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Les petites constitutions en Afrique: essai de réflexion à  partir des exemples de la Côte d'Ivoire, de la RDC, de la Tunisie et du Togo.

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par Kakessiwa Kokou KOMLAN
Université de Lomé - Master 2 en Droit Public 2015
  

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A. La particularité de la nature juridique des petites constitutions

Les périodes d'interrègne constitutionnel qui surviennent la plupart du temps à la suite d'une révolution dans l'ordonnancement juridique peuvent-elles donner lieu à un ordre juridique ? Ou bien, le constitutionnaliste peut-il justifier par l'argument du constat empirique l'existence du droit? Ou encore, peut-on affirmer l'existence du droit au sein du phénomène social comme l'affirme le Doyen Léon DUGUIT ?

D'après donc DUGUIT, le droit correspond à la « solidarité sociale », qu'il observe comme la véritable loi qui détermine le phénomène social. Cette solidarité sociale, selon le Doyen, est produite spontanément au sein du phénomène social en dehors de toute autre volonté supérieure aux volontés individuelles, mais en liaison avec ce qu'il appelle la « conscience juridique »76. Il estime à cet effet que « la conscience chez la masse des individus d'un groupe donné que telle règle morale ou économique est essentielle pour le maintien de la solidarité sociale, la conscience qu'il est juste de la sanctionner, sont les

Institutions politiques, T1. Théorie générale des régimes politiques, Paris, PUF, Coll. Thémis, 4e éd. 1959, pp. 217-219.

76 « La force obligatoire de la norme juridique n'implique aucunement l'existence d'une volonté supérieure s'imposant à une volonté subordonnée ; elle implique seulement dans la masse des esprits la conscience de son caractère obligatoire, ce que j'ai appelé d'un mot la conscience juridique », DUGUIT (L.), Traité de Droit Constitutionnel, Tome 1, p. 191.

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éléments essentiels de la formation et de la transformation de la règle de droit »77. La solidarité sociale est donc selon la doctrine réaliste de DUGUIT, le fondement de validité de tout droit positif.

De ce point de vue, il serait évident que pour DUGUIT, la révolution est dans beaucoup de ses aspects, non pas un pur fait78, mais un phénomène juridique. En effet comme le démontrait le professeur Yao Biova VIGNON, lors d'un cours sur les « Libertés publiques » qu'il dispensait à la Faculté de droit de l'Université de Lomé, : « la révolution naît au moment où la conception sur laquelle est basée l'organisation des pouvoirs publics d'un pays donné, à un moment donné, ne rencontre plus d'écho dans la conscience des citoyens et qu'une nouvelle conception du pouvoir politique surgit dont le but est précisément de remplacer les autorités établies pour introduire dans l'organisation sociale, les principes directeurs qui correspondent à cette nouvelle conception »79. L'éminent professeur arrive ainsi à la conclusion que : « quand un peuple cesse de trouver son droit et sa justice dans une vision du monde qu'il estime périmée, et lorsque ses nouvelles aspirations se cristallisent dans une doctrine qui le séduit, ce n'est pas seulement la force qui s'introduit pour un temps dans la vie publique. Mais c'est un droit nouveau qui s'affirme » 80.

Alors, il n'y a pas de vide juridique entre deux Constitutions. HAURIOU disait à cet effet que « le mouvement du droit va du discontinu au continu, chaque fois qu'un évènement le rejette du côté de la discontinuité, il recommence aussitôt à s'orienter vers la continuité qui n'est peut- être, ici, qu'une forme de l'inertie »81. Les petites constitutions participent donc de ce processus dynamique. Elles contribuent à la discontinuité constitutionnelle, établissant une rupture avec l'ordre précédent, tout en représentant en même temps la première manifestation formelle de cette inlassable continuité du droit, qui

77 Idem, p 125.

78 Pour KELSEN : « la révolution [juridique] (...) est toute modification de la Constitution ou tout changement ou substitution de Constitution (...) qui ne sont pas opérés conformément aux dispositions de la constitution en vigueur ». En revanche, si le renversement de l'ordre constitutionnel en vigueur s'opère conformément aux normes de l'ordre constitutionnel précédent, il s'agit d'une « révolution légale ».

