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Réflexions sur le concept d'états défaillants en droit international

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par Wenceslas MONZALA
Université de Strasbourg - Master II Droit International Public 2012
  

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Paragraphe 1 : L'approche des Etats défaillants par la sécurité humaine : une

approche globale de la sécurité internationale

Dans une logique d'extension de la conception traditionnelle de la sécurité internationale, l'approche des Etats défaillants par la sécurité humaine permet à la fois de prendre en compte les menaces qui découlent de la défaillance de l'État en tant qu'institution mais aussi celles qui pèsent sur ses composantes, à savoir les individus. Il s'agit donc d'une approche qui englobe les causes et les conséquences de la défaillance étatique. Les causes de défaillance étatique se traduisent par des facteurs qui mettent en cause la sécurité humaine : pauvreté, sous-développement, maladies pandémiques, violation des droits de l'homme, etc.

285 PNUD, Rapport mondial sur le développement humain, Paris, Economica, 1994, p. 1

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C'est alors l'incapacité de l'État à assurer la sécurité humaine, dans son acception la plus large, qui le rend vulnérable dans la lutte contre le développement des nouvelles menaces à la paix et à la sécurité internationales. Par un cheminement inverse à la logique du concept d'Etats défaillants, le concept de la sécurité humaine aborde la question de la défaillance étatique à travers ses causes profondes afin de contribuer efficacement à la maîtrise de ses conséquences dommageables pour la sécurité internationale. L'approche des Etats défaillants par la sécurité humaine prend ainsi en compte la sécurité de l'État (renforcement de la capacité fonctionnelle de l'État, contrôle de l'intégrité territoriale, autorité effective, etc.) et celle des individus (sécurité alimentaire, sanitaire, éducation, respect des droits et libertés fondamentales, etc.). Cette vision globale de la sécurité internationale émane des deux volets qui ressortent de la foultitude des définitions de cette notion. On apprend du précédent secrétaire général de l'ONU dans son rapport intitulé « Dans une plus grande liberté : développement, sécurité et respect des droits de l'homme pour tous » que la sécurité humaine doit concourir non seulement à libérer l'Homme de la peur (ou « freedom from fear ») mais encore à le libérer du besoin (ou « freedom from want »)286.

Dans sa première acception, « freedom from fear », la sécurité humaine se rapproche de la logique du concept d'Etats défaillants qui envisage la sécurité internationale à travers le renforcement des capacités de l'État. Sous cet angle, le concept de la sécurité humaine n'ignore pas le rôle fondamental de l'État dans le maintien de la sécurité en son sein et, par ricochet, dans la préservation de la sécurité internationale. D'après le contrat social qui le lie à sa population, l'État demeure, de ce fait, l'acteur le plus légitime pour assurer la sécurité au niveau national et international. Ainsi, pour libérer l'Homme de la peur, la sécurité humaine mais aussi le concept d'Etats défaillants militent pour un renforcement des rôles et des responsabilités de l'État. A ce titre, la volonté de reconstruction des Etats, développée par le concept d'Etats défaillants, se justifie aisément au vu des nouvelles menaces à la paix et à la sécurité internationale auxquelles doivent faire face les Etats de nos jours. De manière plus pratique, cette version de la sécurité humaine a été au coeur de la campagne pour l'interdiction des mines anti-personnel et des sous-munitions287, l'action internationale contre la prolifération et l'utilisation abusive des armes légères et de petit calibre et surtout la création de la Cour Pénale Internationale288.

Cependant, selon l'approche de la sécurité humaine, la reconstruction des capacités de l'État ne suffit pas à elle seule à assurer la sécurité internationale. La sécurité humaine introduit donc, dans l'analyse de la défaillance étatique, une dimension humaine qui n'a été que très accessoirement envisagée dans la logique du concept d'Etats défaillants. De cette

286 A/59/2005, Rapport du secrétaire général, « Dans une plus grande liberté : développement, sécurité et respect des droits de l'homme pour tous », 24 mars 2005, §§ 25 - 73 , §§ 74 - 126 ; Voir aussi TAVERNIER P., « La sécurité humaine et la souveraineté des Etats », in KHERAD R. (Sous la direction de), La sécurité humaine : Théorie(s) et Pratique(s), Paris, A. Pedone, 2010, pp. 39 - 50, 41.

