3 P. Mayer, La sentence contraire à l'ordre public au fond, Rev. arb. 1994., n°29, p. 639.

4 La loi du for dite aussi lex fori signifie que la loi appliquée est celle du lieu oii la juridiction a été saisie.

5 Ph. Fouchard, préface thèse Ç L'arbitrage commercial international et l'ordre public È, J-B Racine, LGDJ, 1999.

6 Ç Certaines matières éveillent la méfiance quand il est question d'arbitrabilité car elles sont empreintes de nombreuses dispositions contraignantes È, O. Caprasse, Les sociétés et l'arbitrage, LGDJ, 2002.

B - L'inarbitrabilité des matières intéressant l'ordre public 1° L'inarbitrabilité légale des procédures collectives

47. Les conditions de validité d'une convention d'arbitrage peuvent être classées en deux catégories, les conditions relatives à la capacité de compromettre et les conditions relatives à l'arbitrabilité du litige. La question de savoir si les litiges concernant les procédures collectives peuvent faire l'objet d'un arbitrage est d'importance car le non respect de cette condition de validité est sanctionné par la nullité de la convention d'arbitrage1.

Pendant longtemps, l'inarbitrabilité des litiges concernant une procédure collective semblait ne pas faire de doute. En effet, la justification n'était autre que légale, puisque l'article 2060 du Code civil affirme : << on ne peut compromettre sur les questions d'état et de capacité des personnes, sur celles relatives au divorce et à la séparation de corps ou sur les contestations intéressant les collectivités publiques et les établissements publics et plus généralement dans toutes les matières qui intéressent l'ordre public È. Nul doute que les procédures collectives intéressent l'ordre public. Elles étaient donc interprétées comme étant, de ce seul fait, inarbitrables.

2° Consécration jurisprudentielle de l'inarbitrabilité des procédures collectives

48. Cette règle selon laquelle la seule présence d'ordre public exclut l'arbitrabilité a été consacrée par la jurisprudence pour qui << le compromis est nul chaque fois que l'arbitrage suppose l'interprétation et l'application d'une règle d'ordre public2 È. Cette solution a pour objectif de faire primer les valeurs essentielles d'une société, transcrites dans son ordre public, sur la volonté des parties.

49. Or il est difficile de concilier le caractère autonome de l'arbitrage avec la nécessaire protection de l'intérêt général qu'implique l'ouverture d'un procédure collective. L'inarbitrabilité des procédures collectives met en exergue cette confrontation entre procédures collectives et arbitrales. Mais elle permet aux Etats de protéger certains domaines face au développement de la justice privée. Ainsi, les litiges concernant des procédures collectives ne peuvent se voir appliquer des règles détachées du système étatique, du fait de la présence d'ordre public. Cette interprétation de l'article 2060 du Code civil, qui a aujourd'hui évoluée, justifiait l'inarbitrabilité des procédures collectives et traduisait une manifestation concrète de la suprématie des procédures collectives.

1 X. Linant de Bellefonds, L'arbitrage et la médiation, Que sais-je ?, 2003, p. 44.

2 Paris, 9 février 1954, D. 1954, p. 192.

§ 2 Les justifications à l'attribution exclusive de compétence au profit des juridictions étatiques

50. Il résulte de l'inarbitrabilité des procédures collectives, que tout litige concernant une procédure de sauvegarde, de redressement judiciaire ou de liquidation judiciaire relève exclusivement de la compétence judiciaire, dans cette conception oü la seule présence d'ordre public suffisait à écarter l'arbitrage. Cependant, d'autres raisons se cachent derrière l'inarbitrabilité du fait de la présence d'ordre public. En effet, il para»t opportun de confier les litiges intéressant les procédures collectives aux seules juridictions étatiques afin de centraliser les contentieux (A). Mais l'arbitrage des procédures collectives est aussi exclu dans le but de protéger l'intérêt des tiers, et plus largement l'intérêt collectif (B).

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"Piètre disciple, qui ne surpasse pas son maitre !"   Léonard de Vinci