79 Voir le cours du professeur Yao Biova VIGNON intitulé « Libertés publiques et Droits de l'Homme », dispensé à la Faculté de Droit de l'Université de Lomé durant l'année académique 2007-2008.

80 Idem.

81 HAURIOU (M), Précis de droit constitutionnel, Paris, Sirey, 2e éd, 1929, pp. 24-255.

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recherche sans arrêt un nouvel équilibre là où l'ancien équilibre a été rompu, d'où leur nature particulière.

La qualité de norme juridique des petites constitutions aura permis de cerner les traits caractéristiques de ces instruments dont la force juridique doit être précisée.

B. La force juridique des petites constitutions

La question de la force juridique des petites constitutions constitue une problématique polémique puisque bon nombre d'auteurs leur dénient toute nature juridique et par voie de conséquence toute force juridique. Or, tel qu'il a été montré plus haut, une telle position recèle des insuffisances évidentes. Il convient donc de relever le caractère obligatoire des petites constitutions pour attester de leur force juridique.

Il faut dire que la lecture des dispositions des petites constitutions laisse apparaître une adresse à l'attention des différents acteurs impliqués dans le processus de transition, à observer celles-ci. Cette adresse est assortie d'une obligation de ne pas compromettre leur mise en oeuvre. En effet l'obligation de respect des petites constitutions, à l'égard de tous les acteurs voire de toutes les personnes physiques ou morales résidant ou non sur le territoire, est de plus en plus exigée. Cette obligation implique, entre autre, pour les autorités de la transition, l'obligation d'information et de sensibilisation des populations afin de les amener à adhérer pleinement au processus de sortie de crise et l'interdiction de toute propagande notamment médiatique, tendant à nuire à l'esprit de la cohésion et de l'unité nationale. Par ailleurs, le devoir de respect des petites constitutions se décline en un engagement des autorités de la transition à entretenir un esprit permanent de conjugaison de leurs efforts en vue de renforcer l'éthique et la moralité républicaines dans le respect de la dignité et des droits fondamentaux. C'est ainsi que, comme pour toute norme juridique, des sanctions sont envisagées en cas de leur violation.

Il faut d'abord relever que la notion de sanction a été diversement magnifiée dans la théorie juridique. En effet l'analyse de la doctrine révèle plusieurs conceptions essentiellement basées sur son rapport avec le droit. Certains auteurs estiment que la sanction est une condition d'existence du droit, que le droit est « un ordre de contrainte »82.

82 KELSEN (H.), «Théorie générale du droit international public. Problèmes choisis», RCADI, t. 42, 1932-

IV, p. 124. Il affirme à ce propos: « Le droit est un ordre de contrainte. (...) Si la société ne connaissait

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« De ce point de vue, la sanction peut être définie comme étant la contrainte matérielle destinée à éviter la violation d'une règle de conduite, une contrainte qui constitue le fondement du caractère obligatoire de cette règle »83. D'autres auteurs, par contre, considèrent la sanction comme la garantie de l'effectivité du droit, un « moyen extérieur d'en assurer la positivité »84. Selon cette conception, la sanction ne se confond pas avec le droit et celui-ci existe même sans une sanction organisée de sa violation.

Mais le plus souvent, la sanction apparaît comme le critère de la règle de droit. Cependant, elle emporte une portée réelle : c'est la responsabilité. La responsabilité est donc l'institution par laquelle un sujet de droit est appelé à répondre de ses éventuelles violations d'une règle de droit. En droit interne, il existe deux types de responsabilité : celle civile, qui entraîne l'obligation de réparer, et celle pénale qui implique la punition du coupable. En définitive, l'auteur d'une violation des dispositions de la période de transition constitutionnelle sera donc tenu pour responsable, faisant ainsi des petites constitutions, de véritable règle de droit.

Une fois donc établie la nature juridique des petites constitutions, il faut arguer de la valeur constitutionnelle qui leur est conférée.

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"Il existe une chose plus puissante que toutes les armées du monde, c'est une idée dont l'heure est venue"   Victor Hugo