287 Lancée en 1992 par six organisations internationales non gouvernementales, les activités de ladite campagne ont abouti à la conclusion en décembre 1997 à Ottawa du traité d'interdiction des Mines et la Convention sur les armes à sous-munitions ouverte à la signature depuis le 3 décembre 2008 à Oslo, Voir le site de la campagne : http://www.icbl.org

288 Pour de plus amples développements, voir KRAUSE K., « Sécurité Humaine » in CHETAIL V., Lexique de la consolidation de la paix, op. cit., pp. 507 - 522.

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façon, la sécurité humaine replace l'homme au coeur de l'analyse des menaces à la sécurité internationale puisque si ces menaces sont reconnues comme telles, c'est parce qu'elles affecteront en fin de compte l'individu. La sécurité humaine rend ainsi indissociable la sécurité des Etats et celle des individus et confirme, par la même occasion, la place de plus en plus prépondérante de l'individu sur la scène internationale. Cette vision de la sécurité humaine confirme aussi, d'une certaine manière, l'analyse presque prophétique faite par N. POLITIS en 1927 lorsqu'il estimait qu' « en constatant les résistances d'une partie de la doctrine à reconnaître à l'individu la qualité de sujet du droit international et celles de la pratique à lui accorder la faculté d'agir en justice, on en arrive à la conclusion que le droit international est dans une période de transition : s'il n'est plus exclusivement le droit des Etats, il n'est pas encore complètement le droit des hommes. (...) »289. Dans cette perspective, en raison de la place qu'occupe désormais l'individu dans la société internationale, les menaces à sa sécurité, en tant que personne physique, peuvent désormais être considérées comme sources d'insécurité internationale. Ces menaces sont essentiellement liées au sous-développement et peuvent renvoyer aux problèmes de chômage, au non-respect des droits et libertés fondamentales, au développement des maladies, etc.

Dans ce contexte, pour assurer la sécurité internationale, l'approche des Etats défaillants par la sécurité humaine consiste aussi - et c'est en effet la seconde version de la sécurité humaine - à répondre aux besoins humains des individus en termes économiques, sanitaires, alimentaires, sociaux et environnementaux : il s'agit de permettre aux individus de « vivre à l'abri du besoin » ou encore « freedom from want ». Cette version de la sécurité humaine découle de la formulation originale du concept de la sécurité humaine, définie par le rapport du PNUD de 1994290. Dans cette version, la sécurité humaine englobe donc des menaces liées directement au bien-être des individus mais qui peuvent aussi compromettre la sécurité des Etats et en provoquer la défaillance. C'est pourquoi, à la suite du rapport du PNUD de 1994, l'ancien secrétaire général des Nations Unies considère que pour permettre aux individus de vivre à l'abri du besoin, il importe de s'attaquer à la pauvreté, aux maladies infectieuses mortelles, à la dégradation de l'environnement, facteurs qui tous peuvent générer des conséquences également catastrophiques telles que la violence civile, le crime organisé, le terrorisme et les armes de destruction massive291.

C'est donc à travers cette dialectique sécurité des Etats/sécurité des individus que se manifeste la dimension globale du concept de la sécurité humaine. Sous l'angle de la sécurité humaine, la défaillance étatique autant que les problèmes liés aux conditions de vie des individus peuvent saper la paix et la sécurité internationales. Dans ce contexte, l'État et les différentes politiques visant sa reconstruction doivent être considérés comme de simples instruments permettant d'assurer la sécurité des individus qui conditionne en retour la sécurité internationale. En concentrant l'analyse de la sécurité internationale sur les menaces liées à la sécurité des individus, la sécurité humaine consacre ainsi une évolution de la conception traditionnelle de la sécurité collective. Ce faisant, contrairement au concept d'Etats défaillants

289 POLITIS N. cité par SIERPINSKI B., « La sécurité collective confrontée à la sécurité humaine », in KHERAD R. op. cit., pp. 51 - 64, 64.

290 Rapport sur le développement humain, op. cit.

291 A/59/2005, Rapport du secrétaire général, op. cit., §78

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qui abordait la question de la sécurité internationale à travers une approche unidimensionnelle centrée sur l'Etat, le concept de sécurité humaine peut renforcer l'efficacité de la sécurité collective.

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