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Réflexions sur le concept d'états défaillants en droit international

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par Wenceslas MONZALA
Université de Strasbourg - Master II Droit International Public 2012
  

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Paragraphe 2 : la protection de la qualité d'Etat de l'État défaillant

L'État défaillant en dépit de ses vicissitudes n'en demeure pas moins un État au sens juridique du terme. Un État dont l'existence est protégée par sa personnalité juridique internationale (A) et dont la souveraineté doit être préservée (B) au même titre que tous les autres Etats.

A. Une personnalité juridique internationale protégée

D'une manière générale, la personnalité juridique peut être entendue comme « le fait d'être capable d'avoir des droits et des obligations juridiques dans un système de droit donné ou, en d'autres termes, d'être le destinataire direct des règles de ce système »129. Ainsi, dans l'ordre juridique international, la personnalité juridique internationale désigne concrètement le statut légal des sujets du droit international qui sont dépositaires de la capacité de recevoir des droits et de contracter des obligations en droit international. Cette personnalité juridique internationale renvoie en définitive à la possession de droits et devoirs découlant du droit international et à la capacité à les exercer ou à en être responsable en cas d'inobservation. L'État, sujet par excellence de cet ordre juridique, dispose de toute évidence de cette personnalité juridique internationale même s'il ne possède que l'un de ces droits et devoirs130. De l'avis de la CIJ, la personnalité juridique internationale peut être conférée à une entité (État ou organisation internationale) par le consentement des personnes juridiques internationales existantes, soit par une reconnaissance expresse ou une reconnaissance impliquée et donc tacite131. Cela suppose en effet que pour acquérir la personnalité juridique

129 BEDJAOUI, M., Droit international. Bilan et Perspectives, Paris, A. Pedone, Tome 1, 1991, p. 23

130 CIJ, Affaire relative aux droits des ressortissants des Etats Unis d'Amérique au Maroc, arrêt du 27 août 1952, Rec. CIJ, 1952, p. 185 « [...] le Maroc, même sours le protectorat, a conservé sa personnalité d'État en droit international ».

131 CIJ, Réparation des dommages subis au service des Nations Unies, avis consultatif, 11 avril 1949, Rec. CIJ, 1949, p. 174

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internationale, l'État postulant aura démontré auprès des membres existants, jusque là auteurs des règles de droit et responsables de leur application, sa capacité à assumer les droits et obligations qui découlent de l'ordre juridique international. C'est pourquoi, ayant acquis la personnalité juridique internationale, l'État peut la conserver aussi longtemps qu'elle possédera les moyens d'en assumer les conséquences. Dans une telle configuration, il peut sembler difficile pour un État défaillant, déstructuré, de pouvoir prétendre encore à la personnalité juridique internationale. Ce n'est cependant pas encore le cas en droit international. L'exemple somalien illustre une nouvelle fois de façon pertinente le paradoxe entre le maintien de la personnalité juridique internationale des Etats défaillants et leur déliquescence avérée. En effet, après plusieurs années de crises politiques à répétition, la Somalie était encore, il y a quelques années, « le seul pays au monde à ne pas avoir de gouvernement national et dans lequel les fonctions incombant d'ordinaire à un État (...) ne sont plus assurées »132. Pourtant, la disparition définitive de la Somalie en tant qu'État n'a jamais été validée, son existence, au contraire, continue d'être approuvée par la pratique de l'ONU. Le conseil de sécurité a toujours invité, entre 1992 et 1994, le chargé d'affaires somalien à assister aux débats du conseil concernant son pays133. Les organes et institutions de l'ONU ont aussi, dans leur pratique, continué à affirmer l'existence de la personnalité juridique de la Somalie. Cette dernière est membre de la Commission des Droits de l'Homme jusqu'à la fin de son mandat en 1992. Par conséquent, la Somalie n'a donc jamais perdu sa qualité d'État membre de l'ONU. La présence symbolique de sa plaque dans la salle de l'AGNU peut de surcroît en témoigner.

En outre, la protection de la personnalité juridique de la Somalie se reflète dans les efforts sans cesse soutenus de la communauté internationale à limiter la déliquescence de son autorité et à rétablir la paix dans le pays. Cela se concrétise par l'organisation de nombreuses conférences nationales de réconciliation, d'abord au plan régional par les Etats voisins, et à l'échelle internationale par l'intervention humanitaire des autres Etats sous les auspices de l'ONU avec les interventions des « casques bleus »134. Cette volonté de la communauté internationale de maintenir la Somalie unie en tant qu'État se manifeste aussi par l'absence de reconnaissance d'autres Etats en faveur de la collectivité sécessionniste du Somaliland. Ces recours de la communauté internationale au chevet de la Somalie et de bien d'autres Etats défaillants témoignent de la nécessité de la protection de la qualité d'État de ces entités, en dépit de leur déliquescence, et suffisent aussi à prouver qu' « une fois la situation juridique d'État constituée, le droit international lui assure une certaine permanence, indépendamment de la vérification effective des conditions » à remplir pour bénéficier du statut d'État135. L'État défaillant bénéficie aussi de cette protection au regard de l'un de ses principaux attributs, à savoir sa souveraineté.

132 S/1999/882, Rapport du Secrétaire général sur la situation en Somalie, 16 août 1999, §63.

133 S/23445 du 20 janvier 1992 in Répertoire de la pratique du Conseil de Sécurité - Supplément 1989 - 1992, p. 647.

134 Dans la période 1992 - 1995, on peut compter deux opérations des Nations Unies en Somalie : ONUSOM I (1992 - 1993) et ONUSOM II (1993 - 1995).

135 RUIZ FABRI H., « Genèse et disparition de l'État à l'époque contemporaine », AFDI, 1992, pp. 153 - 178, précisément p. 162.

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