Section 2 : Le caractère central et
controversé de l'intérêt social
« La notion d'intérêt social est un
procédé d'équité modératrice à la
disposition du juge ». Cette phrase de M. Sousi1
témoigne du rôle central dont jouit la notion
d'intérêt social. Pourtant, si son utilisation est
récurrente en droit des affaires, l'intérêt social est
l'une des notions les plus mal définies et les plus sujettes à
controverses. A travers l'étude de la théorie de l'acte anormal
de gestion et du délit d'abus de bien social, il n'est pas
étonnant de constater que l'intérêt social reçoit
une compréhension différente (I.). Ces querelles quant à
son interprétation conduisent certains auteurs à s'interroger sur
la pertinence de son utilisation (II.).
I. La compréhension de l'intérêt
social
La définition de l'intérêt social a
toujours fait l'objet de controverses, questionnements et débats
doctrinaux, tant en droit fiscal qu'en droit pénal des affaires (A.).
Paradoxalement, cette même notion se situe au coeur de la théorie
de l'acte anormal de gestion et de l'abus de bien social ce qui conduit
à nous interroger sur la solidité de ce socle commun (B.).
A. L'impossible définition de l'intérêt
social
1) Une notion sujette à
controverses
a) Les controverses quant à la nature de
l'intérêt social
Malgré son rôle majeur en droit des
sociétés, les tentatives visant à cerner la notion
d'intérêt social sont récentes2. Classiquement,
le monde du droit des sociétés voit s'affronter deux
thèses concernant la nature de l'intérêt social, chacune
défend sa vision de la notion de société. La
première conception suggère que la société repose
sur un contrat entre ses membres. S'appuyant sur l'article 1833
C.Civ.3, cette théorie « société-contrat
» met en évidence l'intérêt des associés qui se
confondrait nécessairement avec l'intérêt de la
société. En effet, la société est
créée par les associés qui entendent ainsi, à
travers elle, satisfaire leur intérêt commun (partager les
bénéfices et profiter des économies). De ce fait, veiller
à la protection de leurs intérêts revient à
protéger la société. Pourtant, si cette théorie fut
dominante au début du XXème siècle, elle est
1 SOUSI (G.), « Intérêt de groupe et
intérêt social », JCP.1975.11816, p. 10
2 MEDINA (A.), Abus de biens sociaux : prévention,
détection, poursuite, DALLOZ, 2001, p. 80
3 Art. 1833 C.Civ. : « Toute société doit
avoir un objet licite et être constituée dans
l'intérêt commun des associés »
apparue trop rigide aux yeux de certains en ce qu'elle refuse
de considérer la société comme autre chose qu'un simple
contrat1.
Une autre conception est peu à peu apparue : celle de
la « société-institution ». Principalement
développée par MM. Champaud et Paillusseau dans les années
1960, elle dissocie l'intérêt commun des associés de
l'intérêt social. Pour ces auteurs, l'intérêt social
est autonome et propre à la personne morale qui devient une
véritable institution.
Si cette dernière conception l'a longtemps
emportée, nous assistons aujourd'hui à l'émergence d'une
troisième théorie, mixte, qui décide de tenir compte de
l'aspect protéiforme de l'intérêt social. Pour ces auteurs,
dont M. Mestre est le chef de file, le caractère ambivalent de la notion
empêche l'établissement d'une définition unitaire.
Dès lors, l'intérêt social doit être vu comme une
combinaison d'intérêts, un outil avec suffisamment de souplesse
pour permettre une utilisation efficace dans différents domaines.
Finalement, cette dernière conception admet
l'impossibilité d'une définition de l'intérêt social
et se contente de l'utiliser plutôt que d'essayer de la
définir2, d'où les nombreuses critiques quant à
sa pertinence.
b) Les critiques quant à la pertinence de
l'intérêt social
Si les tentatives de définition de
l'intérêt social émanent d'auteurs commercialistes, les
critiques quant à la pertinence de cette même notion sont
principalement soulevées par des fiscalistes, tant est si bien que le
recours à la notion d'intérêt social pour l'abus de bien
social n'est pratiquement pas contestée sur ce point.
