WOW !! MUCH LOVE ! SO WORLD PEACE !
Fond bitcoin pour l'amélioration du site: 1memzGeKS7CB3ECNkzSn2qHwxU6NZoJ8o
  Dogecoin (tips/pourboires): DCLoo9Dd4qECqpMLurdgGnaoqbftj16Nvp


Home | Publier un mémoire | Une page au hasard

 > 

Aspects juridiques de la contractualisation agile

( Télécharger le fichier original )
par Camille Planat
Université de Nice Sophia Antipolis - Master 2 droit de la propriété intellectuelle et des nouvelles technologies 2012
  

précédent sommaire suivant

Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy

2.2 L'exécution du contrat

Une fois formé, le contrat est la loi des parties, il doit être exécuté de bonne foi et oblige « non seulement à ce qui y est exprimé, mais aussi à toutes les suites que l'équité,

40

l'usage ou la loi donnent à l'obligation d'après sa nature. »27 Les parties sont donc tenues d'exécuter les obligations du contrat mais aussi celles que la loi, la jurisprudence ou l'usage imposent dans le cas de telle ou telle relation contractuelle. Une clause d'intégralité peut éventuellement renforcer la portée des engagements souscrits en prescrivant que ceux-ci ne sont pas détachables les uns des autres.

Il convient ici d'envisager les possibilités offertes en cas d'inexécution par le débiteur de l'une ou plusieurs de ses obligations contractuelles. L'expression « inexécution » recouvre plusieurs réalités. Ce peut être une absence d'exécution (totale ou partielle) ou bien une exécution défectueuse. Le créancier de l'obligation est alors en droit d'obtenir l'exécution forcée de la part du débiteur. Cependant l'exécution forcée n'est pas toujours possible, dans ce cas l'inexécution sera compensée par des dommages et intérêts.

La pratique la plus courante est de prévoir les questions de responsabilité dans le contrat. Cependant la loi peut toujours suppléer la volonté des parties en cas de vide contractuel. En revanche, le contrat ne devra pas contredire des dispositions d'ordre public. Les règles qui s'appliqueront seront celles du contrat d'entreprise (I, 2.1 ; II, 1.1), ou celles de la société en participation (I, 2.2 ; II, 1.1). L'intérêt de la distinction entre les obligations de moyens et de résultat prend ici tout son sens. Néanmoins il faut garder à l'esprit que la clause limitative de responsabilité qui contredit la portée de l'obligation essentielle est réputée non écrite28.

Une autre alternative au créancier de l'obligation est de se retrancher derrière l'exception d'inexécution, c'est-à-dire qu'il pourra s'abstenir d'exécuter à son tour la prestation qu'il aurait dû effectuer en contrepartie. Par exemple, on peut retarder contractuellement la cession des droits de propriété intellectuelle sur le code source d'une livraison jusqu'au moment du paiement par le client. Notons au passage que le droit de rétention n'est pas vraiment efficace en matière de logiciel puisque celui-ci peut être facilement reproduit. Il pourrait en revanche être exercé par le prestataire à qui le client,

27 Code civil, article 1135

28 Cour de cassation, 29 juin 2010, Sté. Faurécia contre Sté. Oracle

41

débiteur d'un ou plusieurs paiements, aurait remis du matériel informatique pour qu'il y installe le logiciel et le configure.

Le créancier de l'obligation inexécutée peut également rompre le contrat. Il existe deux possibilités : la résolution et la résiliation.

La résolution du contrat consiste à priver rétroactivement le contrat de tous ses effets, les parties devront alors chacune se restituer leurs prestations. C'est différent de l'annulation (2.1) puisqu'en l'espèce le contrat a été valablement formé. La résolution peut résulter d'une clause résolutoire. Celle-ci prévoit que la convention sera résolue de plein droit dans le cas d'inexécution totale ou partielle de ses obligations par l'un des cocontractants. Si la partie à qui est opposée la résolution la conteste et este en justice, le jugement qui sera prononcé ne fera que constater que les conditions prévues par la clause résolutoire ont bien été réunies.

Néanmoins, « La condition résolutoire est toujours sous-entendue dans les contrats synallagmatiques, pour le cas où l'une des deux parties ne satisfera point à son engagement. »29 La résolution devra alors être demandée en justice. Il existe en revanche, dans certains cas gravissimes, une possibilité de résolution unilatérale consacrée par la jurisprudence.30

Quant à la résiliation, son effet est l'anéantissement du contrat pour l'avenir, elle concerne essentiellement les contrats à exécution successive. L'article 1794 du code civil, en matière de contrat d'entreprise, le prévoit :

« Le maître peut résilier, par sa seule volonté, le marché à forfait, quoique l'ouvrage soit déjà commencé, en dédommageant l'entrepreneur de toutes ses dépenses, de tous ses travaux, et de tout ce qu'il aurait pu gagner dans cette entreprise. »

29 Code civil, article 1184 alinéa 1er

30 Civ. 1ere, 20 fevr. 2001, n° 99-15170, Bull. Civ. I, n° 40 ; D. 2001.1568, note Ch. JAMIN

42

La méthode agile étant une méthode itérative (basée sur des cycles), elle implique des livraisons successives. On préférera alors ce second mode de rupture à moins qu'il s'agisse d'une inexécution grave, par exemple si le prestataire n'exécutait aucune de ses obligations.

