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La saisine du juge constitutionnel et du juge administratif suprême en droit public congolais

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par Dieudonné Kaluba Dibwa
Université de Kinshasa - DEA de droit public 2005
  

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2. INTERET ET DELIMITATION DU SUJET

La présente étude portant sur « la saisine du juge constitutionnel et du juge administratif suprême en droit congolais » se veut une réflexion sur la manière dont la Haute Cour a été saisie en matière constitutionnelle et administrative et sur les réponses qu'elle a réservées à toutes ces sollicitations.

Les débats auxquels les arrêts RA 266, 320 et R.Const. 06/TSR ainsi que les avis RL 09 et 10 de la Haute Cour ont donné lieu aussi bien dans la classe politique qu'au niveau de l'élite intellectuelle, méritent qu'on y consacre une réflexion susceptible de situer la question de l'indépendance du juge congolais en rapport à la manière dont la Cour Suprême de Justice a eu à trancher certains litiges soumis à son appréciation.

De là découle l'intérêt de la présente étude qui se situe dans une perspective tendant à dégager, de manière scientifique et désintéressée, le degré de rigueur et d'impartialité des magistrats de la Haute Cour dans la réception des différentes requêtes qui furent ou sont encore portées devant eux ainsi que les limites légales de la saisine du Juge de la Haute Cour congolaise au regard du thème sous examen.

Cette question implique celle que pose le professeur Philippe ARDANT à savoir : à qui sera confié le pouvoir de déclencher le contrôle de la constitutionnalité de la loi ? Qui pourra saisir l'organe compétent ?24(*)

L'ouverture de la saisine peut être démocratique ou plutôt trop étroite. Chacune de ces solutions offre des avantages qui ne sont pas toujours compensés par les bénéfices techniques car l'ouverture plus ou moins grande de la saisine du juge constitutionnel peut entamer l'autorité et la majesté de la loi. Cependant l'on peut s'interroger sur la véracité d'un tel dogme lorsque l'on se rappelle que plusieurs pays d'Afrique noire ont ouvert la saisine de ce juge sans entraîner ni une ruée effrénée vers la justice constitutionnelle ni l'émasculation de la majesté de la loi.25(*)

Faute d'analyser ici et maintenant tous ces cas, il nous a paru opportun, dans le cadre restreint de cette étude, de n'étudier que certaines affaires qui, par les circonstances de leur examen d'une part, et l'objet sur lequel elles portent d'autre part, avaient non seulement suscité une forte controverse sur le plan juridique et politique, mais aussi attiré l'attention des chercheurs. Toutefois, il faut préciser que pour illustrer une notion ou une question spéciale, il sera fait abondamment référence aux arrêts rendus par la Cour Suprême de justice sur les questions de droit étudiées.

Somme toute, le choix de ces arrêts et avis ne peut paraître qu'arbitraire26(*) au regard du thème étudié, mais il se situe dans une perspective plus globale, celle de voir la République démocratique du Congo devenir, à travers une justice constitutionnelle et administrative suprême réellement indépendante, un véritable Etat de droit27(*).

En effet, l'indépendance des juges ressortit aux garanties juridictionnelles des droits et libertés des citoyens dont l'étude relève du droit public. L'Etat de droit, entendu au sens de Jacques CHEVALLIER, comme « un Etat qui, dans ses rapports avec ses sujets, se soumet à un régime de droit : dans un tel Etat, le pouvoir ne peut user que des moyens autorisés par l'ordre juridique en vigueur, tandis que les administrés disposent de voies de recours juridictionnelles contre les abus qu'il est susceptible de commettre », constitue donc la trame de fond ou le cadre épistémologique de cette étude.28(*) L'Etat de droit est donc aux antipodes de la conception patrimoniale du pouvoir où le souverain était personnellement le propriétaire du pouvoir et des moyens du pouvoir.29(*)

A propos, l'effet de mode qu'installe l'Etat de droit issu tout au moins du mouvement constitutionnel des Conférences Nationales en Afrique noire entraîne, aux dires de Jean du Bois de GAUDUSSON, que « les débats politiques sont portés sur le terrain du droit ; la référence aux normes et à la légalité est devenue une condition de la légitimité vis-à-vis tant de l'opinion publique intérieure que de la communauté internationale.(...) Ainsi que l'ont montré des épisodes récents de la vie politique au Bénin, au Niger, à Madagascar, la politique est à son tour saisie par le droit et les juridictions ».30(*)

Il reste entendu que cette étude passe sous silence des notions aussi importantes que la définition des juges constitutionnel et administratif, l'analyse de leurs compétences, leur répartition ainsi que les arrêts rendus par eux pris dans les aspects relatifs à l'exécution. S'agissant d'une étude destinée aux publicistes de haut niveau, il nous a paru superfétatoire de revenir sur ces notions capitales qui pourraient cependant faire l'objet d'une étude ultérieure plus fouillée.