Concernant l'acte anormal de gestion, les auteurs reprochent
à l'administration fiscale son utilisation systématique de la
notion d'intérêt social, qui certes apporte une solution à
l'anormalité de gestion mais ne la définit nullement. Or, cette
absence de définition de l'anormalité est regrettable à
deux égards : elle rend lacunaire la théorie de l'acte anormal de
gestion et elle créée une grave insécurité
juridique3 pour l'entreprise.
1 DUCOULOUX-FAVARD (Cl.), sous TGI Mulhouse, 25 mars 1983,
D.1984, p. 285 : « l'intérêt social est
étrangère ; son pays natal est l'Allemagne. C'est une notion qui
ne pouvait voir le jour parmi les juristes trop convaincus que la
société est un contrat ».
2 COZIAN (M.), VIANDIER (A.) et DEBOISSY (F.), Droit des
sociétés, LITEC, 2006, 19ème éd.,
673 p. : l'intérêt social est vu comme « un impératif
de conduite, une règle déontologique, voire morale ».
3 COLLET (M.), Contrôle des actes anormaux de gestion :
pour un retour à l'anormal, Dr. Fisc. 2003, n° 14, p. 536 :
« Si les effets juridiques qui lui sont attachés sont claires
(...), son identification renferme une part d'aléa ».
Le critère de l'intérêt de l'entreprise
apparait donc très contesté tant sur le plan théorie que
sur le plan pratique. De plus, la dimension subjective de l'utilisation de
l'intérêt social contrevient à l'habituelle
objectivité de l'administration fiscale qui se retrouve obligée
de statuer « au cas par cas ».
C'est au milieu de ces controverses que la notion
d'intérêt social n'a cessé d'évoluer au sein de
l'acte anormal de gestion et de l'abus de bien social.
2) Une notion en constante
évolution
a) Les évolutions en droit pénal
Si le juge pénal ne conteste pas l'utilisation de
l'intérêt social, il tente malgré tout de faire
évoluer la notion. Les juges ont ainsi essayé de confondre
intérêt social et objet social. L'objet social qui
peut être défini comme « l'ensemble des
activités déterminées par le pacte social, que la
sociétépeut exercer »1 est
pourtant très différent de l'intérêt social
puisqu'elle est dénuée de dimension
morale et ne prend comme référence que la
volonté des associés matérialisée par les
statuts2. Ainsi, un acte conforme à l'objet social peut
être contraire à l'intérêt social3.
De la même manière, s'inspirant de la
théorie « société-contrat », certains juges ont
tenté de confondre l'intérêt de la société
avec l'intérêt des actionnaires ou associés. Cette position
est bien évidemment erronée puisque la seule victime de l'abus de
bien social est la société et non les actionnaires ou
associés4.
En définitive, l'atteinte à
l'intérêt social dans le cadre de l'abus de bien social est une
question de faits relevant de l'appréciation souveraine des juges du
fond. En l'absence de textes et de définition précise, la Cour de
cassation se contente de vérifier la réunion des
éléments constitutifs du délit, laissant aux juges des
Cours d'appel le soin d'apprécier l'atteinte à
l'intérêt social5. Ce désintérêt
pour la notion contraste avec les réactions virulentes de certains
auteurs fiscalistes qui souhaitent tout simplement cesser d'utiliser la notion
d'intérêt social.
1 CHAPUT (R.), De l'objet des sociétés
commerciales, Thèse, Clermont, 1973, p. 35
2 A noter que le projet de loi du sénateur Lesaché
de 1932 faisait référence à l'objet social.
3 Pour illustration, l'octroi de rémunérations qui
est conforme à l'objet social mais contraire à
l'intérêt social lorsqu'elles sont excessive (CA Angers, 17
janvier 1991)
4 Citons simplement l'exemple de l'EURL qui est concernée
par le délit d'abus de bien social alors même qu'elle ne compte
qu'un seul associé
5 Une formule de la Cour de cassation est récurrente :
« Attendu que les énonciations de l'arrêt attaqué
mettent la Cour de cassation en mesure de s'assurer que la cour d'appel, par
ces motifs exempts d'insuffisance ou de contradiction et répondant aux
articulations essentielles des conclusions dont elle est saisie, a
caractérisé en tous ses éléments constitutifs tant
matériels qu'intentionnels, le délit d'abus de biens sociaux dont
elle a déclaré le prévenu coupable ».
b) Les évolutions en droit fiscal
Le caractère aléatoire de l'intérêt
social a conduit à de nombreuses évolutions jurisprudentielles,
certes en élargissant le champ d'application de l'acte anormal de
gestion mais au prix d'une incohérence théorique.