Pour régler plus facilement les questions de responsabilité en cas d'inexécution, il peut parfois paraître important de mettre en place une convention de preuve pour déterminer contractuellement de la valeur probante de certains documents qui pourraient être présentés en cas de différend, à l'appui d'un compromis ou d'une action en responsabilité.

Les parties peuvent convenir contractuellement du tribunal qui sera compétent en cas de litige. Cependant, conformément à l'article 48 du code de procédure civile une telle clause ne sera valable qu'entre « des personnes ayant toutes contracté en qualité de commerçant » et lorsqu'elle aura « été spécifiée de façon très apparente dans l'engagement de la partie à qui elle est opposée. » Cette clause est le plus souvent accompagnée d'une clause de conciliation amiable, voire même d'une clause compromissoire fixant la compétence d'un tribunal arbitral.31

Si les parties ont décidé de clauses de garanties il conviendra de les appliquer. En l'absence de toute précision, le juge considérerait, en matière de prestations informatiques, que le fournisseur du programme est seulement débiteur d'une obligation de moyens.32 Cependant l'article 1792 du code civil établit une responsabilité du constructeur de l'ouvrage envers le maître ou l'acquéreur de l'ouvrage pour les dommages qui compromettent la solidité de l'ouvrage ou le rendent impropre à sa destination, cette action se prescrit par dix ans. En outre, l'article 1792-3 institue une garantie de bon fonctionnement de deux ans pour les éléments d'équipement dissociables de l'ouvrage.

31 Code civil, article 2059 et suivants

32 Com. 3 déc. 1985, n° 84-14.463, Bull. civ. IV, n° 284 [sol. impl.] , RTD civ. 1986. 372, obs. Rémy, et 765, obs. Huet.

43

L'applicabilité de ces articles, inspirés par le secteur de la construction, est contestable. Comme nous le rappelions en introduction, le développement logiciel est une activité de conception. Néanmoins, l'article 1792-1 assimile l'architecte au constructeur de l'ouvrage. Le législateur de 197833 a ainsi voulu appliquer le même régime de responsabilité à toutes les personnes accomplissant « une mission assimilable à celle d'un locateur d'ouvrage », y compris celles accomplissant une prestation strictement intellectuelle. Et c'est dire tous les points communs entre l'architecture et l'architecture logicielle, la seconde n'ayant cependant pas encore acquis - en raison de son jeune age - la même maturité que la première.

La garantie contre les vices cachés ne peut jouer concernant un logiciel que dans l'hypothèse où le contrat porte sur un système dans lequel un vice du logiciel induirait une indisponibilité du service. La Cour de cassation ne semble pas distinguer entre la garantie portant sur le logiciel lui-même et celle portant sur le système complet dans lequel il est intégré, ce qui pourrait être interprété favorablement à la thèse de la garantie légale en matière de logiciel (y compris, peut-être la nouvelle garantie de conformité introduite par l'ordonnance du 17 février 2005)34. Cependant les créations intellectuelles sont soumises à des régimes particuliers. Dans ce cas pourquoi ne pas préférer la garantie contre l'éviction ou garantie de jouissance paisible habituellement appliquée en matière de droit d'auteur, bien qu'empruntant son régime à la vente ? On préférera cependant les garanties conventionnelles eu égard aux incertitudes de régime quant à la garantie dans les contrats portant sur des logiciels.

En ce qui concerne le contentieux relatif à l'exécution du contrat, l'adoption d'une méthode agile ne semble pas avoir de grandes conséquences sinon de former la convention plus rapidement (2.1) et donc de ramener les questions qui auraient fait l'objet d'une responsabilité délictuelle vers le contentieux contractuel.

33 Loi n°78-12 du 4 janvier 1978 - art. 1 JORF 5 janvier 1978 en vigueur le 1er janvier 1979

34 Warusfel B., Recours de l'acheteur face à la défaillance logicielle d'un système, RLDI 2005/4, no 120, p. 32

44

45

précédent sommaire suivant






Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy








"Piètre disciple, qui ne surpasse pas son maitre !"   Léonard de Vinci