La saisine du juge constitutionnel et du juge administratif suprême constitue une des garanties de protection des droits et libertés fondamentaux par la justice31(*) ; il s'agira de voir de quelle manière cette protection est assurée par le juge suprême congolais. Les libertés publiques proclamées généralement par le constituant et organisées éventuellement par le législateur ordinaire peuvent être souvent méconnues ou violées par l'autorité administrative. Un régime de droit positif de libertés publiques doit donc comporter des garanties. Les constitutions organisent souvent elles-mêmes les « garanties de droits ».32(*)

L'inquiétude articulée avec humour par le professeur Evariste BOSHAB nous paraît fondée à ce niveau car, « longtemps sous la coupe du Parti-Etat, affaibli par une longue tradition de dépendance, rendu indigent par la rémunération de misère qu'il perçoit de manière irrégulière, suffit-il qu'une disposition constitutionnelle le déclare indépendant, pour que le juge retrouve, comme par enchantement, l'esprit et les réflexes de cette indépendance ? »33(*)

Il s'agit ici de voir comment se met en branle cette garantie de droit au niveau de la saisine de l'organe juridictionnel chargé de la mission de dire le droit et de sauvegarder les libertés publiques. Mais pour donner la consistance à la chose (Forma dat esse rei), comme diraient les scholastiques, il est utile d'indiquer déjà le cheminement méthodologique suivi.

* 24 ARDANT (P.), Institutions politiques et droit constitutionnel, Paris, 8ème édition, L.G.D.J., 1996, p.103, n° 76.

* 25 Par exemple, les Constitution de la République du Bénin du 11 décembre 1990, article 122 ; de la République du Burundi du 13 mars 1992, article 153 ; de la République du Cap-Vert du 14 février 1981 révisée le 4 septembre 1992, article 305 ; de la République du Congo, article 148 et de la République gabonaise du 26 mars 1991, articles 83 et suivants.

* 26 Etymologiquement, arbitrari ne signifie-t-il pas juger ? ; de ce point de vue, nous assumons le fait que nous avons jugé et il ne pouvait en être autrement.

* 27 Lire dans ce sens, ESAMBO KANGASHE (J.-L.), « Regard sur l'Etat de droit dans la constitution du 4 avril 2003 » in Revue juridique, justice, science et Paix, n° 001 Septembre, Kinshasa, 2004, pp. 36-37. Voyez pour un état des lieux de la question de la justice en R.D.Congo, Evariste BOSHAB, La misère de la justice et justice de la misère en République démocratique du Congo,in Revue de la Recherche juridique, Droit prospectif, n°XXIII-74, 23ème année, 74ème numéro, Presses Universitaires d'Aix-Marseille, 1998-3, pp.1163-1184. Cette perspective est aussi celle adoptée par la belle thèse de MATADI NENGA GAMANDA, La question du pouvoir judiciaire en République démocratique du Congo. Contribution à une théorie de réforme, Kinshasa, D.I.N., 2001.

* 28 CHEVALLIER (J.), L'Etat de droit, 2ème édition, coll. Clefs/Politique, Paris, Montchrestien, 1994, p.12. Voy. aussi LAVROFF (D. G.), Les grandes étapes de la pensée politique, Paris, Dalloz, 1993, 499 pages, spécialement les pages consacrées à la pensée de Friedrich HAYEK qui élabore le cadre philosophique géniteur et explicateur de la notion d'Etat de droit dans une conception libérale (pp.466-490).

* 29 ARDANT (P.), Institutions politiques et droit constitutionnel, Paris, 8ème édition, L.G.D.J., 1996, p.24, n° 4.

* 30 DE GAUDUSSON (J.du Bois) et alii, Les constitutions africaines publiées en langue française, Tome 1, Paris, La documentation française, Bruxelles, Bruylant, 1997, p.11(introduction).

* 31 MWILANYA WILONDJA (N.), Les mécanismes congolais de protection et de promotion des droits de l'homme,Tome 1, Kinshasa, éditions AGAPAO, 2004, pp.135 et s.

* 32 COLLIARD (C.-A.), Libertés publiques, 7ème édition, Paris, Dalloz, 1998, p.141.

* 33 BOSHAB (E.), La misère de la justice et justice de la misère en République démocratique du Congo, op.cit., p.1169.

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"I don't believe we shall ever have a good money again before we take the thing out of the hand of governments. We can't take it violently, out of the hands of governments, all we can do is by some sly roundabout way introduce something that they can't stop ..."   Friedrich Hayek (1899-1992) en 1984