Cette évolution peut se résumer en trois
étapes : dans un premier temps, la jurisprudence refusait d'admettre que
l'intérêt social puisse se confondre avec l'intérêt
d'un tiers, l'intérêt de l'exploitation était exclusif.
Puis, en 1992, elle est revenue sur cette position en admettant que
l'intérêt d'un tiers puisse être également conforme
à l'intérêt de l'entreprise1. Dès lors,
les juges ont eu pour mission de veiller à ce que la contrepartie
accordée au tiers n'excède pas celle accordée à
l'exploitation. Enfin, la jurisprudence du Conseil d'État relative aux
groupes de société est venue rompre cet élargissement
apparent : l'appartenance à un même groupe ne suffit pas à
caractériser l'intérêt social2. Ainsi, un
abandon de créance doit apporter une contrepartie à la
société qui le consent sans qu'elle puisse se cacher
derrière l'identité du bénéficiaire3.
Face à ces constats, de nombreuses voix
s'élèvent pour substituer à la notion
d'intérêt social celles d'usage et
d'égalité4. Cependant, si cette solution a le
mérite de fonder la normalité sur un socle moins mobile, elle
élude un peu trop facilement l'élément intentionnel de
l'auteur de l'acte.
B. Une utilisation partiale de l'intérêt
social
1) L'utilisation orientée d'une notion
large
a) Les deux orientations divergentes données par le
droit fiscal et le droit pénal
La notion d'intérêt social est la
véritable matrice commune de l'acte anormal de gestion et de l'abus de
bien social. Pourtant, elle est entendue différemment suivant qu'elle
est utilisée par un juge fiscal ou un juge pénal. Pour le juge
fiscal, l'intérêt social est nécessairement
économique et il se matérialise par une perte financière.
Peu lui importe que l'acte soit illicite comme nous le verrons en seconde
partie. Il n'entend pas porter de jugement moral. Pour le juge pénal en
revanche, l'intérêt social est beaucoup plus large et vise aussi
bien l'atteinte patrimoniale que l'atteinte morale à
l'intérêt de la société.
1 CE, Musel SBP et Bruner, 10 juillet 1992,
req. n° 110213 et n° 110214
2 Cf. infra sur l'intérêt de groupe p. 46
et s.
3 CE, SA Rocadis, 26 septembre 2001, req. n°
219.825, Dr. Fisc. 2002, n° 24, comm. 490, concl. BACHELIER
4 SERLOOTEN (P.), Liberté de gestion et droit
fiscal : la réalité et le renouvellement de l'encadrement de la
liberté, Dr. Fisc. 2007, n° 12, p. 11 : « la
référence serait alors constituée par les usages de la
profession ou les usages de contribuables placés dans des situations
comparables »
Ce constat est intéressant à deux égards
: d'une part, il témoigne du caractère protéiforme de la
notion qui possède plusieurs versants. L'intérêt social
n'est pas figé et ne se limite pas seulement à son aspect
économique. Si ceci est le cas pour le droit fiscal c'est uniquement en
raison de la particularité de sa matière. D'autre part, cette
divergence d'orientation met en évidence les conceptions
foncièrement différentes du droit fiscal et du droit pénal
et surtout l'autonomie de la première par rapport à la
seconde.
Pourtant, il est difficile sur le plan théorique de
justifier qu'une seule et même notion soit utilisée de deux
façons différentes dans un même cas. Cette utilisation
partiale d'une seule et même notion qui permet aux juges d'éluder
les éléments de la définition qui ne les satisfont pas,
apparait étonnante d'un point de vue théorique.
b) L'orientation essentiellement morale du droit pénal
Dès l'apparition de la notion d'abus de bien social au
début du XXème siècle, le législateur
n'a pas caché son intention de moraliser le monde des affaires : le
ratio legis de la loi de 1935 était la protection de
l'intérêt social1 contre les abus des dirigeants
sociaux. L'origine essentiellement politique du délit a conduit à
une utilisation de la notion d'intérêt social qui visait à
permettre de sanctionner un comportement considéré comme bien
plus grave que le simple abus de confiance. Pour se convaincre de la dimension
symbolique du délit d'abus de bien social, il suffit de se
référer à une très ancienne jurisprudence, apparue
quelques mois avant le délit d'abus de bien social, qui rend en quelque
sorte « imprescriptible » le délit2. Cette
décision fait débuter le délai de prescription de trois
ans au jour où le délit est découvert et non au jour
où il est commis (comme cela est habituellement prévu par les
articles 7 à 9 CPP)3. Cette position audacieuse des juges
trouve sa justification dans la nature même du délit qui est
souvent clandestin. La volonté de la jurisprudence est claire :
éviter que ne se retrouvent impunis les dirigeants indélicats qui
ont réussi à dissimuler leurs agissements.
Dès lors, l'intérêt social est
volontairement utilisé comme un outil répressif qui permet, non
pas de délimiter le « normal » et « l'anormal »
comme c'est le cas en droit fiscal, mais de caractériser le
délit.
La théorie de l'acte anormal de gestion en particulier
et le droit fiscal en général rejette clairement cette morale.
Pour comprendre cette différence fondamentale entre l'acte anormal de
1 MEDINA (A.), Abus de biens sociaux : prévention,
détection, poursuite, DALLOZ, 2001, p. 348
2 Crim. 4 janvier 1935, Gaz. Pal. 1935.1, p. 353
3 Cette position contra legem est toutefois à
nuancer puisqu'elle n'est applicable que lorsque le délit a
été dissimulé. Si ce n'est pas le cas, de point de
départ du délai est fixé au jour de la présentation
des comptes annuels.
gestion et l'abus de bien social, il faut se pencher sur la
mission première de l'administration fiscale qui est d'imposer les
entreprises conformément à l'article 14 de la Déclaration
des droits de l'homme et du citoyen de 1789 et non de poursuivre les auteurs de
délits.
Dans les deux cas, l'aspect vaporeux de l'intérêt
social conduit à une insécurité juridique qui contrevient
tout particulièrement à l'exigence de légalité des
peines imposées par le droit pénal et qui nécessite des
remèdes.
2) Propositions et remèdes à
l'insécurité juridique découlant de la notion
a) Le recours aux notions d'usage et d'égalité
pour l'acte anormal de gestion
Nombreux sont les auteurs qui considèrent
l'intérêt social comme inapproprié. En effet, ces
fiscalistes notent que cette notion est un outil insuffisant pour fonder une
théorie aussi majeure que l'acte anormal de gestion1. Les
reproches s'orientent tous vers le caractère incertain de cet outil et
de son « emploi aléatoire » par la jurisprudence.
Presque totalement livrée à l'empirisme, ce qui constitue le
socle de la théorie de l'acte anormal de gestion apparait dangereux pour
la sécurité juridique du contribuable et risque ainsi de mettre
à mal l'équilibre fiscal. Leur souhait est de voir le juge fiscal
utiliser d'autres notions beaucoup moins fluctuantes pour définir
l'anormalité d'une gestion.
Ainsi, ils souhaitent que le juge fiscal reviennent à
la définition originaire de la normalité : «
caractère de ce qui est conforme au type le plus fréquent,
qui se produit selon l'habitude »2. Un acte serait anormal
que s'il est contraire à un « usage de la profession ou d'usage
des contribuables placés dans des situations comparables
»3. L'avantage d'un tel outil de mesure serait de permettre un
examen objectif de la gestion de l'entreprise beaucoup plus respectueuse de
l'équité fiscale et loin de toute considération morale.
Toutefois, l'absence de base légale ou jurisprudentielle nourrit une
part d'aléa qui laisse une porte ouverte aux dérives
généralisées des dirigeants4.
1 COLLET (M.), Contrôle des actes anormaux de
gestion : pour un retour à l'anormal, Dr. Fisc. 2003, n° 14,
p. 538 : « Affirmer que l'acte anormal de gestion est l'acte contraire
à l'intérêt de l'entreprise n'est pas suffisant. La mise en
oeuvre du critère de l'intérêt de l'exploitation oblige le
juge à envisager de multiples combinaisons d'intérêts, et
s'avèrent donc beaucoup plus ardue qu'il n'y paraît de prime abord
».
2 Le Robert, dictionnaire de la langue française, 2008
3 COLLET (M.), Contrôle des actes anormaux de gestion :
pour un retour à l'anormal, Dr. Fisc. 2003, n° 14, p. 538
4 Par exemple, si un usage contraire à
l'intérêt social venait à se généraliser
parmi les chefs d'entreprise, ce comportement ne pourrait être
sanctionné alors même qu'il nuit au Trésor Public.
b) Les propositions législatives en droit pénal
des affaires
Aujourd'hui, la charge émotionnelle des années
1930 est retombée et la réponse répressive qu'est l'abus
de bien social apparait excessive aux yeux de certains acteurs1. La
réforme de l'abus de bien social est limitée puisque l'article 22
de la Convention de Mérida (Convention des Nations Unies contre la
corruption) oblige en effet la France à sanctionner un tel
comportement2. Une réforme de l'abus de bien social notamment
s'agissant du critère de la contrariété à
l'intérêt social apparait délicate, si ce n'est impossible.
Pour s'en convaincre, il suffit de rappeler que diverses commissions
chargées de réformer le droit pénal des affaires n'ont
guère pu modifier un quelconque élément matériel du
délit d'abus de bien social.
Très récemment, l'ancienne garde des Sceaux, Mme
Rachida Dati, a confié à une commission le soin « de
limiter le risque pénal des entreprises et d'envisager des modes de
régulation plus adaptés à la vie économique
»3. A l'issue de leurs travaux, la doctrine a pu constater
qu'aucun élément matériel de l'abus de bien social ne fut
modifié et qu'au contraire, cette incrimination fut
considérée comme le noyau dur du droit pénal des affaires
français. Toutefois, deux remises en cause ont été mises
en relief, l'une concernant le délai de prescription, le rapport
précise : « Si la justice veut être à la hauteur
de ses valeurs et de son propre concept, il lui faut trouver un principe global
et modéré, qui consacre des délais plus longs, mais
insusceptibles de variation aux cas d'espèce »4.
L'autre bémol concerne la notion d'intérêt social, le
rapport se positionne contre l'extension continue du délit d'abus de
bien social due au caractère nécessairement subjectif de «
l'intérêt social »5.
Premier président honoraire de la Cour d'appel de
Paris, Jean-Marie Coulon n'a pas permis de mettre fin au délit d'abus de
bien social et s'est montré beaucoup plus timoré que son
prédécesseur, le député Marini, chargé de
moderniser le droit des sociétés en 19966.
1 Tels que Mme Annie Médina qui s'est exprimé
lors du colloque sur l'abus de biens sociaux, organisé en 2003 : «
La notion d'usage contraire à l'intérêt social est trop
floue et n'a pas sa place dans un texte pénal ».
2 Article 22 : « Chaque État Partie envisage
d'adopter les mesures législatives et autres nécessaires pour
conférer le caractère d'infraction pénale, lorsque l'acte
a été commis intentionnellement dans le cadre d'activités
économiques, financières ou commerciales, à la
soustraction par une personne qui dirige une entité du secteur
privé ou travaille pour une telle entité, en quelque
qualité que ce soit, de tous biens, de tous fonds ou valeurs
privés ou de toute autre chose de valeur qui lui ont été
remis à raison de ses fonctions ».
3 Rapport de la Commission Coulon, Documentation
Française, 2008, p. 2
4 Cf. Infra, p. 83
5 Rapport Coulon, 2008, Documentation Française, p. 39
: « Toujours selon certains, la notion d'« intérêt
social » ne peut être définie in abstracto, et est à
rapprocher des notions génériques permettant une
appréciation au cas d'espèce par le juge, tel que la notion
d'intérêt de l'enfant, ou la gestion de bon père de
famille.
Cette extension du périmètre de l'abus de biens
sociaux a également été due à la difficulté
de caractériser d'autres comportements, tels que la corruption. Une
modification de cette incrimination pourrait ainsi permettre à l'abus de
biens sociaux de retrouver sa fonction initiale ».
6 Cf. Infra, p. 33
II. Les carences de la notion d'intérêt
social
En dépit des controverses entourant son utilisation,
l'intérêt social est une notion qui continue d'être
appliquée. Pourtant, les critiques doctrinales se fondent sur des
carences biens réelles tant théoriques que pratiques (A.) qui ont
pour conséquences de nuire à la sécurité juridique
des justiciables. La solution alternative de la Corporate Governance
qui considère que l'intérêt des actionnaires transcende
l'intérêt social apparait pertinente à beaucoup d'acteurs
économiques (B.)
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